#301 plus rien dans la tête, on arrête de penser, rien n'est sensé - jules

Depuis quelques temps, Alan ressent des émotions complètement aléatoires. Ses pensées et son cœur enchaînent les hauts et les bas complexifiant ainsi le décryptage. Il n’apprécie guère cette situation qui le perturbe. Et pour ne pas aider, il n’en parle pas à ses amis car, pour lui, c'est toujours complexe d’assumer entièrement ses sentiment. Il a toujours été discret sur ça, niant souvent les questions ou en répondant dans la plaisanterie, laissant alors planer le doute du second degré. Il ne sait pas parler sans relancer une blague et préfère en rire qu’en pleurer. Pourtant, et même souvent, ça le tourmente. Et encore plus aujourd’hui. Retrouver Leyla a été un synonyme pour lui d’avoir le Chili, ce voyage et tout le bonheur de leurs petits moments proches de lui à nouveau. Ca a fait l’effet d’une bouffée d’oxygène, d’une escapade loin de tout, d’un petit ilot de douceur présent juste ici, à Bowen. Ca lui a même redonné goût à Bowen. Non pas qu’il déteste cette ville, il apprécie toujours revenir et retrouver quelques-unes de ses habitudes, et avoir la sensation d’être le roi du monde. Mais la ville a tendance à l’étouffer, à l’angoisser, à le tuer à petit feu. Puis, Leyla est venue, elle a balayé tout ça, et a recréé la sensation de son plus long voyage, ici, à Bowen, chez lui. Cette harmonie qu’il y avait entre eux, cette légèreté, et bien plus encore, sont finalement venus à lui. Et il en a été très heureux jusqu’à.. jusqu’à ce qu’il apprenne qu’il y avait quelqu’un d’autre entre eux. Et que, ce quelqu’un d’autre lui a tout pris -pas tout, bien sûr, mais le côté dramaqueen d’Alan ressort beaucoup en ce moment. Et, finalement, ce petit paradis s’envole à nouveau loin, lui arrachant au passage une part de son cœur. Voilà comment il l’a reperdue à nouveau, Leyla. Et peut-être bien définitivement cette fois-ci. Avant, ce n’était que quelques kilomètres à gravir si le destin le voulait pour la retrouver. Maintenant… maintenant c’est plus compliqué. Il s’en est beaucoup voulu, Alan. Il s’est beaucoup questionné sur tout ça. Si finalement, ses ressentis avec Leyla étaient bien réels, si elle pensait la même chose, ou si tout ça n’a été qu’une illusion qu’il s’est créé. Pourtant, tout en lui enlevant une partie de son cœur, la vie lui offre en même temps un beau cadeau, créant donc des émotions complexes. Et ce cadeau n’est rien d’autre que Jules. Jules, cette fille qu’il connaît depuis toujours. Jules, cette fille qui l’attire quand elle le fuit, et qu’il fuit quand il l’attire. Jules, c’est aussi cette fille qui est partie à des milliers de kilomètres mais qu’il a continué à voir quand tout allait mal, ou quand ils avaient quelque chose à célébrer. C’est ce lien indéfinissable entre eux. Et la vie a décidé qu’elle revienne sur le sol australien, et même plus, à Bowen. Cela a eu aussi l’effet d’un électrochoc pour Alan. Il trouve ça également cool de la voir plus souvent. Mais, ça reste autant bizarre, il ne sait jamais trop comment se comporter avec elle. Pour l’instant, ce n’est pas un soucis, il vit le jour au jour, espérant laisser emporter son cœur loin du Chili. C’est ainsi qu’en rentrant de son travail, il passe devant l’immeuble de Jules. C’est ainsi qu’il décide de sonner à l’improvisation, sans vraiment avoir de plan et désirant de la voir ouvrir la porte. Cela lui prend comme ça, des fois, de venir la voir, comme si elle était encore à Milan, sans prévenir, juste pour le plaisir de se retrouver ensemble après une journée pas facile, ou pour annoncer une bonne nouvelle -qui n’existe pas trop pour l’instant. Et bingo, c’est gagné. La porte s’ouvre et le sourire de Jules vient le saluer. « Salut toi. » dit-il. « Je me suis dit qu’un lundi en début de soirée, tu aurais besoin d’un peu  de compagnie pour spill the tea sur les potins du lundi et du week-end. » sourit-il. Il n’avait pas à inventer d’excuses pour la voir, il sait très bien que c’est dans leur nature. Mais bon, ils aiment bien les potins, pourquoi pas partir sur ça, pour ne pas paraître trop bizarre. Maintenant, il n'espère qu'une chose, qu'elle soit disponible, qu'elle libère ce début de soirée au moins pour lui.

