If only I knew you were my brother (Caspian)

Raccrochant au téléphone, Alba voulait la confirmation de Léo. Ce soir, son fils ne serait pas avec elle mais bien avec son papa. La photographe avait prévu une soirée avec cette charmante jeune femme qu’elle avait croisé sur BBT. Certes, elles n’avaient principalement parlé que de travail, Alba la trouvait magnifique. Alors même si sa galerie avait besoin d’une nouvelle décoration, c’était plus une excuse pour la voir. Le rendez-vous n’était pas avant ce soir, alors la blonde avait le temps. Depuis qu’elle avait repris la galerie, Alba ne comptait plus ses heures de travail. Entre répertorier les différentes œuvres, contacter les artistes et faire de la pub, Alba avait encore des tonnes de choses à faire. La première exposition s’était bien passée, même s’il avait été absente presque toute la soirée. Les œuvres de cette exposition allaient être changées dans quelques semaines mais il restait des potentiels acheteurs. Buvant une gorgée de son café bien noir et concentrée sur les papiers administratifs, Alba n’entendit pas tout de suite le jeune homme rentré. Il marchait dans la galerie regardant un peu les œuvres. Alba remontait la tête et elle le vit. Jeune, charmant, ce n’était pas vraiment le style de personnes qui habituellement rentrait ici. Mais comme Alba aimait se le répéter, « l’art touche tout le monde. » Posant sa tasse sur le comptoir, elle s’approchait de lui. « Bonjour ! Puis-je vous aider ? » Demanda-t-elle avec un large sourire. « Je peux peut-être vous offrir un café ? » Elle voulait que sa galerie soit accueillante, un endroit où les personnes pouvaient se sentir bien tout en observant les œuvres.

Quand Alba avait découvert cette galerie quelques années auparavant, elle était tombée sous le charme. Le lieu était atypique et la gérante généreuse. Cette ambiance, Alba ne voulait pas la perdre et comptait garder l’esprit. Mais, la décoration n’était pas vraiment à son goût, il fallait quelque chose de plus jeune, alors Alba depuis quelques jours feuilletaient les magazines de décoration. Et ce soir, Freja venait apporter des idées neuves. Même si Alba ne comptait pas parler que de décoration avec la belle brune. Quand elle vit ce jeune homme, un peu perdu mais bien habillé dans sa galerie, la blonde mit de côté ce qu’elle était en train de faire. Il pouvait être un acheteur potentiel ou tout simplement un mordu d’art. Mais peu importe, elle lui souriait lui proposant un café. Alors elle partait en direction de la machine à café. La blonde avait craqué pour cette machine qui moulait les grains. Fan inconditionnelle de cette boisson noire, c’était la première chose qu’elle avait acheté pour sa galerie. Elle revenait près du jeune homme avec deux tasses, une pour lui et une pour elle. Il avait l’air intéressé par les différents tableaux présents. Cette exposition était une réussite, l’artiste avait un cœur exceptionnel et ses tableaux majestueux rendait la galerie attractive. Elle se posa à côté de lui, de façon non oppressante pour lui laisser le temps de se perdre dans la contemplation. « La galerie est là depuis plusieurs années maintenant. Mais je viens seulement de la reprendre. » Répondait-elle avec un large sourire. « Je suis photographe normalement mais je voulais me lancer dans un nouveau projet. » Pas besoin de lui raconter toutes les raisons. Elle n’allait pas lui parler de Léo et Jonah. « J’ai l’impression de vous avoir déjà vu. » Sa tête lui était familière mais elle était incapable de savoir d’où. Peut-être qu’elle l’avait croisé durant un de ses voyages ou tout simplement croisé à Bowen.

