Losing my religion ✖ ARTHUR

Losing my religion.

ARTHUR & SYDNEY

Dix heures passées. Je regardais la montre que l’on venait fraîchement de m’offrir. Je me tenais là, devant cette immense bâtisse en attendant Arthur. On s’était donné rendez-vous ici, à dix heures pétantes et je respectais toujours mes horaires, mes délais. J’avais pourtant failli être en retard, je n’avais même pas eu le temps de me changer à vrai dire. Je portais toujours une de ces robes dans lesquelles j’étouffais constamment, une robe de couturier que l’on m’obligeait à porter au boulot pour déambuler dans les couloirs de l’entreprise, sourire aux lèvres. Déjà deux ans où je vivais cette situation et je n’en pouvais plus. Apparaître dans les journaux people à cause de mon père, de l’une, parmi tant d’autres, de ses tromperies, mais en vers qui ? Après tout il n’était pas marié, il était toujours Monsieur Carter, le bon parti toujours célibataire. Être sous le feu des projecteurs me dégoutait, parfois j’aimerais retourner à mon ancienne vie, l’usine ce n’était pas vraiment beaucoup mieux mais au moins je n’étais pas une poupée que l’on exposait pour son sourire. Je soufflais tout en remettant une mèche de cheveux derrière mon oreille. Pourquoi un rendez-vous près d’une église ? Parce que c’était à mi-chemin entre mon travail et probablement le sien, ou chez lui, qu’est-ce que j’en savais moi. Je ruminais tout en regardant les illuminations de cette église à travers ses vitraux. C’était beau à voir avec la nuit qui était rapidement tombée. Je croisais mes bras contre ma poitrine tout en jouant avec mon talon sur les pavés. Je n’étais pas forcément croyante et je n’étais pas forcément athée non plus, c’était étrange, j’avais le cul entre deux chaises. Mais mise à part la religion, j’adorais ce genre de bâtisse, extrêmement majestueuse. Je me posais sans cesse la question de la difficulté pour bâtir ce genre de lieu. Oui, parfois je me posais des questions un peu futiles…

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C’est au moment où il jeta un œil à l’extérieur qu’il réalisa l’heure qu’il était et il était tard. Il s’étira. Il ne savait plus trop combien de temps il avait passé sur cette énième révision du script. Il espérait seulement qu’il réussirait à être à l’heure pour ce rendez-vous avec Sydney. Il ne voulait pas la manquer…

Comme d’habitude, il ne réussirait probablement pas à fermer l’œil cette nuit et il ne lui restait plus rien. Il voulait absolument acheter ce soir.  Il se leva et alla chercher son portefeuille, s’assurant que le comptant y était, ainsi que les clés de sa voiture. Il ne pris pas la peine de se changer et même qu’il pris nonchalamment le temps de nouer un peu plus sa cravate et de tirer sur les manches de sa chemise, comme il le faisait toujours avant de partir. Il ne ferma pas les lumières et passa la porte du bureau en coup de vent.

Ils s’étaient donnés rendez-vous près de l’église. Il aimait bien cet endroit, les églises lui rappelaient de bons souvenirs. La portion italienne de sa famille, du côté de son père, était très croyante. Il se souvenait, enfant,  de ces interminables conversations du dimanche sur le pavé de leur paroisse à Rome où il ne faisait qu’observer les jupes et les collants de nylons des dames et sentir l’odeur de cigarette que les pantalons des hommes émanaient. De plus, les églises avaient ce charme austère et silencieux qui n’appartenait qu’à elles. Quand il regardait un cloché, il avait l’impressions de toucher un peu à toutes les époques dont il avait été témoin.

Il aperçut de loin une femme gracieusement habillée qui jouait, les bras croisés, avec le talon de ses souliers de marque. Il leva un sourcil. Ce serait une drôle de rencontre. Son premier contact avait été Blake, disons qu’il ne partageait pas l’allure de cette Sydney. Il immobilisa silencieusement la voiture dans un petit bruit de cailloux rebondissant.  Il prit son temps pour sortir et marcha vers elle.

Sous la lumière faible, mais chaude, du lampadaire qui éclairait le devant de l’élise il put mieux l’observer. Elle avait des origines asiatiques et une petite mèche de cheveux noire et rebelle qui tombait sur le côté de son visage.

- Tu es bien Sydney? demanda-t-il simplement, parcourant son regard sur elle.

Attendant sa confirmation, il passa une main dans sa poche et en retira un paquet de cigarette. Il en glissa une dans sa bouche et tendit le paquet en la direction de la gracieuse dame qui allait lui vendre son stock pour lui en proposer une.

