you knew the house was burning down, i had to get out (elijah)

fin août 2024

Elle était revenue depuis peu, Jules. Depuis la veille, pour être bien précise. Son appartement ne serait prêt que demain, alors elle dormait chez sa mère en attendant. Elle attendait toujours la majorité de ses affaires par la poste et n'avait qu'une seule valise pour l'instant. C'était une bonne charge d'être de retour à Bowen depuis cinq ans. Pendant ces cinq années, elle avait fait pas mal de villes et de pays en Europe, mais elle n'était pas revenue en Australie une seule fois. Ses amis les plus proches l'avaient visité à quelques reprises, sa mère était même venue une fois la rejoindre à Milan, mais elle n'avait jamais fait le voyage. Ça coûtait cher, puis la seule personne qui n'était pas venu la voir, c'était son frère. Et si lui ne faisait pas l'effort, ben elle ne le ferait pas non plus. En fait, ils ne s'étaient pas adressé la parole depuis son départ. Il lui en voulait, elle le savait. Elle, ça la faisait chier, alors elle lui en voulait aussi. Sa mère avait bien compris que ses deux enfants n'étaient pas près de se réconcilier. Ça lui plaisait pas, forcément, mais elle ne semblait pas vouloir trop forcer le truc. C'est, du moins, l'impression que Jules avait eu puisque le sujet n'avait pas trop été abordé. Elles profitaient d'un peu de temps ensemble, comme la veille, en préparant le repas et en se préparant à manger. Un peu sorti de nul part, ça toqua à la porte et sa mère se précipita pour aller ouvrir la porte de façon bien mystérieuse. Jules ne s'en fit pas trop avec ça, ne pensant absolument pas qu'elle attendait réellement quelqu'un autre qu'un colis. Le choc que ça lui fit dans sa poitrine lorsqu'elle vit son frère débarquer dans la cuisine. Si ça avait été possible, probablement que ses deux bras seraient tombés. Heureusement que ce l'était pas. Sa mère fit un petit sourire coupable en les regardant. « Juliana est de retour à Bowen, j'pouvais pas laisser passer cette occasion. » déclara-t-elle joyeusement, comme si c'était la meilleure idée du monde. Déjà, juste d'entendre son prénom ça lui fit grincer les dents à Jules, d'voir Elijah devant elle c'était suffisant, pas besoin d'en rajouter en plus. Elle serra la mâchoire pour éviter de dire des gros mots devant sa mère, tentant d'faire un petit sourire. « Elijah. » dit-elle en guise de salutation. En soi, Jules n'avait pas vraiment de raison de lui en vouloir à son frère, mis à part le fait qu'il ne l'avait pas du tout soutenu, l'avait fait sentir coupable de partir poursuivre ses rêves et avait coupé toute forme de lien qu'il avait avec à cause de ça. Ouais bon, c'était pas mal comme raison en fait. Puis Jules, elle n'avait peut-être pas subi le départ de leur père comme Daniel et lui avaient pu le subir, mais elle avait eu des séquelles aussi à grandir sans père.  Elle avait eu besoin de s'éloigner de Bowen, y'a cinq ans, elle avait eu besoin de vivre sa vie pour elle, de devenir quelqu'un (même si au final, elle n'était pas devenu personne, en fait). Il avait été pas mal égoïste son frère. Elle aussi, mais c'est qu'un détail.

