Ange et démon ft Alexis Silveira

Une exposition de crucifix, rien que ça messieurs, dames ! Le luthier en a vu des tordus dans sa vie, mais ça… Ça le dépassait complètement. Et ça se voyait, à son expression circonspecte (cf sa tronche sur l’avatar, c’est cadeau, même pas fais exprès en plus ! ) devant un étal d'objets religieux exposé à l'église de Bowen. Il y avait des années, pour ne pas dire une bonne décennie qu’il n’avait pas mis les pieds ici. Il y avait du monde ce jour-là. Des vieilles surtout, quelques vieux aussi, la parité, tout ça… Des jeunes traînés de force par leurs vieilles tantes et quelques mères de toutes évidences au bout du rouleau. Bref, il y avait du monde à l’église aujourd’hui. Elle avait franchement choisi son jour pour mourir, cette vieille chieuse de Nelly, sa voisine acariâtre qui lui aura vomi quasiment jusqu’au dernier moment. Ce serait mentir de dire qu’il n’était pas soulagé qu’elle ait fini par claquer, cette vieille qui vivait à quelques mobiles-home du sien, que personne n’allait voir, jamais. A part lui, le soi-disant monstre de Bowen qui savait un truc ou deux sur la solitude…

Personne ne faisait vraiment attention à lui, ça lui faisait du bien.
Il n’était pas venu pour toutes ces breloques, mais pour trouver un prêtre.

Il était un mec lambda, dans une église, il portait des vêtements sombres même s’il ne se sentait pas vraiment en deuil. Il n’arrivait pas à être triste, Nelly était une vraie peau de vache. Il se fondait dans la masse en silence, puis…

“ Buuuuuurrrrrp… “
(Quel talent de l’auteur pour les onomatopées, n’est-il pas ?)

Oui, vous l’avez compris, il venait de lâcher un rot des cavernes, littéralement, et l’acoustique de l’église fut parfaite pour diffuser ce son ignoble au sein de l’édifice, et voila que de l’homme lambda il devenait le gros dégueulasse, et puis quand on le reconnaît… On s'écarte un peu, parce que pour qu’un type comme lui se retrouve à l’église, c’était forcément grave.

Il s’exprima donc à voix haute pour calmer les indignations autour de lui : “ Euh… Désolé. tacos mexicain ce midi. “ Qu'il justifie avec une pauvre grimace en repensant aux piments, les salauds. Qui n’a jamais eu des soucis de digestion après un tacos ? Sauf que là, le bonhomme n’était pas perdu, reclus dans son coin, il était parfaitement en publique et ces regards accusateurs l'agaçaient assez pour qu’il poursuive sur sa lancée. “ Come on, ça ne fera que dix ans de plus à rôtir en enfer, hm ? “ Ok, pas drôle. Enfin peut-être que si, il allait pas regarder chaque personne pour analyser leurs réactions. “ Bon et puisque j’ai l’attention de tout le monde, est-ce que vous savez où je peux trouver le prêcheur ? Le Padré, le cureton, le boss de la boutique, quoi. Non ? C’est pour une morte… Enfin, j’ai tué personne hein. “ Pas cette fois, mais ça il va pas l’ajouter. Lui, ça le fait un peu marrer cette situation, ça tournait vraiment au ridicule. Il se disait que foutu pour foutu, il pouvait se passer de la bienséance, une fois de plus.



@Alexis Silveira Désolé pour ce rp infernal

J'étais vraiment pas certaine de ce que je foutais à l'église aujourd'hui. J'allais jamais là, c'était pas mon genre d'endroit. J'étais pas croyante et j'étais loin d'être assez sage pour me sentir légitime d'y mettre les pieds. En fait, c'était bien ça le problème. J'avais jamais été un ange, j'aimais bien faire des petites conneries, boire et faire la fête, les trucs normaux quoi, mais là j'étais pire que pire. J'étais au fond du trou et j'avais besoin d'me faire guider, d'faire amende honorable disons. Est-ce que c'était le bon endroit pour ça? Pas certaine, mais comme mentionné y'a quelques secondes, j'venais jamais à l'église alors... Ça donnera ce que ça donnera.

Quand j'me pointai là-bas, y'avait pas mal de monde. Pourtant, c'était pas la messe du dimanche ou rien de tout ça, mais non, y'avait une exposition un peu bizarre et les gens venaient voir ça. Bordel j'vivais pas sur la même planète moi. J'entrai dans l'église, regardant les gens de façon un peu bizarre avant d'me diriger vers le fond, à la recherche d'une personne qui travaillait ici. Les prêtres, ça travaillait au fait? Ou bien ça dédiait gratuitement sa vie à l'église, offrant ses services de bonté de coeur? J'espérais pour eux qu'ils avaient un salaire parce que les logements, ils étaient pas donné! P'tête qu'ils dormaient ici? Je jetai un coup d'oeil autour, frissonnant à cette pensée. Creepy. L'endroit était hyper calme et silencieux en plus malgré cette exposition et la présence de beaucoup de gens. Comme si personne voulait déranger l'au-delà. Bref, j'allai au fond et tombai face à face avec monsieur le prêtre - ou du moins, celui en charge de l'endroit. Franchement, ça m'allait. « Bonjour! Je viens pour me confesser. Ça se fait encore? Au pire juste discuter, j'ai besoin de conseils, d'accompagnement, tout ça. » dis-je avec mon plus beau sourire. J'serais bien allée voir un psy, mais bordel c'était cher et j'avais pas d'assurances pour ça. Il m'indiqua une petite cabine, même si bien franchement, ça servait plus à rien, il venait de voir mon visage. C'était juste pour le principe j'imagine. Je m'installai, un peu nerveuse, prête à dévoiler mon sac, à parler de mes péchés, de mes soucis quand un gros rot dégueulasse se fit entendre. Ça me stoppa net dans mon élan et ça stoppa le prêtre aussi. Moi parce que je m'étais fait interrompre, lui parce que c'était choquant et déplacé ce genre de choses. Personnellement, je vivais avec Elijah alors j'trouvais pas ça bien choquant, mais je prétendis le contraire pour entrer dans les bonnes grâces du prêtre. « Wow, quel manque de respect! » glissai-je doucement. La même voix qui semblait avoir produit ce bruit digestif s'éleva pour se justifier, puis s'exprimer, puis poser des questions. Elle s'éleva assez fort pour que le prêtre s'arrête et que ça me coupe dans mon moment. Non mais, pas moyen d'se confesser tranquille ici? J'étais agacée là. J'ouvris la petite porte assez bruyamment et sortie de ma cabine, me dirigeant vers ce grand homme qui semblait en intimider - ou en dégoûter?- plusieurs. Je lui tapai dans le dos avec mon index de façon peu délicate. « Excusez-moi! Vous vous rendez compte que vous êtes le seul à parler aussi fort? Monsieur le prêtre, il est occupé, attendez votre tour! » m'exclamai-je, point sur les hanches. J'étais en gueule de bois, j'avais pas bu de café et j'détestais me faire interrompre alors c'était pas le côté le plus sympa de ma personne qui se présentait là.

