i wish i knew (arielle)

tw : crisse d’angoisse, anxiété

Le temps est beau et Polly sort des cours pour rentrer chez elle. Son casque vissé sur la tête, elle écoute de la musique pop entraînante, comme à son habitude, mais son esprit est ailleurs. Elle pense à son prochain rendu de projet, l’avant dernier avant que son cycle d’études soit terminé, elle pense à la suite, au fait qu’elle n’a rien prévu une fois son diplôme obtenu, qu’elle ne sait pas où travailler, si au final elle continuerait vers un doctorat ou non, cette option semble compliquée en aussi peu de temps de toute façon, elle aurait dû s’y prendre en avance. Mais est-ce qu’elle a réellement envie de bosser dans la cybersécurité ? Dans les intelligences artificielles ? Les évolutions dans le domaine ces derniers mois la font de plus en plus douter. Et si elle s’était complètement plantée en choisissant l’informatique il y a cinq ans ? Et si elle aurait été mieux à choisir l’architecture comme ses parents ? Avec toutes ces questions en tête qui tourbillonnent, elle sent sa respiration s’accélérer et un vent de panique la submerger. Pour tenter de penser à autre chose et se calmer, elle s’arrête devant un stand de smoothies et milk-shake et se place dans la queue. Elle se tient aux lanières de son sac à dos et tente de calmer sa respiration en inspirant profondément et en expirant profondément, mais ça n’aide pas à arrêter l’emballement. Pourquoi ça l’arrête pas ? Elle sent les larmes lui monter aux yeux, elle avale sa salive et essaie de se concentrer pour ne pas pleurer, mais elle ne tient plus en place, elle a envie de se rouler en boule, elle sent ses mains commencer à trembler. La jeune femme regarde autour d’elle en quête d’un endroit où se réfugier. Elle repère rapidement un banc vide un peu à l’écart et s’y précipite, s’asseyant contre. Les larmes se mettent alors à couler avec plus d’intensité et elle sent son corps tout entier trembler, incapable de se calmer, s’arrêter l’angoisse qui ne fait que grandir en elle.

@Arielle Walker

Je bossais pas avant encore quelques heures, travaillant les quarts de nuit cette semaine. J'avais donc eu le temps de me lever, aller courir dehors, faire du rangement dans l'appartement. Ça devenait vite le bordel de vivre avec Orso et Detlev, c'était pas des petites fées du logis ces deux-là. En tout cas, après tout ça, je m'embêtais un peu et j'avais eu envie de faire un petit tour au marché afin de ramener des ingrédients frais pour que Detlev nous fasse à manger. Et bien non, je n'avais pas son talent en cuisine et je préférais largement manger ce qu'il nous préparait. C'était tout de même la moindre des choses de lui acheter des ingrédients de qualité, tant qu'à profiter de lui. J'avais donc pris un tote bag, mis mes lunettes de soleil et avais pris la direction du marché. Il faisait beau aujourd'hui et le vingt degrés était très agréable. Après plusieurs minutes à me promener à travers les kiosques, à sentir les herbes fraiches et à choisir de bons produits locaux, je sentis le besoin de me prendre un petit truc à boire. Il y avait plusieurs choix ici et le mien s'arrêta sur un stand de jus pressés, juste à côté de celui à milkshakes et à smoothies. Mon téléphone resta dans mes poches, je préférais prendre ce moment pour moi, pour admirer autour, pour observer les gens. J'étais bien aujourd'hui, comme en paix. J'aimais bien être attentive à ce qui se passait autour de moi, ça me permettait de mieux apprécier le moment. Je remarquai dans le coin de mon oeil une jeune femme qui semblait paniquée. Je la vois chercher autour et se diriger vers un banc plus loin. C'est plus fort que moi de le remarquer et d'y prêter attention. Elle semble toute seule, personne ne va la rejoindre. Impossible de la laisser dans cet état sans rien faire, je prends vite fait le jus qu'on me tend et me dirige doucement vers le banc où elle se trouve. Je n'ai pas envie de la prendre par surprise non plus, on sait pas trop comment elle peut réagir. « Hey, bonjour... Je m'appelle Arielle, je vais m'approcher un peu, c'est ok? » lui demandai-je d'une voix douce. Vite comme ça, son état pouvait être associé à beaucoup de choses, je préférais ne pas prendre de chance de la trigger davantage. J'attendis donc son ok, son hochement de tête ou même juste de croiser son regard avant de bouger.


