when i'm with you i feel happier (woody + charlie)

Juste avant de venir chez Woody, Charlie avait fait quelques courses pour acheter ce qu'il fallait pour une piña colada. La canicule touchait Bowen alors cela ne leur ferait pas de mal de boire quelque chose de frais. Le temps s'écoulait et elle réalisait à peine que cela faisait déjà plusieurs mois qu'ils se fréquentaient. Il n'y avait pas que le temps qui l'aidait à la réparer car Charlie ne pouvait plus nier : elle s'était attachée à Woody bien plus qu'elle ne l'imaginait. D'ailleurs elle se répétait à elle-même qu'elle devait lui parler de ses sentiments mais elle repoussait sans cesse cette discussion trop sérieuse à son goût.

Ils venaient de passer un moment intime tous les deux et les retrouvailles furent aussi chaudes que le climat extérieur.  Dans la cuisine ce n'était pas une pâtisserie que Charlie préparait cette fois, mais un cocktail frais. Elle avait désormais l'habitude de prendre ses aises dans sa cuisine, se familiarisant avec tous ses ustensiles. Rapidement elle sucra Le bord de leurs verres et versa de la glace soigneusement pilée. Pour la décoration et la gourmandise elle ajouta une brochette de bonbons acidulés. Verres à la main, elle rejoignit Woody dans le salon. Avant de lui donner le sien elle recula la main tendue et pencha son visage pour lui voler un baiser. J'en veux plus. souffla t-elle, le sourire aux lèvres. Mais alors qu'elle se sentait si bien, sans raison particulière, elle eut l'estomac noué. Ils étaient bien là, tous les deux, alors pourquoi ne pas lui en parler? Son sourire s'effaça et elle lui donna son verre.

@Woody Rutkowski

Cette canicule commençait à s’éterniser, et le corps de Woody avait du mal à suivre le rythme. Il supportait déjà assez mal la chaleur, mais la sclérose en plaques intensifiait ce malaise. Depuis le petit incident la semaine dernière, où Léo avait été son sauveur, en quelque sorte, le trentenaire faisait plus attention. Il ne sortait plus beaucoup, restait à l’air frais et ne s’aventurait à l’extérieur qu’en soirée. C’est donc naturellement qu’il avait invité Charlie à se rendre chez lui plutôt que l’inverse, pour éviter d’avoir à se déplacer sous le soleil brûlant. Elle avait amené de quoi faire des cocktails alcoolisés et, même si ce n’était pas vraiment recommandé par son médecin avec les températures actuelles, il ne dit rien. Il ne voulait surtout pas qu’elle se sente coupable ou qu’elle s’empêche de boire ses pina colada. Avant de passer à ce genre de plaisir-là toutefois, ils avaient profité d’un petit moment intime à l’étage, et par miracle son corps suivit la cadence malgré la chaleur. Heureusement qu’il avait un bon système d’air climatisé, parce qu’il aurait très mal vécu de ne pas faire l’amour à Charlie pendant toute la durée de la canicule. Lui qui avait été inactif sexuellement pendant près d’un an, maintenant qu’il avait regoûté à ce plaisir auprès de Charlie, il en voulait toujours plus. Ils redescendirent après leurs étreintes et la pâtissière leur prépara les cocktails frais, pour se rafraîchir. Woody l’attendait au salon, sous ses directives. Il se doutait qu’elle voulait qu’il se ménage. Il allait attraper le verre qu’elle lui tendait à son retour, mais elle le retira rapidement, pour réclamer un baiser comme paiement. Il rit et l’embrassa. « Si c’est tout ce que ça prend pour avoir des cocktails aussi beaux et bien garnis … J’vais te couvrir de baisers. » Le sourire de Charlie s’estompa alors qu’elle lui tendait finalement son verre. Il fronça les sourcils. « Ou pas … ? » Lâcha-t-il ensuite d’une voix un peu confuse.

