Is time coming ? Time to back to me. | Swive

Des mois. Des mois entiers, d'une longueur interminable car, et surtout, d'une violence infinie. A croire qu'ils ne finiraient jamais, qu'aucun répit ne lui serait accordé, malgré toutes les forces et l'acharnement qu'elle avait mis dans la bataille. Celle de sortir son meilleur ami d'un bourbier dans lequel il ne s'était même pas fourré tout seul comme un grand, contrairement à ce qu'on aurait pu attendre d'un adulte normalement constitué. Néanmoins, il fallait le reconnaître, les emmerdes avaient commencé bien avant son incarcération soudaine et injustifiée.

A cause de Jimmy. Ce même jour où Clive et elle étaient sur le point, semblait-il, de commettre l'irréparable. Où, pour une sombre histoire d'hôpital, de Babouchka incapable de se mêler de son cul moulé de léopard et de vaisselle cassée, on avait été à deux doigts de la catastrophe nucléaire. Au moins. Sauf qu'ils avaient été interrompus par la sonnette de la maison de mère-grand et la mine radieuse, suffisante, de l'ex de Swan, revenu d'entre les morts une décennie après sa défection. Les semaines qui s'en étaient suivies avaient eu beau être tendues, elles n'étaient rien en comparaison de ce qui avait suivi.

Les allers-retours au poste. Au tribunal. L'avocat harcelé au téléphone et jusqu'à son cabinet. Si Aleks n'avait pas été dans sa vie, nul doute que la jeune femme n'aurait pas hésité à aller encore plus loin, quitte à finir elle aussi derrière les barreaux. L'outrage à agent et entrave à la justice lui pendaient au nez.

A la place, notre blonde avait fini par ... Se résigner. Terme terrible pourtant adapté, couperet tombé ce soir où le juriste avait osé l'appeler, d'une petite voix, pour l'informer que « ce ne serait pas pour tout de suite », que c'était « plus compliqué que prévu ». Le lendemain, Pavel Karev, son père, était reçu aux urgences de Bowen. Infarctus. Son coeur à lui s'en remettrait, mais celui de sa fille, lui, s'était craquelé en quelques millions de morceaux.

Heureusement, tout possède une fin. Ou du moins, le commencement d'une fin. Ou peut-être un commencement tout court. Pour le savoir, il faut que l'histoire reprenne. Et ça tombe bien, il semble que ce soit pour aujourd'hui.

« Je passe après ma garde. » soufflait-elle dans le pauvre cellulaire qu'elle broyait presque entre ses doigts. Il lui fallait mobiliser tout le peu de sang-froid qu'elle possédait pour masquer l'émotion qui manquait d'étrangler sa voix. « Non, pas à la maison. Je t'expliquerai. Dans deux heures. Dans deux heures, je suis chez toi. » Elle avait raccroché, fébrile, ses prunelles lorgnant du côté de la pendule et souhaitant que les heures en question passent vite. Très, très vite.

A l'heure dite, sa blouse à peine retirée au profit d'une veste en jean par-dessus son tee-shirt blanc - le même qu'elle avait porté toute la journée -, elle se garait sans grande dextérité devant l'immeuble de son meilleur ami. Elle faillit oublier le frein à mains. Quant aux pneus de sa bagnole, aucun doute, elle les avait lissé sur la route tant qu'elle s'était pressée. Grimpant quatre à quatre ces satanés marches qui la séparaient encore du seul individu qui lui eut jamais vraiment manqué, elle déboula devant la porte d'entrée. Sonna comme si sa vie en dépendait. Et c'était peut-être le cas.

« Je ... » Suis là ? T'emmerde ? Vais te tuer ? Te déteste ? T'attendais ? Vais t'expliquer, du coup ? Malgré le temps écoulé et ces retrouvailles qu'elle avait tant espéré, la blonde réalisait qu'elle n'y avait vraiment réfléchi. Rien de bien étonnant quand on la connaissait, sachant qu'elle avait cette fâcheuse tendance à agir avant de penser. Voilà pourquoi, quand le battant s'ouvrit, elle se retrouva sans mots, les bras ballants, échevelée et le souffle court. Aussi fit-elle ce qu'elle faisait de mieux dans ces moments-là. Soit, écouter son discutable instinct. Mue par une véritable pulsion certainement depuis trop longtemps réprimée, elle reprit là où cette putain de sonnette à la con les avait interrompu. Donc, en un battement de cils, ses bras se retrouvèrent entourés au cou de Clive et ses lèvres, écrasées sur celles de son meilleur ami en un baiser brusque, presque sauvage.