Please stay…. | Billie

Déjà plusieurs semaines qu’il est au centre. Il a perdu le compte, les jours se ressemblent et les minutes s’écoulent sans que rien ne change. Il a passé tellement de temps à regarder l’aiguille de l’horloge se promener, le tic tac incessant qui le rend fou… Le manque est encore trop présent, il sait qu’il n’est pas prêt de ressortir, il a encore trop de démons, trop de peur et de sentiments qu’il ne veut pas laisser sortir. Parce que s’il parle d’elle, il a peur de la perdre et que sa mort soit encore plus réelle, s’il parle d’elle il a peur qu’elle s’efface de sa mémoire et qu’il finisse par l’oublier. Les traits de son visage qu’il avait appris par cœur, le son de sa voix qui ne vit que dans son esprit… Il secoue la tête et demande à l’intervenante s’il peut aller dehors pour fumer. Jusqu'à il y a quelques jours, on ne le laissait pas sortir seul, on avait peur qu’il parte et s’évapore dans la nature, mais là, on lui fait un peu plus confiance et prendre l’air lui fait du bien, au moins il ne regarde pas le même mur blanc pendant des heures. On l’autorise à sortir, un membre du personnel sort aussi, mais il le laisse s’éloigner un peu. Detlev s’allume sa clope et marche dans les jardins, prenant l’air un peu, laissant le soleil lui chauffer la peau aussi. Ça lui fait tant de bien, il souhaite rester le plus longtemps possible dehors. Il devient fou enfermé dans sa chambre. Il s’installe sur un banc qui donne sur le côté, la vue sur l’entrée principale. Il s’amuse à regarder les gens qui viennent au centre, il finit par se lever et s’approcher quand il croit reconnaître la silhouette d’une jeune femme. Il ne sait pas s’il doit l’appeler ou ne rien dire, cette femme il la croiser à quelques reprises, toujours par le plus grand des hasards parce qu’il n’a même pas son numéro de téléphone. Ils ont échangé quelques mots, mais il ne se souvient pas de toutes les conversations, il ne devait pas toujours être dans le meilleur des états ! Pensif, il fume sa clope en la regardant, lui parlant mentalement pour qu’elle se retourne, qu’elle le remarque ? Est-ce qu’il a vraiment envie qu’elle voit qu’il n’est qu’un stupide junkie qui se ramasse en desintox ? Sûr un coup de colère, il donne un coup de pied sur la clôture qui tinte bruyamment. Un des agents qui est à l’extérieur lui crie dessus. « Si tu te calme pas Schröder, tu vas retourner à l’intérieur. » L’allemand tourne la tête dans sa direction et tire une taffe de sa clope qui lui brûle les doigts. Il n’avait pas remarqué qu’elle avait fini de se consumer. Il se retient de faire un fuck en direction du mec, puis reporte son attention sur la porte principale du centre. Est-ce qu’elle est encore là ?

Son premier dossier. Elle venait d’obtenir son premier dossier après quelques années à travailler dans son service. Ces collègues la prenaient toujours pour l’étudiante de service, mais elle avait enfin fait ses preuves pour avoir son premier dossier. Un dossier, certes pas facile, mais c’était le sien. Avant de partir du bureau, elle s’assura d’avoir toutes les informations nécessaires. Elle ne voulait pas se pointer au centre les mains vident. Une fois tous les informations et papiers annotés, elle quitta le bureau pour se rendre au centre de désintox. Ce n’était pas la première fois qu’elle y allait, elle y avait déjà fait un stage comme travailleuse sociale. Elle avait trouvé ça un peu difficile émotionnellement. Elle qui voulait aider tout le monde, ce n’était pas toujours facile de voir des patients en manque. Elle connaissait donc les lieux et les membres du personnel, mais elle n’avait toujours pas l’impression d’être à sa place. Aider une personne en manque qui ne veut pas de l’aide, ce n’est pas une simple affaire. Il faut prendre son temps, créer un lien de confiance et attendre qu’elle vienne à nous. Si on force les choses, c’est peine perdue. C’était ce que son enseignant lui avait dit lors de son évaluation de stage. Depuis, Billie avait retenu la leçon. Arrivée dans le stationnement du centre, elle resta dans sa voiture quelques minutes. Elle était prête, mais elle avait tout de même peur de ne pas y arriver. « Allez, Billie, tu vas y arriver ! ». Elle soupira puis descendit de sa voiture. Elle passa devant la cour entourée d’une clôture qui empêche les patients de partir. Elle observa s’il y avait du monde, mais personne. Elle continua son chemin vers la porte principale. Au moment où elle ouvrit la porte, elle entendit le bruit du grillage. Elle se retourna vers là cours et elle sembla reconnaître une personne. Une personne avec qui elle avait échangé quelques mots, mais sans jamais allée plus loin dans leur conversation. Elle l’observa quelques secondes puis entra dans le bâtiment. À l’intérieur, elle demande à voir un patient en particulier. Elle devait l’aidé à reprendre sa vie en main et se trouver un emploi. Malheureusement, on lui annonça qu’il n’était pas disponible. Qu’il était en crise. Billie soupira puis fit demi-tour. Elle pensa quitter le centre et retourner au bureau, mais décida finalement d’aller vers la cour avec l’approbation des responsables. Elle voulait voir si quelqu’un d’autre avait besoin de son aide ou simplement de lui parler. En réalité, elle avait reconnu la silhouette dans la cour. C’était lui et elle avait envie de lui parler, de le revoir et d’en savoir plus. Elle marcha à travers le centre puis poussa la porte qui donnait sur la cour. Elle salua le gardien puis avança de quelque pas. Aveuglée par le soleil, elle plaça l’une de ces mains au-dessous de ces yeux pour se protéger et l’observa quelques secondes avant de lui dire : « Salut... »

