Le calme avant la tempête [Feat. Aaron A. Grant]

Donovan était un habitué des bars, il en avait fait la découverte de certains dans le centre ville. Il se demandait d'ailleurs, s'il en avait manqué certains, serait-il possible qu'il n'est pas déjà mis les pieds dans la totalité des bars de cette ville ? Peut-être qu'il était temps pour lui de partir à la découverte des bars dans les environs de Bowen, au
moins, dans ceux-là, il sera sûr d'être accepté, puisqu'il n'a pas encore mis les pieds, et donc créer de bagarres.

Avec la consommation d'alcool, certaines personnes peuvent devenir quelqu'un d'autre. Pour certains ça les rend euphorique, pour d'autres violents, et pour les derniers totalement déprimés. Danno était un mélange entre le deuxième et le troisième cas énoncé. La plupart du temps, en plus de son caractère déjà impulsif et violent de base, lorsqu'il se mettait à boire à outrance, à tel point qu'il n'était bien souvent pas capable de rentrer chez lui, ça ne faisait qu'empirer la chose. Il suffisait d'un regard, d'un mot, d'un geste et tout cela prenait des proportions énormes qui, en étant sombre n'auraient pas été perçu de la même manière.

Ce soir ne faisait pas exception à la règle, d'autant plus que la date d'anniversaire de sa femme approchait à grand pas, il s'était rendu dans un des bars en ville. Il avait eu une rude journée et il était heureux de pouvoir enfin s'adonner à la seule chose qu'il savait faire correctement : boire à en perdre la raison. Donovan était assis sur les tabourets devant le bar, personne d'un côté ni de l'autre. Le lieu commençait petit à petit à se remplir, tandis qu'il était déjà bien avancé dans ses consommations. Le policier aimait être seul, sa solitude c'était tout ce qui lui restait. Il avait tout perdu et ce sentiment de culpabilité qui le rongeait ne finirait jamais, tant qu'il n'aura pas mis la main sur les coupables du meurtre de sa femme. Il ne prêtait pas la moindre attention au monde qui l'entourait malgré le brouhaha général présent dans ce bar.

Le serveur n'avait même plus besoin d'entendre les mots sortir de la bouche du lieutenant pour comprendre ce qu'il voulait. Un autre verre. Puis un autre. Et encore un. Il ne comptait jamais à combien il en était, peut-être qu'il devrait, ça lui permettrait d'établir un record. À cette pensée, il esquissa un fin sourire avant de replonger dans ses pensées morbides et de descendre les consommations que le serveur vient poser à intervalle régulier devant lui.

Si on remonte quelques années en arrière, Donovan avait tout pour être heureux. Il avait un boulot qu'il aimait par dessus tout, une femme qu'il cherissait autant qu'il le pouvait et un enfant qui attendait de naître. Tout cela lui avait été retiré brutalement. Très brutalement et il n'avait pas eu le temps de se faire à cette idée qu'il pourrait être heureux un jour que tout cela lui avait été retiré.

Les premiers mois avaient été les plus compliqués, il avait essayé de remonter la pente au début, il le devait bien à Miranda, mais sans grande conviction, Donovan avait alors abandonné et s'était laissé tomber dans cette spirale sans fin où il était encore aujourd'hui. Il avait commencé par lâcher petit à petit son travail pour aller boire dans des bars jusqu'à pas d'heure. Il avait poursuivi en enfreignant les lois qu'il est censé faire respecter. Et puis, rapidement il avait sombré au-delà du possible. L'alcool, la drogue, s'il avait pu utiliser le sexe pour faire passer la douleur, il l'aurait très certainement fait, mais sa défunte épouse était bien trop présente dans son esprit et dans son coeur pour qu'il puisse envisager de toucher une autre femme qu'elle.

Les années étaient passées amer malgré ce qu'on lui avait dit, la douleur était toujours aussi présente et forte qu'aux premiers jours. Qu'était-il censé faire pour faire passer cette dernière ? Attendre n'avait pas été une option très concluante et elle ne faisait que conforter sa propre idée. Tant qu'il ne se serait pas occupé personnellement des personnes responsables de son malheur, alors il sera incapable d'avancer dans sa vie. Déchet public, il n'a plus rien à perdre, sauf son emploi, qui pour le moment lui permet de faire les recherches dont il a besoin. Sans ce dernier, il n'aura pas la possibilité d'enquêter sur ces mafieux. Sa vengeance ? Il la prépare depuis tant de mois, voire d'années qu'il ne peut pas se permettre d'échouer.

