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↳ personnages attendus

Bienvenue à Bowen, petite ville côtière du Nord-Est de l'Australie, abritant moins de 7 000 habitants. Si vous recherchez le calme, la bonne humeur et la joie de vivre, vous serez au paradis. Tous les habitants vous le diront, Bowen est l'endroit idéal pour se ressourcer. Et puis ne vous inquiétez pas pour l'intégration, ici tout le monde se connaît et les habitants adorent accueillir les nouveaux. › suite.

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 #122 Home, sweet home.

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MessageSujet: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyLun 22 Avr 2013 - 19:14

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



La petite bruine collait ses vêtements à sa peau, il détestait ça. Son bonnet de laine était trempé et ses cheveux n’avaient donc pas été protégés du tout. Saleté de petite bruine. Elle était vicieuse. On croyait toujours que ce n’était rien du tout, que ça allait vite passer, que faire quelques mètres là-dessous ce ne serait pas la mort. Et vlan ! Vous étiez trempé avant même de vous en rendre compte. Mais pas trempé-dégoulinant. Trempé-frissonnant. Pour une fois, Casey avait hâte de rentrer chez lui, histoire d’être bien au chaud (à moins que la dernière facture de chauffage n’ait été trop importante et que des restrictions s’imposaient…).
Sa journée n’avait pas été horrible cependant. Entre deux cours, il était sorti en ville avec des amis et ils étaient allés dans un parc jouer de la musique pour patienter pendant leur heure de libre. Le temps, de toute la journée, n’avait cessé d’osciller entre venté et pluvieux, mais ils s’en étaient accommodés. En bonne compagnie, on se préoccupait toujours bien moins de la température.
En insérant la clef dans la serrure, son cœur se serra légèrement. Certains jours, il oubliait complètement Emily. Il était là avec ses amis, à sortir, à ne pas vouloir rentrer chez lui et réussissait si bien qu’il finissait par oublier même ce qu’il fuyait. Et puis, parfois, elle l’obsédait. Dans tous les visages il trouvait un quelque chose de Lee. Il sursautait dès qu’une voix féminine l’appelait, dès que quelqu’un le touchait. Il était d’ailleurs beaucoup moins tactile qu’avant, depuis qu’entre lui et la jeune serveuse ça n’allait plus. Avant, il avait l’habitude des étreintes car dans sa famille elles étaient nombreuses et depuis qu’il était à l’université, il faisait souvent des accolades à ses camarades. Au départ, il aimait prendre Emily dans ses bras, il aimait lui prendre la main. Et puis les choses avaient changé, il fuyait même son contact physique désormais. Aussi, dès que quelqu’un en dehors de son foyer le touchait, il était surpris. Il changeait. En mal, probablement. Puisqu’il en parvenait à oublier sa femme. Ce ne fut qu’à ce moment qu’il se souvint, par ailleurs, de l’avoir croisée alors qu’il se dirigeait au parc. Aussitôt aperçue, il avait détourné son regard, sans même lui adresser un sourire. Cet évènement lui revenait en mémoire tandis qu’il ouvrait la porte. Un mauvais pressentiment le prit alors. Emily, elle, n’avait pas dû oublier cet épisode. Le jeune homme pria pour qu’elle ne soit pas rentrée déjà – chose peu probable puisqu’il passait son temps ailleurs et parvenait toujours à rentrer plus tard que la serveuse malgré ses horaires tardifs – et entra en refermant la porte derrière lui.
Par un ton roué d’une habitude morne, sans émotion, sans flamme, il dit mollement :

« Salut… »




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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyLun 22 Avr 2013 - 21:58

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Quand elle était rentrée après avoir terminé son éreintante journée de travail, Emily ne fut pas surprise de trouver l’appartement vide et silencieux. C’était comme cela pratiquement chaque soir, pour ne pas dire tous. Elle avait parfois l’impression de vivre seule, comme si Casey n'était rien d'autre qu'une ombre qui allait et venait sans réellement s'arrêter. Et c'était le cas, au final. Sans prendre la peine de téléphoner à son mari pour savoir où il était - de toute façon, il ne répondrait pas -, elle s'était dirigée vers la salle de bain pour prendre une douche, espérant que les jets d’eau chaude sur sa peau pourraient l’aider à faire le vide. Puis elle avait minutieusement brossé sa longue chevelure en contemplant son reflet dans le miroir. Elle n’aimait pas ce qu’elle voyait. La Lee pleine de vie d’autrefois s’était muée en cette fille aux yeux étonnamment ternes et cernés. Son sourire n’était plus qu’un lointain souvenir et elle ne se rappelait même plus de son rire. Il y a bien longtemps que toute trace de bonheur avait été effacée de cet appartement où les disputes étaient monnaie courante. Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants, tu parles ! Elle commença à préparer le repas en gardant l’espoir qu’il finirait bien par rentrer. Mais non, une fois encore, Monsieur Kennington avait préféré s’abstenir de la prévenir qu’il ne serait pas là pour le dîner. Elle mangea seule, une fois de plus, et se retrouva confrontée à cette solitude qu’elle ne supportait plus. Une fois de plus. Après avoir avalé quelques bouchées de son assiette sans grand appétit, elle inspecta leur impressionnante collection de DVDs dans l’espoir d’y trouver un film qui lui changerait les idées. Ses yeux s’arrêtèrent presque inconsciemment sur Moulin Rouge. Non, même pas en rêve. Ce film lui rappelait bien trop son histoire avec Casey. Leur histoire d’avant, à l’époque où tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Elle l'avait forcé à regarder cette comédie musicale lors de leur premier rendez-vous puis elle lui avait cassé les oreilles en chantant Come What May à tue-tête, jurant que cette chanson était l'hymne de leur couple. Et elle l'était. Elle l'avait été, du moins. Elle soupira doucement. Pourquoi fallait-il toujours qu'elle repense au passé ? Elle jeta un coup d’œil à l'horloge du salon. Presque vingt-deux heures. Envers et contre tout, elle s’obstinait à vouloir l’attendre chaque soir. Peu importe l'heure à laquelle il rentrait, elle voulait avoir la certitude qu'il allait bien. Avec son esprit torturé, elle se faisait toujours des tas de films invraisemblables qui ne cessaient que lorsqu'elle avait la preuve que Casey était sain et sauf là, devant elle. Elle ne savait pas si elle était angoissée de nature ou si c’était son passé qui l’avait rendue comme cela. Anxieuse, imaginant toujours le pire, incapable de voir les choses du bon côté. Y avait-il seulement un bon côté dans cette histoire ? Les optimistes prétendraient que oui. Qu’il y a du bon dans toute expérience, même les plus mauvaises. Mais que pouvait-on trouver de réjouissant dans le fait de voir son mariage voler en éclats ? Le claquement sourd de la porte d'entrée la fit sursauter. Il était enfin de retour. Salut. Voilà tout ce qu’il trouvait à dire. Pas un mot d’excuse, pas une phrase attentionnée, pas plus que ces cinq maudites lettres qu'elle entendait tous les soirs sur le même ton monotone. Elle hésita un instant entre répondre ou se murer dans le silence. Mais elle ne voulait pas entrer dans son jeu et l’ignorer. Elle avait passé l’âge de jouer à ses petits jeux puérils qui ne faisaient qu’envenimer les choses.

« Salut », répondit-elle en levant les yeux vers lui.

Son ton naturellement enjoué disparaissait à chaque fois qu’elle parlait à Casey. Et voilà que le silence s’installait à nouveau. Leurs conversations se cantonnaient à un seul et unique mot répété inlassablement à chaque fois que Casey se décidait à rentrer : « salut ». Pas « salut chéri », pas « salut, tu as passé une bonne journée ? » ni « salut, tu m’as manqué »… Juste un « salut » court, bref et étonnamment froid. Comme s’ils n’étaient que deux étrangers contraints de vivre sous le même toit. Elle avait des tas de choses à lui dire. Cette journée avait été riche en émotions et elle aurait aimé pouvoir en discuter avec lui. Comme elle l’aurait fait avant, quand il était son meilleur ami et qu’ils pouvaient se confier l’un à l’autre sans aucune crainte. Mais tout avait changé. Pour preuve, il avait carrément tourné la tête lorsqu'ils s'étaient croisés par hasard au coin d'une rue quelques heures plus tôt. Il l'ignorait, faisait comme si elle n'existait pas, comme si prétendre ne pas la voir pouvait gommer leurs problèmes d'un coup de baguette magique. Leur vie était tellement pitoyable qu’elle se demandait souvent s’il ne valait pas mieux tout arrêter. Elle faisait son possible pour arranger les choses mais lui ne semblait pas vouloir changer. Et il y avait des batailles qu’on ne pouvait gagner seule, même avec la meilleure volonté du monde. L’amour n’était pas toujours suffisant.

« Pourquoi tu as fait semblant de ne pas me voir, tout à l’heure ? », osa-t-elle demander, brisant par la même occasion le lourd silence qui s’était installé.

Elle avait essayé de se convaincre qu’il ne l’avait pas vue. Qu’il marchait sans vraiment regarder autour de lui et que s’il avait tourné la tête au moment de croiser son regard, ce n’était qu’une coïncidence. Mais au fond d’elle, elle savait que c’était faux. Il avait tourné la tête exprès, parce qu’il n’avait pas envie de la voir ou de lui parler. Et c’était aussi douloureux que de balancer du sel sur une coupure encore ouverte.



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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMar 23 Avr 2013 - 19:12

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)




Il enlevait son bonnet quand Lee lui répondit. Sa tête dépassait du canapé, tournée vers lui. Il croisa son regard et hocha légèrement la tête. Voilà. Il avait bien enregistré son salut. Bon. Faire quoi, maintenant ?
Il détestait vraiment rentrer chez lui. Il ne savait pas quoi faire. En général, si Emily était dans le salon, il allait s'enfermer dans la chambre et passait son temps à potasser ses cours, aller sur l'ordi', jouer de la musique. L'avantage de ne pas parler à sa femme, c'était qu'il travaillait. Et vu les années d'études qu'il lui restait, il faisait bien de réviser autant.
Alors que l'habituel silence pensant s'installait entre eux et que Casey se torturait pour savoir s'il devait dire quelque chose ou filer dans la chambre (la plupart du temps, ne trouvant rien à dire, c'était ce qu'il faisait), la voix d'Emily résonna dans l'appartement. Il sursauta un peu, surpris. Et la question le dérouta. La jeune femme n'avait effectivement pas oublié. Le brun la regarda, gêné. Que répondre à ça ? Qu'il ne l'avait pas vue ? Non. Non il n'irait pas jusqu'à un mensonge aussi stupide. Tous deux savaient très bien qu'il avait détourné le regard. La question était effectivement « pourquoi » ?

Pourquoi tu as détourné le regard en voyant la fille avec qui tu partages ta vie, Casey ? Qu'est-ce qui s'est passé dans ton petit cerveau pour que tu ne veuilles pas la voir ? Ou que tu ne veuilles pas que vous preniez conscience l'un l'autre que vous étiez proches et que vous saluer, vous parler, était alors de rigueur ? Pourquoi tu as refusé votre rencontre ? Voyons Casey, réfléchis. Tu marchais dans la rue avec des amis. Ton regard s'est porté sur Emily et aussitôt tu as regardé ailleurs, comme si tu avais été légèrement électrocuté. Mais ce sentiment-là, c'est bon pour les amoureux non-déclarés qui ne savent comment réagir en croisant l'être aimé. Non Casey c'est autre chose, toi. Peut-être parce que certains de tes amis ne sont même pas au courant que tu es marié ? Oh ce n'est pas forcément que tu leur as menti, simplement, tu ne leur as rien dit. C'est différent n'est-ce pas ?Qu'est-ce qui t'a pris de détourner la tête, Kaz ? Tu n'as pas eu honte tout de même ? Tu n'aurais pas honte de ta propre femme quand même ? Hé, Casey Kennington ? Comment peux-tu expliquer ton geste ?

Pour ne pas rester immobile lors du silence qui précédait la question d'Emily, à laquelle l'étudiant ne savait que répondre, Casey enlevait son manteau et ses chaussures. Il s'approcha un peu du canapé. Lee avait ses yeux sur lui, son regard caramel le dévisageant. Attendant. Et lui qui ne savait que lui dire. Je ne sais pas Lee pourquoi j'ai fait ça. J'en sais foutrement rien. Ça a été instinctif. Mais pour me protéger de quoi ? Voilà, voilà la rengaine qui tournait dans sa tête en cet instant. Il n'avait pas envie d'en discuter. Il voulait juste aller se terrer dans la chambre et regarder un film sur son ordi. Ou bien rester dans le salon où il passait ses nuits, tous les deux ne dormant plus ensemble depuis quelques temps, si Emily préférait aller dans la chambre. Non, l'Italien ne désirait pas être dans la même pièce qu'elle. Pas là, pas ce soir - comme tant d'autres. Supporter son regard tristounet, son calme et sa douceur malgré toute sa tristesse qu'il sentait, qu'il ne pouvait que sentir, mais qu'il faisait tout pour ignorer car elle lui faisait trop mal. Et de sa faute cependant ! Ça ne tenait qu'à lui, lui disait-on. Mais s'ils savaient tous ces gens qui le critiquaient ô combien parler était plus facile qu'agir ! Et puis il ne savait plus. Il ne parvenait plus à avoir les bons mots, les bons gestes. Il oubliait. Comment être avec Emily. Comment prendre soin d'elle. Comment être auprès d'elle. La plus simple des discussions l'embarrassait. C'était comme quand on revoit un vieil ami que l'on a perdu de vue. On le revoit, des années après, et puis une petite gêne s'installa, on tente de se parler, mais les sujets ne viennent pas, la conversation s'essouffle, et le lien meurt. Il ressentait cela chaque jour qu'il croisait sa femme. C'était peut-être difficile à comprendre, voire inconcevable ou prétendument impossible. Mais c'était bien ce qui enserrait son cœur tous les matins et tous les soirs. Néanmoins, là, , il fallait vraiment qu'il réponde.

« Je... J'avais pas le temps, je dev... »

Il s'interrompit. C'était encore plus idiot de lui dire ça. Il avait le temps de marcher jusqu'au parc mais de faire rien qu'un sourire à sa copine ?
Le problème était qu'il ne comprenait pas son geste. Lui-même n'y trovait aucune logique. Plus rien n'avait de logique dans cette histoire. Mais il devait trouver rapidement quelque chose s'il ne voulait pas en discuter dix mille ans avec Emily. Ce n'était pas vraiment son programme de la soirée.

« Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça. Voilà. C'est tout ce que je peux te dire. »

Cette situation l'embarrassait terriblement. Il ne pouvait pas quitter la pièce comme ça mais il ne voulait pas y rester plus longtemps. Pour ne plus affronter le regard de Lee, il jeta un coup d'œil à la fenêtre. La nuit était tombée à l'heure qu'il était, ce n'était pas étonnant.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMar 23 Avr 2013 - 21:50

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



La voix mal assurée de son mari résonna dans l’appartement, laissant Emily sans voix. Elle ne savait même plus ce qu’elle ressentait. Ou plutôt si, elle le savait : un mélange détonnant de plusieurs sentiments qui lui donnait envie de pleurer. De la frustration. De la colère. De la rancœur. De l’impuissance. Mais aussi de l’épuisement. Elle était épuisée, autant psychologiquement que physiquement. Se heurter à un mur à chaque fois qu’elle disait ou faisait quelque chose n’était pas facile. Elle était fatiguée de faire tous les efforts pour deux, fatiguée d’essayer d’engager la conversation, fatiguée d’essayer de tout faire pour qu’ils se rapprochent. Elle commençait à lâcher prise et ne savait pas combien de temps elle tiendrait avant de laisser tomber pour de bon.