Quelqu’un tapota son omoplate et il se tourna vers une ravissante brune au regard néanmoins douteux ponctué d’un certain agacement. Ses sourcils s’envolèrent lorsqu’il vit derrière la jeune femme l’endroit d’où elle provenait… Bordel de chiottes, c’était pas une sorte de placard ? Interdit, il désignait la porte de l’index avec autant d'incompréhension sur le visage que devant cette exposition qu’il trouvait glauque à souhait. Bordel, c’était quoi ce machin ? Il n’aime pas les magiciens, vraiment ! Combien de fois est-ce qu’il doit le dire aux gens, hein ? Alors si c’est pour faire des petits tours à la con, c’est pas la peine, tant pis pour l’enterrement, ça va bien cinq minutes ! Enfin vu ce qui se présentait à lui, il pouvait faire une exception sur la magie, pour une fois. L’église c’était peut-être fun au final si ce sont de jolies femmes se cachent derrière toutes les portes improbables du bâtiment.

Finalement, l’inconnu capta à nouveau son attention en prenant la parole. Les mains sur les hanches d'indignation, carrément, c’était fichtrement adorable…

Il affiche une moue avant de consentir à baisser le ton. “ Oh, il faut attendre son tour ? Y’a un ticket à prendre, hm ? “ Il hausse un sourcil interrogateur, le plus sérieusement possible. Mais c’est qu’elle était vraiment en pétard la brunette, il n’y avait qu’à voir la ligne (plus gentil que ride) du lion sur son visage d’une étonnante harmonie. “ Sérieusement, Monsieur le prêtre est occupé-occupé, ou juste… occupé ? J’ai jamais fais d’enterrement religieux, ou quoi que ce soit de religieux, j’crois bien que si j’touche une statue ou même si j’reste trop longtemps ici, j’vais prendre feu, see ? “ Bon sang de bonne femme ignoble sans famille, hein.. Elle le fera chier jusqu’au bout cette morue. “ Mais eh… Elle est morte après tout, qu’est-ce qu’on s’en tape de c’qu’elle voulait, hein ? Putain, j’suis trop con. “ Et bordel la voilà, cette maudite lueur de tristesse venue hanter ses yeux verts, exactement le contraire de ce qu’il voulait ressentir, c’était bien plus simple de sortir son numéro du gros connard de service plutôt que d'admettre qu’il aurait voulu que ça ne se termine pas comme ça pour elle, que ça l'affecte d’une certaine manière, assez pour qu’il se traîne dans ce qui est pour lui, l’endroit le plus malaisant de la ville.

Le meilleur remède pour faire chasser cette tristesse c’était de changer de sujet, alors il désigne d’un léger levé du menton le placard par lequel elle avait vraisemblablement surgit “ Tu foutais quoi dans c’cagibis ? “ Pourvu que sa réponse soit tout sauf de la magie.