Les lèvres pendues aux siennes, Charlie perdit soudainement sa bonne humeur. Elle s'était souvenue de cette promesse qu'elle se faisait il y a bien trop longtemps : celle de parler de ses sentiments à Woody. Car oui, elle se sentait heureuse avec lui et ça depuis le premier jour qu'ils se sont envoyés dans les airs à la fête forraine. Il était le seul qui arrivait à lui faire oublier Liam.et elle ne pouvait plus nier que se sentiments prenaient désormais trop de place. Désolé... Je... Elle s'interrompit brusquement. Une fois de plus, elle allait se dégonfler. Mais l'air confus de Woody la fit changer d'avis et elle se lança dans la gueule du loup. J'étais juste en train de penser que j'suis bien avec toi. s'autorisa t-elle de dire maladroitement, avec un sourire gêné. Il était très difficile d'affronter le regard de Woody et c'est pourquoi elle fixait inutilement son verre. Dévoiler ses sentiments étaient une épreuve pour Charlie, ce n'était pas un secret pour Woody. Il la connaissait davantage à présent, tout comme elle savait qu'il n'était pas bavard à ce sujet. Cependant ils arrivaient à un point de leur relation où Charlie ressentait le besoin d'avoir des réponses à ses questions. Est-ce que... Je voudrais... Enfin... Tu vois? C'est de ta faute, j'en perd mes mots. Elle sourit timidement. Bon sang, j'veux juste savoir si on n'est sur la même longueur d'onde. Elle ne voulait pas prononcer ni le mot sentiment ni le mot sérieux. Parce qu'elle ne voulait pas l'effrayer.

Woody était probablement l’être qui gérait le moins bien les sentiments des autres. Il se braquait trop rapidement ou alors devenait un malaise sur pattes quand il ne savait pas comment réagir. Alors, en voyant le sourire de Charlie disparaître, il ne sut quoi dire pour commencer. Il lui fit juste comprendre son propre désarroi, attendant de comprendre quel déclic négatif venait de se faire dans la tête de la brunette. Ils s’amusaient, ils avaient fait l’amour, s’apprêtaient à boire un délicieux cocktail, qu’avait-il dit de si choquant ? Déjà prêt à se mettre en mode défensive, Woody fut d’autant plus surpris d’entendre Charlie lui confier qu’elle était juste en train de penser qu’elle était bien, avec lui. Il eut un léger rire nerveux et confus. « Et c’est ça qui te donne un air d’enterrement ? » Releva-t-il, toujours confus. La pâtissière osait à peine le regarder, ce qui détonnait par rapport aux propos qu’elle tenait. Il ne s’attendait pas à ce que ça aille plus loin que ça encore, toutefois, dans les confidences sur les sentiments. Peut-être n’aurait-il pas insisté autant s’il avait su qu’il devrait, lui aussi, potentiellement s’ouvrir. Il détestait parler de ce qu’il ressentait, parce que dès que son cœur prenait la parole, Woody faisait n’importe quoi. Ce n’était pas pour rien qu’il avait perdu à la fois Sara et Freja, dans des circonstances émotivement douloureuses qui plus est. « Ben … Je suis vraiment bien avec toi aussi, Charlie. Je … j’aime passer du temps avec toi, j’aime … » Il en perdait ses mots, lui aussi. Surtout, il ne voulait pas aller trop loin. Woody et l’engagement, ça faisait mille. La seule avec qui il avait été prêt, c’était Freja, et ça l’avait conduit droit vers la dépression. « J’nous aime bien ensemble, quoi. Est-ce que … est-ce que c’est là que tu veux en venir ? Est-ce qu’on est sur la même longueur d’ondes, comme ça ? » Qu’elle lui dise ce qu’elle voulait entendre et il verrait si c’était quelque chose qu’il était prêt à dire. Mais là, ils patinaient.

Woody et Charlie passaient de bons moments ensemble, ils faisaient tout ce qu'un couple ferait sauf qu'ils ne se disaient pas ensemble. Tout ce qu'il concernait les sentiments, depuis des mois entiers, ils avaient évité le sujet. Alors quand Charlie commença par lui révéler qu'elle se sentait bien avec lui, elle était quelque peu gênée. T'es bête! répliqua t-elle avec sourire boudeur. Si elle faisait une tête d'enterrement c'est qu'elle appréhendait de se confier sur ses sentiments. Elle ne voulait pas brusquer Woody, lui qui n'était pas du genre à franchement montrer les siens. Les mots se perdaient aussi bien que pour elle que pour lui. Bien qu'il essayait de la rassurer, elle le voyait bien, il n'avait pas répondu à ses interrogations. Sa faute : Charlie éprouvait de grosses difficultés à être claire. Ça me fait du bien d'entendre ça mais ce n'est pas seulement là où je voulais en venir. Elle jeta un regard dans le vert de ses yeux, cherchant à peser chaucun de ses mots. À vrai dire, je me suis attachée bien plus à toi que je ne le pensais. Sans doute il ne l'ignorait pas, mais peut-être qu'il ne savait pas à quel point il l'aidait à soigner ses blessures. Le temps mais surtout lui, la réparait un jour après l'autre. Seulement les sentiments s'en étaient mêlés et cela pouvait entrainer de lourdes conséquences, elle le sait. C'était pourquoi elle voulait connaître les intentions de Woody, car les mois s'écoulaient et cette discussion se présentait de plus en plus inévitable. Tu le sais déjà, je ne suis pas sortie indemne de ma dernière histoire. Toi non plus, je sais. Alors je ne sais pas où tu en es, ce que tu veux, mais moi je ne veux plus jamais subir un triangle amoureux. avoua franchement Charlie. Elle cherchait à ce qu'il comprenne que ses inquiétudes se portaient énormément sur Freja. Ce dont elle avait vécut avec Liam l'avait bien trop abîmé. Aussi étonnant que cela puisse paraître, depuis Charlie changeait, grandissait, apprenait de ses erreurs. Elle ne voulait plus fuir ses sentiments comme elle l'a toujours fait.