« Je ne sais pas. Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça. Voilà. C'est tout ce que je peux te dire. »

Elle ferma les yeux et soupira. Elle espérait parfois que sa vie n’était qu’un mauvais rêve. Qu’elle finirait par se réveiller un beau matin, constatant que cette mauvaise passe n’était pas réelle et que le Casey des débuts, celui dont elle était tombée amoureuse, n’avait pas disparu. Elle avait pris l’habitude de se taire, d’arrondir les angles au maximum pour éviter les disputes qui ne faisaient que les éloigner davantage. Mais ce soir-là, elle était bien trop peinée pour faire preuve de diplomatie.

« C’est tout ce que tu peux dire ? Oh oui, bien sûr. C’est tellement plus simple de fuir les problèmes plutôt que de les affronter, hein ? C’est tellement plus facile de m’ignorer quand tu es avec tes foutus potes plutôt que d’assumer le fait qu’on soit marié. Qu’est-ce que tu crois, Casey ? Que faire comme si je n'étais pas là va arranger les choses ? Que si tu penses assez fort que je n’existe pas, je vais disparaître ? C’est ça, que tu veux ? Que je sorte de ta vie ? »

Elle avait haussé la voix sans s’en rendre compte. Elle s’énervait tellement peu souvent qu’elle en était la première surprise. Elle qui n’aimait pas les conflits venait d’en provoquer un… Et le pire, dans tout cela, était qu'elle ne se sentait même pas soulagée. Au contraire, ce sentiment de mal-être constant n'avait fait que s'accentuer, comme si mettre des mots sur les pensées de Casey lui transperçait le cœur.

« Je ne sais même pas pourquoi je continuer à rester là à espérer que tu changes alors qu’on sait tous les deux que ça n’arrivera jamais… »

Sa voix s’était nettement radoucie. Elle n’avait plus la force de crier. Elle n’avait plus la force de rien, en réalité. Elle soupira doucement, baissant les yeux pour ne pas voir sa réaction. Malgré tout ce qu’il pouvait se passer entre eux, elle s’en voulait à chaque fois qu’elle le blessait. Même s’il le méritait. Prenant une grande inspiration pour se donner du courage, elle se pinça les lèvres et annonça doucement :

« Tu t’en fiches probablement mais mon père est venu me voir au Café, tout à l’heure. Il est sorti de prison. Et je crois qu’il veut qu’on apprenne à se connaître… Je lui ai proposé de venir s’installer ici quelques temps. Je sais que tu ne seras sûrement pas d’accord mais je me suis dit qu’au fond, ça ne changerait pas grand chose pour toi puisque tu es rarement là. Et moi, ça m’éviterait de passer mes soirées toute seule à me demander ce que j’ai fait de mal pour que mon mari me déteste à ce point… »

Elle n’attendait aucune réponse. Casey ne répondait jamais. Ce n’était pas faute d’avoir essayé de lui parler, de comprendre ce qui la tracassait tant… Mais il s’entêtait à rester silencieux quoi qu’il arrive. Et elle n’avait plus assez d’énergie pour essayer d’arranger les choses.

« Je vais dormir », dit-elle alors, retrouvant son habituelle voix calme. « Bonne nuit. »

Puis elle regagna la chambre sans attendre sa réaction. Elle voulait juste dormir et oublier, pour quelques heures, que sa vie partait en morceaux.



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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMer 24 Avr 2013 - 15:03

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)




Il reporta subitement son regard vers Emily. Ce ton. Ce n’était pas… Ce n’était pas comme d’habitude. Emily… Non. Non, ce… C’était passager n’est-ce pas ?
Emily ne s’énervait jamais. Mais sa voix venait tout à coup de monter et il ne l’avait jamais entendu parler comme ça. Casey la regardait, incrédule. Et complètement dérouté. Là, il ne savait pas du tout comment réagir. Parce que ça n’arrivait jamais. D’habitude, ils se disputaient un peu et puis ils partaient dormir et le lendemain était une autre journée. Pour monsieur Kennington, du moins. Mais voilà. Emily n’en pouvait plus et elle explosait – et encore, bien gentiment. Peut-être l’étudiant allait-il enfin prendre conscience de l’ampleur de la situation. La gravité de son comportement. Son insouciance, son égoïsme. Car il était terriblement égoïste dans cette histoire. Et lâche, oui. Lee avait raison de dire qu’il était plus facile de fuir que d’affronter les problèmes. Il ne faisait que ça. Fuir. Fuir de chez lui. Fuir l’appartement. Fuir les conversations. Fuir Emily. Ne pas la croiser, ne pas lui parler, pour ne pas parler du mariage. Ne pas parler du mariage pour ne pas parler de sa peur. Ne pas parler de sa peur pour ne pas parler de son erreur, de sa décision trop hâtive. Et cela, pourquoi ? Pour ne pas se rendre compte qu’une fois encore il avait échoué, qu’il n’avait jamais réussi quoique ce soit en dehors du domaine scolaire, que tous ses rêves de vie formidable s’écroulaient ? Qu’il ne serait jamais le type avec la plus parfaite des femmes dans la plus belle des maisons à piscine avec les dîners et les invités. Mais, hé, Casey, est-ce que tu t’es demandé si tu voulais vraiment ça une fois ? Ce n’est pas ton idéal. Ce n’est l’idéal de personne tant qu’il n’est pas ce qui fait vivre. Tu aurais la maison et les invités et la reconnaissance que tu ne te sentirais pas bien pour autant. Car ce n’est pas ça, la vérité. Ce n’est pas ce que tu recherches. Et tu ne sais même pas que tu es perdu dans des illusions caduques. Réveille-toi Casey. Réveille-toi et regarde combien Emily est patiente et adorable. À toujours t’attendre. À ne t’engueuler vraiment qu’au bout d’un an. Et encore, elle ne fait que hausser le ton. Vois comme elle est gentille et pleine de vie en temps normal – et ô combien tu l’as affadie ! Si seulement tu t’en rendais compte et tu t’employais à chérir cela, alors, là, tu y trouverais ce que tu cherches. Mais non. Casey est un petit garçon idiot et il a peur et il passe son temps à fuir. Il ne veut pas grandir et être responsable et affronter les problèmes. Il veut les esquiver. Mais plus tu les esquives, plus ils t’attendent, ragazzino.
Et tout ce que disait Emily là, tu ne t’y étais pas préparé. Alors pieux dans ton cœur à chaque mot. Et tu te liquéfiais lentement. Sous la honte, la culpabilité, la douleur. Tu voulais protester mais rien ne venait. Non. Les bras ballants, le regard perdu, tu la voyais, la jeune serveuse, ta toute douce femme si trop tôt femme, à enfin, réellement, faire part de ce qui la tourmentait toute la journée. Et rien, toi. Rien et vide. Muet, surtout. Muré éternellement dans ton silence. Mais c’est trop facile, ça. Et puis… Oui, c’était valable à l’époque du bac à sable, le silence. Mais tu as vingt-trois ans Casey. Vingt-trois ans. Ouvre ta bouche ! Tu veux vivre, tu veux rattraper le temps perdu… Mais au fond tu ne changes pas réellement. Tu as juste un peu mûri. Les seules différences, c’est ton look, c’est ton environnement social. Mais tu es toujours le même finalement que celui que tu étais. Oh bouge-toi Casey !

« Je… Non… » murmura-t-il inutilement. Petite tentative rapidement balayée à juste titre par la réplique d’Emily. Qui n’avait peut-être même pas entendu ce murmure de l’étudiant.

Tu, non, quoi ? Tu ne changeras pas. C’est ce qu’elle vient de dire. Et elle a raison n’est-ce pas ? N’est-ce pas que tu ne changeras pas ? Et elle, elle s’évertue à t’attendre, à t’excuser. S’inquiète. Se laisse sombrer. Tout ça pour toi qui t’enferme dans tes peurs en voulant t’ouvrir au monde. Rien n’ira mieux si tu ne fais pas quelque chose pour, Casey. Essaie de comprendre ça, un peu. Réagis. Tu as peur de louper ta vie et peur d’être responsable à cause du mariage, mais si tu ne prends pas le mariage à bras le corps alors, oui, oui, tu vas t’enliser. L’ombre du mariage que tu délaisses va grossir et t’avaler. Tu ne comprends pas que pour réussir il ne faut pas rester dans un coin ? Tu ne comprends pas que l’orage, lui, bouge, s’élargit, s’étend ? Qu’il atteindra un jour ou l’autre ta petite oasis ? Que tu te retrouveras seul dans l’immense désert de tes peurs et qu’alors, tu n’auras plus qu’à te laisser mourir et poursuivre des mirages où tu croiras voir du secours ? Rien ne viendra si tu ne fais rien pour. Lève-toi contre les dunes qui s’élèvent devant tes yeux ! Gravis-les ! Élève-toi, sois tornade, balaye-les, sois soleil, affronte-les, magnifie-les, supporte-les, sers t’en !
Mais les mots ricochaient dans sa tête, vides. Il entendait Emily sans n’avoir rien à opposer. Il ne savait même pas se défendre. On n’avait pas idée d’être à ce point pitoyable et entêté.

Et puis, la dernière annonce. Le coup de théâtre. Ou de massue, peu importait. Emily avait vu son père… Elle avait vu son père ? Si elle ne le lui avait pas dit, probablement Casey n’en aurait-il rien su ce soir car il ne lui aurait rien demandé. Il la détestait, c’était ce qu’elle venait de dire. Son regard s’offusqua de ces mots sans qu’il ne le sache lui-même vraiment, mais il n’eut aucun mot pour autant. Cependant ces dernières paroles le marquèrent. Alors, un peu, il sentit son cœur se pincer. Un peu, il comprit réellement qu’il fallait qu’il cesse son cirque. Mais Casey était immobile et silencieux. Et pendant ce temps, Emily s’en allait, sachant déjà qu’il ne fallait rien attendre de lui. Bientôt il se retrouva tout seul dans le salon. L’étudiant tourna sa tête pour se sortir de sa torpeur. Le silence qui régnait le frappa à cet instant, et cela lui fit presque mal. Il se sentait lourd et se rendit compte que son corps tremblait légèrement, comme un petit garçon qu’on vient d’engueuler. Le guitariste soutint sa tête de sa main et se la passa dans les cheveux. Il eut un soupir d’homme déboussolé et s’assit sur le rebord du canapé. Que faire désormais ? Il eut un regard vers la porte de la chambre, close. Emily était derrière, esseulée, abandonnée. Ça aurait pu être un soir comme tous les soirs. Elle dans la chambre, lui sur le clic-clac. Mais tout ce qu’elle venait de lui dire… Sa voix… Non il ne pouvait pas. Il y avait quand même des limites à sa stupidité. Casey alla frapper doucement. Il n’entendit aucune réponse. Tant pis. Le jeune homme ouvrit légèrement la porte puis la poussa tout à fait jusqu’à entrer dans la pièce. Là, debout, idiot, sur le pas de la chambre. Ses yeux se posèrent sur la jeune fille, il se retint de se mordre les lèvres. Détourna furtivement son regard vers le mur droit.

« Euhm… Je… » essaya-t-il pour commencer, son regard revenant doucement vers Emily.

« Lily… »

« Et moi, ça m’éviterait de passer mes soirées toute seule à me demander ce que j’ai fait de mal pour que mon mari me déteste à ce point… » Cette phrase tournait et retournait dans l’esprit de l’Italien. Pour que mon mari me déteste à ce point… Oh mais, non, non. Non tout de même… Il ne la détestait pas… Il ne savait plus très bien où il en était à vrai dire, mais il savait, il était certain qu’il ne la détestait pas. Non il ne la détestait pas ! Oh, elle en était venue à penser une telle chose ! Pourquoi fallait-il qu’elle s’inquiète toujours autant ? Elle se faisait toujours des films catastrophes.
Il s’humecta les lèvres, voulut dire quelque chose, échoua, tourna sa tête vers le mur derrière (pour quoi, y chercher l’inspiration ?), revint vers sa femme. Respira fortement. Il s’avança un peu d’elle. Peut-être, des mois auparavant, aurait-il pu la prendre dans ses bras. Ou rien que s’asseoir à côté d’elle. Mais ce soir il en était incapable. Quelque chose le paralysait et bloquait toutes ses tentatives. Il avait trop perdu l’habitude d’être avec Emily. Il ne savait plus. Cependant il ne la détestait pas et cela il en était certain ! La voir là comme ça… Oh il y avait bien un petit quelque chose au fond de lui qui s’attendrissait. Et puis, s’il la détestait, se sentirait-il aussi mal ? Non bien sûr, il l’aurait méprisée, lui aurait ri au nez ! Mais ça lui faisait mal de la voir ainsi. Et savoir que c’était de ta faute… Et puis… N’avait-il pas sa photo en fond d’écran de portable, hein ? C’était une preuve, ça ! Photo qu’elle s’empresserait de lui demander de changer si elle le savait d’ailleurs, il en était persuadé. Mais lui… Lui adorait cette photographie. En fait, dès qu’il allumait son portable, la mine de Lee arrachait un sourire au jeune homme. Cette petite tête figée dans cette expression le faisait rire. Qu’était-ce, si ce n’était pas au moins de l’affection ? Non maintenant il le savait. Il ne la détestait pas. C’était catégorique. Alors elle ne pouvait pas dire cela, il ne fallait pas qu’elle pense cela ! Au moins… Au moins lui enlever cette idée de la tête… Rien que ça. Il pouvait y arriver. Allez. Il y arriverait ! Il avait foi ! Oui, c’est ça ! Flambeau olympique, podium, médaille d’or, grandes acclamations, voilà. Foule en délire et énergie. Allez, devenu vaillant, c’est bon ? Tu te lances, tu es sûr ? Tu as assez de force pour parler à ta femme, là, ça va ? Cretino !

« Emily, je ne te déteste pas. Je ne te déteste pas, Lee. »

Tout ça pour ces malheureuses paroles. Très doué, le Casey.
Il avait essayé d’avoir un ton affirmé. Il voulait qu’Emily comprenne que ce n’était pas vrai. Qu’il était attaché à elle.

«Je… Pense pas un truc pareil Lily… J’te déteste pas…Je… Tu… T’es mon fond d’écran de portable ! »

Et voilà. C’était l’argument le plu stupide du monde. Mais c’était un argument d’autorité dans le cœur de Casey, visiblement. Il n’en finissait pas de passer pour un idiot.
Et puis. Et puis autre chose le chiffonnait et l’avait obligé à venir voir Lee. Son père. Elle avait revu son père. Bon sang !

« Et… Tu as revu ton père, alors… Il… Il va bien ? »

Réplique stupide, on continue.
Mais ce qui l’embêtait vraiment, c’était cette histoire. Quoi, elle lui avait parlé, il allait habiter ici ? Son père ? Alors qu’elle jurait ne plus jamais vouloir le revoir ? Alors qu’il sortait tout juste de prison, qu’elle ne le connaissait pas du tout, qu’il n’avait jamais donné une seule nouvelle ? Et là, ça y était, il allait venir vivre ici ?