@Polly Burnett

Les crises d’angoisse, Polly en a eu quelques unes durant son enfance, quand le harcèlement revenait et qu’elle se sentait complètement seule face à ça, mais ensuite, les choses se sont plutôt calmées. Les angoisses se sont faites moins présentes et la panique restait un lointain souvenir. Si bien que lorsqu’elle a commencé à trembler, à se sentir complètement perdue, comme si elle tombait tout d’un coup dans un puits sans fond alors que ses pieds étaient bien sur terre, elle n’a pas pensé à de l’angoisse. Plutôt à un manque de sucre peut-être, malgré son petit déjeuner habituel et son estomac qui ne l’alertait pas sur un manque de nourriture. Mais elle n’a pas eu le temps d’en avoir le cœur net, se sentant étouffer dans la queue pour avoir un milk-shake, ne pouvant rester en place plus longtemps, sentant les quelques personnes autour d’elle l’oppresser complètement alors même que l’endroit était plutôt calme. Suivant son instinct, la seule chose qui semblait fonctionner à cet instant, elle se dirigea vers un banc contre lequel elle se mit à pleurer sans retenue. De toute façon personne ne viendrait la voir, les gens s’en fichent de voir quelqu’un pleurer et paniquer. La dilution de la responsabilité, elle connaît bien ce phénomène pour en avoir été la victime durant son enfance. Personne ne fera rien car tout le monde se dit que quelqu’un d’autre interviendra. Est-ce qu’elle a envie que quelqu’un vienne la voir ? Elle n’a pas envie de faire perdre son temps à quelqu’un, elle peut gérer, elle a toujours géré, elle s’en est toujours sortie. Quand elle entend une voix autour d’elle, Polly n’imagine pas tout de suite que c’est à elle qu’on puisse s’adresser. Elle relève tout de même un peu la tête pour voir une jeune femme à l’air bienveillant postée proche d’elle mais pas trop non plus. Oui c’est bien à elle qu’elle s’adresse. La jeune femme tente de reprendre un air qui veut dire que tout va bien mais avec son corps qui tremble comme si elle avait trop froid et les larmes coulant sur son visage, elle sait bien qu’elle pourra pas la flouer. Elle hoche simplement la tête, sentant qu’aucun mot ne pourrait sortir de sa bouche pour l’instant.

On m'avait déjà dit que ma tendance à aller vers les gens inconnus pour les aider pouvait être dangereuse. On savait jamais sur qui on pouvait tomber et effectivement, parfois c'était téméraire. Comme la fois où j'étais allée vers Detlev alors qu'il venait de se battre avec quelqu'un. Il aurait pu être un fou furieux, m'attaquer, me kidnapper. Bon, je partais dans les extrêmes, mais on comprenait l'idée. Celle-ci étant qu'il fallait être prudent de nos jours avec les gens qu'on ne connaissait pas. C'était peut-être à cause de mon travail, mais quand je me retrouvais face à une situation d'urgence ou de crise, la prudence était mise de côté parce que c'était plus l'essentiel. L'essentiel devenait la personne devant moi, celle en détresse. Aujourd'hui, cette personne avait pris la forme d'une jolie jeune femme rousse qui semblait toute seule et dans un mauvais état. On s'entend qu'elle n'avait pas l'air dangereuse. J'étais donc presque choquée du nombre de gens qui passaient devant elle en lui adressant à peine un regard. Je voulais laisser le bénéfice du doute et dire que beaucoup ne la remarquait pas, mais ça montrait une bonne image de la société : trop centré sur leur propre nombril pour remarquer quelqu'un qui avait besoin d'aide. Je m'étais donc empressée d'aller vers elle, me gardant une distance au cas où la situation était liée à une autre personne ou un traumatisme physique quelconque. On ne savait jamais. Je guettai ses réactions, à la recherche d'une approbation de sa part pour m'approcher, pour prendre soin d'elle et l'aider à traverser ce qui m'apparraissait être une crise d'angoisse. Dès qu'elle hocha de la tête, je m'approchai doucement et m'accroupit pour être à son niveau. Je tentai de me faire la plus rassurante possible. L'important était surtout qu'elle sache qu'elle n'était pas seule, qu'elle était en sécurité et finalement, de lui changer les idées. '' Okay, je suis là, je te lâche pas. '' lui dis-je avec un sourire rassurant. '' Je sais que c'est pas facile, mais j'ai besoin que tu te concentre sur mes mains, d'accord? Quand elles montent en l'air, on inspire ensemble et quand elles redescendent, on expire. Tu peux faire ça avec moi? '' lui demandai-je en faisant un exemple au fur et à mesure que je parlais. '' On inspire. '' la dirigeai-je en montant mes mains. '' Et on expire. '' indiqua en les descendant. On répéta quelques fois, au moins jusqu'à ce que je sente qu'elle arrivait à bien respirer. '' Est-ce que tu arrives à me dire ton prénom? '' lui demandai-je en la regardant.