Il était vrai que Charlie et Woody avaient très peu parlé de ce qu’ils représentaient l’un pour l’autre. L’amie de Charlie, Billie, avait elle-même était plus impliquée dans la compréhension de leur relation que les principaux concernés. Le trentenaire ignorait quelles raisons motivaient ce silence de la part de la pâtissière, mais de son côté il était parfaitement lucide quant aux motifs de son inaction quant à l’étiquetage de leur duo. Il avait l’impression que dès qu’ils décideraient d’être un couple, toute cette simplicité allait s’envoler. La preuve : il s’agissait actuellement de leur première tentative à verbaliser leurs sentiments, et voilà qu’ils étaient tous les deux confus, intimidés, perdus. Woody tenta d’en donner le plus possible à Charlie, sans mentir, sans en dire trop non plus. Il avait encore cette boule au ventre qui lui criait qu’il venait à peine de se remettre sur pieds, que ce n’était pas le moment de prendre des risques. La pâtissière lui avoua alors s’être attachée à lui bien plus qu’elle ne le pensait. Il esquissa un faible sourire en baissant les yeux. Woody Rutkowski était gêné. Lui qui avait entendu cette confidence des dizaines et des dizaines de fois lors de ses jeunes années, le voilà qui ne savait plus comment y réagir. « Je me suis beaucoup attaché à toi aussi, Charlie … À la base BowTie ça avait été juste pour … pour voir si j’y arrivais encore, quoi. Mais ça a été plus loin, avec toi. » Admit-il. Autrement, il ne serait pas encore là avec elle, bien des mois plus tard. Le jeune homme hocha la tête quand Charlie lui parla de ses blessures de sa dernière histoire. Oui, il le savait déjà. Tout comme elle savait que lui non plus ne s’était pas encore tout à fait remis de Freja. « Je ne voudrais pas avoir à te le faire subir non plus. Et j’veux pas le vivre non plus. » Il la regarda enfin. « J’veux pas te mentir, Charlie, parce que justement je tiens à toi et je te respecte, énormément. Freja … elle a été une partie importante de ma vie. Elle l’est encore, d’une certaine manière, même si j’ai l’impression que quelque chose est à jamais brisé entre elle et moi. On s’était promis de s’attendre, entre tous nos bad timing … mais depuis plus d’un an maintenant j’ai l’impression d’attendre après le vide, parce qu’elle a trouvé quelqu’un d’autre. Le truc c’est que je ne suis pas encore certain, de mon côté, de pouvoir affirmer qu’elle aussi, elle attendrait après le vide … » En d’autres mots, Woody ne savait pas s’il avait définitivement laissé Freja dans le passé, ou si inconsciemment, il attendait encore de la retrouver dans quelques mois, dans quelques années. « Toi, si Liam revenait vers toi, s’il te disait qu’il s’est trompé et que c’est toi qu’il choisit, tu ferais quoi ? » Woody ne s’attendait pas à ce qu’elle le choisisse lui. Peut-être parce qu’il avait le sentiment que Liam était pour Charlie ce que Freja était pour lui, et que dans son propre cœur, il n’y voyait pas encore si clair. Charlie avait beau être exactement ce qu’il voulait, présentement, son cœur avait encore un bout de chemin à faire pour oublier les traces laissées par la norvégienne.

Ni l'un ni l'autre ne s'était attendu à ce que cela aille aussi loin entre eux. Pourtant ils se voyaient encore, après des mois et des mois et de plus en plus souvent. Ce fut pourquoi Charlie voulut demander où en était Woody. Après avoir tant souffert d'être au milieu de Liam et Pippa, elle redoutait de répéter le même schéma. Et ses craintes étaient justifiées car Woody avoua qu'ils s'étaient promis de s'attendre avec Freja. Son cœur se serra. Ses mots étaient durs à entendre. Elle baissa les yeux tristement, sans rien dire. Jusqu'à ce qu'il pose cette terrible question qui serra davantage son cœur, si cela était possible. Si Liam revenait vers elle, que ferait-elle?

