crise (scar)

Ava avait eu sa première journée de travail aujourd'hui. Elle avait pris un emploi de serveuse dans un nouveau restaurant qui ouvrait tout juste. C'était bien beau voler, mais c'était tellement risqué et les entrées d'argent étaient complètement irrégulières. Si elle voulait pouvoir arriver à quelque chose dans la vie, il fallait commencer à la base. Peut-être pourrait-elle reprendre les études? Après tout elle avait toujours été douée. Enfin, la matinée avait plutôt mal commencée, elle était arrivée presque en retard pour sa première journée, mais elle avait réussit à rattraper le coup et arriver tout juste à l'heure. Le reste de l'avant-midi s'était bien passé. Ava avait déjà été serveuse au Canada, elle avait donc de l'expérience et connaissait déjà la base. Elle avait rencontré son collègue Azriel ainsi que son patron, Carlisle. C'est en finissant la journée que tout s'est gâché. Ava avait pour habitude d'ignorer les appels de ses parents depuis qu'elle était en Australie. Ils l'avaient étouffés depuis sa plus tendre enfance et elle avait eu besoin de liberté. Sa seule idée avait été de s'enfuir à l'autre bout du monde et de gagner sa vie malhonnêtement. C'était d'ailleurs en train de la rattraper, et sans même devoir passer par la case prison, elle avait compris que ses agissements avaient des conséquences. À la fin de la journée de travail, Ava s'était rendue à son casier pour y trouver encore quelques appels manqués de son père et un texto. Elle lève les yeux aux ciels, décidément il ne comprenait pas. Mais son coeur arrête de battre un instant lorsqu'elle lit le message.
Ava, je ne voulais pas te le dire par messagerie texte, mais tu ne me répond pas. Ta mère est malade, elle a un cancer. Rappelles-moi.
Ses yeux se remplissent d'eau et son écran devient flou. Rapidement, la jeune femme compose le numéro de son père qui répond après le premier coup, la voix enrouée. [...] ils l'ont vus trop tard, elle ne s'en sortira pas. [...] je n'ai pas l'argent pour un billet d'avion, j'ai dû quitter mon emploi. Tu n'as pas de travail? Non papa, je n'ai pas de travail je suis une voleuse et j'ai moins d'argent qu'un sdf... C'est en raccrochant qu'elle sentit son pouls s'accélérer et sa gorge devenir serrer. Elle voyait noir et un bourdonnement désagréable remplissait ses oreilles. Elle avait l'impression de se noyer, mais elle comprit après coup qu'elle venait de vivre la première crise de panique de sa vie. Alors qu'elle devait se sentir si libre, elle ne s'était jamais sentie aussi emprisonnée. Après s'être calmée, Ava avait pris le bus et avait envoyé un texto à la seule personne qu'elle connaissait qui vendait de l'herbe, Scar. Elle qui n'avait pas l'habitude de fumer, elle en avait bien besoin ce soir.

Ava arrive devant l'appartement du jeune homme en fin d'après midi. Ses cheveux sont attachés, son visage n'est pas maquillé et beaucoup plus pâle qu'à l'habitude. Elle est méconnaissable, elle qui ne sort jamais sans s'être mise belle avait l'air d'un fantôme. Elle appuie sur la sonnette et attend devant la porte.

Scar ouvre la porte et Ava ne remarque même pas son air incertain, en fait elle n'avait même pas pensé qu'elle pouvait faire peur. Telle la comédienne qu'elle ait, la jeune femme offre un petit sourire forcé au jeune homme, mais n'arrive pas trop à rire à sa blague. Ava entre dans l'appartement, et comme elle est invité à faire comme chez elle, la comédienne s'assoit machinalement sur le divan, le regard vide. Tandis que Scar est partie chercher ce pour quoi elle était venue, une image soudaine apparaît dans son esprit. Une grande chambre sombre aux couleurs délavées avec pour seul meuble un lit et une chaise. Elle voit sa mère le teint livide couchée sur le dos avec son père assis sur la chaise qui lui tient la main. Des moniteurs les entours, renvoyant les signes vitaux de sa mère comme image. Ava n'en peux plus et elle éclate de nouveau en sanglots, seule dans le salon. Elle se dit qu'elle doit reprendre le dessus avant que le jeune homme ne revienne, mais rien n'y fait, elle est tout bonnement inconsolable.

Même si Scar ne savait pas comment agir avec la jeune femme, il faisait ce qu'il fallait; s'asseoir et rester en silence. De toute façon elle n'aurait pas été capable de parler à cet instant. Ava parvint finalement à ce calmer même si c'était plutôt difficile. Le fait d'être en présence de quelqu'un d'autre l'aidait un peu. La brune remonte ses genoux sur sa poitrine et entour ses jambes de ses bras. Désolé que ça tombe sur toi. Finit-elle par être capable de dire. Ma mère va mourir, elle a un cancer. Un hoquet sort de sa bouche alors qu'elle tente encore de retenir ses larmes. Elle enfuit son visage dans ses genoux pour se cacher. Les larmes coulent de nouveau sur ses joues, mais elle n'est pas en sanglots.

Ava attrape un mouchoir. Elle savait bien dans quelle situation elle mettait Scar, il devait être plutôt mal à l'aise et ça la gênait, mais elle avait cru pouvoir se contenir le temps de venir chercher l'herbe, cependant ça avait été plus fort qu'elle. La jeune femme reste dans la même position foetale et prend le joint entre ses doigts avant d'inhaler une longue "puff" (on appelle ça comme ça dans mon coin ). Comme elle n'avait pas l'habitude de fumer, évidemment elle s'étouffe bien solidement avec la fumée tout en redonnant le pétard à Scar. Elle se sent d'un coup étourdit. Elle va m'assommer celle-là. Finit-elle par dire après avoir réussit à reprendre son souffle.

Scar était évidemment bien plus expérimenté que la jeune femme qui fumait plutôt rarement. Ava finit par redescendre ses jambes, se sentant ainsi bien plus à l'aise. Plutôt rapidement elle sent la drogue faire effet. Ce qui l'entoure bouge un peu au ralentit et son cerveau semble flotter sur un nuage. Elle balance la tête vers l'arrière, regardant le plafond quelques instants. Elle ne remarque pas le jeune homme qui se lève pour aller chercher de l'alcool. Lorsqu'il revient et lui propose un verre. Ava acquiesce rapidement de la tête. Whisky, mon vieil ami. Elle attrape un verre au passage. Je prendrais bien un peu de whisky. Et par un peu elle voulait dire: garde la bouteille pas trop loin.

Ava lève donc son verre en direction du jeune homme avant de caler son contenu, puis de se resservir sans toutefois le porter une nouvelle fois à ses lèvres, elle le pose plutôt sur la table. Il l'attendrait bien sagement. La brunette fixe son verre. Quand j'aurai l'argent pour aller la voir au Canada ça ira. Bon, ça ne réglerait pas la question du cancer, mais d'une façon ou d'une autre, elle allait mourir. Son père lui avait dit que ce n'était qu'une question de temps et qu'elle ne ferait même pas de traitements. Les médecins lui donnerait des médicaments pour supporter la douleur avant qu'elle ne s'éteigne d'elle même. Ce qui lui faisait le plus mal dans cette histoire c'était de s'imaginer que sa pauvre mère ne pourrait pas revoir sa seule fille, son enfant unique avant de partir pour de bon. T'inquiète pas, c'est mon vieil ami. Lui dit-elle en pointant du nez le liquide brun qui dansait dans son verre.