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ARTHUR & SYDNEY

J’attendais impatiemment qu’il daigne montrer le bout de son nez. Je scrutais ma montre hors de prix tout en faisant cogner mon talon contre le sol. Blake m’avait refilé son numéro en espérant que je conclus un autre deal et visiblement c’est ce qui allait se passer, s’il voulait bien se pointer. D’un coup, j’observais du coin de l’œil une voiture arriver doucement puis se garer. Arquant un sourcil, je guettais la silhouette qui en sortait. Un homme d’une grande classe, très bien habillé, à vrai dire c’était un très bel homme. Un léger sourire venait alors se dessiner sur mon visage, sourire que je perdais alors qu’il arrivait vers moi. Les apparences, toujours les apparences… « Tu es en retard, mais oui c’est bien moi. » J’aimais donner le ton du sérieux, après tout j’avais totalement hérité de mon père de ce côté, je menais les affaires d’une poigne de fer. Blake n’était pas totalement chaud au début pour me recruter, après tout mon visage était dans pas mal de magazines ainsi que sur des pubs, mais au final, il avait pu constater après plusieurs semaines que c’était une bonne chose puisque j’avais doublé son chiffre d’affaires. J’étais une bonne commerciale, une pure et dure et j’adorais ça. « Merci. » Je me radoucissais en lui offrant un sourire, j’aimais rendre un peu fou les gens et les voir sauter d’un pied sur l’autre pour danser. Je tirais de mes doigts fins une cigarette que je venais lover entre mes deux lèvres puis j’attendais qu’il allume sa cigarette. En bon gentleman, du moins je l’espérais, je me penchais vers lui pour qu’il allume la mienne et une fois fait, j’inspirais une bonne bouffée de fumée. « Marche avec moi Arthur. » Je venais, très chaleureuse d’un coup, attraper son bras afin de m’y accrocher gentiment comme faisaient la plupart des couples autrefois. Je me mettais alors à marcher vers un coin un peu plus sombre que j’apercevais au loin. Les rues avaient beau être désertes, je ne voulais pas prendre le risque de dealer en pleine rue. Dans un coin sombre au moins, en cas de surprise, nous pourrions nous prendre pour des amants coquins.

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Elle l’avait accueilli sans même l’ombre d’un sourire, mais Arthur ne pouvait pas lui en tenir rigueur, après tout, ils n’étaient pas dans un 5 à 7. D’ailleurs, cela n’enlevait rien à la beauté de se traits, même que cela lui donnait une charme auréolé de mystère qu’il savait apprécier.  Elle lui reprocha son retard et confirma son identité ce à quoi Arthur répondu par une petite moue faussement désolée. Une pointe d’arrogance n’avait jamais fait de mal à personne…lui aussi savait l’importance qu’avaient les apparences.  

Elle le remercia pour la cigarette et lui lança un sourire presque mielleux qui le décontenança un peu. Elle jouait. Il aimait bien jouer lui aussi en réalité. Il ne put réprimer un sourire. Elle avança une main délicate, parfaitement manucurée, et fit glisser doucement un cigarette hors du boitier, elle portait sur son poignet une montre magnifique et probablement très dispendieuse. Il sortit son briquet en argent et pris son temps pour allumer la sienne, observant Sydney du coin de l’œil tandis qu’elle déposait  la tige de tabac sur ses lèvres. Maintenant qu’il la voyait mieux, il se demandait où il avait bien pu la voir elle ou sa photo. Sans dire un mot, il s’approcha instinctivement d’elle tandis qu’elle se penchait vers lui, et couvrant la flamme d’une main, alluma la deuxième cigarette. Il prirent tous les deux le temps de savourer la première inspiration et de souffler doucement la fumée. Dans tous les cas, il aimait son rythme.

Sans prévenir, et de façon subite, elle l‘agrippa par le côté  et s’installa confortablement, sa main reposant sur le muscle de son avant-bras. Ne refusant jamais un peu de chaleur par une nuit sombre, surtout venant d’une femme aussi élégante, il accepta docilement à la fois le contact et l’ordre de marcher.
Il aperçut le coin sombre vers lequel elle comptait probablement les mener et lança à la blague, un sourire moqueur aux lèvres :

- Tu veux un coin tranquille pour m’attaquer?

Il prit une autre bouffée de sa cigarette et ajouta :

- Après, je dis pas non à un peu d’action.