« Emily… Tu es sûre que c’est une bonne idée de l’inviter ici ? Tu ne le connais pas, Lee… C’est un inconnu. Tu vas faire venir un inconnu chez toi. Je croyais que tu ne voulais plus le revoir ? Lily… T’es sûre qu’il ne veut pas profiter de toi ? Comment ça se fait que vous vous soyez rencontrés ? Là, il est sorti de prison, et hop il t’a retrouvée par hasard ? Emily… C’est ton père, certes mais… Ne précipite pas les choses. Tu es certaine, vraiment certaine, qu’il ne te cache rien et qu’il ne veut pas profiter de ta gentillesse pour se planquer d’on ne sait qui ? Si oui et que la personne le découvre, ça pourrait retomber sur toi Lee ! C’est peut-être un bon plan pour lui mais c’est dangereux pour toi Emily ! Comment il était quand tu l’as vu ? »

Oui. Oui ça l’inquiétait ! Son père, en taule pour avoir tué et fait un braquage, allait débarquer chez eux ! Il ne connaissait rien de ce bonhomme que ce que les journaux en disaient et ce qu’il avait cru comprendre avec Emily mais il se méfiait. Il sortait de prison et hop, il allait vivre chez sa fille ? Qu’il n’avait pas vue ? Ça étonnerait Casey que le monsieur soit tout blanc à sa sortie de prison. Lui avait été enfermé quinze ans… Il avait fait des braquages, tué des gens… Est-ce que tout ce petit monde à qui il avait causé des torts ne risquait pas de lui tomber dessus ? Même après avoir purgé sa peine… Ou justement, plutôt. Pour un peu il allait profiter d’Emily. Et Emily deviendrait alors une très bonne cible pour faire chanter monsieur Papa Lee ! Et ça… Ça, Casey en avait peur. Il tremblait de peur et de colère d’avance en y pensant. Si jamais quelqu’un touchait à sa Lee, et bien ils verraient les gens ! Le lâche Casey n’était plus sûr d’être toujours lâche. – Preuve bien plus probante qu’il aimait toujours Emily et qu’il ne la détestait pas, mais il en était tellement inconscient, ne parvenant pas à analyser ses propres réactions, qu’il ne lui vint pas à l’idée d’exprimer aussi clairement ses craintes. Et il fallait dire que Casey était plus méfiant que la serveuse. Emily était toujours douce et gentille et voulait sans cesse aider les gens. Le Kennington, lui, se méfiait. Il ne faisait pas confiance facilement et au lieu de chercher le bon côté, cherchait les failles. Son enfance rejetée lui avait forgé l’habitude de voir le mauvais partout. Il avait plutôt tendance à croire en une perversion naturelle qu’une bonté innée.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMer 24 Avr 2013 - 19:27

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Emily avait regagné la chambre sans penser une seule seconde que son mari pouvait la suivre. Il ne le faisait jamais. C’était toujours pareil : ils se disputaient un peu, chacun restait de son côté et les choses suivaient leur cours. Mais pas ce soir-là, visiblement. À peine installée sur le lit, elle entendit frapper à la porte. Alors c’était ça ? Il avait besoin d’un électrochoc pour réagir et sortir de cette torpeur dans laquelle il était plongé en permanence ? Si elle avait su que s’énerver un peu le ferait bouger, elle l’aurait sûrement fait plus tôt ! Cependant, elle décida de ne pas lui répondre (s’il avait vraiment envie de lui parler, il n’avait qu’à entrer sans lui demander la permission). La porte s’ouvrit doucement, laissant apparaitre un Casey bien maladroit – comme à son habitude. Assise sur le lit, la jeune femme leva les yeux vers lui sans rien dire. C’était à lui de parler, elle avait fait bien assez d’efforts comme cela. Il bafouilla quelques mots, peinant visiblement à faire une phrase cohérente. Elle soupira malgré elle. Arriverait-il un jour à lui reparler sans être gêné à ce point ? Elle continua à le regarder fixement. Elle attendait beaucoup de lui. Peut-être trop, même. Elle espérait qu’il avait compris qu’elle n’en pouvait plus. Et qu’elle voulait qu’il change, qu’il prenne ses responsabilités et qu’il redevienne le Casey qu’elle avait toujours aimé.

« Emily, je ne te déteste pas. Je ne te déteste pas, Lee. »

C’était un bon début. Mais même s’il essayait de se montrer sûr de lui, elle n’était pas convaincue. Et puis, un « je ne te déteste pas » ne voulait pas dire qu’il l’aimait pour autant. Elle baissa les yeux, jouant nerveusement avec son alliance. Son comportement ne lui prouvait pas vraiment qu’il tenait à elle, au contraire. Il ne faisait que la repousser, faisant échouer ses tentatives de réconciliation les unes après les autres. Avec le temps, elle avait arrêté de lui trouver des excuses pour se rendre à l’évidence : il regrettait de l’avoir épousée et leur amour s’était éteint. L’amour qu’il lui portait, en tout cas. Parce qu’aussi dingue que cela puisse paraître, Emily était toujours amoureuse de son mari. Pourquoi s’entêterait-elle à continuer à vivre avec lui si ce n’était pas le cas ?

«Je… Pense pas un truc pareil Lily… J’te déteste pas… Je… Tu… T’es mon fond d’écran de portable ! »

En temps normal, elle l’aurait trouvé adorable. Sa maladresse légendaire, ses réflexions complètement décousues par moment… C’était en partie pour cela qu’elle était tombée amoureuse de lui. Mais aujourd’hui, elle était déçue. Et en colère. Parce qu’elle ne comprenait pas. Elle ne savait pas ce qu’il voulait, elle ne savait pas ce qu’il attendait d’elle… Elle était complète perdue et aucune de ses pseudos réponses n’éclairait la situation. Elle attendit quelques secondes, ignorant s’il avait terminé ou s’il lui restait des choses à dire, mais le silence l’enveloppa à nouveau. Elle était le fond d’écran de son portable. Voilà tout ce qu’il avait trouvé à dire pour espérer la réconforter. C’était l’argument le plus pitoyable du monde.

« Finalement je crois que je préfère quand tu m’ignores… C’est moins décevant », constata-t-elle tristement.

Elle n’avait plus envie d’être agréable. À défaut d’arranger les choses, lui dire ce qu’elle avait sur le cœur l’aiderait peut-être à se sentir mieux. Elle ne pouvait pas garder tout cela pour elle indéfiniment. Il fallait que toute cette colère sorte, à un moment ou un autre. Le fait que Casey l’ait ignorée en pleine rue n’avait été que l’élément déclencheur. La goutte d'eau qui avait débordé le vase.

« Et… Tu as revu ton père, alors… Il… Il va bien ? »

De mieux en mieux. Voilà qu’il prenait des nouvelles de son père alors qu’il ne l’avait jamais vu et qu’Emily parlait rarement – pour ne pas dire jamais – de lui. S’il cherchait à la mettre davantage en colère, il y arrivait très bien ! Elle soupira doucement, secouant la tête d’un air déçu. Plus les minutes passaient, plus elle était persuadée qu’ils avaient atteint un point de non-retour. Jamais ils ne pourraient s’en sortir. Le mariage avait brisé leur complicité et elle n’était pas sûre qu’ils puissent y remédier.

« Emily… Tu es sûre que c’est une bonne idée de l’inviter ici ? Tu ne le connais pas, Lee… C’est un inconnu. Tu vas faire venir un inconnu chez toi. Je croyais que tu ne voulais plus le revoir ? Lily… T’es sûre qu’il ne veut pas profiter de toi ? Comment ça se fait que vous vous soyez rencontrés ? Là, il est sorti de prison, et hop il t’a retrouvée par hasard ? Emily… C’est ton père, certes mais… Ne précipite pas les choses. Tu es certaine, vraiment certaine, qu’il ne te cache rien et qu’il ne veut pas profiter de ta gentillesse pour se planquer d’on ne sait qui ? Si oui et que la personne le découvre, ça pourrait retomber sur toi Lee ! C’est peut-être un bon plan pour lui mais c’est dangereux pour toi Emily ! Comment il était quand tu l’as vu ? »

Cela faisait des mois qu’ils ne s’adressaient quasiment plus la parole et voilà qu’il se lançait dans un long monologue sur son père. Elle l'avait écouté avec attention, comme elle le faisait toujours. Il semblait s'inquiéter pour elle et même si elle restait furieuse, cela la touchait.

« T’as pas à t’en faire, Casey. Je crois que la prison lui a fait du bien. C’est un homme réglo, maintenant. Il était gentil et c’est moi qui ai insisté pour qu’il vienne vivre ici… Il voulait même nous donner de l’argent en échange, ça prouve qu’il n’est pas revenu pour profiter de moi, non ? Je sais qu’il a fait des choses horribles par le passé et quoi qu’il arrive, je ne l’oublierai pas. Mais c’est mon père et je ne peux pas lui fermer la porte au nez. Il a besoin de moi. Et j’ai besoin de lui. Il y a toujours un risque pour qu’il ait de mauvaises intentions, oui. Mais on n’est jamais sûr de rien dans la vie, pas vrai ? On ne savait pas que notre mariage serait aussi catastrophique avant de passer devant le Maire, sinon on n’aurait jamais franchi le pas, tu ne crois pas ? », conclut-elle en plantant son regard dans le sien.

Elle regrettait déjà ce qu’elle venait de dire. Mais ces mots étaient sortis sans même qu’elle y réfléchisse. Comme si elle ne pouvait s’empêcher de déverser librement toute la peine et la rancœur accumulées au cours de ces derniers mois. Ce n'était pas une bonne solution. Se disputer sans cesse et se lancer des piques n'arrangerait rien, bien au contraire.

« Désolée, je... Je ne voulais pas dire ça », souffla-t-elle en baissant les yeux, la voix pleine de remords.



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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMer 24 Avr 2013 - 21:47

Lee & Casey
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Ah, Casey, Casey… Non décidément, il n’était pas fait pour les relations sociales. Il ne l’avait jamais été. Sa phrase n’avait pas fait mouche, elle avait plutôt sombré dans le gouffre des répliques débiles. Tombant sans fin, ne résonnant contre rien. À la place, ce fut Emily qui lança dans l’air une réplique presque piquante. Si elle préférait qu’il l’ignore… Casey se retrancha dans la merveilleuse stratégie du silence et n’essaya même pas de riposter. Il était totalement nul à ce jeu, si le silence était préféré, il n’allait pas s’en plaindre. Alors voilà, il allait se taire. Pour un peu il serait reparti dans le salon, sous le coup de la vexation sûrement. Oui, cette petite phrase d’Emily l’avait vexé et blessé, car pour une fois il avait essayé de dire quelque chose, en plus il voulait la rassurer… Et elle le rejetait. Elle lui disait qu’il était plus pitoyable encore quand il parlait que quand il se disait et que son effort était inutile. Elle n’avait pas une once de reconnaissance envers son effort. Elle venait de l’envoyer balader alors que pour la première fois il avait essayé de faire un pas en avant au lieu de reculer. Il ne lui répondit rien mais son regard se fit involontairement plus sombre sous le coup de son indignation. D’accord. D’accord il l’ignorerait, si elle préférait ça.

Cependant, avant de se taire complètement, il devait résoudre l’énigme paternelle ce pourquoi il avait abordé le sujet. Dans son indignation, il ne perçut pas le soupir de Lee après qu’il ait pris des nouvelles de son père. Il entendit seulement sa réplique en réponse à la plus longue tirade qu’il lui ait faite depuis des mois très certainement. Tout se passait plutôt bien. Et même s’il n’était pas tout à fait convaincu et rassuré, il avait décidé de ne pas le dire à Emily histoire de ne pas l’affoler au cas où, sinon c’était Bagdad assuré dans son esprit (déjà que ça ne devait pas en être loin). Alors il hocha simplement la tête pour lui signifier que d’accord… Si elle estimait que la situation était claire, on allait y croire. Et c’est vrai… C’était son père après tout. Malgré tout. Tout se passait bien, donc. Mais les derniers mots de la jeune femme se plantèrent dans le cœur de Casey en même temps que le regard de Lily dans ses yeux. Pour un peu, il aurait vacillé. Mais il se força à ne pas fléchir. Sa tête sembla simplement se relever plus que ce qu’elle n’était et dans son regard une lueur perça. Ah. La petite réplique cinglante. Oui bien sûr puisqu’on avait commencé avec du piquant, il fallait bien corser les choses. Lui qui s’était un peu apaisé après sa vexation, le discours sur le père de la demoiselle Kennington l’ayant un peu calmé, il se ferma plus encore que tout à l’heure et serra les dents. Qu’est-ce qu’il pouvait répondre à ça, de toute façon ?

« Très certainement. » dit-il vivement. Et ajoutant, sous l’impulsion : « Julie Bennet a raison en définitive, j’aurais dû l’écouter, elle est de bon conseil – et en plus elle a une position constante. D’ailleurs, quand j’aurai quelque chose à dire, j’irai la voir, elle reconnaîtra mon effort elle au moins, puisqu’ici il vaut mieux que je me taise alors qu’on me tanne depuis des mois pour que j’ouvre la bouche. » asséna-t-il de sa voix grave et trop sèchement ou brutalement peut-être.

Mais voilà. Il avait essayé de faire un effort et elle l’avait envoyé bouler… Alors ça servait à quoi qu’il fasse des efforts si c’était pour qu’on lui demande de ne plus rien faire ? Non, elle allait être contente, il l’ignorerait encore plus qu’avant dès à présent. Voilà, ils sauveraient leur mariage de cette façon puisque quand ils se parlaient tout empirait. Le silence. Il l’avait toujours su, c’était le meilleur remède ! – Il allait monter la secte des silencieux après la secte des célibattants.
Casey s’était décidé à quitter cette chambre de malheur et laisser Emily comme chaque soir, au final. Il voulait partir, la laisser toute seule, et rester tranquille dans le salon où on ne lui reprochait ni ses paroles ni son silence. Seulement, alors qu’il s’apprêtait à tourner les talons, la petite voix douce de Lily s’éleva. Elle s’excusait… Elle s’excusait et sa voix était pleine de remords… Et comment… Ô comment résister à la voix d’Emily ? QUI pourrait prétendre y résister ?
Pas Casey. Pas Casey Kennington. Jamais. Il ne put s’empêcher de se mordiller les lèvres tandis que son visage se froissait de culpabilité à son tour. Son regard s’adoucit aussitôt. Sa voix grave se fit non plus brutale mais douce. À son tour il s’en voulut de sa brusquerie.

« C’est pas grave… » dit-il, touché. « Je… Désolé aussi… J’aurais pas dû… » souffla-t-il, son regard chocolat se faisant abyssal.

Il voulut faire quelque chose, sa main commença à se lever, esquissant un geste vers elle, et puis elle retomba, morne. Il n’osait pas. Il n’osait pas.

« Je… Je vais retourner dans le salon… Te laisser tranquille… »

Néanmoins, il ne parvint pas non plus à s’en aller.

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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMer 24 Avr 2013 - 23:57

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Emily connaissait assez bien son mari pour voir qu’elle l’avait blessé. Et même s’il le méritait, elle ne pouvait s’empêcher de s’en vouloir. Elle ne voulait pas d’une relation destructrice comme celle qu’avaient connue ses parents. Mais au final, et ce malgré tous ses efforts, elle semblait bien peu douée pour entretenir son mariage et le mener dans la bonne direction. La propension à rater sa vie affective était-elle génétique ? Alors qu’elle pensait qu’il n’allait pas riposter, Casey retrouva son courage et lui balança une réplique cinglante en pleine figure, la confortant dans l'idée qu'il ne la supportait plus. Profondément blessée par cette tirade piquante, elle baissa la tête et ferma les yeux pour ne pas se mettre à sangloter comme une gamine. Après tout ce temps, il parvenait encore à la toucher au point de la faire pleurer. Beau travail, Casey. Cette fois-ci, ce fut à son tour de se murer dans le silence. Que pouvait-elle bien répondre à cela, de toute façon ? Julie avait eu raison, avait-il dit. Oui, probablement. Tout le monde avait eu raison. Tout le monde sauf eux, puisqu’ils avaient été les seuls à croire en leur mariage.

