Grocery store ft Jamie Rankin

Les choses se sont précipités ces dernières semaines, Manwë est sur les traces de son géniteur depuis presque un an. Celui-ci avait vraisemblablement quitté Bowen pour se faire oublié après l’incident chez son avocate avant de revenir. Il était bel et bien dans le coin, mieux que ça, Man’ savait exactement où le trouver. Il continuait d’agir normalement, du moins, aussi normal que puisse être un homme aigri de quarante ans. Ne pas éveiller les soupçons, le temps de prendre ses dispositions… De simplement… Mettre ses affaires en ordre. Il n’avait pas l’intention de mourir, mais il n’écartait pas l’éventualité que cela puisse arriver. Il connait les enjeux, il a fait son choix.

Aujourd’hui, il faisait des emplettes. Beaucoup d’emplettes. Il a toujours été seul et n’a jamais fait autant de courses dans ses souvenirs ! Man’ va faire déborder les placards alors qu’il allait peut-être passer l’arme à gauche d’ici quelques jours ? Ce n’était pas pour lui, mais pour Saoirse qui crèche chez lui depuis que sa colocataire a prit le large. Il ne veut pas qu’elle ait besoin d’acheter quoi que ce soit, ce sera une pré-occupation de moins pour la jolie rousse. Man’ a même utilisé l’argent gagné en couchant avec une gosse de riche en manque d’action pour se rabibocher avec le propriétaire. Il avait obtenu de lui que Saoirse puisse reprendre le bail lorsqu’il partira, prétendant qu’il envisageait de déménager bientôt - au grand soulagement dudit proprio qui en avait marre des retards de paiement !

Son caddie est plein à craquer : gâteaux, pâtes, huile, plats surgelés, produits de ménage, une montagne de papier toilettes et même des tampons… De toutes les tailles, de toutes les couleurs ! Il n’a aucune idée de savoir à quoi ça correspond, mais il sait que ça sera utile à Saoirse, tôt ou tard. Il pensait avoir terminé quand il passa devant une promotion d’enfer pour des casseroles. Les siennes sont très bien pour ce qu’il en fait, mais il décide de mettre toute une batterie de casseroles dans son chariot ! Puis enfin il se dirige vers la caisse.

C’est bien l’une des rares fois où il ne passe pas son temps à râler tout seul dans les rayons, même le vieux devant lui ne l’agace pas à mettre quinze ans pour sortir ses articles de son panier ridicule. Manwë est curieusement en paix depuis qu’il sait ce qu’il va pouvoir accomplir, il est reposé même, il dort bien. Il n’est pas stressé face à ce qui l’attend, il est d’un calme implacable, une sensation qu’il n’a pas connu depuis des années et qui transforme positivement ses traits.

Aussi, il ne s’offusque même pas quand quelqu’un dans la file d’attente dit à haute voir à une autre personne de passer devant lui, il s’est même retourné en direction de la personne apparemment prioritaire. Il y a une caisse pour ça, alors de coutume il l’aurait envoyé chier aussi sec même si la personne n’avait rien demandé à l’autre. Il aurait été d’autant plus désagréable quand il aura remarqué que cette personne n’était nulle autre que cette maudite avocate enceinte jusqu’aux dents.

Joli deux tonnes malgré tout.

“ Tu peux passer devant moi aussi, si tu veux. “ Lui qui est tout le temps pressé, à courir après le temps par manque d’argent. Tout ça, il s’en fou aujourd’hui. Il n’y a pas de sourire, pas de provocation dans ses mots. Il n’est pas non plus à l’extrême de la politesse, il passerait presque pour un mec lambda, comme si derrière cet homme ne se cachait pas une personnalité explosive. Il sait qu’il aura tout le loisir de défouler sa haine d’ici peu, de planter un couteau autant de fois que désiré dans la chair d’un monstre. Il ne sait pas encore à quel point il veut le faire souffrir, mais chose certaine : ça ne sera pas joli à voir.