Le son des talons de Syndey qui frappaient le sol dans un rythme constant avait quelque chose d’engourdissant, elle était plus petite que lui, il se demanda alors ,d’une façon un peu triviale, où elle lui arriverait sans ses souliers. Il baissa les yeux sur elle, on voyait ses hanches agréablement rouler sous sa robe moulante. Qu’est-ce qu’elle pouvait bien faire d’autre de son temps que  devenir vendre de la drogue à de parfaits inconnus au beau milieu de la nuit? Il était sûr de déjà l’avoir vu quelque part. Il détestait toutefois poser cette question aux gens. Il trouvait qu’il y avait dans cette interrogation l’expression d’une espèce de paresse du dialogue. Il trouverait bien sans tomber dans le ton qu’ont les échanges de banalités. Il avait trouvé quelqu’un qui aimait jouer, alors il en profiterait.

Ils arrivèrent assez rapidement dans cette petite rue mal éclairée qu’elle avait aperçue de loin.  L’église, de cet angle, avait des proportions encore plus majestueuses à côté des bâtiments plus modernes. Il s'arrêta de marcher, mais il ne détacha pas son bras, elle lançait si bien les ordres…

- On y est. Est-ce que c’est le moment où je commence à m’inquiéter?

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ARTHUR & SYDNEY

La cigarette me faisait du bien, sentir la fumée s’insinuer dans mes poumons et les noircir n’avait pourtant rien de séduisant mais qu’importe, la sensation d’apaisement était ce que je préférais. Je posais mon regard attentif sur Arthur qui semblait être surpris de mon comportement. Avant, j’étais une jeune femme innocente, qui menait sa vie rengaine sans dire un mot et du jour au lendemain j’avais dû paraître pour la plus écervelée et superficielle des filles de ce pays. Mon père m’avait arraché à ma vie en souhaitant que je devienne sa poupée, pour uniquement dorer son image de faux père attentif et aimant, quelle belle connerie. Venant me loger auprès de lui, ma main se posant doucement sur son bras, je l’invitais à marcher vers un coin plus sombre. Je me concentrais sur le bruit que faisaient mes talons, il y avait quelque chose d’angoissant dans ce bruit mélangé à la pénombre qui s’ouvrait devant nous. « Je n’attaque pas encore les jolis garçons, du moins pas ce soir. » Un sourire joueur et je tapotais son avant-bras. Depuis quand étais-je aussi sûre de moi ? Depuis que j’avais commencé à bosser pour Blake, sûrement. « C’est noté. » J’avais dans la tête un autre homme avec qui j’aimais passer du temps mais depuis quelque temps quelque chose avait changé chez lui, comme une envie d’évasion que je ne comprendrais pas. Un peu d’action avec quelqu’un d’autre aurait peut-être plusieurs atouts, déjà me faire plaisir mais aussi peut être rendu jaloux Blake . Dire qu’avant de venir ici, j’étais vierge et pure, quelle belle connerie. Une fois arrivée dans le petit coin sombre, je ne dissimulais pas mon enthousiasme à conclure cette affaire, après tout si mon patron m’avait refilé son numéro c’est que le deal semblait prometteur… au même niveau que l’homme. « Détends-toi, tout va bien se passer. Je t’écoute, dis-moi de quoi tu as besoin précisément ? » Les affaires, toujours les affaires. Après tout c’était pour ça que j’étais présente ici ce soir non ? Je me détachais doucement de son bras et lui offrais un joli sourire. Quelque chose avait l’air de tiqué chez lui et j’ignorais quoi mais le voir un peu pensif ne le rendait que plus séduisant. J’étais loin de m’imaginer qu’il avait déjà vu mon visage quelque part, ce qui en soi n’avait rien d’étonnant car il apparaissait sur des magazines voire des panneaux publicitaires.

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- Détends-toi, tout va bien se passer. Je t’écoute, dis-moi de quoi tu as besoin précisément ?

Il rigola un peu et haussa un sourcil.

- Moi je trouve que ça se passe déjà très bien. Mais tu as raison. Ça ira encore mieux quand on aura réglé cette question.

Ce qu’il avait besoin….de beaucoup de choses à vrai dire. Premièrement de dormir. Mais, ça la belle qui se trouvait devant lui n’allait rien pouvoir y faire. Quoique que dans le repère de voyous pour lequel elle travaillait devait bien se trouver de puissants narcotiques…mais c’étaient moins son genre. Devenir une chiffe molle qui rêvassait debout complètement décapée par une dose d’opium ne l’intéressait pas. Ensuite, de ne plus obséder sur l’image du cadavre de Deborah quand il se retrouvait seul. Donc, dans un sens, elle l’aidait déjà un peu en ce moment. Plutôt que de se rappeler ce moment atroce où il avait dû extirper le corps lourd et inerte de sa femme de l’eau lui-même, il pouvait apprécier la posture de Sydney, un peu nonchalante, mais ouverte, sa silhouette élancée et son ton dont la pointe d’humour et d’arrogance le charmait.