Elle essayait de se réhabituer à la vie australienne, Jules. C'était pas évident, même si ça faisait déjà trois mois qu'elle était de retour. Par fois, la simplicité de l'Italie lui manquait, les rencontres éphémères, les sorties tous les soirs, le charme des Italiens. C'était un pays dur à égaler, fallait l'admettre. Bowen, c'était la maison mais... C'était une petite ville. Elle connaissait la majorité des gens, elle avait interagi avec la majorité, encore plus maintenant qu'elle bossait dans une institution bien établie. Elle savait à quoi s'attendre en choisissant de revenir ici quand même, elle ne pouvait pas se plaindre. Elle aurait pu continuer là-bas, mais l'argent lui manquait, ses amis aussi. Il avait été temps de rentrer, mais ouais... C'était un ajustement. Bosser au Wojna's, ça lui plaisait bien quand même, ça l'occupait et la rapprochait de cette vie mouvementée qu'elle avait vécu à Milan, le plus possible du moins. Le problème, c'était les soirs de congés où elle savait pas toujours quoi foutre. Elle s'était sentie seule, par moment, en Europe, surtout après la mort de Sofia. Elle tentait d'éviter cette solitude à tout prix depuis. Elle se gardait occupée, mais c'était moins facile ici que là-bas. Tout le monde avait sa petite vie, sa routine dont elle ne faisait plus partie depuis cinq ans maintenant. Elle avait été remplacée, presque. Même si cette pensée ne lui plaisait pas, elle surgissait par moment dans son esprit, de façon bien intrusive. C'était dur de réapparaître chez soi cinq ans plus tard et espérer que rien n'ait changé. C'était impossible, forcément des trucs allaient avoir changé. Pas tout, par contre. Pas Alan. Enfin, pas ce qu'ils étaient. Faut dire, ils avaient gardé contact pendant les cinq dernières années. Il était même venu la voir quelques fois, parfois de façon planifiée, d'autres non. Et ça lui avait toujours fait plaisir à Jules, à son plus grand dam. Elle se surprenait même à avoir envie qu'il débarque, par moment, simplement parce qu'il avait ce don pour la faire sourire dans les pires moments. Il avait toujours eu ce don, ce pouvoir sur elle. Aucune idée de ce qui le rendait si spécial, mis à part qu'il s'agissait de la seule personne dont elle avait été réellement amoureuse. P'tête même qu'une partie d'elle le serait toujours. Pas qu'elle avait envie de l'avouer à voix haute, si aux autres ni à elle-même. Ce qu'elle savait, en tout cas, c'était que depuis son retour, il avait gardé la même habitude de débarquer à son appart sans s'annoncer, comme ce soir. Elle lui ouvrit la porte, sourire aux lèvres et s'appuya contre le cadre de celle-ci pour le regarder. « Salut toi-même. » souffla-t-elle doucement. Elle fit mine de réfléchir à sa proposition avant de poser un regard amusé sur lui. « Si y'a bien quelqu'un qui a besoin de la compagnie de l'autre ici, c'est toi. » précisa-t-elle avant de rire. « Mais ouais, tu peux entrer. » finit-elle par dire en se déplaçant sur le côté pour libérer le passage. Comme si elle savait dire non à Alan. Elle n'avait rien de prévu ce soir, attendant la première proposition qui viendrait à elle, mais Jules aurait certainement pu annuler ses plans pour lui. Pas qu'elle était désespérée ou quoi, mais c'était comme ça entre eux.