Regrettant amèrement ses paroles, Emily s'excusa alors qu'il était sur le point de quitter la pièce. Oui, Casey méritait qu’elle lui fasse ce genre de réflexions – et c'était mille fois moins blessant que toutes les horreurs auxquelles elle avait été confrontée au cours de ces derniers mois. Mais elle n’était pas pour ce système de vengeance gratuite. Elle détestait les conflits et s'en voulait toujours lorsqu'elle dépassait les bornes. Elle avait parlé sans réfléchir, laissant la colère l'aveugler, mais jamais elle n'avait pensé ce qu'elle avait dit. Son mari s’excusa à son tour et l’espace d’une seconde, Emily eut l’impression de retrouver le Casey d’avant. Son Casey.

« C’est rien », assura-t-elle en essuyant les larmes qui s'étaient formées au coin de ses yeux d’un geste rapide.

Elle ne voulait pas pleurer devant lui. Elle ne voulait pas pleurer tout court, d’ailleurs. Elle se plaisait à croire qu’elle était étonnamment forte et que rien ne pouvait la faire flancher. D’où son discours catégorique sur ses parents, d’ailleurs. Elle avait juré ne plus vouloir les revoir alors qu’au fond d’elle, ils lui manquaient terriblement. Elle n’était rien qu’une gamine incroyablement fière qui refusait d’avouer ses failles. Pendant qu’elle était une fois de plus en proie à des débats intérieurs intenses, Casey amorça un mouvement vers elle. Emily retint sa respiration, pétrifiée. Les contacts physiques se faisaient aussi rares que les conversations et ils n’avaient plus l’habitude. À tel point que Casey se ravisa au dernier moment, n’osant pas s’approcher plus près. Se débinant une fois de plus, il annonça finalement qu’il allait retourner au salon. Fuir, encore et toujours.

« Comme tu veux... »

Un rictus étonnamment triste s’empara des lèvres fines d’Emily et elle détourna le regard. Casey ne partait pas. Il avait beau avoir annoncé son départ, il restait là, près d’elle – à une distance raisonnable, tout de même. Qu’était-elle censée faire ? Le retenir ? Faire un pas vers lui ? Était-ce un moyen de lui faire comprendre qu’il souhaitait rester sans pour autant oser le dire ? Elle était perdue. Elle l’observa quelques instants, dans l’espoir qu’il prenne le dessus sur ses craintes, puis elle se rendit finalement à l’évidence : il ne bougerait pas. C’était à elle de faire le premier pas. Encore une fois. Elle avait l’impression qu’elle passait sa vie à essayer d’arranger les choses, à faire des efforts, à essayer de réinstaurer la complicité qui les unissait autrefois… Lui ne faisait jamais rien. Il se contentait de fuir – et de la faire culpabiliser quand un miracle le poussait à faire un infime pas vers elle. Si elle voulait qu'il reste ? Oui, bien sûr. Elle en mourrait d'envie. Elle aurait aimé qu'ils puissent discuter de toutes ces choses qui n'allaient pas. Qu'ils trouvent des solutions, se réconcilient et que tout redevienne comme avant. Mais elle ne voulait pas se faire de faux espoir : cela n'arriverait pas. Ni ce soir, ni jamais. Le temps avait réussi à noyer toutes ses belles illusions et à présent, elle analysait son quotidien avec une lucidité déconcertante.

« Bonne nuit, alors », dit-elle finalement avant de s’allonger sous les draps et d’éteindre la lumière.

Elle avait attendu, il n’avait rien fait, fin de l’histoire. Encore une soirée passée à espérer pour rien. Peut-être qu’un jour, elle arrêterait de l’attendre. Peut-être qu’elle se dirait qu’il valait mieux partir, autant pour elle que pour lui. Peut-être qu’un beau jour, elle finirait par se lasser de tout ça et qu’elle le quitterait pour de bon. C'était sûrement ce qu'il attendait, d'ailleurs.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyVen 26 Avr 2013 - 11:52

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)




Emily eut beau être rapide, Casey n’eut aucun mal à voir et interpréter son geste. Cependant le sien n’aboutit pas, son bras était retombé le long de sa jambe et il venait de décevoir une fois de plus sa petite-amie. Alors Lee se retrancha-t-elle sûrement derrière une sorte de cynisme nécessaire, ou bien dans une résignation habituelle et sur ses lèvres un rictus se dessina. Le musicien ne put que le voir, et cette grimace sur le visage doux de sa femme lui fit plus mal encore que ses paroles – pleines de véracité – de tout à l’heure. C’est peut-être pour cela que malgré son annonce il n’était pas parti mais qu’il était resté là, immobile, paralysé. Pétrifié par l’expression du visage de son amie. Peut-être, peut-être pas. L’Italien était aussi droit et muet qu’une statue, et le noir bientôt l’enveloppa, le faisant aveugle. Emily s’était couchée, avait eu la force – l’extrême politesse – de lui souhaiter bonne nuit. Alors Casey tourna sa tête vers l’endroit où Lee allait s’endormir. Peu à peu ses yeux s’habituaient à l’obscurité et il distinguait la forme de la serveuse sous les draps. Son cœur aussitôt lui fit terriblement mal, peut-être de tristesse, peut-être pour qu’il ne s’ankylose pas dans son immobilité. Casey se décida à bouger suite à cet assaut, hésita, finalement sortit de la pièce.

Ses pas se traînaient sur le sol tandis qu’il allait vers la cuisine. De toute la dernière scène il n’avait pas dit un mot, observant et écoutant simplement Emily. Comme s’il n’était qu’un spectateur devant une pièce. Comme si tout cela, c’était du théâtre, c’était irréel. Mais c’était bel et bien leur quotidien – et qui semblait s’accélérer, prendre des mesures plus grandes, s’intensifier, presque se démesurer, ce soir. Tout n’était pas arrivé en un jour, il fallait dire. Au départ… Au départ il ne s’en rendait absolument pas compte et il n’y avait peut-être même rien d’alarmant. Casey sortait de temps à autre avec ses amis de la fac. Il connaissait les lieux et les gens maintenant, il était à l’aise dans l’univers étudiant. Et il était bien normal qu’il ne passe pas sa vie avec Emily mais que parfois il passe quelques soirées entre amis tout comme Lee. Rester à l’écart à l’université, ce n’était pas son but, ce n’aurait pas été bon pour lui non plus. Seulement il y avait pris goût et il craignait en refusant de participer à une soirée d’être méprisé. Alors il avait commencé à tout accepter. Et plus il acceptait, plus il en voulait. Plus il aimait ça : être dans un groupe, faire partie des fêtards, de ceux qui profitent, qui ne sont pas terrés dans leurs bouquins. Ne pas être le type de la bibliothèque mais le gars de la piste de danse. Ne plus être l’intello timide et minable mais le brun cool et sympa. Cette année, plus que ses débuts à la fac où il était encore timide, il se sentait vraiment intégré et il ne voulait pas en perdre une miette. Louper une soirée, c’était louper des moments de partage, ne pas comprendre des blagues, ne pas être sur les photos. Être celui qui était absent. Plus que n’importe qui Casey refusait d’être l’absent. Comme si son image, ses amis, sa vie, dépendaient de sa présence à une malheureuse soirée parmi tant d’autres dans le mois. C’était comme ça qu’il avait commencé à s’éloigner de leur foyer à Emily et lui. Dès qu’elle proposait quelque chose, il avait toujours une soirée ailleurs, toujours mille et une raisons pour y aller. Et puis, son frère avait fait son tour du monde… Ça lui avait encore plus donné envie de sortir. À présent, il avait un nouvel argument : il ne voulait pas rester terré dans son appart’. Il avait plein d’endroits à découvrir même dans cette petite ville où il vivait depuis toujours puisqu’auparavant il ne sortait jamais ! Il voulait tout voir, tout connaître, être de partout. Et puis, quoi, sortir avec Emily ? Non, sûrement pas ! Ce n’était pas en étant avec Emily qu’il allait rencontrer des gens (car jamais personne ne parlait aux couples, petits microcosmes intouchables dans la foule grouillante et pullulante des hommes). Or le voyage, c’était ça aussi… Il transposait ses envies de voyage dans ces petites soirées estudiantines. Explorer des lieux – des bars – et se confronter à des cultures – des étudiants d’autres filières. Voilà ce qu’il faisait, voilà ce qui l’animait. À partir de là, tout s’était aggravé. Il rentrait de plus en plus tard. Parfois ne rentrait pas du tout. Oubliait de prévenir Emily. Il avait fallu plusieurs mois pour en arriver à ce stade, pour que la situation devienne alarmante. Alors la jeune fille avait commencé à lui faire comprendre qu’il l’abandonnait un peu. Mais jamais en le lui reprochant. Toujours avec cette gentillesse et cette douceur. Et Casey trouvait qu’elle exagérait. Et puis, au bout d’un moment, il s’était aperçu que la serveuse avait raison. Il ne passait vraiment plus de temps avec elle. Pourquoi n’avait-il rien fait à ce moment-là alors ? Pourquoi n’avait-il pas réagi ? Parce qu’il s’était mis à penser. À comment passer une soirée avec Lee. À ne pas aller à une fête. Et ça l’avait effrayé. Il ne savait plus très bien ce qu’il devait faire pour amuser Emily. Et il avait plus peur qu’avant encore de ne pas être dans une soirée. Un soir, il avait tenté. Il était resté avec sa femme. Mais ça avait été catastrophique car le brun n’avait fait que penser à ce qui se déroulait dehors dans les rues et à se montrer plus lourd que jamais. Le lendemain, en entendant les autres parler de la soirée, il s’était senti exclu. Il avait eu l’impression de retourner des années en arrière quand il était rejeté. Et il avait détesté. Alors il avait fui puisque jamais son mariage, et cela durait jusqu’aujourd’hui. Les choses étaient donc réellement ainsi depuis… Quatre mois environ ? Peut-être plus, ou moins. Il ne savait pas. Il n’avait pas la notion du temps. Tout s’enchaînait. Et voilà. Ils en étaient arrivés à ce soir. Cette dispute. Plus marquante que les autres. Plus blessante aussi sûrement. Un point de non-retour ?
C’était tellement de sa faute tout cela. Et il n’en avait conscience que depuis peu. Il ne savait pas comment faire. Il s’en voulait évidemment ! Maintenant qu’il comprenait à quel point il abandonnait et s’éloignait d’Emily, il ne pouvait que s’en vouloir – Emily était tellement patiente et adorable qu’il ne concevait pas qu’il soit parvenu à un tel degré d’ignorance envers elle. Pourtant c’était le cas. Et tout s’embrouillait. Que devait-il faire ? Comment se rattraper ? Pouvait-il seulement se rattraper après tout le mal qu’il faisait jour après jour ? Y avait-il un moyen de se racheter alors qu’il étiolait leur mariage de plus en plus ? Il était complètement perdu. C’était un cercle infernal duquel il ne savait pas se tirer. Il était persuadé que demain, si on l’invitait, il dirait oui, même après ce soir. C’était pourtant une prise de conscience à son paroxysme. Jamais il n’avait autant vu et ressenti l’horreur de ce qu’il infligeait à la jeune femme. Mais il était tellement pris dans ses habitudes qu’il ne voyait pas comment en sortir.
Maîtrisant les larmes qui forçaient ses paupières, il prit un verre d’eau pour rafraîchir sa tête ébouillantée. Il humidifia un peu son visage et posa ses deux mains sur la table. La porte de la chambre d’Emily était toujours ouverte sur une béance noire, il ne l’avait pas fermée en partant.

Casey était dans la chambre. Il y était allé. Debout encore, il regarda le lit, la petite forme de sa femme qui, peut-être, dormait. Il s’approcha sans bruit et s’accroupit en silence. Pendant quelque secondes il resta là à ne rien faire (comme d’habitude ?). Il la regardait et maîtrisait son souffle pour ne pas la réveiller si jamais elle dormait – et il priait pour que ce soit le cas. L’Italien faisait tout pour être discret et qu’elle ne se doute pas qu’il fût là si par malheur Lily était toujours éveillée. Sa tête était tournée vers le mur opposé à lui, il ne voyait que ses cheveux. Elle était allongée paisiblement alors qu’il venait de lui faire passer une des plus rudes soirées depuis leur mariage certainement. Il l’avait déçue plus que jamais, probablement. Et il ne voulait pas. Il refusait d’être celui qui échouait tout dès qu’il ne s’agissait plus d’ingurgiter des connaissances. Pas ça. Pas avec Emily. Il savait. Il savait désormais combien il avait tout gâché. Le problème était qu’il ne risquait pas de tout arranger en une nuit. Ni même le lendemain. Casey était invité demain soir, et il avait bien sûr dit oui. Et il n’allait pas annuler. Non, il ne leur dirait pas « En fait je ne viens plus, je reste avec ma femme. » Il savait qu’il n’en avait pas la force – et une excuse tournait en rond dans sa tête, plus pour lui-même que pour Emily peut-être : annuler le jour-même, ça ne se faisait pas. Et l’alcool, même s’il n’en prenait pas à doses démesurées, l’aiderait à oublier toute la mascarade de ce soir et comme d’habitude il ne prendrait donc pas la peine d’envoyer un quelconque sms à Emily. Qu’allait-il se passer alors ?