À l'évocation de son nom, Charlie sentit quelque chose en elle s'effondrer. La mine assombrie, elle resta un long moment silencieuse. Il venait d'être honnête avec elle et cela aurait été injuste de ne pas l'être aussi avec lui. J'sais pas. J'ai laissé la porte ouverte à Liam pendant longtemps. avoua Charlie en toute sincérité. Avant que leur semblant de relation ne se dégrade, Liam avait une grosse emprise sur elle. Mais il n'a jamais essayé de la récupérer depuis qu'elle l'a quitté et c'était la raison pour laquelle elle faisait face à cette triste réalité qu'il ne reviendra pas. Auprès de Woody elle avait retrouvé un réel réconfort, une échappatoire, qui ont donné naissance petit à petit à des sentiments. Elle ne pouvait pas encore prétendre être amoureuse de Woody, comme elle ne pouvait pas nier qu'elle ressentait plus qu'un profond attachement. Il lui faisait du bien au quotidien et chaque moment qu'ils passaient ensemble lui redonnait l'impression de revivre. En ayant cette discussion trop sérieuse elle réalisa qu'elle avait pris le risque de le perdre et cette sensation lui noua le ventre. Je ne veux pas que les choses changent entre nous. lui dit-elle d'une voix presque implorante. Elle osa prendre sa main et affronter son regard. J'aime... comment tu as dit déjà? Je nous aime bien ensemble. rajouta t-elle avec un faible sourire. Alors qu'ils mettaient les choses au clair, elle espérait qu'ils ne reculent pas dans leur relation si particulière à leurs yeux. Tous deux avaient leurs fantômes du passé mais Charlie semblait bien plus prête à fermer la porte à Liam que Woody à Freja.

Si au départ, Woody avait eu l’impression que Charlie et lui avaient à peu près les mêmes blessures, pour celles du cœur du moins, il pensa aujourd’hui qu’ils ne guérissaient toutefois pas au même rythme. De son côté, cette conversation-là, il ne l’aurait pas envisagée avant plusieurs mois encore sans doute. Il en était encore à surfer la vague, à profiter de l’instant présent auprès de Charlie, sans trop chercher à se poser des questions. Après plusieurs mois de relation, c’était probablement très lâche de sa part d’espérer que leurs cœurs demeurent ankylosés. Pour avoir le cœur net du niveau où ils en étaient chacun de leur côté, Woody se permit de renvoyer la balle à Charlie, à propos de Liam. Sa réponse n’était pas des plus arrêtées. « Tout comme je l’ai laissée ouverte pour Freja. J’dirais pas qu’elle est encore toute grande ouverte, mais … elle est pas encore refermée non plus. » Et qu’en était-il de celle que Charlie avait dessinée pour Liam dans sa tête ? Y avait-il encore une lueur d’espoir qui se faufilait à travers l’embrasure ? La pâtissière prit sa main en affirmant ne voulant pas que les choses changent entre eux, qu’elle les aimait ensemble, reprenant les mots de l’homme. Il esquissa un sourire et baissa les yeux, pendant un bref instant, vers leurs mains. « Tu sais … j’ai jamais prétendu être le prince charmant, ou whatever, et je suis pas mal certain qu’on t’a souvent mise en garde à propos de moi dans les derniers mois. » Il n’était pas naïf, Woody, il était au courant qu’ils avaient des connaissances en commun, des connaissances qui n’auraient pas forcément que du bon à dire de l’aîné Rutkowski. Surtout pas lorsqu’il était question d’amour. Il en avait fait des ravages, à Bowen, depuis qu’il avait l’âge de briser des cœurs. Et là-dessus, il avait été plutôt précoce. Le jeune homme haussa les épaules. « J’ai pas envie de leur donner raison, mais j’ai pas non plus envie de te mentir. J’ai changé dans les dernières années, j’saurais pas encore trop dire de quelle façon, mais je pense que je me situe sans doute à mi-chemin entre ce qu’on a pu te dire sur moi, et ce que j’ai envie, moi, d’être pour toi … » Woody aurait aimé lui promettre du concret, du solide, à Charlie. Il aurait aimé pouvoir la rassurer aujourd’hui. Mais il n’en était pas tout à fait là, il ne pouvait rien lui affirmer sans basculer vers le mensonge. « Moi non plus j’ai pas envie que les choses changent alors … si tu veux me laisser ma chance, on peut voir ensemble où est-ce que ça nous mène plus tard. » Peut-être que c’était nulle part, peut-être que c’était droit vers le mur, peut-être que c’était vers la délivrance de leurs chaînes du passé. Ce serait peut-être très laid, ce serait peut-être très beau. Seul le temps le dirait.

