You know you need a fix when you fall down + Norasher

S’il y avait une chose que peu de gens connaissaient d’Asher, c’était la souffrance quotidienne qu’il subissait. Tout son corps qui lui faisait mal, quasi constamment. Il savait parfaitement d’où ça venait, plus de vingt ans à se faire frapper presque quotidiennement, son corps mis à rude épreuve, les coups, généralement violents, jour après jour, année après année. Il était évident que ça laissait des traces, des blessures, des hématomes, les muscles fatigués, les articulations usées. Il savait que c’était le prix à payer pour une si belle carrière, pour les victoires et la gloire, alors il serrait les dents, il n’en parlait pas, ou très peu. Parfois, il grimaçait, notamment lorsqu’il ressentait la douleur se réveiller dans une épaule, une jambe ou son dos, quand il retapait sa maison. Ça non plus n’aidait pas, il le savait bien, mais cette rénovation, c’était son exutoire à lui, sa petite fierté personnelle, son nouveau but dans la vie. Alors, il ravalait sa douleur et il avançait. Jusqu’à ce qu’il ne puisse plus. Depuis trois jours, il était assailli de migraines, elles le mettaient suffisamment à terre pour qu’il reste enfermé dans sa chambre, rideaux fermés pour faire le noir, priant des dieux auxquels il ne croyait pas pour que ça passe. Quand la douleur s’était suffisamment calmée, il avait appelé son médecin, qui l’avait envoyé faire pas mal d’examens toute la journée. Et en cette fin de journée, il en ressortait avec un épais dossier sous les bras, un rendez-vous chez un médecin du sport, mais rien de concret pour soulager sa douleur. Sauf si la prescription était de bouffer tous ces foutus papiers ! Il était en colère, contre son corps qui lui faisait payer, à raison, ses années de mauvais traitements. En colère également contre les médecins qui n’étaient pas fichus de lui donner une boite de calmants autre que de l’ibuprofène, simplement parce que le diagnostic final n’avait pas été posé. Mais lui, il le savait, il n’était pas stupide, pas besoin d’avoir fait dix ans d’études pour comprendre qu’il était cabossé, que les coups répétés sur sa gueule l’avaient affaibli et qu’à présent, il ne pourrait pas vivre sans subir sa peine. Excepté si on lui donnait un bon traitement de cheval. Pourquoi pas après tout, avaler quelques cachets pour se sentir mieux, qu’est-ce que c’était au fond ? Le prix à payer n’était pas si élevé. Il marchait la tête enfoncée dans le col de sa veste, son éternelle casquette vissée sur la tête, à ruminer son échange avec le médecin, quand il bouscula une personne. Il releva sa tête renfrognée, il n’avait pas fait attention, c’était une jeune femme et au passage toute sa mallette s’était ouverte sur le sol, libérant des boites de médicaments qui se faisaient la malle. Fucking hell ! Qu'il râla avant de se reprendre. Excusez-moi, je n’ai pas fait attention. Il grimaça, en vérité Asher n’était pas un mauvais bougre et cette blonde ne lui avait rien fait. J’vais vous aider. Il baissait déjà douloureusement pour ramasser ses bêtises.