Accroupi sur le sol de la chambre dans le noir, près du lit il la regardait presque avec timidité. Et beaucoup de honte, aussi. Elle pensait qu’il la détestait. Oh bon sang Emily était persuadée que lui la détestait ! Mais non, non, non… Non Lee, non. Enfin, quand même ! Lily ! Pas à ce point, toute cette histoire, pas à ce point… Ils n’en étaient pas arrivés à une situation aussi dramatique tout de même ? Et elle… Et elle est-ce qu’elle l’aimait encore ? Est-ce qu’elle le détestait ? Oh elle aurait des tonnes de raisons… Le détestait-elle alors ? Ce soir sûrement. Mais les autres soirs ? Les jours ? Les heures ? Il ne savait même pas comment elle allait ou ce qu’elle faisait. Comment pouvait-il savoir si elle l’aimait ? Pitoyable petit Casey. Il sanglotait presque avec tous ces questionnements qui le bouleversaient. Tout ce qui lui tombait sur la tête comme ça en une soirée. Il prenait conscience de trop de choses à la fois et son regard allait bientôt s’embuer. Mais les Kennington ne semblaient pas être des pleureurs chroniques, au moins cela leur était-il commun, et le jeune homme essuya rapidement les larmes qui commençaient à se former au coin de ses yeux comme la serveuse précédemment. Non il ne la détestait pas. Elle était Emily Kennington et ce n’était pas pour rien. Il leva la main. Ils avaient beau ne pas s’entendre depuis un an, elle était Emily. Emily, Emily, Emily. Et elle restait sa petite Emily, cette jeune fille qui l’avait touché par la douceur de son caractère. Levait la main oui. Et ému par cette fragilité qu’on sentait en elle quand bien même elle se montrait d’une force incroyable. Car elle ne se laissait pas faire par ses sentiments malgré tout ce que l’on pouvait voir. Allongeait son bras. La preuve était qu’elle restait là avec lui, à le supporter. Que c’était la première fois qu’elle s’exposait autant. Elle se maîtrisait terriblement. Oh certes c’était sûrement dû à sa gentillesse mais tout de même il fallait saluer sa résistance ! Beaucoup auraient abandonné Casey ou l’auraient mis à la porte. Et bien plus tôt ! Mais pas Lee. Lee était patiente et continuait de faire de son mieux. Elle ne tarissait pas d’efforts. Elle endurait en silence, surtout. Alors oui Emily était forte, forte de sa patience et de son endurance, de son cœur toujours prêt à écouter et comprendre, entendre, accepter. Et puis forte aussi car elle avait réagi ce soir et qu’elle ne se laissait pas dépérir. Elle voulait que les choses changent, bougent, les provoquait pour que quelque chose se passe, se produise. Peut-être avait-elle réussi. Une petite part du moins. Sa révolte n’avait pas été vaine ce soir puisque Casey avait vraiment conscience de ce qu’il faisait désormais. Peut-être que le changement serait long, mais finalement… Finalement tout ça, tout ça ce n’était pas figé. Finalement, ce soir, ce qu’il prouvait, c’était qu’il y avait encore de l’espoir. Non ? Eux deux qui pensaient qu’ils étaient au plus bas et qu’ils n’allaient que s’étioler plus encore… Peut-être pas, en fin de compte. Savez-vous pourquoi ? La réponse est dans un geste simple, mais c’est un geste de douceur et aussi, n’ayons pas peur de le dire puisqu’il est surtout vrai – un geste de vrai avant tout oui – donc, je disais, c’est un geste de douceur et n’ayons pas peur de le dire, un geste d’amour et tant pis si certains vomissent en entendant cela car c’est la vérité même, ce geste est d’amour, et véracité, et poigne, et coton, et légèreté et volupté, tout cela à la fois – et puis, gêne et peur, crainte, de petits frétillements de crainte dans le bout de ce geste (au début ou à la fin, je ne sais pas, mais quelque part dans le bout), frétillements de crainte et frissons, comme piaffement d’étalon, piaffement, tout ce petit geste qui tremble. Car il a peur mais il est ému. C’est un geste de rien qui représente tout cependant. Et il balaie la haine et les colères, emporte loin les furies et l’ire, souffle sur les courroux. Non, peut-être qu’ils avaient tort tous les deux de croire que tout était perdu et que ce soir, c’était la fin. La fin de la pire ignorance certainement. Mais pas l’ultime moment de leur mésentente. Pas le dernier cri avant la véritable tempête. Non ils se trompent évidemment ! Ce n’était pas ça. C’était un balbutiement. Une tentative. Un espoir, là, caché dans le noir, murmuré, prisonnier du temps des rêves, comme pris entre deux temps. Qui ne sortira assurément jamais de cet espace, secret étouffé entre les ailes de la nuit. Geste de rien quand Casey lève sa main et la pose le plus délicatement possible, presque dans une tendresse, avec une précaution touchante voire amusante, posant sa main, dans le silence le plus terrible et le plus protégé pour ne surtout pas la réveiller, pour ne pas qu’elle sache, deviner seulement, le mystère des hallucinations du sommeil et des vérités inavouées, qu’il était là entrain de lui caresser les cheveux à présent, comme un mari fautif, exactement ce qu’il était, et sa tête s’était rapprochée de la jeune fille, son souffle passait dans ses cheveux et pourtant il faisait tout pour le retenir car elle ne devait pas savoir oh non, et sa main toujours à caresser ses cheveux dans une émotion qui étranglait son cœur et le faisait trembler, et il ferma les yeux quelques instants pour se calmer au son de la respiration de sa femme, et tout en faisant cela sa tête involontairement tombait lentement et il faillit la laisser chuter contre celle de la jeune femme, mais à temps il s’en empêcha, et son autre main osa aller frôler sa joue tandis que la gauche s’était arrêtée dans sa chevelure et que seul son pouce enlaçait ses mèches , et puis lui qui se retenait de respirer et de pleurer, se demandant si elle dormait ou si elle faisait semblant, ayant peur, étouffant de peur dans le noir de cette chambre, mais ne partant pas cependant et continuant à l’aimer en silence, c’était bien cela, dans ce geste de rien il l’aimait, et il n’était pas le Casey d’avant ou le Casey retrouvé, c’était le Casey qui avait tort et qui s’en voulait, c’était un Casey qu’Emily n’aurait jamais pu connaître s’il n’avait pas fait toutes ces erreurs car ce geste, inconsciemment, c’était une rédemption, mais cela peut-être même la serveuse l’ignorerait-elle pour toujours car Morphée avait dû être plus rapide que le mari et il l’avait prise dans ses bras avant que Casey n’arrive, cependant à lui était le geste de rien et d’amour et de tout, et c’est pour cela que dans un suprême acte de peur, il posa ses lèvres, en se redressant un peu, le torse au-dessus du lit désormais et l’ombre de sa tête sur le visage de sa femme, posa ses lèvres sur sa joue mais dans un geste si furtif que si jamais elle ne dormait pas elle pouvait croire que c’était une mouche ou bien un rêve ou bien l’une de ces croyances qui nous prennent quand la pénombre tombe et que l’esprit alors aime à s’inventer des monstres dans les coins, des clowns probablement, tenez cela il n’avait pas oublié, il se souvenait qu’elle avait peur des clowns, et des reptiles également, non il n’avait pas oublié, oh vous voyez qu’il n’était pas si horrible, il n’avait pas tout oublié d’elle, alors oui peut-être bien que cette soirée ce n’était pas l’ultime fin mais seulement la dernière étape de la descente, et alors, alors, ils allaient commencer à remonter, ô avec lenteur certainement, mais au moins ça signifiait bien qu’il y avait encore de l’espoir à avoir et que cet espoir allait un jour ou l’autre devenir vérité et existence, et tout ça, tout ça, à partir d’un geste de rien.
Et lui à présent, son torse rabattu et sa tête de nouveau à hauteur de la sienne, il crut murmurer, mais peut-être ne le fit-il pas, peut-être ne le dit-il que dans sa tête, ou peut-être bien le prononça-t-il, la nuit, vous savez, la nuit brouille les sens :

« Emily, j’espère que tu m’aimes encore. »

Et son regard brillait dans l’obscurité tandis que sa main doucement quittait le chemin des cheveux de son épouse et lui-même s’éloignait peu à peu d’elle, se séparant de la bordure du lit, mais restant, restant là, accroupi par terre dans le noir et voilà, il avait décidé, il resterait là, accroupi par terre dans le noir, il ne bougerait pas d’ici cette nuit. Et demain matin… Non demain matin il ne voulait pas y penser il avait trop peur. Pour le moment, nuit et secrets, silence et vérité. (Amour.)

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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyDim 28 Avr 2013 - 15:03

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



La jeune mariée ne parvenait pas à trouver le sommeil. Comme tous les soirs, son esprit restait éveillé et se plaisait à lui faire revivre tout ce qu’il s’était passé au cours de sa journée. Ce client particulièrement indécis qui avait mis plus de quatre minutes à choisir ce qu’il allait prendre, le retour inattendu de son père, leur discussion maladroite… Et puis Casey. Casey qui l’avait ignorée dans la rue, comme s’il avait honte de dire qu’elle était sa femme. Casey qui s’obstinait à rentrer de plus en plus tard, de plus en plus souvent. Casey qui se vexait pour un rien. Casey et leurs disputes mémorables qui l’empêchaient bien souvent de dormir. Elle soupira doucement, sentant une vague de tristesse l’envahir. Non, elle n’allait pas se remettre à pleurer. Les larmes ne servaient à rien, de toute façon. Elle n’était pas faible. Elle n’était pas de celles qui se laissaient totalement aller et qui pleuraient, encore et encore, sans s’arrêter. Non, Emily, elle, était une battante. Elle essayait de faire bouger les choses et refusait de se morfondre. Elle devait cela à sa mère. Elle l’avait regardée se détruire petit à petit sans avoir le courage de reprendre sa vie en main et elle s’était promis que jamais elle ne suivrait ce chemin-là. Se lamenter est toujours facile et choisir la facilité n'était jamais la meilleure solution.

Elle eut l’impression d’entendre quelqu’un s’approcher. Casey, évidemment. Personne d'autre ne partageait leur appartement. Elle ne se retourna pas pour autant, préférant attendre de voir ce qu'il allait faire. Elle sentit sa main glisser le long de sa chevelure et elle ferma les yeux. Elle n’était plus habituée à ce genre de contact. Elle eut envie de l’arrêter. De stopper son geste d’une manière ou d’une autre, de lui dire de la laisser tranquille et de quitter la pièce. Mais elle n’avait pas assez de courage pour lui faire face. Alors elle se retrancha dans un sommeil feint, espérant qu'il y croirait. Il y croirait. Cela l’arrangeait sûrement de se dire qu’elle ne l’entendait pas et qu’elle n’avait aucunement conscience de ce qu’il faisait. Alors qu’elle ne s’y attendait pas, les lèvres de Casey se posèrent sur ses joues d’une manière si furtive qu’elle se demandait si elle n’avait pas rêver. Puis un murmure brisa le silence de la nuit :

« Emily, j’espère que tu m’aimes encore. »

Si elle avait été plus courageuse, elle se serait probablement retournée pour voir si son mari était bel et bien dans la pièce. Mais elle avait trop peur. Peur de réaliser que tout cela n’était pas réel, peur de constater qu’une fois encore, ses espoirs étaient déchus. Cette scène surréaliste n’était probablement que le fruit de son imagination. Ce n’était pas le genre de Casey, de faire ce genre de trucs. Ou peut-être que si. Elle n’en avait pas la moindre idée parce qu’elle avait l’impression qu’elle ne le connaissait plus. Plus les jours passaient, plus ils s’éloignaient et plus il devenait un étranger avec qui elle cohabitait par obligation. Gardant les yeux fermés, elle se concentra pour ne pas trahir son mensonge. Un simple petit mouvement et il saurait qu’elle ne dormait pas. Elle analysait ce qu’il venait de se passer dans sa tête, cherchant une explication à tout cela. Si elle ne rêvait pas, alors Casey était étonnamment lâche. Il préférait attendre qu’elle soit endormie pour lui parler – parler était un bien grand mot mais cette petite phrase en disait plus que de longs discours inutiles – plutôt que de l’affronter. Une fois encore, il contournait le problème. Il avait toujours fait cela : dévier les contrariétés ou carrément les ignorer dans l’espoir qu’elles finissent par disparaître. Mais ce n’était jamais le cas. Elles ne faisaient que grandir, encore et encore. Au final, ces petites contrariétés d’apparence insignifiantes devenaient de monstrueux problèmes dont on ne pouvait plus se sortir. Le silence ne tarda pas à la bercer à nouveau, comme si tout cela n'avait été qu'une douce illusion. Casey était probablement sorti de la pièce (avait-il jamais été là, d’ailleurs ?) pour regagner le canapé qui l’accueillait depuis de nombreuses nuits. Emily finit par s'endormir quelques minutes plus tard ignorant que son mari était toujours là, près du lit.

La sonnerie tonitruante du réveil interrompit son sommeil au petit matin. Elle soupira doucement, rechignant à sortir de ce lit où elle était si bien, puis elle se résigna à se lever en pensant à toutes les choses qu’elle avait à faire. Comme tous les jours, son planning était plutôt chargé et son esprit serait suffisamment occupé pour oublier la dispute de la veille. Le fait de travailler l'aidait incontestablement à aller de l'avant et à ne pas ressasser inutilement. Elle se frotta doucement les yeux, remit ses cheveux en place, se redressa d'un geste plus ou moins habile et… elle aperçut Casey, endormi au pied du lit. Elle s’approcha doucement et l’observa quelques secondes, incapable de faire le moindre mouvement. Comment pouvait-on en arriver à être gênée de devoir réveiller son propre mari ?

« Casey ? », chuchota-t-elle en se penchant un peu vers lui.

Pas de réponse. Sans doute dormait-il assez profondément pour ne pas l’entendre. Elle soupira doucement et le dévisagea malgré elle. Là, en train de dormir, il ressemblait à un petit garçon. Un adorable petit garçon. Elle se surprit à sourire un peu mais se ressaisit rapidement. Elle n'avait pas le droit de se laisser séduire par son air parfaitement innocent. Sa rancœur était toujours là - et il était hors de question qu'elle tire un trait dessus aussi facilement.

« Casey », répéta-t-elle en lui secouant doucement l’épaule dans l’espoir de le tirer de son sommeil.

Il avait passé la nuit au pied du lit. C’était à la fois ridicule et adorable. Ridicule parce qu’il aurait très bien pu s’installer à ses côtés plutôt que de passer plusieurs heures d’affilées dans cette posture étrange (il allait sûrement avoir des courbatures partout, après une nuit pareille !) et adorable parce qu’il avait fait l’effort de revenir la voir après leur dispute... Elle repensa soudainement à la phrase entendue la veille au soir, alors qu’elle était sur le point de s’endormir. Elle n'avait pas rêvé. Il avait demandé si elle l’aimait encore, ce qui impliquait qu’il avait pris conscience qu’il avait dépassé les bornes. De là à dire qu’il allait enfin se décider à faire des efforts pour sauver ce qu’il restait de leur mariage chaotique… Perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas que Casey avait enfin ouvert les yeux. Leurs visages n’étaient qu’à quelques centimètres l’un de l’autre et la jeune femme, mal à l’aise de cette proximité à laquelle elle n’était plus habituée depuis longtemps, se recula avec une brutalité qui ne lui ressemblait pas. Elle lui lança un regard désolé, tentant de sourire pour camoufler sa gêne.

« C’est la nouvelle mode, de dormir par terre ? », demanda-t-elle gentiment.

Elle voulait bien évidemment sous-entendre qu’il aurait pu la rejoindre dans le lit conjugal. Cela faisait plusieurs mois qu’ils dormaient séparément mais quitte à passer la nuit dans la chambre, autant s’installer confortablement, non ? Elle l’observa encore quelques secondes, n’osant pas faire le moindre mouvement. Cette situation était tout bonnement ridicule. Ils étaient mariés et ils ne supportaient plus de se regarder en face ou de se tenir près l’un de l’autre. À ce train là, les choses ne risquaient pas de s'arranger !

« Tu peux prendre le lit, si tu veux. »

De mémoire, elle savait qu’il n’avait pas cours avant quelques heures et il pourrait dormir encore un peu avant de partir. Sans attendre sa réponse, elle se leva rapidement et quitta la pièce pour rejoindre la cuisine. Et voilà qu’à présent, c’était elle qui fuyait… Comme si elle avait peur qu’il se décide enfin à changer, alors qu’elle n’attendait que cela depuis des mois.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyLun 29 Avr 2013 - 20:40

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Casey avait fini par s’endormir au pied du lit comme il l’avait décidé, épuisé par toute cette soirée. Couché en chien de fusil, ses paupières s’étaient closes sur l’océan vaseux de leur mariage et la douceur perlée des quelques gestes qu’il venait d’avoir, comme des rais de lumière incandescents qui seraient parvenus à transpercer la profondeur des eaux de leur vie conjugale. Mais ils avaient été aussitôt absorbés par la nuit noire et le sommeil. Un rêve doux, de lâche, de peureux. De culpabilité, aussi.