@Elijah Bishop

Globalement, là, je vivais pas le meilleur hiver de ma vie. J'vais pas mentir. Ca pourrait aller bien, bien mieux. Avec Leyla, c'était le froid polaire, j'avais eu l'idée brillante de lui proposer de rester ami. Ca m'donnait des envies de chialer à chaque fois que j'y repensais. Mais de tristesse hein, de rage. Pour avoir été aussi con de lui dire un truc pareil. Et pis, à côté de ça, j'étais en train de me lancer dans une histoire qui était en train d'me dépasser. J'avais toujours eu envie d'ouvrir un skate shop, c'était un truc qui avait trouvé sa place, dans un coin d'ma tête, mais là, depuis que Jude m'avait encourager à le faire vraiment, j'me retrouvais à quelques jours de signer un contrat de location pour un local commercial et je balisais grave. J'étais en train d'me mettre tout un tas de problème sur le coin de la tête et j'étais pas certain d'avoir les épaules pour. Et pis j'avais aussi un peu peur d'avoir la flemme. Il me faudrait pas grand chose pour reculer, pour tout envoyer valser et pour dire à mon patron, que finalement, à l'automne prochain, je serais encore là. Ca tournait tout ça, dans ma tête. Et depuis que c'était fini avec Leyla, j'avais pris pour habitude, plus que la normale, j'veux dire, d'aller faire des p'tits repas avec ma mère. Souvent, mon frère se joignait à nous, avec sa fille, et c'était cool en fait. Ca m'faisait du bien, juste parce que je pensais pas au fait que j'étais un gros lâche avec Leyla. Alors ce soir, quand ma mère m'avait envoyé un message pour me dire de passer manger à la maison, j'avais juste accepter, sans me douter du guet-apens. J'arrivais alors presque à l'heure et je toquais à la porte. J'tombais sur ma mère que j'prenais dans mes bras, par habitude mais j'voyais bien qu'elle avait une tête bizarre. J'la regardais, la tenant par les épaules, encore dans l'entrée. "Oooh toi t'as la tête de quelqu'un qu'a fait un mauvais coup! C'est quoi? T'as cuisiné des Lamingtons?" J'disais ça en riant, parce que ma mère savait que j'avais la noix de coco en horreur et parfois, elle en faisait, parce que les autres aimait ça, et souvent, elle avait ce même sourire de "je sais que tu vas pas être content." Clairement, j'avais pas mal foi en ma mère parce que dans ma tête, le pire truc qu'elle pouvait me faire, c'était des Lamingtons. Imposer la présence de ma soeur, en revanche, c'était vraiment un sale coup et alors que j'arrivais dans la cuisine, j'perdais automatiquement mon sourire. Ca m'faisait un coup en dedans, d'la voir là, Jules. Elle prononça mon prénom, tandis que j'avais totalement ignoré la phrase de ma mère. Elle espérait quoi au juste, qu'on se saute dans les bras, l'un de l'autre? J'étais vraiment pris de court. C'était compliqué avec Jules, très compliqué. Ou plutôt, ça n'était pas. Tout court. Il n'y avait plus rien, depuis cinq ans. Je retirais ma veste que je calais sur le dossier de ma chaise. J'la regardais plus, j'étais pas prêt. "Tu repars quand?" que j'lui demandais froidement, sans violence ni jugement, juste un ton totalement neutre. J'sais pas ce qu'elle espérait notre mère, mais l'ambiance du repas allait être glacial, for sure.

@Jules Bishop

Est-ce que c'était un trait Bishop de faire des petites manigances? Non, ce l'était pas. Jules était assez cash pour ne pas avoir besoin de faire ça. Enfin... Rien ne lui venait sur l'instant, mais c'était peut-être de la mauvaise foi. Une chose était sûre, ce que sa mère lui avait fait là, ça ne passait pas spécialement bien. Jules n'arrivait même pas à feindre un sourire sur son visage. C'est pas faute d'avoir essayé, vraiment. Elle n'était pas heureuse de voir Elijah devant elle. P'tête que deep deep down, oui, mais elle ne le ressentait pas. C'était juste la petite rancoeur qui flottait là qu'elle arrivait à ressentir. On pouvait bien voir que c'était la même chose du côté de son frère. Ça n'avait jamais été simple, de base, entre eux, vu leurs personnalités bien différentes. Disons que la distance n'avait pas arrangé les choses, son départ les ayant aggravé. Elle ne savait pas trop ce qui était passé par la tête de leur mère, d'les réunir comme ça alors que sa fille avait à peine mis les pieds sur le sol australien depuis 24h. Elle savait très bien où en était leur relation, son excuse ne suffisait pas à Jules. La question d'Elijah, la seule qu'il lui posa, suffit à confirmer que son frère était tout aussi amer de ce set up. « C'est pas dans les plans de repartir. » déclara-t-elle tout aussi froidement. C'était pas lui qui lui donnait envie de rester, prenez-en bien note. C'est juste que Jules avait tout une vie ici si on excluait Elijah, c'était donc pas assez pour la remettre dans un avion. Elle soupira bruyamment tandis que leur mère jugea bon de se reculer vers la cuisine pour les laisser ''rattraper le temps perdu'' comme s'ils avaient envie d'le rattraper, ce temps. « Tu pourrais juste faire semblant d'pas te sentir bien et te barrer. » suggéra-t-elle comme s'il était con de rester. Comme si Jules avait la priorité au repas de leur mère. En même temps, elle vivait ici encore pour une journée alors ouais, elle avait la priorité. « Tu pourrais aussi faire genre qu'Alexis a besoin de toi. T'as mille raisons que tu peux utiliser pour t'en aller. » déclara-t-elle en fronçant les sourcils. Nan c'était définitif, elle le trouvait con, c'était pas juste ''comme si''. Elijah n'avait aucune bonne raison d'passer toute la soirée là. « D'ailleurs, c'est pas un peu loser d'être encore en coloc à votre âge? » ajouta-t-elle en faisant mine de réfléchir avant de faire un petit sourire innocent tandis que leur mère revenait. C'était complètement gratuit ça, mais ça l'amusait Jules. C'était cadeau, spécial i'm back. En plus, c'était fun avec Elijah parce qu'il était bien naïf et donc, ça fonctionnait toujours bien d'le faire rager avec des petits commentaires. Un p'tit plaisir perso pour Jules depuis longtemps maintenant. P'tête qu'il lui avait manqué son frère, au fond.