Il s’adossa au mur, son corps couvert complètement par l’obscurité. Il pris une bouffée de sa cigarette, une petite lueur orangée brisant la pénombre qui les entourait. À chaque fois, quand il achetait, une partie de lui le sermonnait : «mais qu’est-ce que tu fais? Quand tu l'as mariée tu lui avais promis de plus jamais en reprendre». Heureusement pour Blake et Syndey, il parvenait relativement aisément à la faire taire. Ce qu’il avait besoin, au final, c’était d’oublier, de penser à autre chose, toujours, toujours penser à autre chose. Ne plus voir le teint horrible du corps mort de Deborah, ne plus penser aux raisons pour lesquelles il l’aimait. Toujours penser à autre chose.  Pour l’instant, seule la façon dont il alternait frénétiquement travail et sorties, fermant à peine les yeux, lui permettait de se déconnecter de ce souvenir obsédant. Certaines rencontres faîtes à Bowen l’aidaient quelque peu...même s'il aurait espéré ne pas tomber dans ce patern où les autres femmes devenaient une façon de compenser pour l'absence de la sienne. Mais dans tout cela,  le seul carburant qu’il avait pour continuer à fonctionner ainsi et pour avoir l’illusion que tout se tenait en place était la raison de sa présence ici.

- Je pensais que Blake te l’avait dit. Je lui achète de la cocaïne. Je prends toujours la même quantité. Moi j’ai ce qu’il faut, et toi?

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ARTHUR & SYDNEY

Je me mettais à rire, il avait quelque chose de charmant ce jeune homme. Les affaires allaient bien se dérouler, comme d’habitude non ? « Effectivement. » Je restais mystérieuse à propos de mes intentions, cependant je lui adressais un léger sourire charmeur. Il était de bonne compagnie contrairement à d’autres camés que je pouvais régulièrement croisé. Avec ce genre de personne, je ne restais pas bien longtemps, je n’aurais même pas pris soin d’aller dans une ruelle sombre à vrai dire. Blake me connaissait, il savait éperdument quelle clientèle je pouvais toucher et c’était souvent des gros bonnets, voilà pourquoi j’amassais énormément d’argent d’un coup. Mais il m’arrivait de vouloir l’aider, de le dépanner de temps en temps alors oui, il m’arrivait de croiser de vrais toxicomanes qui faisaient peur à voir tellement ils étaient atteints et détruits par ce que je pouvais vendre. « Il me l’a dit en effet, mais il arrive parfois que les hommes aient besoin d’autre chose de temps en temps… » Je plantais mon regard dans le sien, je ne parlais pas forcément de drogue. La femme fatale avait un peu disparu pour laisser place à celle que j’étais réellement, la petite fille qui se préoccupait du monde autour de lui, celle qui ne voulait pas se laisser dessiner un monde obscur et sans vie, sans joie. Je l’observais un long moment, quelque chose me disait qu’il se droguait pour oublier quelque chose, pour s’évader un peu de ces torpeurs, ce que je pouvais comprendre. Je baissais alors le regard vers ma petite pochette de marque et j’en sortais un sachet docilement préparé par Blake. Bien sûr, j’avais tout ce dont Arthur avait besoin. Je lui tendais gracieusement et attrapais l’argent qu’il me donnait, voilà, le deal était conclu. « Au plaisir de faire de nouvelles affaires avec vous. » Je rangeais l’argent dans ma pochette puis je tirais une nouvelle fois sur ma cigarette, soufflant ensuite la fumée dans une pénombre certaine.

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Il arrive parfois que les hommes aient besoin d’autre chose de temps en temps disait-elle. Arthur haussa un sourcil et la regarda des pieds à la tête. Plusieurs réponses, toutes plus séductrices les unes que les autres, lui traversèrent l’esprit, mais le regard que Sydney planta dans le sien lui fit garder le silence. Ils se fixèrent un moment sans parler. Étrangement, depuis son arrivé à Bowen, c’était la première fois qu’il avait l’impression que quelqu’un le regardait réellement pour ce qu’il était. Les masques étaient toujours là, partout, mais pourquoi le porter devant sa dealeuse et pourquoi, elle, verrait-elle autre chose que ce qu’il y avait dessous? Qu’avait-il vraiment à cacher à la personne qui venait lui porter le seul objet dans sa vie qu’il ne pouvait pas arborer et qui pourtant prenait toute la place.