La sonnerie du réveil d’Emily ne parvint pas à le tirer de son sommeil, elle ne fit que percer la brume de ses songes en s’y intégrant. Ce fut le contact inhabituel et étrange d’une main sur son épaule qui parvint à le réveiller. La surprise de cette proximité, leur promiscuité s’étant éloignée dans des abysses de plus en plus profonds au fil des mois, l’avait soutiré aux bras de Morphée. Quand ses yeux furent ouverts, le visage de la jeune femme n’était qu’à quelques centimètres du sien. Fraîchement éveillé, son cerveau perdu dans ses mystères, cette apparition était un peu fantasmagorique, clairement onirique. Cela accentua la douceur des traits de Lee et la délicatesse de son geste. Le murmure de sa voix et sa bienveillance en furent soulignés et pendant quelques secondes, Casey admira cette petite tête brune qui le réveillait avec une attention comme maternelle. Et une gêne indicible, liée au chaos de leur vie. Les volets n’étaient toujours pas ouverts mais le soleil perçait au travers et quelques traits clairs plongeaient la pièce dans une atmosphère presque aquatique, la poussière voletante se faisant bulles d’air ou plancton. La lumière de la table de chevet, au contraire de ramener au concret la chambre, profilait le travail du soleil et semblait n’être qu’un point lumineux perdu au fond d’une mer trouble, éclat d’or frappé du soleil ou reflet lui-même du cercle de feu. Dans ce décor, Emily, tout juste réveillée, les cheveux encore un peu emmêlés et la peau de son visage dorés par le soleil pointant, devenait une créature mystique, sirène des abîmes. Alors qu’il était pris d’un léger assoupissement, mélange de sa fatigue persistante et d’un vertige furtif face à ces visions, la serveuse rompit le charme en s’éloignant un peu brutalement et, soudain, ce fut le matin.
Lee allait travailler et lui avait encore une petite heure avant de devoir se lever véritablement. Il sentit que ce matin, il ne retournerait pas au lit. Après le départ d’Emily il se préparerait un café et prendrait une douche froide. Il n’allait pas pouvoir se rendormir.

La boutade de l’Australienne le piqua au vif et il se pinça les lèvres. Elle aurait visiblement préféré qu’il partage ensemble le lit. Mais il n’en avait pas eu la force. Et puis… Et puis à présent, il s’y serait senti comme un intrus. Ou alors, il aurait eu l’impression de la violer. Comme si dormir à côté de sa femme était devenu un sacrilège. Emily avait tout des figures sacrées après tout : il ne la touchait plus, ne la regardait plus, ne lui parlait jamais directement, ne faisant que s’adresser à elle dans des monologues intérieurs. N’étaient-ce pas là des éléments de culte ? Il était vrai qu’il aurait eu l’impression de transgresser un interdit en s’installant à côté d’elle cette nuit, et il se serait senti mal à l’aise, gêné, impur. Indésirable. Alors même que ce matin, elle venait implicitement de lui reprocher son geste – son absence d’action, plutôt.
Il eut un petit sourire et ses yeux, plus sombres que jamais dans l’atmosphère de la pièce, brillèrent de gêne. Il était encore une fois fautif, ne cessant de faire tout de travers. Heureusement, le jeune homme ignorait que sa femme était éveillée quand il était allé auprès d’elle. Et ignorait surtout qu’elle l’avait trouvé plus lâche et ridicule que jamais. Il n’aurait sûrement plus jamais fait un geste vers elle après ça, par forcément de vexation mais plutôt de honte.

« Ouais… » lâcha-t-il dans un souffle avec un petit sourire timide en se redressant progressivement.

Il passa sa main dans ses cheveux et réalisa soudainement qu’Emily savait. Du moins, à présent, elle savait. Qu’il était venu dans sa chambre cette nuit et qu’il était resté là toute la nuit, puisqu’il était à ses pieds. Ses yeux s’écarquillèrent au fil de ses pensées et il fut submergé d’un sentiment croissant de honte. Il ne savait plus où se mettre ni comment faire. Comment expliquer la situation ? « Alors en fait cette nuit je suis venue dans la chambre après notre dispute et puis, euh… Je t’ai un peu caressé les cheveux et je me suis laissé dormir sur le sol. » Non. Il ne pouvait pas lui servir ça.


« Je… Je me suis endormi aussi quand tu t’es mise au lit… Je m’étais assis deux secondes et puis visiblement j’ai fini par dormir… » mentit-il avec le même petit sourire que précédemment, mais plus accentué encore. Plus gêné, plus troublé. Plus réveillé, plus conscient.

Il fallut un temps à l’étudiant pour comprendre pourquoi Emily l’autorisait à aller dans le lit et quand il fit le lien entre le temps qui lui restait avant d’aller en cours, la jeune femme avait déjà filé dans la cuisine. Cette fuite rapide étonna le jeune homme, pas toujours très bien réveillé. Cette matinée s’annonçait rude, il avait vraiment du mal à émerger. Il bâilla pour se détendre la mâchoire puis se leva. Casey avait encore les vêtements de la veille. Son jean et son pull gris, choisis à la volée hier matin car il avait peur d’être en retard. Il avait passé la nuit précédente à se gaver de séries sur Internet en apprenant de temps à autre des phrases de son cours et ne s’était couché qu’à cinq heures du matin après avoir fini en panique un devoir qu’il avait complètement oublié. Il n’était donc pas plus réactif hier matin qu’aujourd’hui. Mais les causes en étaient toutes différentes.
Debout, ses yeux parcoururent la pièce et en découvrant les affaires de la jeune femme – des vêtements, son sac, des films – il eut l’impression qu’elles lui criaient toutes de s’en aller d’ici, lui l’étranger. Il secoua sa tête pour chasser ses visions matinales qui n’en finissaient plus et gagna la cuisine où Emily était déjà. Non, il ne dormirait pas dans sa chambre. Pas ce matin. Son esprit était beaucoup trop perturbé pour qu’il s’y sente à l’aise et même s’il se sentait fatigué, il mettrait plus de temps à trouver le sommeil qu’à réellement dormir. Ainsi ils se retrouvaient tous les deux ensemble pour le petit-déjeuner ce qui n’était pas arrivé depuis, oh… Cinq mois ? Casey commençait souvent plus tard que Lee et si ce n’était pas le cas, il allait dans la salle de bain pendant qu’elle mangeait ou bien l’inverse. Le week-end, soit il se réveillait plus tard, soit il n’était pas là. Il se rendit compte en détaillant ce qu’elle sortait qu’il ne savait même plus ce qu’elle prenait le matin. Vraiment… Il s’était laissé entraîner comme un adolescent. Sauf qu’il avait vingt-trois ans et que tout ça, il aurait dû l’éprouver bien plus tôt. Il aurait dû être sorti de tous ces débordements, avoir fait ces « expériences » bien avant et à présent, savoir équilibrer sa vie. Mais Casey ne faisait rien comme les autres. Alors qu’il brillait dans ses premières années scolaires et qu’il n’avait pas d’amis, il s’était marié brutalement à vingt et un an et puis avait décidé qu’il était temps pour lui de s’amuser tandis qu’il délaissait un peu ses cours alors que tout le monde autour de lui rattrapait justement ses années de débauche pour enfin réussir et ne plus commettre les erreurs du lycée. Non, vraiment, il faisait tout n’importe comment. Pas même à l’envers. Juste n’importe comment. Dans un désordre chaotique, apocalyptique. Le déluge était-il proche ? S’il n’était pas Noé, alors rien ne pourrait sauver leur situation.

« Je vais juste prendre un café vite fait et te laisser après, t’en fais pas… »

Ce fut à ce moment que son rêve de cette nuit lui revint, provoqué par la vision d’Emily. Il avait rêvé d’elle, d’ailleurs. Et puis de lui. Et… Haha. Oui. L’autre aussi était là. Il ne savait pas trop où ils étaient. Sur un bateau lui semblait-il. Un bateau de croisière. Il naviguait on ne savait om et honnêtement ce n’était pas ça l’important – même si le fait que l’eau était d’un rose framboise plus sanguinaire que douillet pouvait interpeller. Trois, donc, sur ce bateau. Emily dans un ravissant maillot de bain, allongée sur un transat à profiter du soleil. Irradiée par le soleil, beauté fulgurante. Casey avait d’ailleurs dégluti. Mais ce n’était pas vraiment – pas totalement – la raison de ce geste. Non, le problème, c’était l’autre. Cette scène s’était déroulée plusieurs fois par ailleurs, sur un bateau il n’y avait pas mille et une choses ou rencontre à faire, on tournait en rond. Mais jamais elle n’avait atteint l’intensité de ce qui se déroulait sous les yeux de Casey – qui par ailleurs était le seul idiot à porter un pull. L’autre, donc, parlait à Emily. Il la dévorait des yeux et elle frétillait des paupières. À vomir. C’est d’ailleurs ce Casey avait fait. (Un vomi vert qui s’était mélangé avec l’eau rose… Des couleurs printanières qui respiraient l’ironie.) Et cela, l’autre et Emily l’avait vu. Mais au lieu d’être la Lee inquiète de d’habitude, sous l’influence du type qui le méprisait (et qui avait surtout bien plus d’abdos que lui – abdos bien visibles par tous puisque cet énergumène était torse-nu comme tous les beaux gosses vaniteux de la planète, pfff), elle éclatait de rire avec lui, se moquant de Casey plus ridicule que jamais, croyant qu’il avait le mal de mer. Casey décidément ratait toujours tout. Et tous les doigts de tous les passagers s’étaient pointés vers lui, et tous riaient, et faisaient même ce truc de gamin, le « bis bis carotte » avec l’un des doigts frottant perpendiculairement l’autre. Il était humilié par tout un bateau. Même le commandant de bord se tordait de rire. Casey avait alors voulu se jeter sur l’autre mais il s’était affalé de tout son long sur le ponton car le bateau venait d’accélérer – maudit commandant qui l’avait fait exprès. Les rires étaient repartis de plus belle. La bague de fiançailles d’Emily avait brillé au soleil. Elle l’avait montrée à Casey. Jetée dans l’eau – et aussitôt elle s’était faite happée par ce ventre marin toujours affamé. Casey avait pleuré les larmes de son corps tandis que le type s’était penché sur la belle (en maillot, en plus ! Emily en maillot ! Vous imaginez ?) et l’avait langoureusement embrassée.

Revenu à la réalité mais néanmoins troublé, Casey détourna le regard de sa femme. Il fallait à tout prix qu’il s’active pour ne pas penser de nouveau à son songe. Cauchemar oui ! Qui était l’idiot qui avait dit que les cauchemars étaient la réalisation franche d’un désir repoussé déjà ? Nietzsche ? Non, non, pas lui. Ses cours de philo’ étaient loin mais il savait que ce n’était pas… Freud. Freud évidemment, qui d’autre, hein ? Freud. Et bien le Freud pouvait ravaler sa théorie. Jamais, jamais, et surtout pas au plus profond de lui-même, Casey ne désirait se faire humilier par des dizaines de personnes dont Emily qui, il fallait le dire, était l’une des personnes à qui il tenait plus, pourquoi serait-il encore là malgré leur passade à vide sinon ? Non, jamais.
Et il désirait encore moins qu’Emily le quitte pour ce pauvre libertin d’Emrys.
Oui, le type, dans son rêve, c’était Emrys. Le siiii sympathique collègue d’Emily. Qui malgré sa petite amie rôdait aux yeux de Lee – du moins, du point de vue de Casey, qui n’était pas des plus objectifs. Petite amie que Casey essayait d’enjôler dans sa théorie afin d’avoir au moins un allié dans cette foutue histoire. Et si ce rêve le perturbait autant, c’était bien pour ça. Et si Emily le trompait ? Et si elle allait respirer auprès d’Emrys ? Si tous les deux se foutaient de sa tronche à lui, Casey ? Le doux de visage de la jeune femme croisa son regard à la volée et il se sentit tout à coup stupide de penser à cela. Stupide, et d’autant plus inquiet. Parce que, oui. Emily avait un visage doux et c’était un atout terrible. Elle était séduisante et belle, et cela, Casey était bien placé pour le dire et le savoir. Alors pourquoi pas Emrys ? Et pourquoi Emrys-mister-abdos ne pouvait-il pas à son tour avoir séduit Lee ?
L’étudiant se garda bien de demander quoique ce soit à Lily, surtout de si bon matin, surtout après la soirée d’hier, mais l’idée allait plus que trotter dans sa tête toute la journée.

« Euhm je… Je vais prendre une tasse. » affirma-t-il en se rendant compte qu’il était resté debout à ne rien faire quelques secondes de trop, assez pour être bizarre du moins. Mais après tout… Lee pouvait penser qu’il était tellement lent le matin que c’était son schéma habituel, non ? D’accord, c’était exagéré.

Il se déplaça pour aller prendre ladite tasse, gêné de devoir partager un petit-déjeuner avec Emily, de devoir évoluer en même temps qu’elle la pièce. Il ne savait plus comment la regarder, comment lui parler. Il baissait les yeux ou détournait le regard comme après qu’on se soit moqué de lui. Pourtant, quand il passa derrière pour se servir et qu’il se retrouva derrière son dos, sa longue chevelure le frôla, si bien que cela lui rappela ses caresses de la veille et il se sentit plus apaisé. Ce contact était inoffensif – involontaire et peut-être même que la serveuse ne l’avait pas senti – et neutre. Rassurant. Comme une mère caresse au front son enfant. Comme on presse une main par soutien. Mais c’était beaucoup plus léger et beaucoup plus subtil que cela. C’était un émoi qui picotait, des petites pattes d’oiseau sur le cœur, et le battement d’ailes faisait courir plus vite le sang dans les veines, augmentant le rythme cardiaque comme une force croissante, l’oisillon qui perce son œuf et respire pour la première fois, l’oiseau qui prend son envol, la vie qui s’éveille. Il eut subitement envie de la prendre dans ses bras avec cette légèreté d’antan, quand il n’était ni gêné ni mièvre, simplement aimant et malice, mais il eut peur et l’oiseau s’évanouit dans son cœur alors qu’il s’en allait vers la cafetière, tasse à la main.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMar 30 Avr 2013 - 0:21

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Cela faisait bien longtemps qu’ils n’avaient pas partagé un petit-déjeuner, ni même un autre repas. Cette proximité soudaine avait plongé la pièce dans une atmosphère lourde, presque étouffante. Emily était mal à l’aise, maintenant plus que jamais, et elle n’avait qu’une hâte : quitter l’appartement pour aller travailler. Elle se sentait bien plus à l’aise au Café que chez elle. Essayant d'ignorer la présence de son mari, elle se servit une tasse de café noir accompagnée d’un simple yaourt. Elle n’avait pas eu le temps d’aller faire les courses et de toute façon, elle n’avait pas très faim. L’ambiance qui régnait au sein de leur appartement affectait son moral et son appétit diminuait au fil des jours. Elle scruta Casey pendant quelques secondes, essayant de deviner le fond de ses pensées. Elle ignorait si cette situation le pesait autant qu’elle. Elle ne savait pas ce qu’il pensait de tout cela. Était-il peiné ? Fatigué ? Amer ? Ou totalement indifférent ? Elle n’arrivait même plus à lire sur son visage.

« Tu crois qu’on se reparlera comme avant, un jour ? », demanda-t-elle soudainement en plantant son regard dans le sien.

Cela faisait bien longtemps qu’elle ne l’avait pas regardé en face plus d’un quart de seconde. Mais elle en avait assez de fuir ou de baisser les yeux à chaque fois qu’ils avaient le malheur de se croiser. Cette crise conjugale – ou appelez ça comme vous voulez ! – commençait à devenir plus que pesante et elle n’en pouvait plus. Et puisque Casey ne semblait pas décider à faire le moindre effort (sauf quand elle était endormie, la belle affaire !), elle avait décidé de jouer franc jeu et de lui parler directement de tout ce qu'elle ressentait.