Je vivais quand même depuis toujours à Bowen, j'étais pas aveugle, je l'avais déjà vu ce drôle de monsieur. Je n'avais juste encore jamais eu l'occasion de lui parler, ou de le voir d'aussi près. J'avais déjà entendu quelqu'un dire qu'il était terrifiant. Je plissai les yeux un peu, nope, il semblait juste manquer de manières et avoir de très mauvais goûts vestimentaires. Il semblait bien secoué par le fait que j'arrive en surprise, sortant de la petite cabine à confession en tout cas, mais il sembla baisser le ton. P'tête que c'était lui qui avait peur de moi! J'étais pas très grande, mais je pouvais avoir un regard menaçant par moment. Comme quand Elijah laissait ses chaussettes sales un peu partout dans le salon ou bien quand Beckham mangeait mes biscuits sans ma permission. Dans ce genre de moment, mon regard il pouvait tuer. Mais juste mon regard, promis. Cette pensée s'évapora plutôt rapidement parce que j'avais la forte impression que l'homme en face de moi se moquait de moi. J'étais pas sûre, il affichait un air sérieux, mais ses paroles insinuait cela. '' Ben oui il faut attendre son tour. On peut pas juste demander à voir le prêtre et hop, il lâche tout pour venir vous voir. '' répondis-je, les sourcils toujours froncés. L'inconnu, il semblait plutôt pressé de voir le prêtre. Je l'écoutais me raconter tout ça, je remarquai une petite tendance à overshare vu le rot précédent, sa justification de repas et maintenant... Ça. Je ne savais pas trop comment réagir, il me laissait un peu perplexe. Surtout quand il parla de prendre feu. '' On peut faire ça? Prendre feu? '' demandai-je doutant soudainement de l'existence d'une force supérieure. Je mentionnai ces mots et me sentis ridicule. Bien sûr que non c'était pas possible. Sinon j'serais déjà brulée vive moi. Je secouai la tête, chassant ces pensées stupides et posai mes yeux bruns sur l'individu. '' Oh. Vous êtes triste. '' remarquai-je en scrutant son regard. '' Je suis désolée pour votre perte. C'était votre femme? '' demandai-je. J'essayai d'être polie, mais franchement pas certaine qu'il était marié. '' J'vais être bien franche, j'suis pas certaine qu'elle se rende compte de quoi que ce soit maintenant qu'elle est morte donc oui.. On s'en fout. '' dis-je avec une petite grimace. Bah non, je n'y croyais pas à la vie après la mort. Selon moi, on s'évaporait dans l'univers et on avait plus notre mot à dire sur rien. Sauf que là j'disais ça ici, dans une église avec des gens qui y croyaient eux. J'sentais quelques regards sur nous, clairement on était pas les bienvenus. L'homme devait bien le sentir lui aussi, mais choisir de s'en foutre parce qu'il continua la discussion en me questionnant. '' J'avais l'air d'y foutre quoi? '' demandai-je suspicieuse. Mes sourcils se froncèrent, faisant 1+1 avec son interrogation sur le prêtre plus tôt, quant à savoir s'il était occupé-occupé. Une grimace d'horreur apparu sur mon visage. '' Hé ho! Vous pensiez quand même pas que c'est moi qui l'occupait de... Cette façon? '' demandai-je légèrement offusquée. C'était pas mon genre. C'était plus mon genre. Bon, avec un prêtre ça n'aurait jamais été mon genre, j'préfère être claire. '' Si vous voulez tout avoir, espèce de curieux, j'suis allée me confesser. J'avais des p'tites choses sur le coeur et parait-il que c'est leur job d'écouter. '' pris-je tout de même soin de l'informer. '' J'ai pas eu le temps de dire grand chose, votre rot l'a bien déstabilisé. '' marmonnai-je. Donc au final, j'étais un peu venu pour rien moi.

Voila, voilà pourquoi il ne sortait pas de chez lui, pourquoi il était très bien depuis un an, quasiment dans son mobile-home, loin des gens, même les voisins étaient presque trop près pour lui ! Sortir était toujours une pure catastrophe. Enfin, pour cette fois, il n’était pas obligé de tabasser qui que ce soit et c’était déjà pas si terrible. Il n’y avait que cette jeune femme, qui hypnotise un peu avec ses grands yeux de biche coiffés de sourcils foncés.

Il avait simplement haussé les épaules, l’air de dire : je suppose. Il n’avait jamais entendu parler d’un type ayant prit feu dans une église, mais c’était ce que l’on pouvait s’imaginer d’un gars comme lui, non ? Même si c’était plus de l’humour qu’un fait sérieux, à l’origine, juste pour dire qu’il ne se sentait pas spécialement dans son élément.

Un léger froncement de sourcil marqua son visage lorsqu’elle prononça ces mots : vous êtes triste. Est-ce qu’il avait l’air triste ? Il n’en sait rien, il n’aimait pas vraiment ça, pas plus que les question absurdes qui s’en suivait. “ Ma femme ? Pitié, non… “ Il en grimace. Pitié, pas cette morue. Ni personne d’autre d’ailleurs.  La petite chrétienne venue l’enguirlander parce qu’il parlait trop fort venait-elle vraiment de dire que l’on s’en foutait ? Les pratiquants, ce n’est plus ce que c’était ! Alors comme pour clairement changer de sujet, il questionne la jeune femme ce qu’elle fichait avec le padre dans le placard à balais…

Il lève les mains - ho sentiment de déjà vu lors de ces différentes arrestations - lorsqu’elle semble un poil offusquée par sa question. “ Hé oh, je juge pas. “ Si ça se trouve, le curé est du genre beau gosse. Il ne put retenir un sourire amusé, à priori il avait gâché un moment de confession. “ T’as pas des amis pour te confier plutôt qu’un vieux puceau déstabilisé par un simple rot ? “ Ok, son rot n’avait rien eut de simple, clairement pas, mais bon… Pas de quoi être scandalisé, c’est la nature après tout, non ? Sa question n'était sans aucun jugement, un peu comme un mec sorti des montagnes et qui essai de comprendre la société... Un peu ça, ouais... “ Ces mecs vivent dans leur petite forteresse avec leurs crucifix à la con, ils ont aucune idée de c’que c’est la vie des gens… Pourquoi on commet tous ces péchés… Même les pires. “ Oh oui… Il n’avait pas reçu d’éducation religieuse, mais il avait regardé assez de films pour connaitre le fameux commandement de : Tu ne tuera point.

Il ne voulait pas du pardon d’un prêtre.
Il ne voulait le pardon de personne.
Il voulait seulement vivre avec ça, vivre…

“ Bref t’as raison… Pas de cérémonie. C’est putain de débile. “ Une crémation et on n’en parle plus de cette vieille peau de vache. Voilà ce qu’il devait gérer, il s’apprêtait même à tourner les talons, bien qu’il tenta, levant un sourcil interrogateur  “ Tu t’y connais en crématorium ? “ C’est que lui et la paperasse, ça fait douze. Enfin, pas qu’il comptait sur elle pour vraiment l’y aider, parce qu’elle pourrait lui retourner le compliment concernant l’existence d’amis pour l’épauler, parce que s’il avait bien des amis, il avait franchement tendance à les fuir pour une liste gigantesques de raisons.

Ça serait absurde qu’ils jouent les amis par intérim… Hein ?
Et finalement, pourquoi pas ?
Le temps d’une journée.