J'la comprenais pas ma mère là. J'lui en voulais sacrément de nous imposer l'un à l'autre avec Jules. On se supportait pas. C'était jamais passé entre nous et il y a quelques années, quand elle avait décidé de se barrer à l'autre bout du monde, ça avait scellé un truc. Un truc bien amer. Un truc du genre: si tu crois que t'es mieux ailleurs, restes y. Et je l'appliquais à chaque jour. Sans tenter d'aller vers du mieux. Bien évidemment, j'avais des nouvelles de Jules, via ma mère et mon frère qui eux avait gardé contact avec elle. J'savais où elle en était, ce qu'elle avait fait mais rien de plus. Et j'cherchais jamais à approfondir. J'allais jamais aux devants des informations, juste par fierté. Ca m'ressemblait plus tant que ça toute cette animosité, mais j'la conservais bien au chaud, juste pour Jules. C'était mon p'tit cadeau d'ma part. Alors quand j'la voyais dans la cuisine là, se tenir là où je m'étais tenu durant ces dernières années, ça m'enchantait pas. Tellement pas que j'lui montrais bien que j'attendais qu'une chose, qu'elle reparte. Mais c'était pas dans ses plans. "Ah ça y est, tu t'es dis qu'on était pas si pire que ça, à Bowen." que j'lui lâchais, bien conscient qu'elle était parti pour ses études mais je l'avais jamais envisagé comme ça. Son p'tit côté peste et condescendante, ça m'avait toujours agacé. Profondément. J'la regardais en haussant les sourcils quand elle me suggéra de trouver une excuse pour me barrer. "Ah parce tu crois qu't'as une place privilégiée à la maison? Tu rêves, jamais j'bouge de là. Si ça te satisfait pas, j'peux t'aider à trouver un vol pour l'Italie ou j'sais pas où là." Au contact de Jules, j'me transformais. Par contre, sa p'tite pic sur Alexis et moi, ça me plaisait pas. Ca m'blessait aussi mais ça, jamais j'lui dirais. J'fronçais des sourcils. "Comment tu peux savoir si on est encore en coloc ou pas? T'es partie y a 5 ans." Ca c'était juste pour la piéger, pour lui démontrer par A+B qu'elle avait eu de mes nouvelles via notre mère et j'me plaisais à croire qu'elle les avait demandé par elle-même. Parce que oui, on était encore en coloc et non c'était pas loser. Elle était probablement jalouse de mon amitié avec Alexis. J'voyais que ça. "Pis c'est pas parce que toi t'es pas capable d'avoir de vrais potes, qu'il faut rabaisser celle des autres hein." Clairement, c'était pas la meilleure répartie du siècle, en fait sa présence me tendait, et pis, ça faisait accessoirement cinq ans qu'on avait pas eu de joutes verbales, j'devais être un peu rouillé. Ou alors, j'osais pas m'avouer que Jules était un cran au dessus. C'était une possibilité aussi. Notre mère arrivait comme une fleur encore, p'tete qu'elle, elle était juste contente d'avoir son fils et sa fille, en même temps. Mais j'crois qu'on était pas suffisamment mature pour s'en apercevoir. "Vous allez pas commencer vous deux, hein, allé faites vous un câlin!" J'regardais ma mère en ouvrant grand les yeux et j'portais mon regard vers Jules. J'faisais comme si j'avais envie de vomir, révulsant mes yeux, avec quand même un p'tit sourire en coin. "Certainement pas. J'attends des excuses avant." Des excuses pour quoi? Pour être partie, tout simplement. La rancoeur elle était encore bien là. Il n'y avait pas de doutes.

@Jules Bishop