@Alan Hopkins

Le retour de Jules est aussi synonyme du retour des passages à l’improviste chez elle. Comme avant, comme avant son départ. Enfin, cela n’a pas vraiment changé. La distance n’a pas limité Alan pour aller la voir, là-bas, à Milan, à des milliers de kilomètres de Bowen. Mais cette fois-ci, c’est plus simple, plus facile, et peut-être sûrement, ça sera plus régulier. Surtout depuis qu’Alan a la tête perdue et le cœur confus. Surtout depuis qu’il n’a plus de nouvelles de Leyla, ou plutôt qu’il n’en prend plus trop suite à l’annonce de l’arrêt de leur relation à cause de son mec. Avec Leyla, il avait retrouvé la douceur de son voyage au Chili, elle avait réussi à ramener ça à Bowen. Et soudainement, grâce à elle, rester coincé dans cette ville était devenu agréable pour Alan. Il revivait, finalement à travers elle, la nostalgie de son plus beau et long voyage. Mais, maintenant, tout ça c’est fini. Il a dû faire une croix dessus. Retrouvant la saveur mi-fade, mi-joviale de Bowen. Il ne peut pas dire qu’il déteste cette ville, non, non, non, il adore ses amis là, il adore de s’y croire le maître du monde, mais il a horreur d’y rester bloquer. Pourtant, dans ce mélange peu séduisant, Jules est revenue rendant le désagréable agréable. Jules a remis les pieds à Bowen. C’est vrai, il avait hésité à repartir la voir, à passer une semaine au moins en télétravail dans son  appartement italien. Mais, contre toute attente, elle est venue à lui. Pour un long moment, et sûrement définitivement. Alors, une nouvelle routine s’est installée : des escapades sans prévenir chez l’un et chez l’autre, comme ce soir. Il avait besoin de la revoir, Jules. Alan rit à son accueil. Elle est fidèle à elle-même, elle n’a pas tant changé que ça. Et ça fait plaisir à Alan de savoir que le retour en Australie ne l’a pas métamorphosée. « Mouais, j’sais que c’est ton jour de repos aujourd’hui, j’m’étais dit que t’allais te sentir biiiien seule. » surenchérit-il, pour avoir le dernier mot, fidèle à lui-même aussi. Il entre dans son appartement, enlève ses chaussures et va s’installer directement sur son canapé. Il fait comme si c’était chez lui, Alan. Il s’est toujours comporté comme ça dans les lieux où Jules vivait. Il a pris cette habitude, ils se connaissent bien trop pour être timides et faire des manières. « Alors ce week-end ? Des clients pas trop chiants ?» demande-t-il « On a hésité à aller au Wojna avec Logan vendredi soir mais finalement on a fini au Hendrix, il voulait une bière. » explique-t-il en haussant les épaules. Alan, il aime bien aller au Wojna, déjà pour les bons rhums qu’ils servent, alcool qu’il apprécie bien, puis maintenant, pour venir taquiner Jules lors de son service, sûrement à son grand désespoir. Mais ce n’est pas grave, il aime bien ce petit jeu quand elle est de service. Et puis, peut-être que ce soir, il sera tout aussi taquin, ou peut-être pas, puisqu’il n’a plus son public. Il n’y réfléchit pas de toute façon, ça ne se prévoit pas ce genre de choses, et, surtout, il préfère se laisser emporter avec Jules plutôt que de tout calculer.

Elle aurait pu se sentir comme un second plan, Jules, comme celle qui est là pour réparer les pots cassés (ou les coeurs brisés dans ce cas-ci), comme le deuxième choix. C'était pas le cas, parce qu'elle n'avait aucune idée par quoi était passé Alan. Autant ils pouvaient avoir des conversations sérieuses et profondes par moment, autant ils ne parlaient pas de ça, de leurs sentiments, des autres. Et c'était mieux comme ça, probablement que ça aurait changé les choses entre eux, ça aurait bien piqué son égo en tout cas. La version qu'elle avait sous les yeux, celle où Alan choisissait de passer son temps avec elle, de passer à l'improviste comme ils l'avaient toujours fait l'un pour l'autre, ça lui convenait, ça lui plaisait. Ce soir, Jules était un premier choix, comme elle l'avait été à Milan alors qu'il n'hésitait pas à monter dans un avion pour venir la voir. Comme lui l'était, chaque fois qu'elle le choisissait lui plutôt qu'un autre simplement parce qu'il lui faisait des beaux yeux. Une faiblesse, voilà ce qu'il était. Bon, il était bien plus, mais... Particulièrement ça. C'était pas toujours ce qui ressortait lorsqu'on les voyait agir en public, mais en même temps leur relation, qu'importe le stade de celle-ci, avait toujours été différente une fois la porte fermée, en toute intimité. « Si le fait d'être mon sauveur sur ton cheval blanc te fait sentir mieux... Be my guest. » dit-elle avec un sourire rieur avant de le rejoindre sur le sofa. Jules aussi avait ce besoin d'avoir le dernier mot. Ça pouvait être à l'infini avec ces deux-là. Elle se laissa tomber à ses côtés, le coude appuyé contre le siège, la tête tournée vers Alan tandis qu'il prit des nouvelles de son week-end. « Des clients géniaux, t'étais pas dedans. » dit-elle avec une petite grimace pour le taquiner. Ça l'avait un peu déçue, en fait, de ne pas voir Alan au Wojna's pendant ses services, mais son explication parlait d'elle-même. Il était avec Logan. Déjà là, ça n'aurait pas été comme d'habitude. « Tant pis pour vous, y'avait une bonne ambiance. » dit-elle simplement en haussant les épaules. « T'aurais pu venir samedi. » ajouta-t-elle avec un petit clin d'oeil. Elle le fixa quelques secondes, laissant son regard trainer sur les traits de son visage avant de se relever du canapé « Tu veux un truc à boire? » demanda-t-elle, déjà en train de marcher vers le bar où siégeaient ses bouteilles d'alcool. Comme elle, Alan ne disait jamais non à un verre, ne serait-ce que pour déguster un truc sans avoir l'intention de se saouler. Elle versa du gin dans deux verres, ajoutant glaçons et tonique avant de revenir vers lui pour lui tendre. « Y'a un truc de différent chez toi ce soir. » dit-elle en plissant les yeux comme pour l'inspecter. Il était plus posé, presque comme.. Fatigué. Dur à dire, Jules avait peut-être perdu la touche pour le lire. Elle reprit place, étalant ses jambes sur celles d'Alan, attendant une réponse.