« Je veux dire, c’est tellement ridicule… On se croise sans se regarder, on se parle à peine, on ne partage plus rien, on fait chambre à part depuis des mois… Ce n’est pas comme ça que j’imaginais le mariage. »

Elle marqua une courte pause, s’autorisant enfin à baisser les yeux. Elle savait pertinemment que parler ne servait à rien. Casey allait se murer dans le silence, c’était ce qu’il faisait le mieux. Elle soupira doucement, jouant nerveusement avec sa tasse pour se donner une contenance.

« Tu me manques, Casey. Enfin, le Casey dont je suis tombée amoureuse me manque, en tout cas. »

C’était vrai. Elle avait l’impression que le Casey qu’elle avait sous les yeux en ce moment même et l’homme qu’elle avait épousé étaient deux personnes qui n’avaient rien en commun. Ce Casey là n’était pas celui avec qui elle voulait finir ses jours. Le problème, c’est qu’elle ne savait plus. Elle ignorait s’il avait joué un jeu pendant tout ce temps, si sa vraie nature se montrait au grand jour depuis quelques mois, si elle était tombée amoureuse d’un imposteur… Elle ne le connaissait plus.

« Je… Je crois qu’il vaudrait mieux qu’on... divorce. Je ne peux plus vivre comme ça. J’en ai assez de t’attendre tous les soirs, de me confronter à tes silences, d’être la seule à essayer de faire bouger les choses… Ce n’est plus possible, Casey. Il faut mieux qu’on arrête avant de se faire encore plus de mal. »

Ce qui la poussait à parler comme cela ? Elle n’en avait aucune idée. La lassitude, peut-être. Ou ce sentiment amer d’échec qu’elle ressentait à chaque fois qu’elle pensait à son mariage. Elle en arrivait à un point où elle n’avait plus aucun espoir. Elle n’avait plus envie de se battre, plus envie de faire d'effort. Elle était résignée – et c’était pire que tout. Elle avait accepté l’idée que leur union n’était pas faite pour durer et qu’ils s’étaient trompés. Le divorce n'était plus une option envisageable mais la seule solution pour mettre fin à ce chaos. Elle ne savait pas si elle avait dit cela sérieusement ou simplement pour lui faire peur. Elle avait laissé parler son cœur sans réfléchir – et les mots qui étaient sortis témoignaient de son désarroi. Elle préférait ne pas y réfléchir pour l’instant, de peur de réaliser qu'elle était parfaitement sérieuse. Elle attendait sa réaction avec appréhension, se demandant s’il allait enfin se décider sortir de son mutisme ou à faire quelque chose pour lui montrer qu’il tenait à elle malgré tout.


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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMar 30 Avr 2013 - 15:21

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Il était allé de l’autre côté de la table, face à Lee, mais était resté debout auprès du canapé. Ou plutôt, il n’avait pas encore eu le temps de s’asseoir. Sa tasse de café à la main, alors qu’il soufflait dessus pour la refroidir – il avait la sale habitude de toujours trop chauffer dès qu’il mettait quelque chose au micro-onde – la voix d’Emily résonna dans la pièce. Il sentit son regard sur lui et quand il leva les yeux, les siens s’ancrèrent dans ses pupilles. Il déglutit. D’accord. Pas de trêve matinale. Lee attaquait directement, bam. Pas de pitié pour l’ennemi encore un peu endormi, elle le prenait de court au réveil, impitoyable. Casey allait devoir revêtir son armure lui aussi s’il ne voulait pas capituler à peine le combat démarré. Car il ignorait, mais cette phrase d’Emily n’était que la garde de leur affrontement. Et déjà cette garde était un premier affrontement.
Surpris par cette joute matinale, Casey fronça légèrement les sourcils et eut une moue pincée. Pendant ce temps, Emily enchaînait, plus nette, plus tranchante. Mais avec sa voix à elle. Et ce contraste était plus terrible encore car il savait que ce n’était pas le genre de Lee de faire de tels discours.
Bien sûr, elle avait raison. Ils étaient absolument ridicules. Mariés et incapables de s’accorder un regard. Pourtant… Pourtant là, tous deux soutenaient les yeux de l’autre et ne cillaient pas. Mais c’était bel et bien dans le cadre d’un combat, non pas d’une scène ordinaire. Quatre petites billes brunes qui s’observaient. Se testaient peut-être aussi ? Celles d’Emily étaient plus claires que ses yeux mais elles n’en étaient pas moins combatives. Elle était déterminée à mettre les choses à plat et cela se sentait. Casey, lui, avait l’œil plus sombre.

« Yeah… Sure. » dit-il simplement sous le coup de la surprise, un mouvement de sourcil accompagnant ses mots tandis que sa bouche se crispait en un espèce de soupir.

Honnêtement ? Honnêtement il ne pouvait qu’être d’accord avec ce que disait la jeune femme mais, vraiment, il ne savait pas ce qu’il pouvait répondre. « Oui on est ridicule tous les deux, c’est vrai, tu as raison… » Et quoi ? En quoi cela les avancerait qu’il dise une phrase de la sorte ? C’était plus inutile que ses bribes de mots précédentes. Qui étaient, d’ailleurs, bien plus éloquentes même si plus courtes.
Mais Emily n’en avait pas fini. Tout son discours allait crescendo et Casey allait bientôt recevoir le coup fatal. Pour l’heure, il fut simplement interloqué et percuté par cette phrase qui le déstabilisa. Il prit une gorgée de café pour mieux digérer cette déclaration. Il ne savait pas ce qu’il devait dire, si jamais il devait dire quelque chose. Il lui manquait. Non, pire. Le « Casey dont elle était tombée amoureuse ». Que vouliez-vous qu’il dise ? Il était complètement abasourdi d’entendre ça, ce matin, de si bonne heure. Quand Emily baissa les yeux, lui-même détourna le regard et inspira. Trop d’émotions en si peu de temps, il avait du mal à réfléchir. Un mal de tête allait poindre, il le sentait. Des bourdonnements déjà s’insinuaient dans son cerveau et sa gorge se serrait quelque peu. Il reposa son regard sur elle, abattu, tentant de réfléchir, les sourcils froncés, la respiration plus difficile. Il ne dit rien parce qu’il n’avait rien à dire. Parler aurait été broder, et ils n’avaient pas besoin de ça. Ça n’aurait fait qu’empirer la situation n’est-ce pas ? Hier, c’était bien ce qu’il s’était passé non ? Il avait parlé et il avait envenimé les choses. Et face à ce que lui disait Emily ce matin, que pouvait-il ajouter ? Désolé de te manquer ? Je ne recommencerai plus maman c’est promis ? Ridicule. –Oui, Casey était amer. Un goût âcre planait dans sa bouche et il n’en finissait pas de le ravaler, de le mastiquer, de le déglutir. Et plus il salivait, plus le goût était fort. Ses yeux étaient plissés et son front se ridait sous le froncement de ses sourcils.
Il y avait quelque chose cependant. C’est qu’il était persuadé de n’avoir pas changé. Son mode de vie avait changé, mais pas lui. Il n’était pas un imposteur comme elle le pensait. Casey Kennington était toujours Casey Kennington. Il avait les mêmes rêves, les mêmes envies, les mêmes tics, les mêmes maladresses. Simplement, il s’émancipait. De lui-même. De ses démons. De ses peurs. Mais pas de la bonne manière. Au lieu de respirer il plongeait dans l’abîme des folies. Il n’avait pas conscience des limites à ne pas franchir car il découvrait tardivement un monde que d’autres avaient déjà exploré et personne ne s’apercevait de sa cécité, de son manque de discernement, à la fac. On s’amusait point barre. En plus et étonnamment, il tenait plutôt bien l’alcool ce qui aggravait son cas. Malgré tout, il était bien Casey Kennington. Un Casey qui se trompait peut-être de chemin.

Emily avait fait une pause. Elle n’aurait peut-être pas dû, au moins tout se serait enchaîné et il n’aurait pas été pris d’une telle stupeur. Mais là… Son visage se figea dans une expression d’effroi et ses lèvres s’entrouvrirent sans qu’aucun son ne les perce. Ses yeux étaient grandis par le choc et, définitivement, il ne savait plus comment respirer. Il dut s’asseoir, se posant sur le rebord du canapé. Il n’était pas sûr d’avoir bien compris. Ou plutôt,il ne voulait pas avoir compris ce qu’il avait compris. Il regardait Emily, éberlué. L’espace autour lui parut tout à coup beaucoup plus restreint et tout se brouilla en même temps que son cœur battait la chamade.

Quelques instants, il ne put que hocher de la tête, plus aucune pensée ne parcourant son esprit. Et puis une révolte sourde gronda en lui. Non. Ce n’était pas possible. Son visage se durcit et il sentait bouillir en lui des sentiments déterminés à combattre la déclaration de Lee. Divorcer. Il avait à peine entendu la suite tant ce mot avait produit une onde de choc en lui. Il n’eut jamais pensé qu’un mot puisse avoir autant de force. Il fut pris d’un petit rire nerveux puis se ressaisit.

« Tu veux dire que… » commença-t-il, incrédule.

Oui. Oui, elle voulait dire que. Qu’il fallait que vous vous sépariez et que vous n’habitiez plus ensemble. Que vous ne vous voyiez plus. Que vous n’ayez plus aucun rapport. Plus rien en commun. Plus rien, tout court. Oui elle était en train de se dire qu’elle allait vivre toute seule, sans toi, et que ce serait mieux. Que chaque matin en se levant elle ouvrirait les volets, irait dans la cuisine, et tu ne serais pas là. Que tous les soirs quand tu rentreras, ta maison serait vide et qu’il n’y aurait personne pour t’accueillir. Oui, c’était bien de cela dont elle voulait parler.
Et cela, tout ça, non. Non, non, non. Ce n’était pas possible. Plus dur que jamais, son regard se posa sur sa femme, le visage paralysé dans une détermination impériale et immuable.

« Non. » prononça-t-il simplement. Sans réelle force, sans intonation. Un non bête et faible. Pouvait-on croire. Car il reprit, bien plus fortement, bien plus énergique. « Non ! Non, non, non ! » refusa-t-il, secouant sa tête dans une expression de déni, les mots sortant mécaniquement de sa bouche sans qu’il pût contrôler quoique ce soit.

« Non Emily, NON ! » reprit-il, criant presque, le visage froissé, s’emportant dans un refus violent.

Expliquer ? Donner des raisons ? Développer ? Il en était incapable. Il refusait mais c’était inexplicable. Aucune raison ne se dessinait, rien de précis ne se jouait dans son refus. Mais il reniait massivement, en bloc. Avec une force terrible. C’était tout son corps qui refusait. Il voulait projeter contre le mur ces syllabes et les y faire éclater comme on brise un miroir. Les détruire, les démanteler, les tordre, les étrangler – les faire disparaître.

« Non on ne va pas… On ne va pas divorcer Emily ! Non ! Non ! »

En vérité il avait crié. Pour un peu il aurait hurlé. Les mots écorchaient sa gorge. Lentement, une marche véhémente commençait dans son cerveau, tambours battants. Une marche militaire, frappant des pas lourds dans sa tête, des pas qui à chaque avancée écrasaient le sol, l’écrabouillaient même. Et inconsciemment, il se mettait en mouvement lui aussi, ses propres pieds commençant les cents pas. Quelque chose de léger et d’imperceptible pour l’instant mais qui allait s’amplifier. Il était en pleine crise et il ne le savait pas. Il ne l’avait jamais été. Mais bel et bien, une marche s’entamait dans son cerveau, et elle allait bientôt l’envahir.

« Pas ça. » dit-il d’une voix moins forte, se calmant un peu, une mine inquiète et moins colérique prenant place sur son visage.

Il n’avait jamais été aussi déterminé de toute sa vie. Pour être exact, il n’avait jamais été déterminé. Pas comme ça. C’était la première fois qu’il montrait une face aussi sûre de sa personnalité. Sa voix ordonnait presque. Il parlait en homme qui dirige, il soumettait implacablement sa volonté. C’était une décision qu’il tenait à faire entrer avec le plus de fermeté possible. Non, il ne voulait pas.
Casey respira et tourna le dos à Emily, s’en allant vers la salle de bain. Une fois entré, il s’appuya sur le rebord du lavabo, s’observant. Ses cheveux n’étaient pas coiffés et ils étaient complètement ébouriffés sur sa tête. Il essaya machinalement de les coiffer, croisa son regard. Ses yeux étaient plus sombres, assombris par la colère. Car il s’agissait bien de cela. Il avait été pris d’une colère en entendant ce simple petit mot. Une telle colère qu’il avait eu l’impression d’être un lion pris dans une cage, si bien que le ton avait monté alors qu’il était le seul à parler, alors que sa réaction pouvait peut-être sembler démesurer compte tenu de sa conduite.
Mais c’était venu comme ça, d’un coup. Tout son être s’était opposé à ce maudit petit mot. Parce qu’en s’imaginant se lever et se coucher sans avoir Emily quelque part avec lui… Ça lui avait donné le vertige. Certes, il ne lui parlait plus. Mais elle était là. Et il se rendit compte que cette présence, sa présence, lui importait énormément. Et qu’elle lui manquait. Oui elle lui manquait à lui aussi. Alors bien sûr… Bien sûr puisqu’elle lui manquait il n’avait qu’à aller la voir et lui dire qu’il arrêtait tout et que, là, c’était fini, tout irait mieux désormais. Mais ce n’était pas aussi facile. Ils ne savaient plus comment se comporter l’un avec l’autre ! Tout ne pouvait pas devenir mieux en un jour ! Des mois de décadence et un jour pour faire la paix ? Non, ça ne fonctionnait pas comme ça. Une distance et une gêne les tenaient l’un l’autre éloignés. Et puis… Et puis il se sentait nul, à présent. Parfois, il avait bien envie d’avoir quelques attentions pour elle. Mais il ne savait plus. Il avait l’impression qu’il serait maladroit et ridicule. Alors par honte anticipée, il ne faisait rien. Oui, le problème, c’était lui, entièrement lui, il le savait. Seulement il ne savait pas comment remettre les pendules à l’heure. Peut-être devrait-il faire une thérapie ? Aller voir un psy ? Non, tout de même… Il n’allait pas aller voir un psy pour ça !
Mais elle lui manquait. Emily était une personne adorable et il en avait encore conscience. Son amour pour elle ne s’était pas envolé, il se cachait seulement dans un coin. Où, il l’ignorait. Mais Casey savait qu’il l’aimait toujours. Et qu’il n’était pas question qu’il vive sans elle.

Sorti de la salle de bain, il rejoint sa femme à la cuisine. Avant de partir il avait croisé une dernière fois son regard. Sa détermination s’y lisait encore mais son visage était plus doux, apaisé. Et surtout, il était sorti en se souvenant de son amour pour Lily. C’est pour cela qu’il se dirigea vers elle et la serra dans ses bras, peut-être un peu trop fort. Il tenait d’une main sa tête et de l’autre sa taille, la pressant contre lui. Sa tête était posée près de son cou et son cœur calmait ses battements à la douceur d’Emily.

« Non… » murmura-t-il encore.