Il a trop de temps pour penser, réfléchir, se faire des idées et il n'aime pas ça. Il s’ennuie de l’action, de bouger, faire du sport, travailler… Il a l’impression que cet endroit va finir par le rendre encore plus cinglé. Entre les ateliers et les « réflexions » sur ses actions, sur les raisons qui le pousse à consommer. C’est une vrai horreur, parce que chaque fois qu’il se met à penser son esprit vrille et la douleur refait surface, cette putain de douleur qu’il voulait effacer. La rage s’empare de lui et il a envie de cogner, de consommer, de s’épuiser au point de tout oublier, tout sauf revivre les derniers instants de sa fiancée. Même y penser c’est trop pour lui, il en a assez du tic tac de l’horloge, assez des cris qu’on entend à tout heure du jour ou de la nuit. Des spécialistes à la vie parfaite qui essaient de lui faire croire qu’ils le comprennent… tsss foutaise. Il sait qu’il a un problème, il sait qu’il doit faire des actions pour s’en sortir, mais la dernière fois y’avait sa mère, y’avait Agnès, la y’a personne. Il est dans un centre, il ne sait même pas si Arielle va accepter de lui reparler après ce qu’il a pu lui balancer à la tronche ! Dehors il profite un peu avant de devoir retourner à l’intérieur, devant la stupide feuille blanche qu’on lui a donner pour qu’il se vide l’esprit. Il n’y arrive pas ! Il aperçoit une jeune femme qu’il connaît et il ne sait pas s’il a envie qu’elle le voit ici. Encore une autre personne qui va finir par le jugé alors que les mots qu’ils ont échangés à quelques reprises était agréable et simple. Coup de pied dans le grillage, le gardien qui l’avertit et voilà qu’elle s’est évaporée, elle n’est plus là. Il jette sa cigarette dans le cendrier, se tâtant pour en allumer une autre, il décide de marcher un peu, étirer son temps de sortie. Il a l’impression d’être en prison voilà. Il s’apprête à faire demi-tour quand il se retrouve nez à nez avec la jeune femme. « Hey… » Il hésite, surpris de la voir ici, de voir qu’elle est venue jusqu’à le rejoindre dans la cours. Il plisse les yeux en regardant autour avant de reporter son attention sur la jeune femme. « Je pensais pas te voir ici… » Ce n’est pas une mauvaise surprise, mais c’est inattendu. Il fait un signe de tête en direction du banc à quelques pas de la et va s’asseoir sur le banc. «Tu… Je… Tu ? » On va repasser pour un langage clair… « Tu fais quoi ici ? » Il regarde derrière elle, le gardien semble garder un œil sur lui. Detlev se renfrogne, puis fouille dans ses poches nerveusement. Il est un peu mal à l’aise.