J'avoue qu'ils me font chialer de rire

C'était une rencontre à laquelle je ne m'attendais pas, ce matin. En même temps, vu comment je n'avais pas l'habitude de fréquenter ce genre d'endroit, j'imagine que ça venait avec. Des monsieurs un peu bizarres, ça devaient être coutumes dans les églises. Mais celui-là, il avait un petit plus, il avait un air triste. Enfin, j'assumais plus qu'autre chose, c'était peut-être son air naturel. En tout cas, c'était pas lié à la mort de sa femme/pas femme. Bon, permettez-moi d'en douter. Pas que c'était sa femme, ça, j'suis bien d'accord qu'il devait pas être marié celui-là, mais que ça n'avait rien à voir avec cette dame pour qui il s'était déplacé jusqu'ici? Pas sûr. Je levai les deux mains en l'air innocemment. « Pas de honte à avoir si vous étiez amoureux hein. »  C'était p'tête un peu pour remuer le couteau dans la plaie, avoir une autre réaction. Pas sympa de ma part, mais ce drôle d'humain, c'était la chose la plus intéressante dans cette église en fait.

Cette altercation me changeait bien les idées jusqu'à ce qu'il m'accuse de choses indécentes avec le prêtre. J'étais même pas certaine qu'il y avait assez d'espace dans le cagibi pour bien faire ça en plus. Loin de lui l'idée de me juger, il s'agissait seulement de curiosité mal placée. Sa question me fit réfléchir sur le pathétisme de ma situation. « Ben... Si, j'ai des amis. » répondis-je en fronçant les sourcils. Alors pourquoi c'était pas à eux que je me confiais? Pourquoi c'était plus facile de me dévoiler à un inconnu qui n'avait clairement pas vécu la moitié de ce que moi j'avais vécu d'ailleurs. C'était un pensez-y bien cette question. Le rot ambulant, il disait pas que de la merde. « J'sais pas, j'me suis dit qu'il éviterait le jugement. Vous croyez qu'il nous trouve cons d'se dévoiler de la sorte devant lui ? Qu'il parle de nos histoires avec ses amis prêtres et qu'ils se foutent tous de nos gueules ? » demandai-je bien sérieuse. Plus j'y réfléchissais, plus je m'enfonçais. C'était mieux d'avoir été interrompue finalement. Le petit discours du grand gaillard, il m'faisait remettre en question tout ça, mais une de ses phrases attira quand même mon attention et pas dans le meilleur sens. « Vous semblez parler par expérience avec vos péchés. Vous en avez commis d'atroces? » demandai-je en plissant les yeux. Pas vraiment par inquiétude, plus par curiosité également. Qu'est-ce qu'il pouvait bien avoir fait de si horrible?

Alors qu'on concluait que j'devrais parler à mes amis et que lui ne devrait pas faire de cérémonie pour une femme à laquelle il n'était pas marié, alors que j'croyais que nos chemins allaient se séparer juste là, il me posa une question bien étrange. « Euh... Non? » répondis-je étonnée. J'étais pas encore à l'âge où tous mes amis devaient passer par cette étape, j'ai pas familière avec le sujet. La seule mort que j'avais vécu, c'était ma mère et comme on l'aimait et bien on avait fait une, une cérémonie. « Vous avez besoin d'aide peut-être? » proposai-je après un grand silence. Quelque chose dans son air me donnait envie de l'aider. C'était peut-être juste ma grande générosité face à quelqu'un dans le besoin aussi. Clairement, lui, il n'en avait pas d'amis.

A-amoureux ? C’est qu’elle voulait lui faire péter une coche, il ne voyait guère autre explication ! Le brun s’agaçait, c’était plus fort que lui, la légère crispation de sa mâchoire et ce bras qui se levait avec un index pointé en direction du visage fort harmonieux de la jeune femme. “ Je n’étais pas amoureux, bon sang ! Qu’est-ce que vous avez tous à ramener tout à ça, hein ? C’est ça votre génération de dégénérés à regarder Twilights et Game of Thrones, hm ? C’était une vieille peau, un vieux machin de soixante-dix balais, un monstre qui plus est, une putain de tueuse d’enfant, non. Non, elle mérite même pas que je me casse le cul à roter dans une église pour trouver un curé, bordel. Bordel. “ Bordel, il avait beaucoup trop parlé, beaucoup trop. Il aurait mieux fait de rester chez lui, clairement, terré dans son coin, loin des gens qui ne connaissent rien à son univers, qui ne peuvent plus le comprendre. Et à force de vivre isolé, il ne savait plus vraiment communiquer avec les gens, il était déjà naturellement grossier et gauche, mais ça n’avait pas franchement amélioré la situation. Son bras retomba le long de son corps avec une certaine forme de dépit dans le regard.

C’est bizarre, le deuil, surtout quand on déteste la personne que l’on doit mettre en terre. Il ne s’était pas emmerdé avec son père, pourquoi est-ce qu’il le faisait pour Nelly ? Le monde se porte mieux sans elle, et le monde se portera sans doute mieux sans Manwë Druid.

“ Le curé est censé éviter le jugement ? Ce n’est pas lui qui s’est vexé pour un rot ? Hein ? Non… C’est juste un gars, un gars dans une robe. Et ce gars, il juge, comme les autres, mais il s’garde de le dire. Juste un gars.. Mais… J’crois bien que les gens qui jugent mais qui vous acceptent quand même, c’est ça les amis. “ Alors pourquoi est-ce qu’il fuyait les siens depuis un an ? Parce qu’il est persuadé que personne ne peut accepter ce qu’il a fait. Parce que si on lui pardonnait ses frasques, ses bagarres aussi, un meurtre… Il doutait d’eux. Il doutait de leur capacité à le regarder dans les yeux et lui dire que tout va bien. Pourtant… Putain, il sait qu’un pote comme Marcus ou Tyler l’aurait aidé sans discuter à cacher un cadavre s’il en avait besoin, mais il préférait que ça ne soit pas le cas, parce qu’il les aimait… Tout simplement.