Elle savait qu’il avait une faiblesse. Et lui savait qu’elle le savait. Ils étaient là à se fixer. Là à le savoir. Son sourire malin s’effaça tranquillement tandis que ses sourcils se froncèrent légèrement, comme embêtés par la sérosité subite du moment. Une partie de lui avait envie de s’effondrer là devant elle.  

Elle baissa ses yeux dans lesquels il s’était perdu un instant, et cela lui fit l’effet d’un coup d’eau passé au visage. Il sortit de sa torpeur. Alors qu’elle sortait le petit sac de poudre blanche de son sac, il sortit son portefeuille en cuir, bombé par les billets. L’échange se fit rapidement. Arthur frotta le petit sac machinalement entre ses doigts, il ne ressentit pas le besoin de peser, reconnaissant sa quantité habituelle, du moins environ. Il ouvrit son veston et y glissa la drogue dans la poche intérieure sans dire un mot.

C’est alors qu’il aperçut l’ombre d’une silhouette s’avancer.  Arthur connaissait la ville, il savait bien que personne ne s’intéressait réellement à ce qui se passait dans les petites ruelles sombres, mais l’excuse lui sembla bonne pour effleurer d’un peu plus près cette femme intrigante.  Délicatement, mais d’un geste sûr, il attrapa le poignet de Sydney qui tenait toujours une cigarette et la tira vers lui. Il accota sa propre main, celle qui tenait la jeune femme, au mur sur lequel il avait le dos appuyé. Le bras levé, le corps de Sydney était légèrement tiré par le haut, sa taille s’étirant contre Arthur. Leurs regards se croisèrent encore et à cette distance, il pouvait sentir son parfum riche, mais élégant, à son image bref. Il lui dit à voix basse, tandis que l’on entendait maintenant distinctement les chaussures du passant frapper le sol :

- Mais tout le plaisir fut pour moi. J’ai même pu me trouver une excuse pour tenir près de moi une belle femme qui ne passe définitivement pas ses journées dans la rue à faire de mauvais coups, mais qui semble savoir très bien comment les faire. Blake sait faire tourner ses affaires, mais franchement pas à ce point là. Vous m’intriguez. Mais je ne poserai pas de questions. Je m’en fous un peu. Mais j’aimerais bien continuer à faire affaire avez vous.

Il fit une pause et rigola sans faire trop de bruit.

- Il sent franchement moins bon.

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ARTHUR & SYDNEY

J’en avais parfois marre de jouer ce jeu, d’être la belle et séductrice Sydney, la femme d’affaires incroyables qui menait tout le monde à la baguette ou par la pointe de son talon. Parfois, lorsque je me retrouvais seule dans mon grand loft tout droit sorti d’un de ces magazines de décoration, je me perdais dans mes pensées et je me demandais si ma mère serait fière de moi à l’heure actuelle, en voyant la femme que j’étais devenue et malheureusement je n’étais pas sûre que la réponse soit positive. Avant j’étais douce, insouciante, un peu fleur bleue et pour être honnête, je l’étais toujours un peu, mon cœur s’emportait parfois un peu trop vite alors que même mon corps n’avait pas prononcé son envie de désir ou d’autre chose. Mais ce qui n’avait pas changé entre là moi d’avant et celle-ci, c’était mon intelligence. J’étais intelligente et je ne me vantais pas en le disant mais disons qu’à l’heure actuelle, ça me permettait de faire de bonnes affaires, juste et droite. Je m’étais renseignée sur Arthur avant de venir, résultats je connaissais ses désirs mais aussi ses envies et ça m’aidait grandement à soutenir son regard. L’échange était en train de se passer sans encombre mais je relevais un sourcil alors qu’il pesait le sachet d’un bref geste de la main. Me prenait-il pour une arnaqueuse ? J’affrontais son regard et lui adressais mon mécontentement d’un battement de cils un peu hautain mais je gardais finalement le silence. D’un coup, la situation se renversait, des pas se faisaient entendre et Arthur comptait visiblement en profiter pour se rapprocher de mon corps. Mes sourcils froncés, je le laissais alors attraper mon poignet et me surélever ou presque. À un moment sur la pointe des pieds, ma poitrine venait se coller à son torse et je plantais mon regard un peu plus aguicheur dans le sien. « Ravie de voir qu’il y a toujours des hommes un peu sauvages dans ce monde. » Je venais de chuchoter cette phrase tout en aiguisant un léger sourire sur mon visage. Je lâchais un léger gloussement avant de reprendre. « Si c’est mon parfum qui vous tente, je pourrais lui en vaporiser avant qu’il ne vous rende visite. » Je prenais une moue de gamine innocente pour faire comme si de rien n’était, mais une chose est sûre, l’envie de faire des affaires en sa compagnie était toujours présente. « D’un autre côté, il est rare que j’aie des clients aussi… classe, alors je suis partante pour continuer notre petite relation discrète. » J’appuyais chacun de mes mots tout en détaillant certaines parties de son corps bien en évidence devant mon regard de chat étudiant une souris.