La raison pour laquelle elle avait décidé de devenir travailleuse sociale, c’était parce qu’elle trouvait que ça lui irait bien. Avais-telle fait le bon choix ? Elle qui avait parfois un manque de confiance en elle ? Son écoute et son besoin d’aider son prochain était plus fort qu’elle et c’était devenu une évidence. Bien qu’elle ne fût pas la meilleur dans son domaine, elle voulait tout donner pour réussir. Elle avait bien réussi ces cours, son stage lui avait montré comment intervenir. Elle avait tout les outils pour réussir, mais par moment, elle se demandait si elle était la bonne personne. La bonne personne pour venir en aide. Ces pensées lui venaient en tête lorsqu’elle n’arrivait pas à forger un lien avec un usager, car oui, dans son domaine, on ne les appelait pas patient ou client, mais usager. Une personne qui utilise un service d’aide. C’était par respect. Si elle le pouvait, elle choisirait ces dossiers pour travailler avec les familles et le enfants, mais le système ne fonctionnait pas comme ça et elle n’avait pas assez d’ancienneté pour le faire. Après tout, c’était mieux ainsi. Cela la permettait de la confronté à ces limites et de savoir ce qui était bon ou mauvais pour elle. Bien sûr, son dernier dossier avait mal tourné, donc on lui donnait plus de cas de violence, mais elle s’y était mal prise avec lui. Enfin, elle avait mis ça derrière elle. Elle voulait aller de l’avant et tenter de réussir un jour à la fois. Au centre, elle pensait tourner les talons et rentrer au bureau, mais elle voulait le revoir. Ils n’avaient échangé que quelques mots, mais il l’intriguait. Il y avait quelque chose que la poussait à aller vers lui, à lui venir en aide ou simplement être présente pour lui. Arrivée dans la cours, elle ne savait pas trop comment l’interpeler, elle avait alors laissé sortir qu’un simple « salut... ». Très original. « Hey... ». Voilà un premier mot échangé. Tu attends de voir s’il veut te voir et te parler avant de faire un mouvement. « Je ne pensais pas te voir ici... » Bon, au moins, il n’est pas fâché de la voir là. « J’étais dans le coin... » Un petit sourire s’afficha sur son visage. Il lui montre alors le banc et l’invite à s’y asseoir, elle le suit, mais ne voulant pas le presser, elle le laisse entamer la conversation. « Tu... Je... Tu ? » Un large sourire réapparu sur son visage. Il semblait mal à l’aise de la voir. Elle reprit son sérieux et le laissa faire une phrase complète. « Tu fais quoi ici ? » Elle aurait voulu lui dire qu’elle était là pour lui, mais elle se ravisa. « Je devais voir une autre personne, mais je n’ai pas pu le voir. » Elle l’observa quelques instant avant de porter son attention sur le reste de la cours. « Est-ce que tu vas bien ? » Elle s’inquiétait pour lui, mais elle ne voulait pas le presser. S’il ne voulait pas s’ouvrir maintenant, ce n’était pas plus grave. Elle était patiente.

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Le passé finit toujours par nous rattraper, surtout quand on tente de le fuir. C’est le karma, il n’y a rien à faire. On passe par la case départ et on revient au tout début. Une chute, on tombe, on se fait mal, on se casse la gueule et on souffre. C’est un combat sans fin et il ne croit plus au happy ending parce qu’il y a toujours quelque chose quelque part qui n’attend qu’une chose, te frapper en pleine gueule pour que tu tombes à genoux, te faire fléchir. Ça en devient un jeu et quand tu n’as pas les bonnes cartes en main, tu perds à chaque fois. C’est ce qu’il commence à comprendre l’Allemand, il a mal et il souffre. Il a mal et parfois il aimerait bien mettre un terme à cette souffrance, pourtant parfois il y a des éclaircies dans le ciel noir. Une éclaircie blonde fait surface aujourd’hui dans ce centre, il a honte qu’elle le voit ici, peur aussi de la voir partir, il ne sait toujours pas ce qu’il pense d’elle, il ne sait pas si c’est une bonne chose de la revoir, pas pour lui, parce qu’elle lui fait du bien, mais il a peur de la noircir elle… Pourtant, elle est là, solaire et douce avec lui, elle est venue le voir, elle l’a donc reconnu au loin. Il ne sait que lui dire, pourquoi elle est dans le coin, qu’est-ce qu’elle vient faire dans un endroit aussi nul ? Son sourire l’apaise, il se sent un peu moins fébrile malgré le fait qu’il ne sait pas aligner trois mots de suite pour faire une phrase. Comme s’il en perdait son anglais, sa voix est rauque parce qu’il ne parle pas beaucoup depuis qu’il est ici. Il a un petit pincement au coeur quand elle lui dit qu’elle est venue pour un autre. Il ne sait presque rien d’elle, elle a peut-être un copain qui a sombré lui aussi dans les affres de la drogue. Il hoche la tête, les lèvres pincées, ça explique ce qu’elle fait ici, c’est clair. Il la regarde un instant alors qu’elle regarde au loin avant de se prendre une autre cigarette qu’il porte à ses lèvres, son regard dérivant vers un point invisible sur l’horizon. “Pas vraiment… Je le mérite j’imagine… Après tout, on récolte ce qu’on sème non ?” Il ne sait pas pourquoi il le lui dit, pourquoi il s’ouvre un peu à elle. Qu’est-ce qu’elle peut en avoir à faire de comment il va ? Normalement, il aurait dû répondre que oui ça allait, mais le mensonge était beaucoup trop gros pour être crédible. Après tout, on ne vient pas ici parce que tout va bien. “Je suis pas quelqu’un de bien Billie, tu devrais pas rester ici pour moi… ” Il est prêt à repousser tout ce qui peut lui faire du bien.