Il marque une pause, avant de répondre à la brune en essayant de ne pas avoir une mine trop grave, d'avoir l'air de s'en foutre. “ Ouais… J’en ai commis, hm… De ceux que personne ne peut accepter. “ Un peu comme cette bonne femme morte, mais elle était pire, non ? Elle avait tué un bébé, lui… Lui avait tué un assassin, un monstre. Il se consolait comme ça, vis à vis de ce qu’il était capable de faire, le grand méchant loup.

Il devait se débrouiller pour l’incinération, de qui elle se foutait en prétendant être religieuse ? Les flammes de l’enfer, c’est tout ce qui l’attend. Il lève un regard étonné lorsqu’elle propose son aide. “ J’sais pas… Peut-être. “ Parce qu’il n’avait au final aucune idée de ce qu’il foutait. “ Et toi, toujours besoin de parler à un gars ? J’suis à peu près sûr que j’peux accepter d’entendre n’importe quoi…  “ Non, en réalité il n’était pas en capacité d’accepter les crimes des autres, si un gars venait s’asseoir à côté de lui et lui disait qu’il battait ses mômes tous les jours, il pouvait être certain de se prendre la raclée de sa vie. Venant d’une fille comme elle, il doutait qu’ils arrivent à un tel extrême et puis… Il ne frappait pas les femmes, ni les enfants, les vieux et les handicapés d’ailleurs. Ça serait facilement résumé d’affirmer tout simplement qu’il réservait sa violence aux hommes.

Je l'avais peut-être cherché un peu, cette réaction. J'avais voulu le piquer un peu, le provoquer cet inconnu. C'était p'tête de jouer avec le feu que de rechercher une telle réaction d'une personne dont j'ignorais tout. J'savais pas moi comment il pouvait réagir, p'tête qu'il voudrait casser des trucs, p'tête qu'il voudrait m'enfermer dans le cagibi où j'étais un peu plus tôt. Il me semblait pas dangereux, mais on savait jamais. Les gens d'nos jours, ils étaient fous. J'arquai un sourcil alors qu'il me pointait son index au visage, l'écoutant râler pendant un bon moment, parlant de Twilight, de balais, de cul et de tueuse d'enfant. C'était chaotique, j'savais pas sur quel détail me concentrer, ils étaient tous un peu troublants à leur façon. « Wow, d'accord. Faut pas s'énerver pour si peu. » dis-je en agrandissant les yeux. Si elle était si horrible que ça cette dame, si elle ne méritait pas qu'il se casse le cul pour elle, comme il le disait si bien, pourquoi le était-il là s'il n'en était pas amoureux? J'me ferais pas chier moi à sa place. Parfois, fallait pas chercher à comprendre les gens, pas sur ce genre de mystères. On m'y reprendrait plus. Par contre, l'homme bizarre, il essayait bien d'éluder mon mystère à moi, celui de ce que je foutais ici et pourquoi j'me confiais à un prêtre qui me jugerait certainement, si j'avais des amis. « Y'a pas une option où les amis jugent pas, disons? » demandai-je comme s'il avait la réponse. « Puis si le fameux curé, il me juge mais il m'accepte quand même dans son église... Ça devient un ami? Ou ça s'applique pas à lui? » demandai-je en fronçant les sourcils. Il m'faisait tourner la cervelle celui-là, j'me posais des questions que je m'étais jamais posé avant, ça devenait un peu too much d'ailleurs. Ça m'faisait tout remettre en question. P'tête que c'était plus simple de parler avec Kay ou avec Elijah au final. Ils m'connaissaient mieux que ce prêtre, ils savaient ce que j'avais vécu, ce que j'vivais. Alors pourquoi ça m'semblait aussi dur? J'étais certainement pas la seule à vivre des choses difficiles, à péché pour reprendre le langage utilisé ici. L'homme là, il en avait certainement commis, des péchés. « J'ai l'impression que c'est mieux si j'demande pas de quoi il s'agit. » remarquai-je à voir le ton utilisé. J'voulais pas être complice d'un crime non plus hein. « Si ça m'incrimine pas et que vous voulez en parler... J'peux vous écouter aussi hein. Mais vous sentez pas obligé quoi. » proposai-je quand même. Ben oui j'avais regardé Suits et How to get away with murder moi, j'connaissais la base dans l'domaine du droit criminel. J'étais pas sans coeur non plus, s'il voulait râler, j'savais écouter. En plus, il semblait avoir besoin d'aide, donc on risquait d'passer plus que cinq ou dix minutes ensemble, autant s'connaitre un peu. « J'suis pas très calée en la matière, mais je suis presque certaine que j'peux être utile. » dis-je avec un sourire. Un p'tit sourire, pas un grand, on parlait quand même d'incinérer quelqu'un. En retour, il m'offrit une oreille attentive et c'était déjà plus que ce que cet endroit m'avait offert. « Ça ferait pas de tort d'avoir l'avis de quelqu'un... De plus expérimenté. » dis-je en sachant pas trop si ça sonnait aussi impoli que j'le croyais. Plus expérimenté que le curé en terme de faits vécus, plus expérimenté que moi en terme d'années au compteur quoi. « J'm'appelle Alexis au fait. Et j'serais prête à quitter cet endroit, j'aime bien l'attention qu'on nous porte, mais j'ai aussi l'impression qu'on va nous brûler sur un bûcher d'une minute à l'autre. » mentionnai-je alors qu'on dérangeait les pauvres croyants depuis plusieurs minutes déjà. De toute façon, on avait une bonne femme à réduire en cendres nous!