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Il ne put s’empêcher de rigoler un peu en voyant son visage changer alors qu’il vérifiait sommairement la quantité de son sachet. Le visage de Sydney était expressif et il trouvait ça quand même assez adorable. Et au final, sa réaction l’amusait.

- Tu t’attendais à quoi? C’est pas parce que tu as des beaux yeux que je peux nécessairement te faire confiance. Même que c’est plutôt l’inverse. Pas que j’en manque nécessairement, mais c’est pas que du petit change que tu as entre les mains…

Elle se laissa tirer vers lui, en réalité elle n’avait pas trop eu le choix. Sauvage. Hahaha. Il se revoyait dans cette vie qui avait été la sienne, il y a peine quelques mois de cela….docile comme un agneau dans un mariage stable.  Il écouta sa proposition avec une mine peu convaincue, il approcha son visage de sa nuque, effleurant le haut de sa mâchoire et recula ensuite la tête.

- Je pense pas que ce soit qu’une question de parfum. Blake c’est tout lui qui put.

Il lui lança à son tour un regard de gamin. Il observa ensuite les yeux de Sydney le parcourir sans montrer aucune gêne. D’un geste nonchalant, sans la lâcher, il jeta son mégot sur le sol. Elle, elle n’avait pas encore terminé sa cigarette puisqu’il tenait toujours entre ses doigts le bras qui la tenait. Il fit descendre les doigts de la dealeuse jusque devant son visage, les pieds de Sydney purent se reposer complètement sur le sol et il lui vola alors une bouffée en tirant sur son poignet.

- Ça va? Tu aimes ce que tu vois? dit –il d’un ton joueur, mais arrogant, en relâchant la fumée.

Il la fit tourner aussi subitement qu’il l’avait fait approchée et la plaqua, sans y mettre trop de force quand même,  sur le mur.

- Relation discrète? Oui, je vois bien pourquoi tu voudrais qu’on la poursuive…

C’est alors lui qui la détailla de haut en bas avant de planter ses yeux dans les siens. Cette fille avait quelque chose d’hypnotisant, il ne se lassait pas de la regarder. Il ne pouvait s’empêcher de se demander comment elle en était venue à travailler pour un dealeur.

- Il t’a trouvée où Blake?

Il savait bien que dans ce milieu, le mieux était de ne pas se poser de questions…mais ce soir il avait déjà plus d’une chose qu’il avait faites qu’il évitait habituellement avec ses dealeurs alors…une de plus ou de moins.

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ARTHUR & SYDNEY

« Les hommes se méfient toujours de tout… » Je me contentais de faire rouler mes yeux tout en regardant ailleurs par la suite. D’un haussement d’épaules je laissais ma phrase en suspens. Il pourrait vérifier si ça lui chante, je n’étais pas du genre à arnaquer les gens même si j’aurais pu facilement le faire à plusieurs reprises. La plupart des camés balançaient le fric afin de déchiqueter le sachet et de s’injecter une douce avant que je n’aie pu dire quoi que ce soit. Je détestais vraiment ce milieu, voilà pourquoi j’avais expressément dit à Blake que je voulais m’occuper de sa clientèle un peu plus raffinée, des gens comme Arthur par exemple. Je me mettais à rire alors qu’il disait explicitement que Blake puait, c’était une drôle de façon de parler de leur mais rire me faisait du bien alors j’en profitais. Personnellement je ne trouvais pas, même si je savais bien que c’était quelque chose de théorique, enfin une dissimulation discrète pour parler de son personnage. J’appréciais la classe d'Arthur, son petit côté nonchalant qui dissimulait probablement des allures de gentleman bien trop docile autrefois. Je me laissais faire et mes pieds revenaient peu à peu sur le sol après qu’il ait jeté sa cigarette. Je lui laissais prendre la fin de ma cigarette avant de la jeter du bout de mes doigts. « Je ne sais pas trop… » Un sourire animal sur les lèvres, je le regardais avant qu’il ne me retourne et se colle une nouvelle fois à moi. Relations discrètes… Le simple terme me mettait la puce à l’oreille et le sourire aux lèvres. Je ne parlais pas d’une telle discrétion mais soit, pourquoi pas. « Ne croit pas qu’une relation pareille s’acquière facilement… » Oui j’avais beau être parfois docile, je ne me montrais parfois pas toujours sage et je savais mener mon petit monde à la baguette. Je reposais mon regard sur son torse avant de lâcher un léger gloussement, que répondre à cette fatale question ? Blake et moi c’était compliqué, depuis le début… « C’est moi qui l’aie trouvé à vrai dire. » Et c’était vrai. Je l’avais connu dans un bar, j’étais directement allée le voir afin de lui proposer de travailler avec lui. Dans la fougue nous avions terminé dans le même lit et son chiffre d’affaires avait considérablement augmenté.