Elle n’en pouvait plus la pauvre Jamie. Elle ne voyait pas le bout de ces 9 mois. Le futur petit garçon devait pointer le bout de son nez dans le mois et l’avocate avait de plus en plus de mal à porter son ventre. Sa grossesse n’avait pas été la pire mais ni la meilleure. Elle avait détesté les premiers mois et elle détestait les derniers mois. Au milieu c’était plutôt un mouai généralisé. Les femmes mentaient quand elle disaient qu’elle se sentait femme enceinte, et elle haïssait celles qui rayonnaient. Jamie était un tas de bout de femme fatiguée, qui avait mal au dos et qui n’attendait qu’une chose, retrouver son corps à elle toute seule. Mais dans le fond, elle avait hâte de rencontrer son petit garçon. Il allait être si petit et si fragile que ça fit peur à Jamie. Carter connaissait déjà la sensation et il serait très doué, elle n’en avait aucun doute. Mais ce n’était pas son cas à elle. Il y avait bien trop de responsabilité à élever un enfant et surtout un garçon. Qu’est-ce qui se passerait si finalement il devenait un con. Ou pire comment elle réagirait si elle apprenait que son fils avait fait du mal à une personne, à une femme. Tant de questions angoissantes. Son désir d’enfant n’avait jamais existé parce qu’elle pensait sincèrement ne pas avoir les épaules pour. Ou peut-être qu’égoïstement, elle voulait d’abord faire passer son bonheur avant celui de n’importe qui d’autre. Sauf qu’aujourd’hui tout changeait. Même pas né, la future maman mettait tout en place pour qu’il arrive dans les meilleurs conditions. Tout était prêt. Quelques mois auparavant, Carter avait quitté sa colocation pour habiter avec la belle avocate, un pas de géant dans cette jeune relation. Il travaillait à la salle aujourd’hui pendant que Jamie s’ennuyait sur son canapé. En regardant les pubs à la télévision, elle était tombée sur une annonce d’un presse agrume. Il lui fallait ça ! Citron, orange, mandarine … tout passait sous ce presse agrume et elle qui raffolait de ses fruits ne pouvait pas se passer de ça. Alors difficilement elle s’était levée pour se retrouver dans un magasin. Si Carter apprenait qu’elle avait bougé, il l’aurait incendié. Le terme était proche et depuis quelques jours, elle avait des fausses contractions. Jamie se souvenait parfaitement bien du moment où ils étaient partit en catastrophe à l’hôpital pour qu’on leur dise qu’elle n’accoucherait pas de suite. Sur le coup, elle les aurait tué ses médecins qui ne comprenaient ce qu’elle endurait. Marchant difficile dans les rayonnages, elle trouvait le saint graal. Heureusement que les agrumes n’étaient pas contre indiqué pour la grossesse. Faisant un petit détour au rayon fruit, elle fit une razzia de citron et orange. Se léchant la lèvre, elle avait hâte de rentrer chez elle pour se faire un bon jus. Il n’y avait pas grand monde dans la file d’attente et Jamie refusait d’aller aux caisses prioritaires. Elle patientait quelques secondes avant que le Monsieur de devant elle lui propose gentiment sa place. Mettant son égo de côté, elle acceptait parce qu’elle sentait que son ventre commençait à tirer. « Merci ! » Répondait-elle avec un large sourire avant de se retourner. La personne encore devant lui proposait la même chose. Sauf que Jamie le regardait la bouche grande ouvert. Manwë Druid. Ce petit être détestable qu’elle avait rencontré neuf mois plus tôt. « T’es sûr ? » Demandait-elle. Ignorant son degré de rancune, elle préférait ne pas trop s’avancer. La dernière qu’ils s’étaient vus, elle l’avait abandonné à l’hôpital. En même temps à cause de lui, deux gorilles étaient venus la menacer. Doucement elle passait devant lui le remerciant avant de lâcher son presse agrume et ses fruits par terre. « Putain ! » Disait-elle en se tenant le ventre. Les contractions revenaient.

