hasta que salga el sol / Léo & Cam

2008, Cuba, Léo a 21 ans, il est jeune, bourré de principes, de rêves et d'idéaux. Il vient d'obtenir une accréditation pour faire des photos sur l'île, un journal les lui achètera s'il les trouve bonnes. C'est sa première chance de se faire un nom dans le monde de la photographie, du reportage photo pour être honnête, de prouver de quoi il est capable. Il est fâché à avec son père mais sa mère a tout de même accepté de financer son voyage, maman a toujours cru en lui. Il a tout a prouver et des envies de liberté plein la tête. Son rêve, obtenir des images exclusives, des preuves de la dictature qui, selon lui, règne d'une main de fer sur le pays, c'est un gamin un peu trop ambitieux, mais il s'en fou, il la confiance que lui confère sa jeunesse. Depuis quelques jours il traîne dans les bars, se mêle aux locaux, il a entendu quelques noms, des choses intéressantes, un prénom en particulier est revenu souvent à ses oreilles, Alejandro. Il a enquêté, il s'approche de quelque chose, un savant fou, une histoire d'expérimentations sur les humains, il veut en savoir plus. Il ne lui reste que quelques jours sur place, il a plus d'un millier de photos sur sa carte mémoire et de quoi écrire des choses pas jolies jolies, mais lui il a sa nouvelle obsession, dépeindre les actes de cet Alejandro au delà de cette île maudite, faire éclater la vérité au grand jour. Alors il va frapper d'un grand coup, aujourd'hui, il rencontre la petite sœur du médecin fou et il compte bien lui soutirer des informations.

Léo avait les mains moites et le regard fiévreux, le rendez-vous avait été donné dans le musée national, là où la jeune fille était stagiaire depuis quelques jours, le problème c'était qu'il n'y connaissait pas grand chose en art, encore moins en patrimoine cubain, alors il ne savait pas vraiment comment aborder la jeune Camilla pour commencer. Mais il allait improviser, il savait toujours y faire, avec sa belle gueule de jeune aventurier australien et son bagou légendaire. Il se présenta à la cubaine avec un sourire un peu forcé mais avec ses plus beaux mots espagnols. Bonjour mademoiselle Jimenez, je suis Léo, merci de me recevoir.

Camilla était jeune, très jeune, quinze ans tout au plus. Léo ne pourrait assurément pas la séduire avec ses regards enjôleurs, ça serait équivalent à une tentative de détournement de mineur, c'était dangereux, voir même suicidaire, surtout dans un pays en crise comme celui-ci. Et même s'il ne pouvait nier qu'elle était belle à se damner il devrait réprimer sa fougue de jeune premier pour rester professionnel avant tout. Même si sa visite n'avait rien de professionnel, mais ça elle n'en savait encore rien. Elle lui tendait une main pleine de bravour alors que tout comme lui, la gamine ne semblait pas en mener bien large, il la serra avec une virilité convaincue et qu'il espérait convaincante ainsi qu'un sourire aux lèvres pour détendre l'atmosphère. Il s'installa sur la chaise qu'elle lui présentait, il avait chaud dans ce bureau, comme s'il étouffait. Se raclant la gorge il chercha ses mots. On va commencer par se tutoyer, ça sera plus simple et... Léo, c'est très bien, pas besoin d'un Monsieur ! Lui qui avait horreur des rencontres pompeuses, il ne voulait pas que la jeune Jimenez se montre comme ça envers lui. Il voyait bien qu'elle évitait son regard, pourtant il voulait qu'elle se détende, qu'elle ait confiance en lui, c'était important pour la suite de leur rencontre. Ce musée est une merveille, quelle chance de travailler ici ! Tu as toujours aimé l'art ?

Elle semblait se décontracter un peu, c'était déjà ça, même si elle avait donné un accord assez peu convaincu à la demande de tutoiement de Léo, lui ne comptait pas revenir dessus, il avait à peine la vingtaine, lorsqu'on l'appelait Monsieur Emerson il avait l'impression qu'on s'adressait à son père et l avait horreur de ça !
L'entretien pouvait commencer, il tâtonnait, n'ayant clairement pas l'âme d'un interviewer... pourtant sa question sembla éveiller Camilla, elle avait les yeux qui brillaient et dans ses mots on sentait toute une passion, c'était déjà ça. C'est formidable de pouvoir allier travail et passion. Et ce pays semble regorger d’œuvres, d'Histoire, c'est d'autant plus stimulant. Il hocha la tête pour donner plus d'importance à ses paroles mais il ne savait pas bien ou tout ça pourrait le mener au sujet qu'il voulait aborder, surtout qu'il allait rapidement arriver à court d'idées concernant l'art. Est-ce que le régime sous lequel vous vivez, ici à Cuba, vous soumet à une sorte de censure, d'ailleurs ? Est-ce que vous vous sentez menacé ? Dans le domaine de l'art, j'entend. Les mains moites, il espérait qu'elle s'ouvre un peu et qu'il réussisse petit à petit à introduire le sujet de façon détournée.

Le problème de la petite Jimenez c'est qu'elle était jeune et, en effet, elle ne se rendait peut-être pas compte de tout ce qu'il se passait dans son pays. Ou pire, peut-être qu'elle était parfaitement au courant des actes de son frère et qu'en plus elle le protégeait. Léo n'avait pas pensé à ça, si tel était le cas alors il aurait du mal à lui soutirer des informations sans éveiller des soupçons. Il était dans l'impasse. Prendre des photos, jouer au justicier de cette façon c'était bien plus simple, il suffisait d'être discret et rapide. Alors que là c'était tout le contraire, il était totalement à découvert et il devait prendre son temps. Oui.. mmh, pardon, je vais trop loin. L'idée n'est pas d'insulter ton pays. Au contraire, il est superbe. Mais, d'un œil extérieur, on trouve que la vie ici peut être difficile... vous n'êtes pas libres, en quelque sorte. Non, il ne prononcerait pas le mot dictature devant Camilla, ce serait prendre le risque de la perdre totalement. Tu as de la famille, dis-moi, des sœurs, des frères ? Vous êtes tous des passionnés d'art, j'imagine ! Il essaya par un autre moyen, essayer de copiner avec elle, de la prendre par d'autres sentiments, peut-être que ça fonctionnerait.