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Il haussa un sourcil. Et les femmes elles? Il laissa finalement un sourire glisser sur ses lèvres. De toute façon, il ne semblait pas y avoir de problèmes alors cela réglait la question.  Sa remarque concernant l’odeur de Blake sembla l’amuser et elle lâcha un joli rire. Bien entendu, en réalité il n’avait jamais vraiment senti Blake…Mais il était pas mal convaincu de ce qu’il avançait, du moins s’il le comparait à Sydney…

Il savait bien que la jeune femme entendait par «discrète» : l’intérêt de garder à profil bas une relation basée sur un échange illégal…mais c’était plus amusant de tourner la phrase ainsi non? Et quelque chose lui disait qu’elle, autant que lui, avait un peu besoin de ça…de rire un peu…

Maintenant qu’elle avait son dos contre le mur, la lumière faible qui venait de la rue éclairait légèrement son visage. Ses yeux brillaient dans cette luminosité un peu voilée. Sans trop y penser, il replaça cette mèche rebelle qui ne voulait que tomber devant ses magnifiques yeux en amande derrière son oreille. Un sourire en coin se dessina sur ses lèvres.

- Je n’oserais pas le croire. Et de toute façon…il serait où le plaisir là-dedans…

Cette fille, c’était le genre de plaisir coupable qu’on déchiffre lentement, surprises par surprises; une corde tendue qui se délie centimètre par centimètre.  Et voilà qu’elle lui en réservait une surprise, justement : « C’est moi qui l’aie trouvé à vrai dire. » Il fronça légèrement les sourcils…vraiment? D’un autre côté, comment Blake aurait-il vraiment pu la dénicher…C’était quoi son plan à Sydney? De l’auto sabotage? Au lieu de la consommer, elle vend cette drogue qui enlise dans tout ce qui nous rend moins bons, c’était ça? Qu’est-ce qu’elle fuyait comme ça?

- Ça se trouve où des Blake? Et pourquoi on voudrait le garder une fois dans nos mains?

Il avait beau faire des blagues, Blake avait probablement son charme. Il rigola et ajouta d’un ton taquin :

- Toi tu trouvais qu’il sentait bon?

Losing my religion.

ARTHUR & SYDNEY

« Bonne réponse. » Un sourire se dessinait alors sur mes lèvres pendant que mon regard fier se posait dans le sien. C’est alors que ma réponse ne le laissait pas de marbre, je voyais chez lui une lueur d’étonnement et surtout des questions qui avaient l’air de fuser au sein de son crâne. Voilà la réaction que j’attendais, voilà comment j’aime que les gens réagissent à mon sujet. Je le laissais alors me poser une puis deux questions, auxquelles il serait facile de répondre, un peu trop facile d’ailleurs. Une moue s’installait alors sur mon visage qui devenait soudainement enfantin. « On ne t’a jamais appris que la curiosité était un vilain défaut ? » Heureusement que je n’avais pas d’autres clients après Arthur sinon ce petit amusement m’aurait terriblement mise en retard. Je réfléchissais une seconde, comment rendre ce petit jeu plus amusant ? Comment apprendre à se connaître tout en enlevant les critères basiques ? Je songeais à une technique que je me gardais bien de dévoiler pour l’instant. Un petit rire cristallin fendait le silence de la rue alors qu’il me parlait du charme de Blake. Bien sûr,’il sentait bien, donc bien sûr qu’il était charmant. Cet homme avait quelque chose d’imprenable, de tentant et surtout de très délicieux. Ce n’était qu’une histoire sans lendemain autrefois et désormais une relation particulière nous unis, relation sur laquelle je serais incapable de mettre un nom ou même un terme commun. « Il sent très bon. L’ennui c’est que son parfum est… entêtant et qu’il se propage… loin. » Une pointe de jalousie ? Peut-être bien oui, c’est même certain. Je pensais alors rapidement à Maxine qui était un peu trop présente dans sa vie puis je soufflais. Je me devais de ne pas m’aventurer dans ces coins sombres de mes pensées. Je me redressais alors quelque peu puis venir tenir tête à Arthur. « Dis-moi Arthur, tu es joueur ? Et si je te proposais de jouer à un petit quelque chose hein ? Tu veux en apprendre plus sur moi ? Sur ce qui a fait que j’ai trouvé Blake ? Il va donc falloir que ce soit donnant donnant et tu vas devoir me révéler certaines choses à ton sujet. »

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La curiosité…c’était bien un des trucs qui le définissait le mieux. Du moins tout le monde était très rapide pour le décrire ainsi. Mais avec le temps il avait compris que les gens expliquaient par la curiosité ces actions qu’eux-mêmes n’auraient pas osé faire par crainte. Le vilain défaut ce sera pour l’instant se dit-il alors qu’un sourire en coin se glissait sur ses lèvres.

