Dancing in the stars (Persgus)

Je ne sais pas pourquoi mais mes élèves avaient développé une passion pour La La Land, le film. J’avais donc regardé ce dernier en prenant des notes (comme à chaque fois lorsqu’il s’agit d’une comédie musicale) avec Pile Poil sur les genoux et Debussy à mes pieds. J’avais trouvé la scène du planétarium tellement énorme que j’avais réussi à me bagarrer pour obtenir l’autorisation de l’école. Je devais emmener les enfants voir un spécialiste des étoiles pour en apprendre un peu plus et ainsi monter un spectacle dessus. Les étoiles et la musique, certains pourraient ne pas y voir le lien mais bon, j’étais tellement barrée que pour moi tout avait une certaine continuité. J’avais d’ailleurs dessiné entièrement les tableaux mais je voulais les éclairements de cet Angus Helyer. Donc, alors que nous étions dans le car qui nous menait à l’observatoire, je fis la leçon à mes garnements pour ne pas trop emmerder le mec. Après tout, je savais que les mecs dans son genre devaient être perchés. Un peu comme moi d’ailleurs. J’avais relevé mes cheveux sur ma nuque, vêtue de mon habituel tee-shirt avec des notes de musique et ma petite jupe noire. Le tout assorti de baskets. Mon dieu que cette fille est étrange. Lorsque nous arrivons à destination en périphérie de la ville, je descends la première pour compter les garnements et aller me présenter à l’homme avec qui j’avais eu un peu de contact. J’avais une certaine appréhension rien qu’à la simple idée de lui serrer la main. Je ne supportai pas trop le contact d’autrui. Je ne cessai de déplier, plier ma main comme pour une fille prise de tocs. Il allait croire que j’étais bizarre. Je passe donc ma main dans ma nuque, mal à l’aise avant de lever les yeux vers lui. Premier constat, il était immense. Le second, il était plus séduisant que je ne l’aurai cru. Cliché. Je tentai donc de sourire ce qui eut pour effet un rictus affreux. « Bonjour, je suis Melle Strauss, on s’est parlés au téléphone. Enfin appelez-moi Perséphone. Ou Percy, comme vous voulez. » Je m’empourprai ayant l’impression d’être un de ces personnages de cartoon qui s’emmêle les pinceaux et asperge son entourage de peinture. « Vous êtes bien Angus Helyer ? » Je tente de retrouver la feuille parmi mon dossier tandis que les élèves s’étaient dispersés sur le site. Une bourrasque de vent me balaya d’un coup emmenant mes papiers au loin comme des oiseaux pressés de prendre leur envol.

Les visites scolaires sont assez rares, du moins avec des enfants. Les adolescents sont plus courants, bien que pas forcément nombreux non plus. Tu n'as pas pour habitude de t'occuper de ce genre d’événement, mais que l'on te le demande n'était pas pour te déplaire. Ce sera une première, mais tu aimes ton métier et tu le connais comme personne, alors qui serait mieux placé. Sans oublier que tu adores les enfants, tu ne devrais avoir aucun mal à gérer cette journée. Le rappel demeure tout de même douloureux, les enfants qui courent et rient, se chamaillent et s'amusent, choses simples que tu imaginais ton enfant faire, avant de le perdre. Tu veux toujours être père, tu ne sais ni quand ni avec qui évidemment, mais l'idée demeure, l'envie aussi. Tu avais tout prévu pour votre enfant, vous aviez tout rêvé. Et c'est encore plus dur pour ton ex-femme, elle ne peut même plus voir d'enfants, et elle n'en veut certainement pas. Tu n'as de cesse de lui répéter qu'un jour, elle parviendra à passer outre, mais ça fini souvent en engueulades malgré les relations tout à fait amicales que vous conservez. Alors le sujet est à éviter, et c'est sans doute mieux pour tout le monde. Lorsque tu aperçois le car scolaire, tu sors enfin de ton bureau et descend à la rencontre du groupe. Tu attends que la jeune professeure ait terminé de compter ses élèves et posent son attention sur toi pour t'avancer, en même temps qu'elle. Son appréhension est palpable mais, pour le coup, tu n'en ressens aucune. Tu es en terrain connu, s'il y a bien une chose que tu maîtrises c'est celle-ci. « Bonjour. » Tu souris, tendant la main sans t'apercevoir une seconde que c'est justement ce qu'elle redoutait. Tu écoutes son introduction, hochant la tête. « Perséphone... C'est très joli. » Et très inhabituel, mais sans doute n'y a-t-il pas beaucoup plus d'Angus que de Perséphone en Australie. « C'est bien moi, enchanté. » Après avoir confirmé ton identité, tu t'apprêtes à lui indiquer l'entrée mais ses papiers s'envolent dans tous les sens et vous vous lancez à leur poursuite. « Attendez, je vais vous aider. » Tu laisses échapper un léger rire et vous vous employez à la tâche.