@Nora Walsh

L’ex-boxeur se serait bien passé d’une journée entière passée à l’hôpital. Il était passé par beaucoup de services et de salles différentes, on lui avait des prises de sang, un bilan ophtalmologique, scanner, IRM, test d'effort, électrocardiogramme et j’en passe. Un véritable check-up des pieds à la tête. Il avait la chance d'avoir un médecin qui savait remuer dans les brancards et lui avait obtenu des rendez-vous à la chaîne. Les premiers examens étaient revenus plutôt normaux. Pas de maladie, rien d’alarmant, rien qu'il ne sache pas déjà. À savoir, l’usure précoce de son corps à force de le surmener, de lui en demander plus et plus encore, durant des années. Quelques autres résultats devraient tomber dans les prochaines semaines et avec tout ça ils pourraient décider d'un protocole avec le médecin du sport et son généraliste. Mais en attendant, il devait prendre son mal en patience. Le problème étant qu'il souffrait, là aujourd'hui. Et qu'il était un homme, de ceux qui n'avaient aucune patience avec la douleur. Alors ça le rendait fou de se dire qu'il n’avait rien pour le soulager. Asher n'avait jamais abusé des traitements, de par son hygiène de vie de sportif de compétition, il avait toujours fait très attention aux médicaments qu'il ingurgitait, surtout les anti douleur. Mais à présent sa carrière était derrière lui et il aspirait à vivre avec le moins de souffrance possible. Il estimait qu'il avait droit à un peu de repos, cependant ce ne serait visiblement pas pour ce soir. Alors il était d'humeur maussade en quittant l’hôpital. Et le fait de bousculer cette personne le fit râler. Il aurait pu la planter là et la laisser ramasser des foutues boîtes toute seule. Mais au fond il n'était pas comme ça, il n'était pas méchant et pas du genre à faire payer sa souffrance à la terre entière. Alors il se baissa pour l’aider, s’excusant déjà. La jeune femme s'excusa également, à tous les deux, ils n'en avaient pas fini, visiblement ils étaient tous les deux maladroits. Tandis qu'il se saisissait des boîtes, sans trop faire attention à ce qu'elles contenaient, il remarqua par contre qu’elle le dévisageait, cherchant clairement où elle avait pu le voir. D’ordinaire il aurait été flatté, aujourd'hui il n'était pas tellement d’humeur. Et quand elle énonça son patronyme en entier, comme une bonne élève, Asher grogna. Bien vu, enchanté. Tenez, c’est à vous. Il lui tendit les boîtes, prêt à se barrer.


@Nora Walsh

Avant le procès, avant que tout ne s'écroule, Asher était toujours sympa avec les fans. Il prenait toujours du temps pour faire des photos, signer des autographes, avoir un petit mot gentil. Il fallait avouer que c'était agréable et puis il n’était pas non plus l’homme le plus célèbre au monde, loin de là, il avait sa petite côte de popularité, mais ce n’était pas invivable. Alors autant en profiter et entretenir son capital sympathie. Aujourd'hui tout était différent, avec les accusations, étrangement, il avait gagné en visibilité, malheureusement pas des meilleures. Beaucoup d’inconnus s’étaient mêlés à cette affaire, chacun avait son opinion non sollicité. Entre ceux qui étaient de son côté et voulaient lui donner des conseils, ceux qui étaient contre lui et se montraient sacrément virulents. C'était rapidement devenu invivable, d'où son envie de quitter New-York. Malheureusement il avait dû attendre la fin du procès et que le jugement soit rendu. Ç'avait été long, ça l’avait brisé. Aujourd'hui il ne voulait plus de la célébrité, il voulait retrouver la tranquillité, être monsieur tout le monde. Il avait plutôt bien réussi jusque-là, le fait est qu'on ne s'attendait pas à croiser un champion de boxe à Bowen ! Mais cette fille, là, elle le croisait clairement dans un mauvais jour. Ce n'était pas de sa faute, elle n’avait rien fait de mal. Évidemment elle prit la mouche, ça semblait tout naturel et Asher ne s’en formalisa pas trop. Au pire elle penserait que c’était un sale con qui prenait les gens de haut. Ce serait une erreur mais elle ne serait pas la première. En plus, il n'avait pas raté le bruit de tissu qui se déchire, il n'osa pas la regarder, de plus en plus mal à l'aise. Ils allaient se séparer et ne plus jamais se revoir, ce serait pour le mieux. Le boxeur commençait à se retourner quand entendit cet homme dans leur dos. Rien de tout ça ne le concernait cependant un truc dans la voix du médecin ne lui plaisait pas, ni le regard qu'il aperçu sur la jeune femme. Clairement cet homme avait une idée en tête. Ash failli répliquer quelque chose mais la blonde sembla bien se débrouiller toute seule. Finalement, le quarantenaire passait juste pour un voyeur et il se sentit con. Une fois le médecin repartit, mademoiselle Walsh s'excusa auprès du boxeur. Il la fixa d’un air interdit avant de réagir. C'est moi qui suis indiscret là. J'me trompe où c'est un vieux con celui-là ? C’est quoi votre job pour qu'on vous prenne pour un morceau de viande ? Ce genre de vieux vicelard le dégoûtait carrément et même si elle avait semblé bien se débrouiller, ça n’enlevait pas que l'autre n’avait pas à parler ni à la reluquer ainsi. Il osa un regard sur sa jupe, il pouvait deviner l'endroit où elle s'était déchirée alors il retira son gilet à capuche et le lui tendit. Tenez, mettez ça autour de votre taille. Ça allait devenir une habitude, qu'il passe ses vêtements aux filles en détresse !