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S’inquiéter pour les autres était dans sa nature. Elle avait toujours été ainsi. C’est peut-être pour ça aussi qu’elle en portait aujourd’hui les cicatrices sur son corps. Elle s’était inquiétée pour la mauvaise personne et voilà ce qui était arrivé. Seulement, elle n’a pas changé pour autant. Elle aime s’occuper des autres, prendre soin d’eux, se préoccuper de leur santé. Un jour ça la perdra, mais pas aujourd’hui. Elle apprend doucement de ces erreurs et tant du mieux qu’elle le peut d’éviter de les reproduire. La patience, voilà ce qu’on lui avait appris. Elle devait être présente, mais surtout patiente avec les autres. Il ne fallait pas leur mettre la pression. Elle en connaissait maintenant les conséquences. Enfin, aujourd’hui, elle tentait d’oublier ce passé douloureux. Elle avait passé proche de la mort, mais la voilà en vie. Rien n’était plus important pour elle maintenant que vivre sa vie pleinement et surtout au jour le jour. Le présent, c’est ce qui compte dorénavant. Detlev est ce qui est important. Ils avaient échangé que quelques mots lors de leur première rencontre, mais elle avait vu en lui une possibilité de reprendre sa vie en main. Elle était certaine qu’elle pouvait l’aider. En faisait-elle sa mission ? Était-ce étrange de vouloir aider une personne aussi fort ? Peut-être y avait-il autre chose derrière. Non, elle ne voulait pas être une quelconque sauveuse, mais elle voulait aider les gens. Elle voulait l’aider lui à aller de l’avant. Quelque chose en lui faisait qu’elle n’arrivait pas à l’oublier. Plus elle passait du temps avec lui et plus, il était présent dans ses pensées. C’est sans doute pour cela, que lorsqu’elle l’avait aperçu au loin, elle avait décidé de rester au centre au lieu de retourner au bureau. Certes, elle était venue pour un autre, elle était restée pour lui. Elle voulait profiter de chaque occasion de passer du temps avec lui. « Tu sais, la cigarette aura ta peau si tu continues » Elle ne disait pas ça pour mal faire, c’était simplement spontané et puis tout le monde sait que la cigarette tue... Elle lui fit un sourire en coin, déposa ces mains sur le banc et commença à balancer ces jambes comme une petite fille. Elle profitait du soleil de sa présence. Pas besoin de parler. Le simple fait d’être à ces côtés était déjà bien. Elle lui avait demandé comment il allait, simple formalité et il lui avait répondu quelque chose qui sonna dure aux oreilles de Billie. « J’ignore ce que tu as vécu Detlev, mais tout le monde a droit à une seconde chance. » Ce n’était pas moralisateur, simplement ce qu’elle pensait vraiment. Il rajouta qu’il n’était pas quelque de bien. Et puis quoi encore. « Ça c’est à moi d’en juger, tu ne crois pas. Que tu sois bien ou non, mon choix est de rester à tes côtés... » Wow, elle venait de dire quoi ? Qu’elle voulait rester à ces côtés ?