Jadis, lorsqu’il était un jeune homme fringuant de la vingtaine, il avait dégoté un job bien payé dans le batiment. Pourquoi  votre sublime et brillant auteur apporte cette précision en guise d’introduction ? Eh bien, parce qu’il arrivait à Manwë dans ce travail de porter plusieurs sacs de ciments sur son dos et qu’il imaginait que ça devait faire cet effet d’avoir un bide énorme comme celui de l’avocate. Être fin et porter une grosse charge, c’est pas le plus facile… Il aurait apprécié qu’on le laisse passer devant s’il avait ces sacs sur le dos à l’heure actuelle et puis il ne se sent pas préssé aujourd’hui. Le temps est devenu une variable bien différente de sa manière de vivre le temps ces dernières années et surtout ces derniers mois. Il devait enquêter, survivre financièrement et essayer malgré tout de prendre du bon temps avant de vriller cinglé. Désormais le lendemain ne compte plus vraiment à ses yeux, cette course touche à sa fin et le sprint final se parcoure avec beaucoup de sérénité. Man’ n’a jamais vraiment ressenti ça avant, toujours dans la colère, la rancune, la pensée de ne jamais pouvoir soulager sa haine, de se contenter de la déverser sur les autres…

La surprise dans le regard de Jamie n’a rien de surprenant, lui meêm aurait ricané si on lui avait dit qu’il serait aussi poli avec cette dernière. Non, il ne lui a pas pardonné d’avoir pu permettre la libération de son père en trouvant une faille dans le dossier. Il ne lui pardonnera sans doute jamais, mais il a accepté l’idée qu’elle ne savait sans doute pas ce qu’elle faisait. C’était bien pour cette raison qu’il la qualifiait de bécasse, même si au contraire, elle était brillante, assez brillante pour trouver ce détail alors que le précédent avocat de son père n’avait rien vu lors du procès qui l’avait condamné des années plus tôt.

“ Ouais vas’y, j’suis pas pressé de payer une fortune pour 30 kilomètres de PQ, probablement rose... “ Il désigne du menton les pack de papier toilette qui prennent un sacré volume dans son chariot. Il s’écarte un peu, pour la laisser passer, parce qu’elle prend un peu de place quand même (c’est cadeau). Elle commençait à le doubler lorsqu’elle se mit à perdre des bouts, heureusement pas de bébé à l’horrizon, juste des agrumes. Il s’apprête à dire quelque chose qui n’aurait assurément fait rire que lui lorsqu’elle poussa un juron en se tenant le bidon. “ Merde…” Ok, y’a peut-être bien un bébé à l’horizon et franchement, ça ne le fait pas rire du tout. Il a rien demandé pour subir une chose pareille, après toutes les galères qu’il a traversé, pourquoi grand dieu, pourquoi ça ? !

Il regarde le mec derrière lui qui a les yeux exorbités, la caissière elle s’intéresse plus au choses tombés au sol qu’à sa cliente, Man’ déduit qu’il restait malheureusement plus que lui… “ Ça va ? Enfin…J’veux dire, il va pas sortir de là-dedans maintenant le bébé, hm ? “ Il la joue cool, mais si elle lui répond que si… Il se promet de ne plus jamais, ô grand jamais, être sympas avec elle. Oui, parce que même sa bonne humeur absolument exceptionnelle a ses limites. Assister au 'miracle' de la vie en direct fait clairement partie des limites qui pourraient tout à fait nous rendre notre bon vieux ronchon de Druid. Qu’est-ce qu’ils ont les gens à vouloir se reproduire ?

C’était la fin et mon dieu Jamie n’attendait que ça. On lui avait parlé que ça serait difficile de voir son corps de transformer et tout ce qu’on pouvait lui dire sur la post grossesse. Jamie n’avait qu’une envie, c’était de retrouver son corps pour elle toute seule. Fini ! Elle n’aurait pas de nouveaux bébés, que Carter en profite parce que ça sera le dernier. Déjà que depuis des mois maintenant il se permettait de lui donner des conseils sur ce qu’elle devait faire de la journée. Rien n’énervait plus Jamie que ça. Elle savait qu’il réagirait avec excès s’il savait qu’elle était venue là toute seule. Ce n’est pas comme si elle allait accoucher aujourd’hui. Tout l’énervait, même le fait qu’on la laisse passer devant dans les lignes d’attente. Enfin, elle ne disait rien acceptant quand même volontiers le passage. Bébé Carter pesait son poids et Jamie ne tiendrait pas trois heures debout sur ses jambes. Ça se voyait que la fin arrivait, son ventre était aussi large que sa taille à elle. (Enfin peut-être pas non plus). Evidemment, il y avait toujours des cons sur cette planète. Alors qu’elle fut sa surprise quand Manwë, cet être abject, lui proposait de passer devant elle. Timidement elle le remerciait. « 30 km ? Vous comptez manger épicé dans les prochains jours ? » Elle était fière de sa blague, même si personne autour ne riait. Mais en tout logique personne ne remplissait son chariot de pq si cette personne n’avait pas de problèmes de transit. En attendant, celle qui eût un gros problème, c’était Jamie.