@Nora Walsh

Ce n'était pas le bon jour, il fallait l’admettre, après plusieurs jours de migraine intense et alors que l’épisode n'était pas terminé, Asher n'avait pas envie d'être sympa. Ou du moins il voulait qu'on lui foute la paix. Alors il fallait avouer qu’il n’avait pas été le plus amical avec cette fille, de prime abord. Mais quand la situation se retourna, mettant la blonde dans une position indélicate, le boxeur ne se voyait pas une seconde la laisser dans l’embarras face à cet homme. Alors il resta là, comme s'il avait vraiment pu faire quelque chose. En tout cas, il s'était radouci, ce qui était déjà positif. Une fois le vieux pervers reparti, Asher s’inquiéta pour la jeune femme. C’est le job qui veut ça ? C'est pas vraiment acceptable, il me semble. Bah ouais, c’était facile à dire pour Asher, qui ne bossait pas dans la branche, qui était un homme, qui était assez imposant pour qu'on ne vienne pas le chercher, d'une façon ou d’une autre. Drogue légale qu'elle disait, il aimait bien le terme. Il n'aurait pas été contre lui acheter son stock d’ailleurs, là, si ça pouvait le soulager. Le boxeur retira donc sa veste pour la donner à la blonde, un geste qu'elle semblait apprécier, son sourire avait retrouvé sa chaleur. Mal jugé ? Il haussa les épaules. Elle avait eu affaire à un Asher peu plaisant, ce n'était pas étonnant. La suite le surprit davantage. Walsh l’invitait à prendre un café. En temps normal il aurait hésité mais peut-être fini par accepter, après tout, à Bowen il ne risquait pas grand chose à se montrer en public avec une femme. Cependant il ne lui fallut pas longtemps pour répondre. Nah, faites pas ça, c'est rien. Pour tout vous dire, je sors d'une journée entière dans ce foutu hôpital à cause de migraines. J’ai été examiné comme un rat de laboratoire et j’ai qu'une envie, me refoutre au lit dans le noir là. C'est pas contre vous hein. Mais on me laisse partir avec du paracétamol et franchement, j’ai un doute sur le fait que ça agisse sachant que j’me suis déjà envoyé toutes mes boîtes à la maison. L’idée même d'aller dans un café plein de monde, avec de la lumière trop vive, aussi agréable que soit la compagnie, ça lui redonnait la gerbe.