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Longtemps, il a essayé d’avancer seul, longtemps, il a cru qu’il pourrait tout vaincre jusqu’à ce qu’il frappe ce putain de mur. Mur qu’il avait déjà croisé plus jeune, il avait oublié à quel point il avait pu perdre des plumes dans cette game. Maintenant, il devait reprendre sur lui, mais il n’était pas certain d’avoir la force de le faire. Il ne savait pas si ça valait vraiment la peine. Ne serait-il pas mieux de retourner en Allemagne et se laisser dépérir encore et encore ? Non, il ne pouvait pas y retourner, là-bas, il y avait beaucoup trop de souvenirs d’Agnes. Trop de douleur encore. Pourquoi en un an ou presque il n’a toujours pas avancé ? Il était censé reprendre le contrôle de sa vie en venant ici ! Il espérait avoir une relation avec son demi-frère et sa demi-soeur, mais rien, aucun des deux n’avaient vraiment voulu de lui dans leur vie… Des amis, il s’en était fait deux très bon, Orso et Arielle, ils sont devenus sa famille. Puis, il a quand même fait d’autres rencontres au cour de cette dernière année, dont la demoiselle qui est à ses côtés actuellement. Pour vrai, cette dernière est vraiment une surprise, il ne pensait pas qu’elle voudrait le voir, encore moins maintenant qu’il est ici. “Autant savoir qui aura ma peau… La cocaïne aussi aurait fini par l’avoir… ” Il n’avait plus les effets physiques du manque, le cold turkey il l’a affronter, mais ça l’empêche pas de se sentir quand même comme une petite merde. Il tire une taffe sur sa clope, recrachant la fumée loin du visage de la jeune femme, son regard se porte sur elle et il souri, trouvant mignon de la voir se balancer les jambes comme une jeune gamine. Il répond aussi à sa question, honnêtement, peut-être trop pour le peu qu’il la connaît, mais il a peur de sa propre personne, il ne se fait pas confiance et il ne voudrait pas faire du mal à quelqu’un, même de manière involontaire. Il avait dit des choses horribles à son amie quand elle l’a conduit ici, la drogue a parlé pour lui, il ne voulait pas faire la même chose à quelqu’un d’autre. “Humph…” Pour lui ce n’est plus une deuxième, mais bien une troisième et même plus encore si on se souvient des conneries qu’il faisait plus jeune. Il est surtout étonné par le reste de sa phrase, il se tourne vers elle et ne sait pas trop quoi dire, il est surpris et ça le touche en plein coeur. C’est en plein le genre de réflexion que Agnes aurait pu lui faire dans le temps. “C’est un choix que je ne suis pas certain de comprendre, mais oui, c’est ton choix… ” Il pince les lèvres, touché par cette révélation, plus que de raison, mais ses émotions sont à fleur de peau ici. Tout semble beaucoup plus intense. “Est-ce que c’était un ami que tu venais voir ici ? Parce qu’il me semble qu’on a pas vraiment le droit aux visites non ? ” En tout cas, lui on ne lui a jamais parlé qu’il pouvait avoir de la visite, ils sont ici pour guérir d’un mal invisible.

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Elle avait déjà pensé à changer d’emploi. Beaucoup disait d’elle qu’elle n’avait pas l’étoffe d’une bonne travailleuse sociale. Qu’elle était trop douce, trop solaire pour venir en aide à des personnes qui ont sombré ! Pourtant, elle est toujours là, fidèle au poste. Elle continue tout de même de penser à changer de domaine, aller vers quelque chose de moins dur, mais il n’est pas encore rendu là. Son père aimerait la voir dans le domaine médicale, mais elle ne supporte pas la vue du sang. Elle ne ferait pas un bon médecin. Pourtant, son père ne perdait pas espoir de la voir un jour changer de métier. Billie ne voulait pas, elle était entêtée de continuer d’aider les gens de cette manière. Un jour peut-être, changera-t-elle, mais pas maintenant ? Le passé était le passé. Son agression avait certes changé sa vision des gens, mais elle ne voulait pas baisser les bras aussi rapidement. Elle devait au moins essayer. Elle est ni arrivait pas à Detlev, alors elle changerait de domaine. Avec lui c’était différent. Tout était différent. Elle arrivait à voir la vie différemment, elle pouvait être elle-même, être tout simplement Billie. Elle devait au moins essayer. Elle se l’était promis. Quand Detlev lui parla de la cocaïne, elle retenir un regard triste. Elle savait qu’il était dans ce centre pour cette raison, mais l’entendre le dire de cette manière la rendait triste. « Ne dis pas ça s’il te plait... » Dit-elle dans un murmure ? Son sourire avait quitté son visage pour laisser place à une expression de tristesse. Bien qu’elle soit de nature positive, il y avait certain moment où elle se laissait envahir par ces émotions et n’hésitait pas à les montrer à ces interlocuteurs. Les secondes chances, ce n’est pas tout le monde qui y croit, mais elle oui. On parle de seconde chance, mais parfois, il arrive qu’il y en ait plus. Il faut toutefois faire attention, car un jour l’élastique lâchera. Elle ne connaissait pas le passé de Detlev et ça lui était égal. Elle connaissait le Detlev d’aujourd’hui et ça lui suffisait. Elle avait même été surprise de sa réponse lorsqu’elle lui avait dit qu’elle avait choisi de rester à ces côtés. Elle était mal à l’aise maintenant, elle se sentait encore plus petite que d’habitude. « Euh... » Voilà tout ce qu’elle avait réussi à articuler pour l’instant. Heureusement, il changea rapidement de sujet en lui demandant ce qu’elle faisait vraiment ici. « Je devais venir voir une personne pour un dossier. J’aurais pu partir, mais j’ai voulu te rendre visite. En tant que professionnelle, je peux me déplacer dans le centre, mais je suis venu te voir à titre personnel. »