Pour oublier juste le temps d'une soirée, il avait noyé son chagrin dans l'alcool, en attendant de pouvoir mener à bien son plan, il se détruisait chaque jour un peu plus. Que risquait-il de toute manière ? Rien, il avait déjà tout perdu, et une fois qu'il aurait tué ces personnes qui lui avaient ôté son bonheur, il savait qu'être flic n'était plus une option pour lui. Alors il continuera à boire, encore et encore jusqu'à ce que mort s'en suive.

" - T'en veux un ?" demanda-t-il à l'homme qui semblait le fixer du regard. Il parlait d'un verre évidement.

Donovan était souvent comparé à un ours mal léché, souvent de mauvaise humeur, l'alcool ne le rendait pas vraiment plus sociable pour autant. En revanche, il était tellement ivre qu'il était incapable de penser correctement, et ce soir, il serait sans doute même incapable de marcher seul jusqu'à la sortie du bar, c'est aussi pour cette raison qu'il avait le cul visé sur ce tabouret.

S'il y avait une chose dont Donovan se fichait bien, c'était de sa propre vie. En réalité, depuis le meurtre de sa vie, il ne vivait plus, il survivait, et tout ce qui le tenait en vie, c'était son plan de vengeance. En dehors de ça, il se fichait de tout le reste, ça n'avait pas grande importance à ses yeux tant que ça ne concernait pas son plan. Bien sûr qu'il avait toujours l'amour du métier, il avait fait ça pendant tant d'années, mais tout avait radicalement changé, tout était devenu des automatismes chez lui. Il était devenu un robot, même dans sa routine quotidienne. Se lever, aller travailler, arrêter des criminels, finir sa journée en allant dans un bar et boire jusqu'au trou noir.

Il n'oubliait pas tout, enfin pas tout le temps, parfois il n'avait réellement aucun souvenir de la veille, mais bien souvent c'était le cas contraire. Par chance, il tenait assez bien l'alcool, ou bien c'est parce que son organisme avait fini par prendre cette quantité d'alcool comme normale.

Tranquillement installé au comptoir du bar, un homme le regardait, sans doute avec un peu trop d'insistance, et Donovan n'avait pu s'empêcher de lui faire remarquer. Avait-il besoin de quelque chose ? Cherchait-il un compagnon pour passer sa soirée ? Quoiqu'il en soit, le policier n'était clairement pas le partenaire idéal. Il n'avait qu'une envie c'était de sentir cette brûlure si familière descendre le long de sa gorge, il n'y a que ça qui permettait de le calmer ne serait-ce que quelques instants. C'était un plaisir éphémère malheureusement.

" - Pourquoi est-ce que j'aurai besoin d'un taxi ?" demanda-t-il avec un sourire sur son visage.

Il était venu en voiture et il comptait bien repartir avec. Et ce, même si cet homme ne semblait pas être pour. Après tout, qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire ? Il ne manquera à personne si jamais sa voiture finit dans un arbre.

" - Tas déjà vu quelqu'un se bourrer la gueule juste par plaisir ? Juste pour ne plus avoir aucun souvenir de sa soirée ?"

Franchement, est-ce que ça existait les gens comme ça ? Probablement que oui, mais ce n'était pas son cas, s'il était ici, c'était pour une bonne raison, et malheureusement, ses soirées se ressemblaient toutes. Il finissait toujours dans un bar, à moitié ivre. Et c'était le même programme chaque soir. La même spirale qui se répète depuis sept ans. Enfin peut-être pas totalement sept ans, au début, il ne s'est pas laissé glissé sur cette pente, mais maintenant, elle représentait la facilité à ses yeux et c'était tellement mieux comme ça.

" - Chacun réagit d'une manière différente, moi ça me permet d'oublier tout pendant quelques instants."

Et il en avait réellement besoin, sinon, ce serait dans la rue qu'il trainerait à la recherche d'une personne sur qui passer ses nerfs. Et pour tout le monde, c'était bien mieux qu'il passe sa soirée accoudé au bar comme il le faisait en ce moment même, même s'il frôlait l'inconscience, aussi bien par son entêtement à couloir rentrer seul, que par son état à moitié comateux où il n'avait plus réellement le contrôle sur son corps ou ses paroles.