Elle lâchait tout ce qu’elle avait dans sa main avant de les plaquer sur ventre. Ça faisait mal. Le bébé bougeait mais pas que. Son visage se transformait en une grimace de douleur et personne ne réagissait. A part Manwë. « Non ! » Répondait-elle en soufflant. Non ça n’allait et non le bébé n’allait pas sortir, du moins il fallait attendre encore quelques jours. « Ce sont juste des fausses contractions mais boooooooooooooooooordel » Cirait-elle avec une contraction. « que ça fait mal » Concluait-elle. Il fallait qu’elle boive un peu d’eau et surtout qu’elle s’assoie quelque part. Le mec derrière Manwë finalement râlait et Jamie le regardait avec plein de haine. « Allez me chercher un truc pour que je puisse m’assoir ! » Il ne se fit pas prier, elle était peut-être enceinte, mais elle faisait bien plus peur que quand elle ne l’était pas. Elle se retournait vers Manwë. « Changez-moi les idées … pourquoi tout ce pq ? » Disait-elle en essayant de respirer comme elle l’avait appris en préparation à l’accouchement. Des cours pourris qui avaient soulé Jamie. A chaque fois, elle perdait du temps sur son travail et en avait marre d’écouter les autres mamans expliquer à quel point la maternité c’est chouette.

Ses yeux verts se posent sur la collection de paquets de papier toilettes dans son caddie et doit admettre que l'on pourrait se questionner sur ce qu'il prépare. Malgré tout, ce n'est pas la course la plus louche qu'il ait pu faire dans sa vie. " Qui sait ? " Man' n'allait pas s'étaler avec l'avocate qu'il ne portait pas particulièrement dans son cœur, c'était déjà quasi miraculeux qu'il se montre aussi aimable, faut dire que la barrique qui lui servait de ventre était plutôt impressionnante. Il respectait la gente féminine pour cette prouesse-là, pour cette déformation du corps afin de donner la vie. Il se demandait parfois si sa mère a souffert lorsqu'elle l'a porté ou si elle continuait de se bourrer la gueule et prendre des drogues comme s'il n'y avait pas un petit monstre dans ses entrailles. Il n'aura jamais de réponses à ces questions, juste des bribes de souvenirs d'enfance avec une mère complètement camée qui se faisait battre par un homme violent et possessif. Une vraie merde que Manwë se missionnait d'exterminer.

Il s'imaginait patienter dans cette file d'attente en pensant à l'exécution prochaine de son géniteur. Mais il fut bien vite interrompu par Jamie et la menace imminente d'un accouchement. Elle avait beau dire que non, il n'était pas totalement convaincu. Des fausses contractions, ça avait l'air drôlement vrai en tout cas, mais qu'est-ce qu'il y connaît en utérus ?

Il grimace un peu lorsqu'elle crie, ça fait drôlement mal aux tympans et il n'ose imaginer ce que ça doit donner dans une salle de travail... Un type parti chercher un siège derrière une autre caisse pour qu'elle puisse s'asseoir, Manwë craignait le pire lorsque la brune se tourna vers lui. Franchement, il préférait de loin se battre avec des mecs armés qu'affronter... Ça.

Ses sourcils se lèvent de surprise face à sa soudaine question, encore sur le pourquoi d'un tel stock de PQ dans son chariot. " Pour se torcher le cul. " Ce bon vieux Manwê, n'est-ce pas ? Il ne s'imaginait pas vraiment raconter sa vie, il ne fait déjà pas ça avec ses proches, mais avec celle-ci... Il veut bien être sympas, mais il ne faut pas pousser le bouchon ! Il se penche dans son caddie pour attraper une bouteille d'eau qu'il donne à la brune. " J'ai pas élaboré de plan diabolique à base de PQ..."

