light in darkness will show you the way (annabeth)

Les évènements échappaient de nouveau au contrôle de Ari. Les choses avaient pourtant semblé se calmer, s'éclaircir même, il y a quelques semaines, pour la première fois depuis son retour à Bowen. Il commençait enfin à tirer un trait sur sa relation avec Avery après quatre années remplies de regrets. Se voir rejeté par son ex fiancée lui avait brisé le coeur ce soir là au Adam & Yves, lorsqu'il avait réalisé qu'il était bien trop tard, la jeune femme ayant donné son coeur à un autre. Mais petit à petit il avait commencé à remonter la pente, comme si ce rejet avait finalement été la chose dont il avait besoin pour enfin avancer. Et il y avait eu Rori. L'élément surprise qui était venu s'ajouter à l'équation. Le rebondissement qu'il n'avait pas vu venir, Ari. Petit soleil tout droit revenu d'Angleterre, leur retrouvailles sur la plage s'étaient finies d'une façon à laquelle il n'aurait jamais pu s'attendre, le jeune homme. Mais une fin loin d'être désagréable, qui laissait peut-être deviner les prémices de quelque chose de joli. De simple. Ils s'étaient donné du temps, sans pression, sans besoin de mettre des mots sur ce qui était en train de se passer. Des emplois du temps chargés les avaient empêché de se revoir rapidement mais les sms s'étaient fait nombreux entre eux depuis ce baiser inattendu. Mais alors était arrivé l'autre rebondissement. Et celui-ci non plus, il ne l'avait pas vu venir, Ari. Il ne s'était pas attendu à trouver Avery sur son palier ce soir-là. Et si elle était manifestement un peu alcoolisée, lui n'avait aucun semblant d'excuse, parfaitement sobre lorsque les choses s'étaient enchainées. Il avait senti le bordel s'installer dans son esprit, Ari, lorsqu'elle lui avait confié sa rupture avec Hugo. Et ce qui s'était passé après n'avait rien arrangé, niveau bordel. Le jeune homme était perdu. Et par dessus tout il se sentait coupable. Il n'avait rien promis à Rori bien sur mais il se doutait qu'entendre une telle nouvelle ne ferait pas plaisir à la brune. Et il ne s'était pas trompé. Il avait tout gaché, une nouvelle fois. Il devrait commencer à s'habituer peut-être ? Expert en bousillage de relation. Rori n'était pas sa petite amie, certes, mais il n'avait pas pu lui cacher ce qui s'était produit avec Avery. Il avait dû assumer. Peut-être apprenait il un peu de ses erreurs, au final, petit à petit. Sa réaction ne l'avait pas vraiment surpris, elle était légitime. Il avait merdé. Il méritait de se retrouver seul et malheureux. Et à vrai dire, il était toujours perdu, Ari. L'esprit confus, plus si sûr désormais de vouloir tirer un trait sur Avery, cette soirée ayant à nouveau entrouvert une porte qu'il pensait pourtant fermée. Mais en même temps, y avait aussi la peine qu'il avait ressenti lorsqu'il avait compris qu'il avait perdu Rori, le manque qui était présent quand il prenait son téléphone n'affichant désormais plus aucun message de la jolie brune. Oui, il était perdu. Et il se maudissait pour s'être une nouvelle fois fichu dans une situation aussi merdique. La sonnerie de la porte d'entrée tira le jeune homme de ses pensées. Assis dans son canapé, Joy jouant dans sa chambre au fond du couloir, voilà plus de trente minutes qu'il ruminait ses sombres pensées. Annabeth devait passer ici en cette fin d'après-midi pour le goûter et c'était probablement elle. Ari ne savait pas vraiment s'il aurait le coeur à lui raconter tout ce qui lui occupait l'esprit. La dernière fois qu'il avait parlé à sa soeur de ses histoires de coeur, il venait d'embrasser Rori. Petit crush naissant, tout était pour le mieux. Assurément, les choses avaient changé. Et pas pour le mieux, en l'occurrence. Il se leva pour aller vers l'entrée, suivi de près par son chien, Rio, dont la queue remuait déjà à l'idée d'accueillir l'invitée du jour. Il tenta de lui sourire d'un air convaincant lorsqu'il ouvrit la porte. "Salut." dit-il en s'approchant d'elle pour l'étreindre, alors que Rio lui faisait déjà la fête, sautant presque sur les genoux de la jeune femme.