Si seulement elle avait su, Alba ne se serait pas montrée si accueillante. Il y avait un déséquilibre. Lui il savait tout. Il connaissait la mère d’Alba, avait eu quelques années son amour. Et elle ignorait tout de sa mère et du lien qui les unissait. Peut-être que s’il avait su la peine qu’elle allait vivre en apprenant ce lien fraternel, peut-être se serait-il abstenu ? Mais il était présent dans sa galerie. Elle aurait pu discerner une tâche commune, une fossette similaire, un regard connu. Mais non, Alba pensait juste qu’il était un intéressé d’art et un acheteur potentiel. En bonne commerçante, elle lui préparait son café. La blonde avait toujours été comme-ça. Pour elle, la bien-être des personnes était primordial. Et si l’accueil pouvait les encourager à sortir leur porte-monnaie ce n’était que positif. Pourtant, il lui semblait familier. Ce visage carré et la fossette au coin de la lèvre lui rappelait quelqu’un. Appréciant la chaleur et l’amertume de la boisson, Alba profitait de ce petit moment de pause. Depuis ce matin, elle ne s’était pas arrêtée. Ce jeune homme était arrivé au bon moment. Elle riait à sa remarque. Elle n’était pas la seule à l’avoir déjà vu. Puis un rire un peu plus grave sortit de sa bouche. Le café était fort, loin de ce que les australiens et américains avaient l’habitude. « Oh… Pardon. Il est un peu fort. Il vient du Costa Rica. » Elle avait toujours aimé le café mais durant ses nombreux voyages elle avait testé dix milles saveur de caféine différente. Chaque mois elle changeait d’origine pour continuer à voyager. Puis il lui expliqua. Il faisait de la télé et Bowen n’était pas une ville étrangère pour elle. « Oh … voilà ! J’ai dû vous voir dessus. » Ce n’était pas une grande fan de la télé, mais parfois elle zappait en repassant ou en faisant à manger. « Vous faites une émission sur quoi ? » Demanda-t-elle avec un sourire. Un peu de pub ne lui ferait pas de mal même si pour le moment la galerie était plutôt attractive. Elle espérait plus, mais attendrait les rénovations pour vraiment s’y mettre. « Oh … alors. » Elle reprenait son sérieux professionnel. « Il s’appelle Guilby, il est australien. Je ne sais pas si vous connaissez ? » Alba, elle l’avait découvert il y a quelques mois à Brisbane et l’avait appelé pour qu’il inaugure sa galerie.

Quand elle remarqua la surprise sur le visage du jeune homme, Alba se fit une réflexion. Ses amis avaient l’habitude de son café et la prévenait avant qu’elle le prépare de la faire moins serré. Il faudra à présent qu’elle fasse attention à ça pour sa galerie. Elle ne voulait pas non plus dégoûté les potentiels acheteurs avec son café trop fort. Il avait l’air intéressé par les tableaux qu’il voyait et la conversation s’était assez bien enchaînée. Et il lui disait quelque chose. Il faisait de la télévision et Alba avide de curiosité voulait savoir qu’elle émission il animait. Et sa réponse lui avait plu. Il était donc un intéressé par la culture et l’art. Et Alba lui souriait, laissant apparaître également quelques fossettes. Un témoin de l’extérieur aurait pu leur trouver une ressemblance physique mais Alba elle ne fit pas attention. « C’est chouette. » La blonde adorait les podcasts, les débats et elle se promettait que demain elle irait voir une ou deux émissions. « Et quelle a été l’émission que vous avez animés qui a été la plus motivante ou la plus transcendante ? » Il devait bien y avoir des fois où les invités étaient passionnants tout comme le sujet. Puis pendant quelques secondes son clients s’arrêtaient de parler, observant l’œuvre qui se trouvait devant lui. Alba lui laissait le temps de se perdre dans la contemplation. L’art était lent, il fallait s’imprégner et se laisser submerger par les émotions qu’on pouvait ressentir. Elle lui sourit, heureuse de lui faire connaître un nouvel artiste. Alba était encore novice dans ce domaine culturel, mais elle aimait parler d’art. Et quand il lui demandait des détails sur l’artiste, Alba lui souriait. « C’est vrai que les couleurs son incroyables. Il a vécu un événement traumatisant dans sa vie qu’on peut retrouver dans toutes ses œuvres. A chaque fois il balance une tâche de couleur pour rapporter un peu d’espoir et de joie. Le reste est très sombre. Ici par exemple, rien n’est réaliste et il laisse le spectateur décidé de la signification. » Elle fit deux pas pour arriver devant une autre œuvre. « Ici c’est un peu l’inverse. Il utilise autant le réalisme et l’abstrait comme s’il voulait faire voyager le spectateur dans son esprit. Le réalisme lui permet de montrer les phases conscientes de sa vie et l’abstrait les phases où ses souvenirs sont flous. » C’était passionnée qu’Alba finissait sa longue tirade. Elle n’avait pas envie de l’ennuyer donc elle n’ajouta rien de plus. L’artiste avait été clair, c’était au spectateur de suivre le chemin.