Comme toujours Polly pensait pouvoir gérer ça tout seule, se débrouiller sans avoir besoin d’aller déranger quelqu’un. De toute façon vu son état, elle n’est pas capable d’aller parler à qui que ce soit. Une jeune femme s’approche pourtant d’elle, avec une voix calme et rassurante, elle l’écoute mais elle est incapable de dire quoi que ce soit en retour, ni de se calmer pour prétendre que tout va bien. Cet élan de solidarité lui donne presque envie de pleurer un peu plus. Ces derniers temps elle a bien besoin qu’on lui montre que le monde n’est pas totalement perdu, qu’il reste de belles personnes qui rendent les choses un peu moins déprimantes, que tout n’est pas noir ni voué à l’échec. Polly relève la tête pour apercevoir l’inconnue entre ses larmes, elle la distingue même si elle voit flou, elle l’écoute, se concentre sur sa voix et ses explications. A nouveau elle hoche la tête, la relève un peu plus et tente d’essuyer ses larmes avec sa manche. Heureusement qu’elle n’a pas mis de maquillage aujourd’hui, le mascara coulant partout ce n’est pas ce qu’il y a de plus facile à cacher. En suivant les instructions de la blonde, elle inspire et expire en suivant ses bras qui montent et qui descendent. Par moments sa respiration s’emballe à nouveau et elle sent les sanglots et les tremblements reprendre en intensité, mais petit à petit, elle se sent se calmer un peu, se sentant moins crispée et moins tremblante. La jeune femme doit le voir puisqu’elle lui pose la première question à laquelle elle ne peut pas répondre d’un hochement de tête. « Polly. » répond-elle simplement. D’ordinaire si bavarde, elle a du mal à sortir ne serait-ce qu’un seul mot de sa bouche. Après quelques nouvelles respirations, elle arrive à ajouter « Et toi ? » et à fouiller dans son sac pour en sortir un mouchoir et se moucher, toujours un peu tremblante, toujours avec des larmes coulant sur ses joues. Elle ne se sent plus autant en détresse qu’il y a quelques minutes, le calme revenant petit à petit, mais elle sent qu’un rien pourrait la refaire basculer vers la panique paralysante.

C'était pas la première crise d'angoisse dont j'étais témoin, pas la première non plus que je gérais. À l'hôpital, c'était pas rare que des patients souffrent d'anxiété et que les crises se déclenchent simplement parce qu'ils étaient là. Y'avait différentes façons de prendre en charge ce genre de crises, ce qui fonctionnait pour une personne ne fonctionnait pas nécessairement pour tous. Fallait se trouver des trucs, en essayer plusieurs et surtout, faire preuve de patience et de compassion. À l'hôpital, en tant qu'infirmière, on était souvent en charge de la santé physique. On s'occupait de blessures, de plaies, de pansements, de traitements. On pouvait facilement oublier que la santé mentale était tout aussi importante. La formation à l'école couvrait pourtant le sujet, mais probablement de façon moins étendue que pour la portion physique. C'était tout de même une réalité et elle devenait de plus en plus grande. Je le savais mieux que quiconque et avec mon parcours ainsi que mon propre diagnostic, je prenais ça bien à coeur. C'était donc totalement normal pour moi de m'approcher de la fille et de tenter de l'aider du mieux que je le pouvais, même si je ne la connaissais pas. Je lui donnai des instructions claires, courtes, un petit truc sur lequel se concentrer alors qu'on tentait de régulariser sa respiration. Je le fais avec elle aussi longtemps qu'il le faut alors que le tout semble s'empirer avant de finalement se calmer. Je lui pose donc une question simple à laquelle elle peut répondre sans trop réfléchir. '' Polly. '' répétai-je avec un petit sourire en hochant la tête. Un pas vers l'avant de fait. '' Moi c'est Arielle. '' lui répétai-je gentiment. '' Je peux m'asseoir? '' lui demandai-je en pointant le banc. Je lui tends mon jus, ça lui ferait probablement du bien de s'hydrater, puis le sucre des fruits peut aider aussi. '' Tiens, tu peux prendre ça. Ça te fera du bien. '' lui offris-je doucement. J'attendis son ok pour prendre place à côté d'elle. J'aurais pu lui demander comment ça va, comment elle se sent, mais je ne la connais pas assez pour savoir si cette simple phrase peut être un déclencheur ou non. '' Tu faisais quoi au marché? '' lui demandai-je pour lui changer les idées et lui faire penser à autre chose.