Après s’être bien fait remarquer, avoir prouvé, une fois de plus, qu’il n’était clairement pas adapté à la vie en société, pas même foutu de respecter un lieu de culte… Il est vrai qu’il avait bien envie de rentrer chez lui, se terre dans sa cabane au fin fond de l’espace carabin en n’en sortir qu’au prochain décès. C’est qu’avec la peine, il avait pensé bêtement que ça l’aiderait, ouais, que ça l’aiderait à moins détester cette vieille peau de lui avoir tenu tête jusqu’au bout… De n’avoir jamais témoigné le moindre petit regret vis-à -vis de ce qu’elle avait fait. C’était tout ce qu’il lui avait demandé, après toutes ces semaines de services, à venir à son chevet pour l’accompagner dans cette fin de vie minable et pathétique… Rien. Elle était partie sans lui laisser entrevoir que les monstres pouvaient avoir un peu de scrupule. Bordel, qu’il la détestait, alors qu’est-ce qu’il fichait dans cette église à demander une cérémonie en son honneur ? Non… Elle ne méritait rien de tout ça. La petite brune en face lui avait le mérite de l’avoir raisonné, remis face à la réalité. Rien ne servait plus de faire des efforts, elle est morte, c’est trop tard.

“ Les amis qui jugent pas, ils ont dû faire au moins autant, si ce n’est, plus de péché que toi, j’imagine. “ Qu’est-ce qu’il y connais en amis, puisqu’il ne leur disait jamais rien ? Parce qu’il avait commis des péchés qui ne peuvent être pardonnés ou cautionnés de personne. Bien sûr, certains savent la vérité. À commencer par son avocate, qui n’était pas une amie. Il y avait Clara et Sam, deux flics qui prenaient des risques pour lui et donc finalement, il devait garder ses distances avec eux. Milo, son alibi béton… Marcus… Certes, ça faisait du monde. Autant de personnes qu’il ne voyait plus. “ Ouais… C’est peut-être un ami… Ou juste son job, j'sais pas. “ Il n’en savait trop rien, il n’avait jamais vraiment discuté avec un religieux, il trouvait ça trop débile de toutes manières.

Il eut un léger rictus, presque attendri face à la proposition. Autant Man pouvait être un homme plutôt sauvage, autant lorsqu’il se lâchait et se sentait en confiance, il pouvait être un type solaire. Là, il était plutôt dans un entre-deux.

“ Dans ce cas… On a un deal. “ La voilà prête à pactiser avec le diable dans la maison de dieu, quelle ironie ! Le brun tendit le bras pour lui désigner la sortie. “ Eh bien, après toi Alexis, c’est le cadavre qu’on doit brûler pas nous autres. “ Pas louche comme phrase, hein. Mais c’est plus simple d'appeler la vieille le cadavre que de lui accorder plus de crédit. Pourquoi est-ce qu’il s'est rendu responsable de tout ça ? “ J’m’appelle Manwë. Même s’il n’a plus vraiment l’habitude de se présenter après que sa sale tronche ait pu faire la Une de pas mal de journaux locaux après cette fameuse histoire de meurtre, puis supposée disparition… Bref, il n’étaient pas là pour débattre de ça.

Les deux protagonistes quittent l’église au grand soulagement des paroissiens et des curieux venus admirer les crucifix. Une fois dehors, il n’y avait plus le poids des regards, plus cette atmosphère pesante. Ses yeux verts détaillent la rue, les passants, par habitude, toujours sur le qui vive. Il reporte son attention sur la jeune femme “ Y’en a pour un petit moment jusqu’au crématorium, on peut en profiter pour que je te donne mon avis… Expérimenté. “ Ou pas, parce que si elle avait des problèmes de couple, il n’avait aucune expérience en histoire amoureuse, lui c’était monsieur sans attache. Qu’il croyait. Pour la route, il s’allume une clope, il en propose une à la brune, histoire de se montrer sympas. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, il était doué pour écouter, il était attentif et il savait se taire pour laisser toute la place aux autres. Il était même plutôt du genre avare en paroles, alors elle pouvait se déverser sans crainte d’être interrompue un instant.