Il craque un emballage de papier toilette pour prendre un rouleau et le coller sur le front de la femme enceinte " Mais on peut aussi s'en servir pour éponger ce front dégueulasse de transpiration. " Rien de mieux que l'art du tact pour changer les idées... " Ou pour jongler, pourquoi pas ? " Il prend deux autres rouleaux, pour jongler avec trois PQ. Ça c'est plutôt divertissant à première vue, en plus il n'est pas trop mauvais. Après la chute d'un des rouleaux, un deuxième commence à se dérouler autour du luthier, prolongeant ce numéro de cirque vers une horrible prestation de danse de ruban. Finalement, on peut faire beaucoup de choses avec du papier toilette...

Transformé partiellement en momie rose à force de se débattre avec, ce numéro s'achevait sur une note clownesque imprévue... Il espérait bien réussir à changer les idées de l'avocate et qui sait empêche ce bébé de sortir maintenant. Si ce miracle s'accomplissait, il se jurait d'avoir plus de respect pour cet objet de première nécessité à chaque fois qu'il posera les fesses sur une cuvette. " C'est bon ? C'était assez divertissant ? Pas de vraies contractions en vue, hm ? " Non parce que s'il a fait tout ça pour qu'elle perde les eaux maintenant, ça le ferait - sans jeu de mot - bien chier...

Jamais elle n’avait vu quelqu’un acheté autant de PQ. Cet homme était bizarre, elle l’avait toujours dit. Peut-être qu’il s’était mit en tête l’idée qu’il y allait avoir une pénurie de PQ ou un nouveau Covid. Elle aurait parié avec Manwë avait fait partit de ces gens qui s’était jeté sur les PQ et les pâtes quand on parlait de pénurie au début de la pandémie. Ça ne l’étonnerait pas. Elle fut toutefois surprise qu’il la laisse passer devant elle. Il est vrai qu’avec son énorme ventre, Jamie avait dû mal à rester debout trop longtemps. Il était temps qu’elle se finisse cette grossesse de malheur. C’était le seul et l’unique enfant qu’elle ferait l’avocate. Elle savait que la grossesse n’était pas faite pour elle, toujours de mauvais poil, son entourage avait subi les foudres de la future maman. Carter était sa victime de prédilection. Elle le voyait bien que l’anglais en avait marre d’elle et il faisait tout pour être au petit soin. Il avait toujours rêvé de vivre une grossesse, lui quia avait mal vécu le fait de n’avoir pas été là pour Tahlia et Thaïs. Sauf que l’avocate ne lui offrait pas une belle grossesse. Toujours de mauvaise humeur ou à pleurer, il était temps que cela se finisse pour Jamie et pour Carter. L’arrivée du bébé stressait la mère, elle n’était pas prête et ne le serait sûrement jamais. Il ne restait que quelques jours et chaque fin de journée était une déception, ce n’était pas encore pour ce jour. Par contre, elle sentit la douleur traverser tout son cops. Les agrumes tombèrent par terre tandis que l’avocate essayait de se retenir à la caisse. Bordel que ça faisait mal, son cri permettait de prévenir tout le monde de la douleur. C’était Manwë qui se retrouvait auprès d’elle, à devoir gérer la tornade rousse. Mais avant tout de chose, elle avait besoin de s’asseoir. Quand le jeune homme lui ramenait une chaise, une contraction revenait. « Bordel ! Ne soyez jamais enceinte ! » Disait-elle en se plaignant. Alors elle mit toute sa concentration sur le mec au PQ. « Avec toi, on ne sait jamais, tout est un plan diabolique. » Oui, elle le tutoyait, se permettait de le critiquer mais à cet instant elle n’en avait rien à faire. Il la distrayait c’était le principal parce qu’une nouvelle contraction arrivait. Heureusement, elle préférait regarder le luthier avec un air méchant que de se concentrer dessus. « Mon front n’est pas dégueulasse ! » Non mais il n’avait jamais un gentil mot à dire celui-là. « Puis à ma place tu serais en train de te torde partout. » Il était avéré que les hommes ne supportaient pas les douleurs de l’accouchement. Bon certes, Jamie n’était pas en train d’accoucher mais c’était tout comme d’abord. Au moins, il faisait ce que Jamie lui avait demandé. Il lui faisait penser à autre chose. Prenant deux rouleaux, il commençait à jongler. « Pas mal ! » Au moins ça faisait de l’animation dans le centre commercial. Le caissier lui-même avait arrêté pour regarder le spectacle et surtout s’assurer que Jamie n’allait pas délivrer son bébé à sa caisse. Les rouleaux tombèrent s’emmêlant sur Manwë. La scène fit rire l’avocate et elle sentait son corps se détendre un peu. Mini Carter n’allait pas arriver maintenant. « Ce sont de vraies contractions, mais pas de bébé en vue. » Elle tentait de se relever, ce n’était vraiment pas facile. Surtout qu’elle en voulait pas d’aide l’avocate. Par contre elle allait devoir ravaler sa fierté parce qu’il était impossible qu’elle puisse ramasser ses agrumes par terre. Ou si elle le pouvait mais finirait sur le ventre avec l’impossibilité de se relever. « Est-ce que … » Demandait-elle nerveusement. Manwë serait capable de rire et de la laisser se débrouiller. « Est-ce que tu pourrais ramasser mes courses s’il te plait ? » Elle demandait avec douceur.