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Il ne devrait pas écouter cette petite voix qui lui parle sans cesse dans sa tête. Cette voix qui n’a de cesse de lui rappeler qu’il aurait pu faire mieux, qu’il a tout fait rater. Qu’il n’aurait même pas dû venir au monde en fait. Qu’il n’était qu’un accident de parcours. Au fond de lui, il se dit que sa mère aurait été mieux sans lui, que son géniteur n’avait pas spécialement envie d’un enfant de plus. Que Stacy et Alex étaient bien sans lui dans le portrait. L’accumulation de toutes ces idées lui font voir le côté négatif de tout, il est dur avec lui-même et il ne s’aide pas à aller mieux en écoutant cette voix. Il veut juste trouver le moyen de la faire taire, la drogue l’aidait, mais sans… il faudra travailler son mental. Son regard soucieux rejoint les prunelles de la blonde. D’un vert hypnotisant, il tente de ne pas se perdre trop longtemps dedans. « Je ne cherche pas à me faire partir avant le temps, si ça peut te rassurer. » Même s’il est conscient qu’il ne risque pas de faire de vieux os, pas avec ce qu’il a pu faire par le passé et sa manière de vivre. Que ce soit les combats ou la drogue… Il court parfois après son châtiment. Il n’aime pas voir son visage triste, une fille comme Billie ne devrait pas ressentir de tristesse, du peu qu’il connaît d’elle. Un petit rayon de soleil. Il tenta un petit sourire et un clin d’œil pour la rassurer. Il change de sujet, essaie de comprendre la raison de sa présence ici. Il se replace sur le banc, se laissant glisser un peu ses longues jambes bien étendues devant lui. Il est curieux de comprendre la raison de sa présence ici. Ce n’est pas le genre d’endroit qu’on visite pour le plaisir non plus. Elle semblait un peu mal à l’aise, il ne savait pas trop pourquoi. Si au premiers abords il fronce les sourcils avant que son expression s’adoucisse. «oh… » ses joues prirent une teinte plus rosée et il tire une taffe sur sa clope pour essayer de ne pas montrer son malaise. Il est timide. « Tu me vois un peu sous mon pire angle… c’est pas anglais dit comme ça non ? Tut mir leid, désolé… » Il secoue la tête, il est pas sous son meilleur angle, mais en même temps, il est vrai… vulnérable comme un bébé chat. « Quand je sortirais, tu me laissera te cuisiner un truc ? » Il ne peut rien faire ici, mais il apprécie sa visite, qu’elle prenne du temps pour lui.

Elle était là, à se balancer les jambes comme une petite fille au lieu d’être au bureau. Elle n’avait pas envie d’y retourner. Si elle avait le choix, elle resterait assise sur ce bas pour le restant de la journée. Au lieu de continuer à travailler, de rentrer et lire des dossiers, rencontrer des usagers, elle avait décidé de rester sur place. Elle voulait être avec lui. Avec lui, c’était si simple, mais à la fois compliqué. C’est ce qui l’attirait vers lui sans doute. Le fait qu’elle n’arrivait pas à le comprendre. « Je sais que tu resteras jusqu’à la fin, mais je tenais quand même à passer te voir. » Dit-elle en le regardant dans les yeux ? Elle détourna le regard pour contempler l’horizon fade. Comment pouvaient-ils réussir à survivre à cet enfer dans un endroit qui ressemble à une prison ? Alors qu’elle était triste, Detlev tenta un petit sourire et un clin d’œil ce qui la fit rire. Bien que ce fût forcé, elle comprenait qu’il faisait ça pour elle. Elle devait partir. Enfin partir bientôt. Elle ne pourrait pas rester indéfiniment avec Detlev, sinon son patron se demanderait pourquoi elle met autant de temps à conclure un dossier. Déjà, qu’elle n’avait pas pu rencontrer l’usager en question, elle aurait dû rebrousser chemin et retourner au bureau pour expliquer la situation. Au lieu de ça, elle avait préféré rester au centre et rendre visite à Detlev à titre personnel. Elle lui avait même dit qu’elle était venue le voir d’elle-même. Que pouvait-elle faire, fuir ?  Maintenant qu’elle lui avait dit ça, elle ne savait plus où se mettre. Dire quelque chose comme ça, laisse comprendre qu’il y a peut-être autre chose derrière ces simples mots. D’autres sentiments. Elle chassa rapidement ces pensées pour se concentrer sur le moment présent. C’est la voix de Detlev qui l’a ramené au présent. Il avait sans doute compris ce qu’elle voulait dire puisqu’il avait changé d’un coup. Son teint plus rosé. « Ton pire angle ... ? » Elle se mit à rire, car oui en effet, c’était drôlement dit, mais elle comprenait ce qu’il voulait dire. « Ne t’en fait pas, j’ai déjà vu pire, tu sais. Pour moi, je trouve que c’est un bon jour... » Elle lui fit un sourire en arrêtant de se balancer les jambes et se leva. Elle fit quelque pas et se retourna rapidement lorsqu’il lui fit une drôle de proposition. « Me cuisiner un truc ? Tu m’invites à diner ! » Wow, était-ce une déclaration ? Billie se calma et lui tourna le dos en faisant mine de réfléchir. « D’accord, mais à une condition. Tu me laisseras t’amener quelque part ? »