Il n'avait pas tort cet inconnu. J'sais pas pourquoi j'avais aussi peur de me confier à mes proches. Probablement pour conserver cette image que je projetais de la fille fun et forte que rien n'embête et qui s'laisse pas abattre. C'était pas tout à fait le cas en fait, j'me laissais bien abattre depuis un moment. J'devais bien pas être la seule sur cette planète à avoir de la difficulté à traverser une épreuve, non? Puis, l'homme il avait raison de dire que mes amis avaient sûrement péché plus que moi - ou du moins tout autant - alors ils n'avait pas à juger de rien. Slowly but surely, ça faisait son chemin dans ma tête tout ça. « Bof je préférerais que ce soit pas mon ami. C'est triste un peu. » admis-je en haussant les épaules. Pas besoin d'un prêtre dans mon cercle quand même. Un Manwë, par contre, c'était ok. À voir s'il y resterait, mais si c'était que pour la journée, ça faisait l'affaire aussi. On avait à présent un deal et j'comptais bien le respecter. Je tentai tout de même d'ignorer ce que j'lui offrais en échange d'une oreille et d'un conseil : de l'aide pour brûler un corps. Corps mort, soit, mais tout de même. Ça sonnait bizarre pour moi. Pour la majorité des gens aussi, j'osais croire, mais pas pour Manwë. Il le disait avec un détachement presque inquiétant, mais il était trop tard pour paraitre dérangée par l'action puisqu'on se dirigeait vers la sortie de l'église. Endroit qui nous faisait déjà bien sentir qu'on y était pas les bienvenus depuis notre arrivée. Le soleil brillait dans la rue, mais un peu moins dans mon coeur qui n'avait pas encore été vidé, c'est bien ce que me proposait de faire Manwë pendant le chemin. « Ouais... Okay.. Sans jugement, hein. » avertis-je en pointant mon index. C'était pas comme si je pouvais contrôler ses pensées non plus. Dans sa tête, il pouvait bien se dire n'importe quoi, j'le saurais jamais. « Hum.. » commençai-je en fronçant les sourcils. C'est drôle, je m'étais rendu jusqu'à la petite cabine dans l'église sans jamais penser une seule seconde à ce que j'allais dire ni comment j'allais le dire. J'étais pas douée pour communiquer mes émotions, mes problèmes, tout ça. Alors mise devant le fait, je figeais un peu, pas trop certaine de savoir où commencer. Ça aurait dû être simple pourtant, surtout que j'le connaissais pas Manwë. « Pardon, j'fais pas ça souvent. » dis-je avec un petit rire nerveux. « Ouais donc eum j'ai eu un accident de voiture y'a quelques mois et j'ai eu une blessure. C'était ma faute, c'était mérité. » entrepris-je de dire rapidement, le but n'étant pas d'avoir quelconque pitié. « Y'avait d'autres gens d'impliqués dans l'accident, j'leur ai fait du tort et... J'vis pas trop bien avec les conséquences de mes actions. J'ai un peu l'impression d'être prise dans une tornade de mauvais choix et de mauvaises actions depuis. » tentai-je d'expliquer sans vraiment mettre le doigt dessus. « J'sais pas si c'est clair ce que je dis. » dis-je finalement en m'arrêtant. J'avais pas trop envie de dire non plus ''bonjour j'ai une p'tite dépendance aux antidouleurs qu'on m'a prescrit'' hein. Je jetai un coup d'oeil à Manwë, c'était peut-être trop d'informations pour une première rencontre. Ou trop personnel. J'avais un peu de mal à bien équilibrer ce genre de sujets.

“ Un peu… “ Qu’il répétait en y réfléchissant, c’est vrai que ça avait un côté un peu triste de se tourner vers un être religieux pour trouver une oreille attentive à défaut de n’avoir trouvé mieux. Il n’était néanmoins pas convaincu d’être une meilleure alternative, mais il s’était proposé en échange d’un p’tit service. Pas certain d’être accueilli chaleureusement au crématorium, lui, un mec bien peu aimé de Bowen… Pour bruler le cadavre d’une femme jugée tout aussi monstrueuse que lui. Pourtant, il avait pire que tuer son père, tuer son enfant. C’était ce qu’il pensait, mais qui était-il pour juger du degré de monstruosité de quelqu’un ? Alors, il hausse les épaules aussi.

Il sourit faiblement à la vue de cet index pointé. “ C’est ce que j’ai dis. “ Pas de jugement. S’il était capable de s’occuper d’la vieille folle de l’espace caravaning, il pouvait bien écouter les histoires de cette jeune femme. Il eut un long blanc, seul le bruit de leurs pas parvenaient aux oreilles du luthier, il glisse un regard interrogateur à la brune qui s’excusa de son hésitation. Il ne dit rien, mais se confier ce n’était clairement pas quelque chose qu’il savait faire non plus, alors il ne pouvait que comprendre ses difficultés à trouver les mots. Il ne fallait pas non plus attendre de sa part des encouragements, il patientait et laissait le temps faire. Et finalement, la sordide petite histoire lui fut contée.

“ Si c’est très clair… Tu crois avoir mérité ta blessure pour un truc que t’as fait sans faire exprès. Tu persuade que t’as le devoir de souffrir parce que t’as causé du tort à quelqu’un. Tu te punie en faisant des mauvais choix pour que tout l’monde te laisse tomber, parce que t’as peur d’faire du mal à quelqu’un d’autre. “ Il en avait pas l’air comme ça, mais c’était un homme perspicace qui en connaissait un rayon sur la peine, sur les gens en général par ailleurs. Il observait beaucoup, il avait l’habitude que l’on vienne le déranger quand ça va pas, et qu’on l’oublie quand les choses vont bien. “ Si seulement cette vieille conne avait eut un dixième de ta capacité à s’repantir, j’serai pas obligé de m’coltiner ses putain d'funérailles. “ Ouais, elle aurait probablement eut un entourage quelconque.

Le grand tatoué lâcha un soupire avant de planter ses yeux verts dans ceux de son acolyte d’église. “ J’sais pas c’que tu fais comme mauvaises actions, mais si l’prix à payer est trop douloureux… Pourquoi tu continues ? “ Il était perspicace, mais sa manière de lui parler était sans jugement, c’était même posé de manière à essayer de dénouer ce qu’il se tramait dans cette jolie petite tête. Lui assumait parfaitement les conséquences de ses actes, son isolement social et la perte de bien des gens qu’il aimait sincèrement. Il avait accepté le prix à payer, pour avoir tué un homme. Il vivait avec cette crainte d’être capable de recommencer, un jour, n’importe quand, sous le poids de la colère, de jamais retrouver la paix. Il acceptait tout ça, si c’était à refaire, il recommencerait. C’était toute la différence avec son accompagnatrice.