Alba semblait s’intéresser à cette émission et encore plus lorsque le jeune homme parlait du moment qu’il l’avait le plus marqué. Elle souriait, imaginant la scène où une adolescente arrivait à étonner des adultes persuadés que plus rien ne pouvait les surprendre. Ce n’était surement pas le cas de son interlocuteur, mais Alba ne le connaissait pas. « Cette nouvelle génération est vraiment épatante. » Disait simplement la blonde. Chaque mois il y avait des nouveaux artistes à voir et à contacter. Ils touchaient toutes les formes d’art, notamment la photographie, passion d’Alba. Il avait l’air de s’intéresser à l’art, et Alba aimait partager. Depuis toute petite, elle s’était essayée aux différentes formes d’art sous les conseils avisés de ses parents. En grandissant, elle avait étonnée Steen et Luke qui à leur tour apprenait de nouvelles techniques grâce à leur fille. Et aujourd’hui, même si la photographie restait son premier amour, Alba se réconciliait avec les autres notamment parce qu’elle voulait que sa galerie soit un mélange d’idée et de beauté. Alors elle expliqua au jeune homme l’idée de l’artiste du moment. Et elle s’était perdue dans ses explications sans s’inquiéter d’ennuyer son interlocuteur. Une fois partie il était difficile d’arrêter la blonde. Les œuvres de cet artiste touchait Alba, parce qu’elles guidaient le spectateur. L’artiste ne s’était pas contenté de laisser le spectateur passif, non il le voulait actif, c’était toute une histoire à travers les souvenirs de l’artiste mais également des souvenirs du spectateur et chacun voyait ce qu’il voulait. « Exactement, vous avez bien saisi sa pensée. » Disait-elle en lui souriant. Puis elle continuait de parler, d’expliquer sans jamais dire ce que elle voyait parce qu’Alba était plutôt réservée sur sa vie. Autant elle arrivait à se confier aux personnes qui avaient franchis une certaine barrière, autant elle se montrait réservée envers ceux qu’elle ne connaissait pas. Et le franchissement de cette barrière n’était pas acquis, du jour au lendemain, une personne pouvait se retrouver éjecter, un peu comme Léo. Elle avait peur de le faire rentrer une nouvelle fois intimement dans sa vie. Elle aimait la réponse du jeune homme, il s’y connaissait en art et il avait l’air d’apprécié les œuvres. Alba buvait une nouvelle gorgée de son café serré avant de répondre à Caspian. « Il ne m’a pas tout raconté, mais je crois que celle-là parle d’une période de sa vie où il a retrouvé une personne. Je pense que les couleurs reflètent la joie qu’il avait dû ressentir. Et je crois que c’est une de mes préférés. » Disait-elle. Elle l’aimait parce que peut-être qu’elle espérait un jour de pouvoir mettre cette couleur sur le sentiment qu’il ne l’avait jamais quitté, de retrouver ceux qui un jour l’avait abandonné, même si Alba hurlait haut et fort que jamais elle ne voudrait des contacts avec eux. Elle se retourna vers son interlocuteur, il était là depuis une vingtaine de minutes maintenant et elle n’avait pas vu le temps passer. « Je m’appelle Alba en fait. » Elle voulait que son lieu soit agréable et convivial, que les gens viennent ici pour passer un bon moment artistique.

Depuis toujours Alba s’était intéressée à l’art dans le sens large, c’était bien plus tard qu’elle avait décidé de faire de la photo son activité principale. Et elle continuait toujours même si aujourd’hui elle passait du temps dans cette galerie. A la naissance de Jonah, elle ne pouvait plus autant voyager et tout une partie de son domaine d’expertise disparaissait. Mais c’était peut-être un mal pour un bien parce que dès qu’elle rencontrait les artistes, et leur parlait elle avait envie de tout faire pour transmettre le plus ses œuvres et sa pensée. Le jeune homme en face d’elle avait envie d’en savoir plus et Alba ne se gênait pas pour l’assommer de paroles. Surtout que cette œuvre lui parlait, ayant toujours au fond d’elle cette envie cachée de connaître ses origines. Juste, elle ne savait pas encore comment elle réagirait si sa mère biologique se retrouvait en face d’elle. Tout était de sa faute, cette manque de confiance en elle, cette sensation de n’être jamais assez pour les personnes. Elle se retournait vers son nouveau client, le tableau lui plaisir, il lui parlait même. « Oh alors on a un point commun. » Lui disait-elle en souriant. Il avait ce petit truc dans les yeux qui inspirait confiance, comme si elle avait déjà vu ces yeux quelque part. Se sentant assez proche, elle lui disait son prénom. Elle le faisait assez régulièrement. « Caspian ? Comme le lion dans Narnia ? » Elle riait légèrement avant de se rendre compte de sa bêtise. « Ah non comme le Prince. » C’était peut-être mieux et dans ses souvenirs elle l’aimait bien Caspian, il avait ce petit charme qui avait plu à la Alba adolescente. Sans s’y attendre, il voulait l’acheter, comme ça sur un coup de tête. « Heu… pardon ? » Bien sûr que c’était le but, de vendre les tableaux, mais habituellement les personnes revenaient plusieurs fois, demandaient le prix et parfois essayaient de le négocier. « Vous ne savez même pas le prix. » Elle lui souriait tout en riant légèrement.