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Il la trouve mignonne, elle dégage une innocence et une douceur qui sont tellement rafraîchissantes dans ce monde sombre. Detlev a du mal à voir le bon côté de la vie, il a trop de fois été déçu, trop de fois blessé. Pourtant, il y a encore des personnes comme elle. « Ta visite me réconforte… » Il ne sait que dire de plus, il est touché, à la limite d’être ému, qu’elle soit la, pour le voir lui. Parce qu’elle voulait prendre de ses nouvelles alors que le fait qu’il soit dans ce centre devrait suffire à la faire dégager à toute vitesse. Elle ne semble pas effrayée par lui, ni même dégoûtée de le savoir aussi faible. Faible devant cette drogue qui le contrôlait jusqu’à récemment. Le silence avec elle n’est même pas dérangeant, c’est étrange comme sentiment. Il veut la connaître plus, en apprendre plus sur elle. Qu’elle lui décrit sa façon de voir la vie, peut-être que son avis à lui changera ? Il a l’impression de lui montrer une facette de lui qui ne lui ressemble pas, qui n’est pas avantageuse. « Si je suis ici, c’est quand même parce que je n’ai pas su dire non à la drogue. Qu’elle avait pris le contrôle de ma vie… » il tire une nouvelle latte de sa clope. Puis lui propose de cuisiner pour elle quand il sortira de cet enfer, il veut la voir dans un autre contexte, lui montrer ce qu’il est quand il n’est pas en manque ou affecté par la drogue. « Seulement si tu veux. » il est gêné d’offrir ça comme ça, mais en même temps, c’est une opportunité pour lui de passer plus de temps avec. Il s’ennuie d’être chez lui dans l’appart de l'entourage, de cuisiner, d’être avec Orso et Arielle. « M’amener quelque part ? Tu m'intrigues, mais oui, avec plaisir. Tu veux que je te laisse mon numéro ? »  est-ce qu’il a une chance avec elle ?

Elle le trouvait de son goût c’était indéniable. Il avait ce je-ne-sais-quoi qui faisait qu’elle avait toujours l’envie d’être à ces côtés. Est-ce ce sentiment du sauveur qui parlait, est-ce parce qu’il était au plus bas qu’elle voulait être là pour lui ou c’était simplement parce qu’il lui plaisait. Avec lui, elle était comme une enfant, est-ce mal ? Plusieurs questions en tête, mais aucune réponse. L’important c’était de vivre le moment présent et de profiter de chaque moment qu’elle pouvait avec lui. Si elle le pouvait, elle ferait en sorte de profiter de chaque occasion, mais elle ne voulait pas non plus avoir l’air de la fille qui le harcèle. Enfin, pour l’instant tout se passait bien. Quand elle avait décidé de venir le voir, elle ne pensait pas qu’elle resterait avec lui aussi longtemps. Pourtant, il aimait sa présence. Il lui avait même dit. « Ma présente te réconforte ? Alors, devrais-je venir plus souvent ? » Elle voulait être là pour lui, sans trop lui mettre la pression. Elle ne voulait pas le faire fuir non plus. « Enfin seulement si tu veux... » Elle continua à le regarder, ne pouvant détourner le regard. Elle voulait en savoir plus sur lui, mais elle ne voulait pas lui mettre la pression. Il lui parlerait lorsqu’il serait prêt à le faire. « Si tu es ici, c’est parce que tu veux t’en sortir, pas l’inverse. Tu fais ce qu’il faut pour avancer, pour avoir une meilleure vie, Detlev. On a tous nos moments de faiblesse, mais lorsqu’on le reconnait, c’est le premier pas vers la guérison. Tu vas t’en sortir, tu es fort. » Billie retourna s’assoir à ces côtés et lui pris la main. Voyant la gêne qui s’installait, elle lâcha la main et ce remit debout. « Bien sûr que j’accepte pour le diner. » Il venait de l’invité, mais en échange, elle voulait l’amener quelque part. Dans un endroit qui pourrait lui plaire. « T’inquiète, c’est en endroit que tu devrais apprécier. » Elle sortit son téléphone de sa poche arrière puis lui tendit. Comment pouvait-elle refuser son numéro de téléphone. C’était quelque chose qu’elle attendait.