Manwë aurait bien des commentaires à faire à la brune, à commencer que cette vision d’horreur, elle pourrait décider de l’infliger à personne en restant chez elle. Elle a bien les moyens de se faire livrer ses courses, non ? Si elle était restée tranquillement chez elle, personne ne se retrouverait dans un embouteillage aux caisses du magasin et surtout, elle ne lui aurait pas flanqué la trouille se se retrouver noyer sous les eaux en cas de rupture de poche. Heureusement, il n’en était rien, pour le moment…

Parce qu’il est de bonne humeur sans doute, aucun de ces pensées ne fuita. Il se retrouvait même à essayer de l’aider. Non pas qu’il ne soit pas serviable, contrairement à ce que l’on pourrait croire de lui, ce qu’il laisse croire tout simplement, Man’ c’est le genre de gars qui vole à votre secours si vous êtes dans al merde, mais du genre à vous envoyer chier si vous le remerciait pour ça. S’il était croyant, ce comportement altruiste et cette volonté à être seul, ça pourrait ressembler à une forme de pénitence. Sauf qu’il ne croit en rien, si ce n’est en ce qu’il pense être juste de faire et son besoin d’être tranquille. C’est un solitaire dans l’âme, un habitué à l’isolement. Sortir de sa zone de confort est plus compliqué que ne le croit.

“ Si. Il est dégueulasse. “ Là, il joue sans doute avec le feu, mais il faut arrêter de se mentir pour faire plaisir aux autres. Il a jamais vu autant de sueurs et peut-être bien sont-ce des boutons ? Il n’en sait rien. En tout cas, la grossesse, ça ne rend pas tout le monde radieux. “ Mais c’est pas la fin du monde. “ Il a hoché la tête concernant la douleur, il a connu la souffrance, mais il ne sait pas ce que c’est quand cette dernière vient de l’intérieur de vos entrailles. Il faut laisser à César ce qui est à César.

Le rire de la brune lui fit penser que les choses allaient mieux, elle semblait plus détendue et lui aussi pour le coup. Il se dépêtrait du papier toilette enroulé autour de lui, avant de l’entendre lui demander trop poliment s’il pouvait ramasser ses courses. Les gens ne lui parlent que rarement sur ce ton. Même sans cet élan de douceur, qui le fit tiquer et l’observer d’un œil suspicieux par manque d’habitude, il se baisse pour ramasser les courses de l’avocate sans avoir répondu. Il dépose le tout un peu en vrac sur le tapis du casier qui continue de les fixer avec des yeux ronds comme des billes “ Quoi ? “ La petite pointe d’agressivité faisait son retour, faut dire que les gens passifs ça l’exaspère.

Le jeune commence à passer les articles, Man ne sait pas si la jeune femme va se lever de sa chaise, si elle sera en capacité de conduire tout simplement. Franchement, il l’imagine mal lui demander de jouer le chauffeur, en plus, il n’a pas le permis même si ça ne l’à jamais empêché de prendre le volant… Une fois les articles ramassés, Man reporte ses yeux verts sur Jamie, le temps s’envole. Ils ne s’étaient pas vu depuis bien longtemps et franchement, c’était pas une si mauvaise chose… Il avait malgré tout bien envie de lui demander si elle avait eut des nouvelles du vieux, mais quelle différence ? Bien que le fait qu’il ne pose pas la question met quelque peu la puce à l’oreille concernant le fait qu’il l’ait juste… Trouvé.