En admettant qu'il laissait une porte ouverte à Freja, Charlie aurait dû prendre ses jambes à son cou. Elle aurait dû se dire qu'il n'y avait plus l'ombre d'un espoir. Elle aurait dû simplement laisser tomber. Et pourtant non. La pâtissière restait là, prenant sa main, voulant de lui. Encore. Elle aimait ce qu'il vivait entre eux, c'était des moments précieux, des moments qu'elle ne voulait pour rien au monde changer. Peu importe ce que les gens affirmaient, car oui, Woody disait vrai, on l'avait plus d'une fois avertie à son sujet. Oui, on m'a mise en garde. Et alors? Je n'ai pas de problème avec la personne que tu es. J'aime bien, moi, comment tu es. Ton passé, tes blessures, tes défauts, je m'en fiche parce que je les accepte. Je vais te dire : je les aime bien, même, ces défauts! Tu supportes bien les miens. rajouta t-elle en haussant les épaules. Ils avaient encore cette même blessure et en dehors de cette similitude, Woody et Charlie étaient tous les deux différents l'un de l'autre. Au fil du temps elle avait appris à connaitre le caractère de Woody, mais elle le vivait bien. Jusqu'à présent cela ne les empêchaient pas de vivre des moments paisibles à deux. Ils avaient besoin d'être honnêtes l'un envers l'autre pour avancer et maintenant que les choses étaient dites, ils semblaient pourtant revenir là où ils en étaient. Si tu veux me laisser ma chance. Charlie s'attendrit à ses mots. Tu sais quoi? Elle se redressa et se mit à califourchon sur lui. Ses mains entourèrent sa nuque, elle le regarda avec tendresse. J'ai envie qu'on se donne une chance... Parce que... T'as tout de suite été d'accord de faire la boule avec moi... Parce qu'on a un poisson depuis plusieurs mois et qu'il n'est toujours pas mort... Parce qu'en pleine nuit tu m'as laissé dormir avec toi alors que j'étais complètement bourrée... Parce que tu me rends heureuse mais que tu ne t'en rends même pas compte. Son sourire se fit plus timide. En parlant à voix haute de toutes ces raisons insignifiantes, elle prit conscience que ses sentiments pour Woody étaient bien réels. Si seulement lui, lui laissait une chance d'abriter son coeur.

Un petit rire soufflé, pas du tout surpris, s’échappa d’entre les lèvres de l’homme qui avait encore les yeux baissés vers leurs mains, à Charlie et à lui. Le jeune homme connaissait sa réputation, celle qui le suivait maintenant sans jamais se dissocier de lui malgré le chemin parcouru. Il faut dire que son attitude négative des dernières années ne donnait pas davantage envie de parler en sa faveur. Autrefois coureur de jupons, désormais bougon. Il n’était pas le candidat idéal pour un cœur doux et lumineux comme celui de Charlie. Pourtant, malgré les avertissements, elle était encore là. Il plongea son regard dans le sien alors qu’elle affirmait aimer ses blessures et ses défauts. « J’crois quand même que ta liste à toi est bien moins longue que la mienne. » Releva-t-il alors qu’elle les comparait, puisque lui aussi supportait les défauts de Charlie. Il en avait mis du temps, à lui en trouver. Il inspira profondément. « J’crois que ce que j’essaie de te dire c’est que … que j’sais pas si j’saurai devenir autre chose que ça. P’t’être même que t’as encore rien vu. » Il haussa les épaules. Il avait l’impression de replonger dans les mêmes incertitudes qu’avec Sara, qu’avec Freja. Le même pattern d’autodestruction. La différence cette fois, c’est que Woody, après avoir nommé ses doutes, osa demander qu’on lui laisse une chance. Il ne s’était jamais autorisé ça, auprès de ses ex. Pas avant qu’il ne soit bien trop tard. Il avait envie de croire un peu plus en lui, en ce qu’il était capable d’offrir malgré son état qui se dégraderait, autant dans son corps que dans sa tête. À cette demande, Charlie se redressa et monta sur Woody à califourchon. Surpris, il l’accueillit avec un sourire déstabilisé. Il rit quand elle parla de Woolie, toujours bien vivant. L’aîné des Rutkowski ne lui avait jamais donné autant de temps. Tout comme il n’avait pas prévu que Charlie et lui iraient aussi loin, non plus. « T’as même pas idée de ce que tu me fais, là, Charlie Keynes. » Déclara-t-il. « J’pensais devoir faire une croix sur ça, j’croyais que j’y arriverais pas à nouveau … mais tu m’prouves le contraire un peu plus à chaque jour. » Il avança son visage vers le sien et l’embrassa. Il n’était pas amoureux, pas encore, ou alors il était encore trop perdu dans sa tempête pour en voir les signaux, mais au moins il comprenait que ce n’était pas perdu. Il n’était pas perdu.