Billie est une jeune femme qui semble attachante et si douce, calme et paisible. Une jeune femme avec le coeur sur la main. Je ne peux nier que je la trouve jolie et de mon goût, mignonne et tout ce qui va avec, mais… Elle me rappelle tellement Agnes, pas tant physiquement, mais ce qu’elle dégage me fait irrémédiablement penser à cette fiancée perdue il y a un an. Ses mots qui sont doux, cette manière de vouloir prendre soin de moi à sa manière, je suppose… N’empêche que la noirceur de mon âme ne colle pas vraiment. Suis-je une bonne personne pour elle dans son entourage ? J’en doute fortement. J’aimerais ne pas me poser de questions, me laisser aller les yeux fermés, oublier cette peur qui vit en moi depuis la perte d'Agnès… Cette certitude que c’est de ma faute, que je ne mérite pas le bonheur. “Je… ” suis incapable de répondre à sa question, je voudrais qu’elle vienne plus souvent oui, j’aimerais la voir davantage, mais ce n’est pas la place pour elle, je suis encore fragile. “... ne sais pas si c’est possible… ” Que je termine happé par son regard magnifique, je suis chacun de ses mouvements, la fixant sans relâche et ses paroles me transperce, comme des lames chauffée à blanc, entrant dans mon coeur, sa voix, sa vision se superpose à mes souvenirs et je sens la panique qui me gagne… Du bist stark, Detlev. Du verdienst das Beste… ces mots résonnent encore au fond de moi et je me perd pendant un moment, restant à moitié concentrée sur ce qu’elle me dit et machinalement je prend son téléphone et entre mon numéro pour le lui rendre. Il y a quelque chose en moi qui ne va pas, comme une cassure et je sens une douleur sourde du plus profond de mon être. Incapable de parler, je me redresse et fait quelques pas pour m’éloigner d’elle, le malaise grandit en moi et je retiens autant que possible l’expression de mes émotions, ne voulant pas craquer devant elle, elle n’a pas besoin de voir ça. Je tremble et je serre les poings pour essayer de camoufler le tout. Ma respiration s’est accélérée et je sens un pincement au coeur, un brûlement, cette impression de mourir. Cette gentillesse qu’elle me montre ne fait qu’accentuer ce mal. “Billie… Tu devrais partir… ” Que j’arrive difficilement à articuler, dos à elle, la main contre ma poitrine, le souffle court. Il ne faut pas qu’elle me voit comme ça… Même si au fond, j’ai pas envie qu’elle parte.

Tu aurais sans doute passé la journée avec lui si tu avais pu, mais le boulot t’appelait. Tu devais retourner au bureau faire ton rapport et passer au prochain dossier qui trainait sur ton bureau. Tu voulais arrêter le temps, profiter encore de ce moment avec lui. Seulement, pour lui, tu n’étais qu’une ami ou même intervenante qui allait et venais pour voir des usagers. Enfin c’est l’idée que tu te faisais. Peut-être que tu te faisais des idées, mais il lui arrivait aussi de te laisser croire qu’il pouvait y avoir plus. Tu voulais revenir plus souvent, mais il n’avait pas l’air de vouloir. À chaque fois que tu faisais un pas vers lui, il reculait de deux. Tu lui avais pris la main et la gêne était montée. Aussitôt, il t’avait dit qu’il se pouvait que tu ne puisses pas venir le voir. Était-ce un sous-entendu ? « Oh... » Tu savais que tu pourrais t’informer pour savoir et qu’en tant qu’intervenante tu pouvais venir, mais peut-être qu’il ne voulait pas que tu reviennes le voir. De nouveau sur tes pieds, tu fils quelques pas avant de te retourner pour lui tendre ton téléphone. Il t’avait demandé ton numéro de téléphone et tu n’avais pas hésité. Avais-tu le droit de lui donner ? Après tout il était usager du centre et toi intervenante. Est-ce que cela entrait en conflit ? Dans tous les cas, ça t’était égal, car de cette manière tu pourrais garder contacte avec lui et t’assurez qu’il va bien. Une fois ton téléphone récupéré, tu lui envoies un message afin qu’il puisse avoir ton numéro en retour. « Je viens de t’écrire. » Ton humeur avait un peu changé, moins joyeuse qu’au début, tu commençais à déprimer intérieurement. Le sourire sur ton visage s’effaçait peu à peu. Tu voyais bien qu’il n’allait pas bien. Il s’était même levé pour s’éloigner de toi. Au moment où tu voulus t’approcher de lui, il te dit que tu devrais partir. « Detlev... » Tu soupiras puis te dirigea vers la porte. Avant d’être trop loin, tu te retournes pour l’observer un instant. « Je suis désolé... » Pourquoi tu étais désolé ? Désolé d’être présente, désolé de lui faire du tord ? Désolé d’être toi ? Tu ne le savais pas, mais c’étaient les mots qui t’avaient traversé l’esprit à ce moment précis.

HS : j’ai changé ma manière d’écrire, j’espère que ça ne te dérange pas !