@Nora Walsh

La blonde n'avait pas l’air d'être la personne la plus épanouie dans son job. Elle semblait résignée à ce que ce ne soit qu’une sorte de racolage pour vendre ses drogues, pas de quoi faire rêver. Asher était persuadé qu'il y avait d’autres moyens que de jouer de son charme, certes indéniable, mais plutôt dégradant quand même. Et puis lui, ça ne lui donnait pas forcément confiance en ces pilules magiques, s’il fallait qu'une jolie fille fasse vitrine pour vendre. Il grimaça brièvement sans rien ajouter. Il ne la connaissait pas, il n'allait pas lui donner de conseil de vieux singe pour gérer sa carrière, au fond, elle y trouvait peut-être son compte dans cette histoire. Quand elle l'invita à prendre un café, il y avait en premier lieu sa migraine qui lui bouffait la vie depuis des jours. Et puis ce red flag de la fille qui le connaissait sous le prisme de la célébrité, il se méfiait toujours de ces rencontres, parfois les gens avaient des attentes, essayaient de réaliser un vieux rêve en passant du temps avec quelqu'un de connu. Pourtant Ash se considérait comme un gars normal et en temps normal tu n’allais pas prendre un café avec un parfait inconnu croisé dans la rue, il fallait être honnête. Enfin lui ne faisait pas ça. Alors il déclina l'invitation et Walsh eut le bon goût de ne pas insister. L’ancien champion hocha la tête avec un mince sourire, il allait la quitter lorsqu'il failli bousculer une nouvelle personne. Quelle idée d’être restés plantés là, en plein devant l’entrée de l'hôpital. La blonde lui proposa alors qu'ils s’éloignent, il acquiesça en silence, se dirigeant vers le parking où sa voiture l'attendait de toute manière. La sienne à elle aussi probablement. Et au milieu de toutes ces bagnoles, elle s’arrêta, ouvrit sa valise et lui tendit deux boîtes. Asher resta là, à la fixer comme deux ronds de flanc avant qu'elle ne donne une explication. J’peux pas accepter ça. Pourtant il lorgnait sur les boîtes, plus fort que du paracétamol qu’elle disait… Sa dernière phrase arracha un petit rire au brun. Je serais votre cobaye en somme ? C’est l'idée ?! Remarque ça pourrait être un bon deal, si ça fonctionnait c'était gagnant gagnant et si ça ne fonctionnait pas, elle aurait au moins une réponse honnête plutôt que celle de ces gros vicelards de médecins. J’comprends pourquoi vous avez besoin de votre jeu de jambes, vous ne les vendez pas super bien vos médocs ! Il la taquinait gentiment mais n’en pensait pas un mot. Après tout, il n'était pas un professionnel de santé qu'elle devait convaincre. Juste un mec qui souffrait à ce moment précis.

@Nora Walsh

Ce n'était pas éthique de la part de la blonde de donner ses boîtes à Asher, ils le savaient tous les deux. Bien que ce geste soit visiblement désintéressé, ça ne serait pas correct d’accepter. Ils étaient tous les deux dans une situation un peu inconfortable, cependant le boxeur hésitait. Il fallait avouer que son état des derniers jours le rendait plutôt vulnérable et il détestait ça, être cloué au lit, incapable de s’entraîner, incapable d’avancer les travaux dans sa maison également, c'était insupportable. Et ce qui était d’autant plus insupportable c'était qu'il n'avait aucune solution actuellement, il devait simplement prendre son mal en patience. Seulement ça faisait des mois que ça durait, les douleurs étaient de plus en plus régulières, de plus en plus intenses. Il le savait, il se faisait vieux Ash, vieux, cassé, il avait tiré sur la corde jusqu'à l’user. Mais ce n'était pas une raison pour qu'il souffre. Si vous savez qui je suis vous vous doutez que j’me suis fait casser la gueule quelques fois, c’est pas une surprise que je le paye aujourd'hui… Il était réaliste sur sa condition. Et à la suite de ça, il la taquina gentiment sur le fait qu'elle se serve de son physique pour vendre ses médocs. Son petit sourire, son air un peu plus séducteur, elle était visiblement très douée dans sa discipline. Rien de plus… Asher n'était jamais totalement insensible à un peu de badinage. Elle fouilla dans son sac pour lui tendre une carte qu'il attrapa. Il y lut le nom, qu'il connaissait déjà, mais surtout le prénom. Il hocha la tête en la regardant s'éloigner un peu, avant de lâcher un soupir et de la rappeler… Hey, Nora ! J'vais les prendre, vos boîtes. Juste pour vous donner mon avis. Ils savaient tous les deux que c’était faux. Et Rob s’imaginait déjà ses les envoyer comme des bonbons quitte à s’abrutir pour ne plus souffrir. Il attrapa les deux boîtes. Merci. Appelez-moi Ash. Monsieur Robertson c’est mon père. Qu'il articula avec un rictus. Et puis il s'éloigna déjà, comme s’il ne fallait pas qu'on voit leur petite transaction.


@Nora Walsh