Quand l’artiste lui avait montré cette œuvre, Alba avait succombé. Ils avaient un deal, si elle ne se vendait, il lui offrirait. Elle lui parlait tellement. Tout reflétait son passé et ses espoirs enfouis. Parce que même si Alba aimait le nier, parfois elle aimerait avoir les réponses à ses questions. Pourquoi ? Pourquoi cette femme qui l’avait porté neuf mois avait décidé de ne pas l’aimer. Le choix de cette femme avait conditionné la vie d’Alba et la photographe avait toujours cette sensation de ne pas être assez bien pour les autres. Elle enleva ses pensées parasites, pour se présenter à ce client qui était sympathique. Il avait ce petit truc qui plaisait à la photographe. Caspian. Ce prénom lui rappelait Narnia, et même si elle se trompait sur le personnage, dans ses souvenirs Alba avait adoré cette saga. « Oui ils sont surfaits, tu dois relever le prénom Caspian. » Disait-elle gentiment. Elle était comme ça la photographe, elle était vite amicale. Bon dans ses souvenirs, elle avait craqué pour le beau Caspian. Ils discutaient devant cette œuvre, témoin de cette rencontre qui allait bouleverser la vie de la blonde. Il voulait acheter la toile. Maintenant ? Tout de suite ? C’était surprenant. Alba n’avait pas vraiment les mots, tout ce qu’elle arrivait à dire était qu’il ne connaissait pas le prix. Ce n’était même pas parce que si la toile ne se vendait pas elle l’aurait. Elle était un peu abasourdie et du reprendre ses esprits pour lui répondre. « Si si bien sûr. C’est juste surprenant. » Disait-elle en riant. « Habituellement les gens viennent plusieurs fois, essayent de négocier. Mais c’est bien. Je vais aller voir le prix. » Elle allait vers le comptoir pour regarder dans son classeur le prix. Elle revenait vers Caspian. « Comme c’est plutôt un grand format, elle est à 3500 $. » Et l’achat d’art n’était pas accessible à tout le monde malheureusement.

Pour cette première exposition, il y avait eu du monde. Peut-être que l’attrait de la nouveauté avait joué, mais elle espérait dans le fond que pour les prochaines il y aurait encore du monde. Ça lui permettait de découvrir un peu plus les habitants de la ville. Certes, peu de personnes pouvaient se permettre un tel achat, mais la galerie restait ouverte aux visites. Toute personne qui désirait entrer juste pour s’imprégner de l’art était le bienvenue, avec une tasse de café. « Oh pas forcément. » Répondait la blonde. « Certains n’y connaissent rien mais ils achètent parce que le tableau leur parle. » Alba n’achetait pas un tableau juste pour en avoir un chez elle, il fallait qu’il y ait un sens. Puis, elle n’en achetait pas régulièrement parce qu’elle n’avait pas forcément les moyens. Elle en avait deux, un grand dans son salon et un plus intime dans sa chambre. Pour le reste de la décoration, elle optait pour des objets trouvables dans les enseignes commerciales. Le jeune homme au nom princier était intéressé par le tableau préféré de la blonde. Elle aurait pu paraitre froide, mais ce n’était pas le but. Elle était surprise de cet achat rapide mais c’était avec sourire qu’elle revenait avec le prix. « Je peux toujours augmenter le prix. » Disait-elle en riant. Au final plus l’artiste était connu plus son art revenait cher. Lui, il n’était qu’à ses débuts. Elle riait à sa question. « Certains me draguent comme si ça allait marcher, d’autres négocient en fonction du marché de l’art. » Sauf qu’Alba ne négociait que très rarement, elle respectait la fourchette de l’artiste. Le but n’était pas de voler l’artiste qui avait passé du temps à confectionner son tableau.