- Disons que j’aime voir ça autrement.

Un rire fin éclate quand il lui parla de Blake. Il avait mis le doigt sur quelque chose alors… Il voyait à la forme de ce rire, mais aussi à la façon dont les yeux de la belle semblèrent tout d’un coup voir, où s’imaginer, quelque chose d’attirant, quelque chose qui fait frissonner sans que l’on ne sache trop pourquoi. Le charme du mauvais garçon pouvait être assez puissant, il s’en doutait bien.

« Il sent très bon. L’ennui c’est que son parfum est… entêtant et qu’il se propage… loin. »

Arthur leva un sourcil. Une pointe de jalousie? Possiblement. Ils n’étaient plus à l’âge ou tout est blanc ou noir et les relations qui se développaient dans les ruelles sombres l’étaient encore moins. Il ne chercha pas à en savoir davantage, les allers et retours de Blake entre Sydney et d’autres femmes ne l’intéressaient pas tant que ça…ils semblaient toutefois affecter légèrement la jeune dealeuse. Elle sembla chasser ses pensées quelques peu déprimantes avant de venir porter son visage près du sien.

Alors elle voulait jouer, et explicitement cette fois-ci. Il lâcha un petit rire. Il baissa les  yeux sur sa taille qu’il effleura du bout des doigts et fit mine d’hésiter en pinçant les lèvres. Il finit par relevé la tête en portant un air malin sur ses traits.

- Très bien. On peut jouer. Est-ce qu’il y a des règles?

Cela promettait d’être intéressant. Une partie de lui appréhendait les questions qu’elle pourrait lui poser tandis qu’une autre, poussé par cette fameuse curiosité n’avait envie que d’en savoir plus sur la mystérieuse qui se tenait devant lui. Et bon. Il était joueur. De toute façon, il sentait qu’avec Sydney peu de chose pouvait le rendre plus vulnérable qu’il ne l’était déjà techniquement. Elle connaissait déjà une de ses plus grandes faiblesse après tout.

Losing my religion.

ARTHUR & SYDNEY

Il y avait chez cet Arthur quelque chose d’attirant, de mystérieux. Il subissait une lourde peine, je pouvais le sentir à des kilomètres et l’ancienne moi l’aurait sûrement questionné avec intérêt afin de l’aider dans sa souffrance. Mais en même temps l’ancienne moi ne l’aurait jamais rencontré dans de pareilles circonstances et il ne l’aurait certainement pas apprécié d’ailleurs. « Je ne sais pas… tu as besoin de règles toi ? » Un sourire malicieux se dessinait alors sur mes lèvres. Je ne pensais pas aux règles alors que pourtant il pouvait m’arriver d’être très terre à terre voir maniaque sur certaines choses, mais là ce n’était qu’un jeu après tout et il consistait à apprendre à se connaître. Je n’avais pas pour habitude de rester avec les clients, tout simplement parce qu’ils ne m’attiraient pas et qu’ils n’étaient pas fréquentables mais avec Arthur, c’était différent. « J’ai terminé ma soirée, alors plutôt que de rester dehors, on pourrait aller se mettre au chaud, c’est plus amusant, non ? » Le froid commençait doucement à tomber sur mes épaules et je m’étais mise à frissonner. Ou bien était-ce dû à son contact sur ma hanche ? Peut-être. J’étais venue à pied mais lui avait une belle voiture, alors pourquoi ne pas en profiter ? Je me décollais alors du mur et on entendait à nouveau mes talons sur le sol de pavés. Les sons sourds venaient se reporter aux alentours de l’église et on n’entendait bientôt plus que ça. « Je te laisse demander en premier, je suis galante. » Je haussais délicatement les épaules puis je me dirigeais vers sa voiture pour l’admirer un peu. Les lumières inondaient la rue, nous étions sortis de notre pénombre, un peu à regret il est vrai mais qu’importe puisque s’il était d’accord, nous allions continuer notre soirée ensemble.

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