Charlie connaissait la réputation de Woody et elle ne comprenait pas toujours pourquoi les gens avaient les yeux ronds d'apprendre qu'elle le fréquentait intimement. Les writers et le monde entier semblaient croire qu'il était un célibataire endurci. Le caractère du physiothérapeute menait aussi sa propre réputation.  Je n'ai pas envie de comparer. Un de nous deux devrait perdre... et on est tous les deux de très mauvais joueurs. lui fit-elle remarquer, tout sourire. Woody essayait de lui faire comprendre qu'il n'était pas sûr de devenir autre chose que ce qu'il était à présent. Avait-il une part encore plus sombre à cacher? La curiosité de Charlie se réveilla. Au lieu d'être alerté, elle avait davantage envie d'être avec lui. Je ne veux pas que tu changes insista-t-elle fermement sur ce point. Au fur à mesure de la discussion l'inquiétude grandissait. Elle avait peur que Woody se rende compte qu'ils n'avaient rien à faire ensemble et qu'il préférait qu'ils arrêtent de se voir. Il alimenta ses doutes en affirmant qu'il n'avait pas encore fermé la porte à Freja. Puis contre toute attente il lui affirma qu'il voulait qu'elle lui laisse sa chance. Le cœur de Charlie explosa en même temps que son visage s'illumina. Elle se redressa à califourchon sur lui, dévoilant un peu plus ses sentiments. À l'énumération de Woolie, leur poisson, elle le fit rire, et c'était une si douce récompense de le voir ainsi.  Tandis qu'il assurait qu'elle ne savait pas ce qu'elle lui faisait là, elle chercha son regard complice. De quoi? demanda-t-elle le sourire aux lèvres, les joues rougissantes. Il approcha alors son visage du sien et elle l'embrassa. Fermant les yeux elle savoura cet instant où une agréable chaleur lui caressait le ventre. Oui c'était indéniable elle se sentait bien. Les sentiments étaient bel et bien présents. Elle entoura ses bras autour de sa nuque et se blottit contre lui. Son parfum lui devenait familier à présent et c'était terrifiant d'imaginer qu'elle ne puisse plus un jour le respirer. J'avais peur de t'en parler. avoua Charlie d'une toute petite voix étouffée, la tête dissimulée contre lui.  J'avais peur de te faire peur. expliqua-t-elle avec un sourire qui pouvait s'entendre au ton de sa voix.

Un rire franchit les lèvres de l’homme qui avait pourtant eu tant de mal à rire, ces dernières années. C’était aussi ça, l’effet que lui faisait Charlie. Elle savait tourner n’importe quelle situation pour la rendre belle et lumineuse. Pourtant, Woody était passé pro dans l’art d’assombrir son quotidien. Mais elle trouvait toujours le moyen de le faire sourire. Ce n’était pas gagné d’avance avec un grognon comme lui mais la jeune femme n’avait même pas l’air d’en faire l’effort. « T’as raison, j’ai pas trop envie que tu te mettes à bouder devant ma victoire écrasante. » Gagner pour avoir le plus de défauts, ce n’était pas ce qu’il y avait de plus glorieux et il n’y avait pas de quoi être fier. Woody savait qu’il n’était pas l’homme le plus adorable en ville, tout le contraire même, mais il n’avait pas envie de faire semblant. Au moins avec lui, on avait l’heure juste. Une personne n’avait jamais à se demander si Woody l’aimait ou non. Il le disait ouvertement et le laissait rapidement savoir. Il laissa également savoir à Charlie que les défauts qu’il avait, ils ne disparaîtraient pas en fumée, pire encore ils s’ancreraient encore plus dans sa personne au fil des années. Ça ne sembla pas l’effrayer. Aurait-il voulu que ça l’effraie ? Lui-même ne savait plus ce qu’il voulait. « Alors si je change mais en pire ? » Osa-t-il demander. Parce que ne pas changer ne signifiait pas seulement qu’elle le voulait plus positif. Elle le voulait là, comme ça, comme il était. Sauf que la situation s’envenimerait pour lui, c’était inévitable, et le poison ne ferait pas de dégâts que sur son corps. Malgré tous ces avertissements, malgré cette discussion qui aurait pu mettre fin à leur relation vu que Woody semblait vouloir la convaincre de laisser tomber, il lui demanda sa chance. Charlie, elle lui faisait du bien, elle le faisait revivre. Il fallait qu’il s’accroche à l’espoir qu’elle était. La blonde se redressa à califourchon sur le trentenaire, à la plus grande surprise de ce dernier qui l’accueillit avec douceur. Elle le questionna davantage sur les effets qu’elle lui faisait, alors il lui parla du fait qu’elle lui redonnait foi en l’amour. Il ne le dit pas comme ça, évidemment, c’aurait été bien trop pour Woody. Mais l’essence de ses paroles était la même. « Oh, j’ai peur, tu sais. » Lâcha-t-il. « J’ai fucking peur. » Ajouta-t-il. « Mais j’ai trop souvent laissé ce sentiment-là diriger ma vie. » Aujourd’hui, Woody avait besoin de retrouver un certain contrôle. Et en prenant des décisions qui allaient à l’encontre de son instinct effrayé, peut-être arriverait-il à sentir qu’il avait du pouvoir sur sa vie.