@Annabeth Coleman

L'accueil de Rio à Annabeth est nettement plus chaleureux que celui d'Ari. Non pas qu'il ne soit pas content de voir sa sœur, le jeune homme. Ces derniers jours ont simplement été rudes, moralement. Et il ne se doute pas encore que cette visite sera loin de lui changer les idées.  Il l'étreint rapidement et sourit en voyant Rio obéir probablement mieux à sa sœur qu'à lui même. Sacré garnement, ce chien. Il débarrasse le gâteau des mains de sa sœur pour le poser sur le comptoir de la cuisine et s'apprête à répondre que c'est très bien, une tarte aux framboises. Mais Annabeth ne lui en laisse pas le temps et le sourire s'évanouit des lèvres d'Ari lorsqu'il entend la suite de sa phrase. Génial. Surpris, il ne sait pas que répondre sur le coup et l'arrivée de Joy écourte son temps de réflexion. Sauvé par le gong. Vraiment ? C'est surement juste de la torture de repousser le savon qu'il est désormais certain qu'Annabeth va lui passer. Les bras croisés sur la poitrine, son visage se ferme et il écoute l'échange entre les deux filles, son regard passant de l'une à l'autre. Il n'est pas trop sur d'être enchanté par la perspective de se faire engueuler par sa petite soeur, Ari. Savon à venir confirmé par le regard qu'elle lui adresse en se retournant vers lui. Il plisse les lèvres d'un air un peu agacé mais préfère ne rien dire devant Joy, bien sûr, s'adressant plutôt directement à elle. "Viens, je te les donne." dit-il, l'air adouci lorsqu'il parle à la petite fille. Il se retourne pour prendre trois assiettes dans le placard et les donner à Joy qui part les disposer sur la table. Il commence à déballer la tarte aux framboises, le regard rivé sur la patisserie alors qu'il s'adresse de nouveau à sa soeur. "Tu veux un truc à boire ?" demande-t-il l'air un peu froid avant d'amener la tarte sur la table où Joy a disposé les assiettes, sans attendre sa réponse. "Il manque les cuillères papa !" dit-elle. "Oui, tu peux aller les prendre dans le tiroir et après on se régale." répond-t-il avec un petit sourire. Quelque chose lui dit qu'il va être long, ce goûter.

La tarte déposée sur la table, Ari retourne vers la cuisine pour récupérer trois verres d'eau en se demandant s'il ne ferait pas mieux de se décapsuler une bière. De la détente liquide en prévision de la conversation plutôt houleuse qui semble l'attendre avec Annabeth. Mais non, il reste raisonnable et pose les verres d'eau sur la table alors que Joy ramène les cuillères et sa soeur les parts de tarte. Ari regarde les deux filles discuter joyeusement pendant qu'il mange sa part avec un appétit tout relatif. C'était bien sa veine qu'Annabeth ait croisé Rori. Mine de rien, il avait hâte d'en savoir plus. Rori s'était apparemment confiée à sa soeur, peut-être pourrait-il avoir un peu de ses nouvelles de manière indirecte puisqu'il n'osait plus lui écrire depuis les aveux qu'il avait du lui faire sur sa nuit avec Avery. Le gouter terminé, Ari débarasse les assiettes et commence à remplir le lave vaisselle alors qu'il entend la conversation des deux filles derrière lui. Jamais il ne s'est autant appliqué à disposer les assiettes dans les racks, avec lenteur et précision, il n'a aucune envie de se retourner et faire face à sa soeur qui doit probablement le fixer dans son dos, maintenant que Joy est partie dans sa chambre. Effectivement, sa voix ne tarde pas à s'élever. Mais les paroles semblent moins énervées. Elle cherche à comprendre, Annabeth. Il ferme le lave vaisselle et fait face à sa soeur, s'appuie contre le meuble de la cuisine, les bras croisés sur sa poitrine. Il hausse les épaules. "Je sais pas, Annabeth. Elle est venue frapper ici un soir. Elle était ivre. Avery, je parle." A vrai dire, lui même ne comprend pas trop l'enchainement des évènements ce soir là. "Je m'y attendais pas, elle m'a dit qu'elle n'était plus avec son mec, ça m'a... perturbé et... je sais pas, les choses se sont enchainées." Son ton est hésitant et alors que son regard soutenait celui de la jeune femme au début de sa réponse, il regarde désormais un peu partout autour de lui, peu fier de raconter tout ça.