Alan hausse les épaules, et souffle. Puis, il roule les yeux au ciel. C’est tout ce que provoque la réflexion de Jules. Même si l’idée d’être son chevalier lui plait, il entend cette touche d’ironie accompagnée de son rire, ce qui peut un peu l’agacer. Pourtant, il entre dans son appartement sans rien dire, attendant d’être sur son canapé pour surenchérir ou être au bon moment pour lancer une petite pique. Même si dans les faits, il a qu’une envie c’est de s’installer chez elle avant qu’elle change d’avis. Dès la porte franchie, il se sent à l’aise, comme chez lui. Cela lui fait du bien. C’est peut-être pour ça qu’il est venu voir Jules, particulièrement. Pour se sentir comme chez lui. Pour se sentir bien quelque part, avec quelqu’un. Comme ce fût au Chili, comme ce fût avec Leyla avant que tout bascule et tout change. Il chasse rapidement ces idées de sa tête. Ce soir, il est avec Jules. Ce soir, il veut profiter de Jules, de sa compagnie. Il se tourne ainsi vers la jeune femme, mettant son bras contre le dossier, et laissant sa tête s’appuyer contre celui-ci avant de la fixer. Puis, il entame la conversation et lui parle de ses activités de son week-end, avec Logan, au Hendrix. « Oh, des clients géniaux mais ennuyants, veux-tu dire. » rectifie-t-il sa phrase avec un petit sourire. Il explique qu’ils avaient plutôt envie d’une bière, justifiant le choix du bar. Certes, depuis que Jules y est, il a tendance à aller au Wojna. Certes, il peut insister avec ses potes. Mais cette fois-ci, il a suivi Logan. Puis, il écoute Jules au sujet de la soirée au Wojna. « Je n’en doute pas ! Mais au Hendrix aussi. » souligne-t-il. « C’est peut-être pour ça qu’on finit toujours pas revenir. » finit-il avec un petit haussement d’épaules. Jules et lui ont fui Bowen, pour diverses raisons. Et pourtant, ils sont tous les deux revenus dans cette ville. C’est qu’elle les attire, finalement. « Samedi ? Il y avait la même ambiance que vendredi ? » demande-t-il. « Ou justement je manquais ? » plaisante-t-il, encore une fois, toujours sur ce même ton d’humour. Toujours sur ce même dynamique fuis-moi je te suis, suis-moi je te fuis Alan observe Jules se redresser, et partir. Il change alors de position, se tenant plus droit sur le canapé et la suit du regard. Il connait déjà l’endroit où elle se dirige, son bar. Un sourire se dessine automatiquement sur son visage. « Avec plaisir. » acquiesce-t-il. Il n’aurait pu rien dire, c’est vrai, Jules connaissait déjà la réponse. Il l’observe servir les boissons, se demande ce qu’elle pourrait bien lui préparer, maintenant qu’elle est serveuse, maintenant qu’elle doit maîtriser certains cocktails. Il prend son verre, la remercie rapidement. Puis, il observe son verre pour humer les parfums d’un gin tonic classique finalement. Il n’ose pas boire de suite, attendant peut-être le départ lancé par Jules. Mais à la place, elle l’accuse. Elle le trouve différent. Il fronce le sourcils. Il semble si différent que d’habitude ? Cela l’attriste. Il ne pensait pas que cela se verrait à ce point. « Hum. le travail, sûrement.. » continue-t-il, cherchant une explication viable. « Je ne m’y plais pas vraiment.. voir pas du tout. » enchaîne-t-il. Est-ce qu’il voudrait parler de tout ce qui lui tourmente à Jules ? Non, pas aujourd’hui, même s’ils en avaient l’habitude. Pas aujourd’hui, il ne pourrait pas lui parler de Leyla. Et puis, il ne veut pas. « Et toi, du nouveau chez toi ? » demande-t-il, pour ne pas axer la conversation sur lui, pour éviter de parler de lui, cette fois-ci. Il laisse Jules étendre ses jambes sur les siennes. « Pas le gin en tout cas, j’espérais être digne d’une de tes meilleures créations de serveuse, mais bon, on prend ce qu’on a. » plaisante-t-il pour revenir à ce qu’il fait de mieux, l’humour, tout en déposant sa main sur un des genoux de Jules.