Elle s’imaginait déjà le regard sévère de Carter. Jamie ferait comme à son habitude, elle lui ferait un grand sourire, déposerait ses courses avant de s’asseoir pour une durée indéterminée dans le canapé. Il savait à quel point elle ne vivait pas bien sa grossesse, c’était pour cette raison qu’elle avait égoïstement décidé de faire les courses toute seule. Le bébé n’était pas prévu avant quelques jours, alors il n’y avait rien de dangereux à se promener un peu. Sauf que ces fausses contractions lui faisaient mal et qu’elles arrivaient sans prévenir. La gynécologue lui disait que ça la préparait à l’accouchement. Ce jour-là, elle lui aurait bien foutu un poing à ce médecin. Il était temps que ça finisse, surtout après cet épisode. En plus d’avoir mal, elle était tombée sur Manwë, le fils de Keynes. Souvent, Jamie se réveillait la nuit, les frissons traversant son corps rien qu’en repensant à cette fameuse nuit. C’était peut-être le plus gros regret professionnel de l’avocate. Cet homme était un monstre, le genre de personne qu’elle ne voulait pas défendre. Elle croyait en une justice juste, mais à quoi ça servait si c’était pour se faire menacer quelques jours plus tard. Son fils, elle ne l’avait pas revu depuis ce jour préférant oublier l’existence de toutes les personnes qui touchaient de près ou de loin Keynes. Le destin se jouait d’elle ramenait le fils à un moment où elle se sentait vulnérable. A sa grande surprise, il était assez doux quoique un peu moqueur. Un regard rempli de haine affrontait celui du luthier quand il parlait de son front dégueulasse. Ce n’était pas sale mais c’était le fruit d’un dur labeur. Elle voudrait bien le voir lui à sa place. Il serait sûrement en train d’insulter tous le monde, imposant aux témoins sa douleur. Alors non, il n’avait pas le droit de dire que son front était dégueulasse parce que ce n’était pas agréable comme parole. La patience de Jamie s’effritait au fur et à mesure des jours durant cette grossesse. Il était temps que ça finisse. « Non mais ce n’est pas très bienveillant de dire ça ! » Elle bouderait presque Jamie. Assise sur sa chaise, elle toisait quand même l’homme. Son regard finit par être plus doux et amusé quand celui-ci s’enroulait dans le papier toilette. Il en avait acheté un stock, comme s’il prévoyait une grosse diarrhée pour les prochains jours ou un meurtre. Jamie pariait sur la diarrhée. Quelle naïveté de sa part. Les contractions disparaissaient. Il était temps pour elle de rentrer. Avec courage et gentillesse, elle demandait une ultime aide à Manwë. Les courses étaient étalées par terre et le temps de se lever de la chaise et de ramasser les denrées, il ferait nuit. Il s’exécutait et Jamie le remerciait avec un sourire. Peut-être avait-il du bon en lui ? Depuis sa grossesse, Jamie s’était posée des tas de question sur l’éducation et le rôle des parents. Manwë n’avait pas eu sa chance à elle d’avoir des grands-parents aimants. Son père était décédé quand elle était enfant, mais elle avait eu un accompagnement éducatif par son papi et sa mamie. Ce n’était peut-être pas le cas du luthier et Jamie essayait de ne pas le juger lui. Il aboyait sur le caissier qui était resté passif tout le long. Difficilement, l’avocate se levait. « Heureusement qu’il y a encore des gens aidants. » Disait-elle avec sévérité aux caissiers. Elle payait ses quelques courses avant de se retourner vers Manwë. « Merci pour l’aide, le fou-rire et même les critiques sur mon front dégueulasse. » Concluait-elle en riant. Ils n’étaient pas amis et n’étaient pas amenés à se revoir. Elle le quittait lui et les gens derrière qui attendait en portant ses deux petits sacs, ignorant qu’elle serait amenée à revoir Manwë dans d’autres circonstances.