Tentant de détendre l’atmosphère, Charlie fut rassurée d’entendre le rire de Woody. Un rire contagieux qu’elle accompagna aussitôt.  C’est faux ! J’boude pas ! protesta-t-elle en lui mettant le doigt sur la bouche, comme si elle allait parvenir à l’empêcher de répliquer. J’boude pas parce que de toute façon, je gagne toujours. Il n’y avait bien qu’eux pour avoir un tel goût pour la compétition. C’était aussi ce qu’il faisait leur complicité et enclenchait des fous rires garantis.  Reprenant un air sérieux, Charlie insista et certifia qu’elle ne voulait pas qu’il change. Son caractère soupe-au-lait ne lui déplaisait pas, elle y était même attachée aussi étrange que cela pouvait sembler. Elle ressentit qu’il n’était pas pleinement rassurée, car il lui l’interrogea si il changeait, « mais en pire » ? Selon elle, le pire serait qu’il soit violent avec elle mais jamais au grand jamais elle pensait qu’il pouvait en arriver là.  Je ne sais pas, on avisera finit-elle par dire, incertaine de ce que leur réservera l’avenir. Cette réponse pouvait paraître vague mais Charlie ne démordait pas. Tout ce qu’elle savait ; c’était qu’elle avait envie de s’accrocher à cette relation. Encore fallait-il qu’il lui donne vraiment l’opportunité de continuer. Pourtant, il le fit. Il lui assura, lui demandant même une « chance » de voir où leur histoire mènerait.  Radieuse qu’il envisage cette perspective, Charlie rayonna, se positionnant sur lui. Il l’accueillit sous un tendre baiser, qui ne faisait qu’enflammer son cœur. Depuis son retour de Paris, depuis qu’ils s’étaient retrouvés, elle flottait sur un petit nuage. Soulagée, elle lui avoua qu’elle avait eu peur d’avoir cette discussion si sérieuse. Peur de lui faire peur.  Contre toute attente, il admit que c’était le cas. On pourrait avoir peur ensemble ? suggéra-t-elle sans parvenir à retenir un sourire. Entendre Woody, de sa bouche, qu’il avait peur, était plus qu’inattendu. Quelque part cela la rassurait de voir qu’elle n’était pas la seule à se sentir effrayée par ses sentiments. Elle craignait, du moins elle s’en persuadait,  avoir une longueur d’avance par rapport à Woody. Mais alors qu’elle était là, si bien, entrelacée à son cou, ses doutes devenaient poussières. Elle se blottit contre sa nuque, profitant pour respirer le parfum boisé du physiothérapeute. J'ai envie que ça marche entre nous... Je tiens à toi. chuchota-t-elle, les yeux fermés, laissant échapper ses mots sans se rendre compte de l'impact terrifiant qu'ils pouvaient avoir.