Les mots de sa sœur sont crus. Brutaux presque, aux oreilles d'Ari. Elle le met face à ses erreurs. Face à ses contradictions. Elle est directe, Annabeth, franche. Elle ne passe pas par quatre chemins pour exprimer sa pensée. En vérité, il a toujours été admiratif de ce côté de sa personnalité, Ari. Il préfère savoir sa sœur comme ça que n'arrivant pas à s'imposer. Au moins il sait qu'elle peut prendre soin d'elle-même. Mais bon, il reste le grand frère malgré tout. C'est aussi son job, de la protéger. Et ça lui fait un peu bizarre, là, de se faire passer un savon par sa soeur. Et que ce soit elle qui lui dise les choses, telles qu'elles sont. Les bras toujours croisés sur sa poitrine, il soupire. Il n'a pas la réponse aux questions qu'elle pose, et pourtant ce n'est pas faute d'avoir retourné le problème dans tous les sens. Il ne sait pas. "Oui, j'étais prêt à tourner la page ! Enfin... Je pensais que j'étais prêt... Je sais pas Annabeth, tu parles comme si tout était simple mais rien ne l'est, c'est le bordel dans ma tête." dit-il d'un ton maussade. "Je pensais que c'était fini avec Avery mais cette soirée... ça m'a mis le doute. Des années de relation, ça s'efface pas comme ça, je croyais que c'était la femme de ma vie, Avery." Il hausse les épaules et décolle ses hanches du plan de travail pour venir ouvrir le réfrigérateur. Une bière ne serait pas de trop, dans cette discussion. Il en saisit une pour la tendre à sa soeur d'un air interrogatif. Peut-être que elle aussi, elle pourrait avoir besoin d'une bière. Il décapsule la bouteille et boit une gorgée en revenant s'appuyer contre le comptoir de la cuisine, face à la brune. "Je sais que je suis une merde d'avoir fait du mal à Rori. Et crois le ou non, avant cette soirée avec Avery, c'est la seule fille à laquelle je pensais. Tous les jours. Ça m'était pas arrivé en quatre ans." ajoute-t-il, l'air un peu amer. Dire qu'il avait tout gaché, en un claquement de doigt. Quel génie, vraiment.   

La bière était bienvenue, le sujet était loin d'être facile à aborder. Il n'avait aucune certitude, Ari. A part celle d'être complètement paumé. Celle d'avoir fait n'importe quoi. Celle d'être un abruti. Au final, ça en faisait déjà trois. Mais trois certitudes qui ne l'avançaient pas à grand chose. Toujours appuyé contre le comptoir de la cuisine, il prend une nouvelle gorgée en écoutant sa soeur. Elle semble s'être un peu adoucie. Ses paroles sont moins sévères, en tout cas. Elles sont mêmes plutôt clairvoyantes, là. Oui, Avery c’était le passé. Et il y avait clairement de grandes chances que, effectivement, leur relation ne redevienne jamais comme elle avait pu l’être, plusieurs années en arrière. Elle avait sûrement changé, la jeune femme. Lui aussi avait changé, il était papa bon sang ! On ne pouvait sûrement pas faire un changement plus radical que ça. S’ils retentaient quelque chose, il ne fallait pas s’attendre à retrouver leur relation d’avant. Peut-être que ça ne fonctionnerait plus du tout. Peut-être que c’était foutu, pour de bon. Bien sûr, le problème était qu’il ne pouvait pas le savoir à l’avance, tout ça. Il hoche la tête, Ari. Elle avait les bons mots, Annabeth. Et une nouvelle fois, elle avait raison. Quoi qu’il fasse, avoir fait souffrir Rori dans le process était inacceptable. Il hoche la tête, encore, l’air triste. « Je sais… J’ai merdé avec Rori alors qu’elle est vraiment… géniale. » Nouvelle gorgée de bière. « Ce que tu dis… T’as totalement raison, je le sais. C’est fort possible que ce soit trop tard pour recommencer avec Avery, je pense qu’il y aurait de gros risques que ce soit pas sain du tout… » Il ferme les yeux un bref instant. « Je crois que j’aurais voulu qu’elle vienne jamais frapper à ma porte. Tout était plus simple, y a quelques semaines. » Oui, tout était plus simple lorsque Rori était encore dans sa vie. Alors n’était-ce pas simplement ça, la réponse à toutes ces questions ?