Si le silence s'était installé pendant quelques minutes, j'entrepris de le briser, finalement, après avoir trouvé un semblant de ce que je voulais dire. C'était pas spécialement que je voulais me confier, c'en était plus une nécessité à ce stade. J'étais dans une spirale, une pente descendante et un avis extérieur, c'était peut-être ce qu'il me fallait pour remonter. C'est qu'une partie de moi souhaitait continuer à s'enfoncer, mais une autre voulait m'en sortir, retrouver celle que j'étais avec l'accident. Fallait tout de même se rendre à l'évidence, ça n'allait pas être possible, pas exactement la même en tout cas. J'avais un peu l'impression que j'vivrais plus jamais naïvement ma vie, pensant que tout ne va que bien tout le temps. Pas en aillant connu cette noirceur qui pouvait m'habiter. D'ailleurs, se confier là-dessus, c'était pas évident, clairement pas ma spécialité alors si Manwë dû attendre un peu, c'était pas spécialement pour un discours extraordinaire, mais plutôt pour un speech décousu et hésitant. Et pourtant. Si j'croyais manquer de clarté, il arriva à mettre le doigt sur comment j'me sentais en l'espace de quelques secondes. Soit j'étais bien prévisible, soit il parlait d'un truc vécu. Ou c'était p'tête un genre de x-men qui peut lire dans les pensées aussi, who knows. « Vois-tu, je ne m'étais pas rendu jusqu'à ton dernier point, mais... Ça a du sens, j'imagine. » dis-je en fronçant les sourcils. J'avais pas été aussi deep dans mon raisonnement, pensant juste que j'méritais bien de m'être blessée et étouffant ma culpabilité dans l'oxy, mais... J'imagine que Manwë, il avait mis le doigt sur quelque chose. Sa remarque sur sa voisine me fit bien rire dans ce moment un peu trop sérieux à mon goût. « Ça m'encourage pour mes propres funérailles alors. » dis-je doucement en riant. Y'aurait du monde parce que j'étais capable de regretter mes erreurs, c'était positif. P'tête même que Manwë y serait aussi. Ça devenait plutôt dark cette journée dis donc, fallait pas que j'aille dans les églises trop souvent moi. J'savais pas ce que je cherchais en racontant tout ça d'ailleurs, peut-être à me faire dire que j'faisais la bonne chose, que continuer c'était la solution. Ou peut-être à recevoir un wake up call avant de toucher le fond et d'plus avoir d'oxygène. Une chose est sûre, Manwë, il ferait travailler mon cerveau avec ses questions. J'arrivai à soutenir son regard, mais la dernière qu'il posa me pris de court. En fait, je la savais la réponse, mais ça me faisait bizarre de la dire à voix haute. J'hésitai un peu avant de soupirer. « C'est que ça ne me semble pas douloureux. C'est comme si... Ça faisait du bien en même temps. » dis-je en plissant les yeux. C'était bien ça les effets de la drogue, te détruire avec un truc qui t'fait du bien, qui te fait croire que t'en as besoin. Je secouai la tête, pas si prête à parler de tout ça finalement. « C'est un peu fucked up ce que je te dis là, j'suis consciente. Pas certaine que j'aurais été jusqu'au bout de la conversation avec m'sieur le prêtre. » dis-je finalement, forçant un petit rire. « Pas certaine que j'ai envie d'aller jusqu'au bout là non plus. » ajoutai-je en grimaçant. Mais j'irai jusqu'au bout de l'entente, c'est-à-dire aller au crématorium avec lui.


t'en fais pas

Il connait ça, ce besoin de faire de la merde, de saboter sa propre vie, il était doué pour ça ; mais il en assumait les conséquences dont il était souvent le seul à en écoper. Il se doutait que la jeune femme à ses côtés n’aspirait pas à une vie aussi anarchique et solitaire. Le brun relève ses yeux clairs en direction du crématorium, ça pourrait donner des frissons à n’importe qui, ce genre d’endroit. Finalement, son regard vert se dirigea sur la brune et il lui adressa un léger sourire d’une douceur bienveillante qu’il ne témoignait qu’à bien peu de monde. “ Tu sais, tu n’es pas obligée d’aller jusqu’au bout… Au bout des mauvaises décisions que t'as commencé à prendre. Ni pour m’accompagner là-dedans, ça a l’air pas mal glauque en plus, hm ? “ Tout n’était qu’une question de choix, les bons et les mauvais, juste des choix, juste à essayer d’faire de son mieux. Manwë a essayé pendant bien longtemps, de faire de son mieux, malgré sa mauvaise réputation. A l’époque où il était innocent, on le jugeait déjà… Alors finalement, bien peu de choses ont changé. Du moins, avec les autres. Pour lui même, c’était tout à fait différent. Il se savait différent, il se savait capable de tuer et ça, c’était une lourde charge mentale… De savoir que l’on est assez fou pour franchir le cap, assez fou pour se venger en dépit de toute morale. Manwë avait longtemps pensé pouvoir lutter contre ça, mais sa haine avait gagné. Il ne valait probablement pas mieux que l’homme qu’il avait tué, dans l’fond… C’était ce poids là, qu’il se trainait, ce questionnement d’savoir de quoi l’on est capable mais plus qui l’on est.

“ J’saurais m’débrouiller, ça doit pas être si compliqué. C’était déjà pas mal d’avoir un peu d’compagnie quelques minutes, j’oublie un peu c’que ça fait des fois. “ Ce n’était pas pour faire pitié, juste sa manière de la remercier (ce qui n’était pas son fort, faire preuve de reconnaissance), parce qu’elle n’avait pas eu cette attitude que tous les autres ont à son égard malgré ses difficultés à se comporter normalement. Il n’avait jamais été doué pour ça, mais vivre reclus ne l’aidait guère à s’améliorer sur ce point. Il ne voyait aucune raison de faire des efforts, aucune. “ J’te dirais bien que c’te séance de… Confession ? Hm… Pourrait s’reproduire avec plaisir, mais j’vais seulement t’souhaiter bonne chance. “ Juste une aparté, néanmoins, Manwë avait une très bonne mémoire des gens et s’il la trouvait dans le pétrin un jour, comme c’est bien souvent l’cas parce qu’il avait le don de se trouver aux mauvais endroits au pire des moments, elle pourrait toujours compter sur son aide. Pour ce qui était de se croiser un jour futur dans une église. Définitivement non.