Continuant à rire même avec le doigt de Charlie sur sa bouche, Woody tenta d’écarter la main de la blonde mais ils commencèrent juste à se chatouiller ou se bousculer gentiment, dans leurs mouvements limités par leur position assise. La jeune femme répliqua alors qu’elle ne boudait pas puisqu’elle gagnait toujours. Un autre rire, plus fort et sarcastique cette fois, se fit entendre brièvement chez le trentenaire. « Attention j’pourrai plus t’faire passer dans les cadres de porte jusqu’à ma chambre avec ces chevilles-là. » Le trentenaire sourit. Ce n’était pas anodin qu’il parle de sa chambre. Depuis qu’ils avaient enfin fait l’amour pour la première fois, Charlie et Woody se redécouvraient souvent sous les draps. Peut-être trop, peut-être qu’il n’y avait pas assez de conversation plus profonde à côté. Peut-être était-ce ça qui effrayait Charlie, que leur relation ne soit qu’un truc casual, pour pallier la solitude de Woody, pour avoir quelqu’un avec qui partager ses nuits mais pas sa vie. Les doutes étaient légitimes, après tout le physiothérapeute se demandait parfois encore, lui aussi, ce qu’ils étaient et jusqu’où ils iraient. Mais pas pour les raisons que pensait Charlie. Pas parce qu’il n’arrivait pas à se voir avec elle. Il n’arrivait juste pas à se voir avec qui que ce soit dans son avenir, Woody, c’était comme ça depuis que le diagnostic était tombé. Il pensait avoir cheminé et sans doute était-ce le cas un peu, mais il avait encore des kilomètres à parcourir avant d’accepter sereinement ce qui l’attendait. « Tu serais prête à gâcher ces années-là de ta vie dans l’attente de voir ce que ça aurait l’air dans quelque temps ? » Demanda-t-il. Mais s’il avait appris une chose de sa relation – et de sa rupture – avec Freja, c’était que peu importe ce qu’elle choisissait, c’était sa décision. Il ne pouvait plus penser et agir à la place des autres, Woody. C’était un long apprentissage, mais il faisait des efforts. Il accueillit donc Charlie sur lui sans chercher à la repousser. Elle lui donnait sa chance alors il la prendrait et il essaierait de faire de son mieux. « On pourrait avoir peur ensemble, oui. » Il esquissa un faible sourire avant de reprendre un visage sérieux, plongeant son regard dans le sien. « Promets-moi juste une chose. Si ça commence à te faire trop peur, dis-le-moi. » Il ne parlait de leur relation, il ne parlait pas des doutes, il parlait de sa condition, de lui-même. Mais il avait du mal à être clair. La blonde se blottit contre lui, soufflant son espoir contre son épaule. « Je tiens à toi aussi, Charlie. » Contre toute attente, il s’attachait. Il ne lui restait donc plus qu’à se détacher de Freja.

Sous les éclats de rire, Woody et Charlie se taquinaient. Même en abordant une discussion sérieuse, elle réalisait qu'il était bon de voir que leur complicité restait intacte. Ou peut-être était-ce aussi leur moyen de détourner le sujet. Pourtant Charlie ressentait de plus en plus le besoin d'avoir des réponses à ses questions et de savoir ce que Woody attendait d'elle, d'eux. Ils se voyaient souvent, ils échangeaient des moments à rire et beaucoup - beaucoup, de moments charnels. Cependant ils n'avaient encore jamais parlé de ce qu'ils étaient vraiment l'un pour l'autre. Jusqu'à présent Woody lui apportait des réponses bien plus positives qu'elle ne le craignait. Il lui avait fait comprendre qu'il n'avait pas entièrement tiré un trait sur Freja, mais au moins il avait envie de continuer de la voir et rien que pour ça, elle débordait de joie. Elle repoussait toute échelle qui se tendait pour la faire descendre de son petit nuage. Woody insistait, cherchant une faille, et c'est à cet instant qu'elle fit le lien. Woody n'aimait pas parler de sa maladie, il évitait et détournait souvent le sujet. Un peu comme maintenant. Quoi? J'ai bien entendu "années"? Donc t'es prêt à me supporter pendant plusieurs années? s'amusa Charlie d'un air prétentieux. Elle reprit aussitôt avec plus de sérieux, mais pas sans l'ombre d'un sourire. Tu sous-estimes à quel point j'ai envie d'être avec toi. T'as pas à t'inquiéter.   Elle ne comprenait pas que Woody puisse croire que sa maladie impactera leur relation. Pour elle il ne s'agissait aucunement d'un obstacle entre eux. Les séjours à l'hôpital, les médicaments, les douleurs, les risques, tout ça, elle le connaissait déjà à travers son frère. Cela faisait partie de son quotidien depuis adolescente. Le plus effrayant présentement serait surtout qu'il ne veuille plus la voir.

Tandis qu'il captiva son regard, Charlie s'immobilsa face à ce que Woody lui demandait. Lui promettre de lui dire quand elle commencera avoir trop peur. Elle fronça les sourcils et acquiesça d'un signe de la tête.  Je te le promets. jura Charlie d'une toute petite voix avant de sceller cette promesse en déposant ses lèvres sur les siennes. Alors qu'elle espérait avoir apaisé les doutes du physiothérapeute, elle se blottit contre lui, s'imprégnant de son parfum boisé. En lui confiant qu'elle tenait à lui, elle ne s'attendait pas à ce qu'il lui retourne cet aveu. Heureusement qu'il ne pouvait pas le voir car elle rougissait. Son cœur semblait bien plus léger à présent. Est-ce que tu veux rajouter quelque chose avant qu'on ferme cette petite parenthèse?