Il avait envie de pleurer mais il se retint. Non ils ne divorceraient pas. Et puis… Et puis ce n’était pas comme s’ils avaient l’argent pour ça en plus ! Il y aurait le problème de l’appartement. Lui ne pouvait l’assumer tout seul et comme il avait ses parents, il retournerait probablement chez eux. Mais alors ce serait à Emily de s’y installer et pouvait-elle le payer seule ? Ou bien, ils pouvaient le vendre. Dans ce cas… Où Emily irait-elle dormir, hein ? Certes son père était de retour, mais de retour de taule et il ne devait pas être bien fortuné donc il ne pouvait réellement offrir un toit à sa fille. Alors où Emily irait ?
Où Emily irait ?
Chez des amis.
Son rêve.
Casey se figea tout à coup. Il se redressa, l’effroi à nouveau dans ses pupilles. Ses yeux détaillèrent Lee. Et si ce n’était pas qu’à cause de lui qu’elle voulait divorcer ? Et si elle voulait divorcer pour… Pour retrouver Emrys ?! Emrys était avec Pandore, certes… Mais peut-être que ce n’était qu’une couverture, un passe-temps. On savait tous que ce type n’avait jamais eu de vraie relation avant non ? Enfin il avait cru comprendre ça avec Julie. Donc… Donc il attendait qu’Emily divorce de lui pour quitter Pandore et que tous les deux puissent se mettre ensemble ! Oh bon dieu ! Casey crut chanceler.

« C’est pas que moi c’est ça… C’est pas que moi… C’est Emrys aussi ! Tu veux divorcer pour qu’on soit plus ensemble et pour aller avec Emrys ! Il est dans le coup celui-là aussi ! Tu veux être avec lui c’est ça ? Tu veux qu’on se sépare ! Pour lui ! Comme ça il sera content le Emrys tout beau là, il aura gagné ça y est ! Il pourra montrer son torse bombé à tout le monde en me pointant du doigt « Hé vous avez vu, j’ai récupéré Emily, Casey est redevenu le nullos éternel ! » ! C’est pour ça ! C’est pour ça que tu veux divorcer ! Pour ce type ! »

Il ne contrôlait vraiment plus rien. Ses mots se heurtaient les uns après les autres tellement son débit était rapide, le volume de sa voix augmentait de plus en plus jusqu’à ce qu’il hurle dans les derniers temps. Alors, la marche militaire s’accéléra, les pas martelèrent son esprit. Cette fois Casey n’en était plus inconscient, il la sentait diriger son corps. Elle tambourinait. Et les pas ne firent qu’aller de plus en plus vite, s’emmêlant. La marche devint folle, lui-même déambulait avec trop d’énergie dans l’appartement. Son regard était fou. Plus il imaginait les choses de cette façon, plus en il était foudroyé. Et il se déglinguait. Son corps, son esprit. Il déraillait. Des tremblements l’agitèrent. Il se prenait la tête dans la main, agitait ses cheveux. Le mal de crâne l’assaillait. Les bourdonnements avaient définitivement envahi son cerveau. Il ne savait plus rien. Plus rien d’autre que l’image d’Emily et d’Emrys s’embrassant. Son rêve l’influençait, il le voyait comme prémonitoire. Et les images de son songe se superposaient à la réalité.
Soudain il fit volte-face et parcourut le salon, revint dans la cuisine de laquelle il s’était éloigné. Il se planta face à Lee :

« Parce que moi, hein, je sors peut-être mais au moins, je flirte pas avec mes collègues comme tu le fais avec Emrys ! Emrys, ton si sympathique collègue ! Ah ça ! Ah oui d’accord ! Alors on me reproche de sortir et de pas rentrer, mais à côté… À côté tu n’as pas peur de te faire draguer par ce type ! Tu le laisses faire ! Tu le laisses t’embobiner ! Il va te prendre dans ses filets ce Don Juan de pacotille là ! C’est pas parce qu’il a un beau torse qu’il t’aime sincèrement ! D’ailleurs moi je t’aime réellement ! Lui c’est de l’apparat ! Sinon comment il oserait faire ça à Pandore hein ? Après il va te faire la même chose ! En fait c’est ça son plaisir ! Briser les couples et les espoirs ! Sinon pourquoi il serait ami avec Julie hein dis-moi ? Il était membre de sa secte là ! Tu vas pas croire à ses sornettes ? Ce type est un séducteur c’est tout ! Laisse-le ou il va te briser le cœur ! Et d’autres encore après ! C’est tout ce qu’il sait faire sûrement ! C’est tout ce qu’il veut faire ! Il est avec Pandore mais c’est qu’un nouveau jeu pour lui ! Et le prochain c’est toi Lee ! C’est toi ! »

Puis, terminant, son bras battant l’air de son poing serré, la mine fermée :

« Fuck you ! » jura-t-il – un juron qui n’était pas adressé à Emily (ni même à Emrys), c’était simplement un ultime lieu dans lequel décharger sa colère.

Il en transpirait presque. Il bouillonnait. Il était crevé. Il n’avait cessé de hurler tout au long de sa tirade, emporté dans une fièvre folle, pire que sa colère précédente. Il était submergé par ses émotions et ne savait plus s’en dépêtrer. Il paniquait, complètement. Les mots s’étaient bousculés dans sa bouche et sous le coup de la folie un scénario catastrophe s’était profilé dans sa tête, faisant de son discours quelque chose tenant à l’insensé, qu’Emily n’avait peut-être même pas compris dans son intégralité.
Enfin, son flot de paroles avait cessé. Il était haletant, reprenait un peu le contrôle de son esprit. Il leva des yeux perdu sur Emily. Le visage affolé, déboussolé. Rétrospectivement, il se faisait peur. Il avait peur surtout de ce que pensait Lee à présent. Aussi, il fila dans la salle de bain. Cette fois il se passa de l’eau sur le visage. En se relevant, le visage pincé, son poing alla s’enfoncer dans le mur. Il avait complètement déraillé. Depuis la veille, il y avait eu trop de choses et son corps n’avait pas supporté toutes ces émotions. Alors il avait explosé. C’était trop en si peu de temps. Il aurait fallu qu’il ait du temps pour ingurgiter toutes les prises de conscience de la veille mais ça n’avait pas été possible. Et l’annonce de ce matin l’avait cueilli si brutalement que tout en lui s’était mélangé. Casey s’appuya de nouveau sur le lavabo en prenant sa tête dans ses mains. Après quelques secondes pendant lesquelles il s’appliqua à respirer et calmer son rythme cardiaque, il leva les yeux dans un désarroi absolu. Puis, sans qu’il ne pût les empêcher, les larmes montèrent à ses yeux et il finit par éclater en sanglots. Non. Il avait vraiment dit n’importe quoi, là. Il était parti trop loin avec son histoire sur Emrys.
Emily croyait que le Casey qu’elle côtoyait tous les jours n’était plus le même que celui qu’elle avait épousé. En vérité, rien n’avait jusque là changé. Le Casey qu’elle ne connaissait pas, c’était celui-là. Celui de ce matin. Celui qu’elle avait réveillé avec un simple petit mot et qui s’était dévoilé dans une détermination que l’on n’aurait jamais soupçonnée chez lui. Celui-là, c’était l’étranger, l’inconnu. Celui que même Casey ne connaissait pas. Un Casey déterminé et fougueux qui, même dans les cours d’école quand il se laissait aller à son impulsivité et quelques bagarres, n’avait jamais atteint un tel degré d’affirmation. Un Casey qui n’avait pas peur, peut-être. Dans l’excès certes ici. Mais quand même. Un Casey qui vivait. Car depuis quelques mois, il n’était plus qu’un fantôme. Il partait sans rien dire. Passait sa journée. Rentrait en silence. Bien sûr dans les soirées il s’amusait. Mais en vérité… En vérité rien en résonnait avec sincérité en lui. Tout comme la joie d’Emily se fanait, sa malice s’atténuait, ses rires devenaient creux. Lui aussi perdait de sa vitalité. Et il ne s’en était même pas rendu compte, persuadé de profiter de la vie. En vérité, il dépérissait, cela le bouffait.

L’Italien resta quelques instants dans la salle de bain. À pleurer, et à se reposer. Tout cela l’avait complètement vidé. Il n’avait jamais été aussi fatigué de toute sa vie. Au bout d’un moment, il respira plus normalement.
L’étudiant se décida à sortir. Il franchit le pas de la porte, fit quelques pas dans le salon vers Emily, ses yeux encore emplis de larmes. Il s’approcha de sa femme, baissant le regard. Plus aucune colère ne l’animait. Il était calme. Mais tremblait encore – de malaise cette fois.

« Désolé Emily… J’ai fait n’importe quoi… Désolé… » bafouilla-t-il le visage tordu de remords.

Il se mordait les lèvres et ses yeux fuyaient. Il n’osait plus s’approcher d’elle. Il avait peur qu’elle le rejette. Son ventre était noué de stress et sa gorge se serrait d’angoisse. Ses yeux brillaient, embués. Il était comme un enfant pris en faute. Mais son statut d’adulte rendait cela plus terrible encore. Il savait à quel point il avait déconné tout à l’heure. Mais il n’avait rien pu contrôler. Ce n’était pas lui. C’était la peur. Et il espérait qu’Emily le savait aussi, tandis que ses yeux observaient la jeune femme avec un regard de biche effarouchée, les larmes se bousculant au bord de ses paupières pour en sortir. Il faisait tout pour les retenir, sans trop savoir exactement pourquoi il se refusait à pleurer. Peut-être parce qu’il estimait qu’il n’avait pas le droit d’être dans un tel état alors que c’était Emily qui souffrait dans cette histoire.

« Désolé… » hoqueta-t-il alors après cette pensée. « Si… Si tu veux… Si tu veux on divorce… »

Il avait dit cela parce qu’il effrayé. C’était la dernière chose qu’il désirait. Mais après tout ce qu’il venait de faire, il était persuadé qu’Emily voudrait encore plus divorcer et là… Là il ne se sentait pas la force de lui imposer de vivre avec lui si elle ne le voulait pas. Il comprendrait qu’elle ne veuille plus vivre avec lui. Ce pourquoi cette petite phrase était sortie de sa bouche, toute basse, toute faible, emplie d’appréhension et de remords, ses lèvres ne cessant d’être mordillées tout le temps qu’il avait fallu pour que ces mots s’extirpent de sa bouche. Il la regardait avec un air désespéré, indiquant clairement que ce n’était pas ce qu’il voulait. Jamais.

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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyMar 30 Avr 2013 - 23:06

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Qui aurait pu prévoir qu’un simple petit mot aurait pu déclencher une telle scène ? Personne, probablement. Pas Emily en tout cas. Divorce. Sept petites lettres qui avaient plongé son mari dans un état proche de la folie. Voilà plusieurs minutes qu'il allait et venait à travers le salon, répétant inlassablement le "non" comme s’il n’arrivait pas à croire ce qu’elle avait dit. En réalité, elle avait du mal à y croire, elle aussi. Comment avait-elle pu parler de divorce alors que cette idée ne lui avait jamais sérieusement traversé l’esprit ? La fatigue faisait vraiment faire de drôles de trucs... Incapable de dire quoi que ce soit, la jeune serveuse restait immobile à attendre qu'il se calme un peu.

« Non on ne va pas… On ne va pas divorcer Emily ! Non ! Non ! »

Elle sursauta malgré elle, surprise par la vivacité avec laquelle il avait prononcé ces mots. Elle voulut reculer, s'éloigner de lui au maximum, mais elle ne pouvait même pas bouger. Pétrifiée, elle était pétrifiée. Casey semblait sombrer dans la folie sous ses yeux et elle ne savait pas quoi faire pour l'apaiser. C'était elle qui était responsable de ce cataclysme, après tout. Elle n'avait qu'à assumer les conséquences de ses actes (ou de ses paroles, plutôt). Il s’en alla finalement dans la salle de bain, laissant Emily seule et complètement déconcertée. Elle n’aurait su dire combien de temps il était parti. Une minute ? Deux ? Voire plus, même. Elle avait complètement perdu la notion du temps. Elle ne faisait que penser, encore et encore, se demandant comment cette conversation allait se terminer. Divorce, pas divorce ? Dispute ou réconciliation ? Alors qu'elle était en pleine réflexion intérieure, Casey s'approcha d'elle. Elle sentit ses bras l’entourer et ses muscles se figèrent, comme pour se protéger. Elle n’avait tellement pas l’habitude qu’il prenne ce genre d’initiative qu’elle était incapable de répliquer. Elle se contentait de rester là, parfaitement immobile, étonnamment anxieuse, acceptant cette étreinte sans pour autant la lui rendre en retour.

Puis il la lâcha finalement, plantant ses yeux accusateurs dans les siens. Elle fronça doucement les sourcils. Que lui prenait-il encore ? Puis elle comprit lorsqu’il se lança dans un monologue surréaliste sur Emrys et elle. Ébaubie, elle l’écouta sans l’interrompre, de plus en plus apeurée. Ses yeux étaient emplis d’une lueur folle et son discours, de plus en plus incohérent, s’intensifiait au fil des secondes jusqu’à ce qu’il termine en hurlant, poing serré et mine fermée. Et avant qu’elle ne puisse réagir, il prit une nouvelle fois ses jambes à son cou et se dirigea dans la salle de bain. C’était officiel : son mari débloquait complètement. Il était intimement persuadé qu’il y avait quelque chose entre son collègue et elle. Quelle connerie ! Emrys était un jeune homme séduisant et très gentil, certes, mais il n’en était pas pour autant un dragueur invétéré. D’ailleurs, il n’avait jamais eu le moindre geste déplacé à son égard. Ils étaient amis, simplement amis. Et si la jeune Emily n'avait pas toujours été insensible à ses charmes, elle pouvait assurer que c'était de l'histoire ancienne. Un petit coup de cœur passager, un émoi sans réelle importance, de ceux qu'ont les adolescentes lorsqu'elles entrent en âge d'apprivoiser l'amour et toutes les émotions qui en découlent.

Quand Casey revint une nouvelle fois près d'elle, elle l'observa d’un air inquiet sans rien oser dire. Elle avait bien évidemment remarqué ses yeux embués de larmes. Il avait pleuré par sa faute. Elle détourna le regard une seconde, mal à l’aise de le voir si vulnérable. Il pleurait à cause d’elle et elle ne pouvait pas se résoudre à dire que c’était mérité. Il avait clairement dépassé les bornes, oui, mais elle ne voulait pas lui faire de mal. Elle tenait bien trop à lui pour supporter le voir souffrir à ce point là.

« Désolé Emily… J’ai fait n’importe quoi… Désolé… »

Elle hocha légèrement la tête pour approuver ses dires. Oui, il avait fait n’importe quoi. Il s’était laissé aller à des délires paranoïaques plus qu’inquiétants, se laissant submerger par ce manque de confiance en soi qui le caractérisait depuis toujours.

« Casey, tu es conscient que ce que tu dis est ridicule ? Il n’y a rien entre Emrys et moi. Il n’y a jamais rien eu et il n’y aura jamais rien. »

Elle soupira doucement, complètement épuisée par tout cela. Et dire que la journée ne faisait que commencer… Après ce début de matinée riche en émotions, elle allait devoir se rendre au Café comme tous les jours et arborer son plus beau sourire pour satisfaire la tonne de clients exigeants qui se presserait jusqu’à la tombée de la nuit. Bonne journée en perspective.

« Emrys est un mec bien et il plutôt beau garçon, oui. Mais il a Pandore. Et moi, je t’ai toi. Et malgré tout ce qu’il peut se passer entre nous, je n’ai aucune intention d’aller voir ailleurs. »

Elle marqua une pause, cherchant les bons mots pour lui enlever cette idée saugrenue de la tête. Elle ne savait pas pourquoi il s'inventait des histoires pareilles mais elle tenait à lui prouver qu'il avait tort.

« Faut que tu arrêtes de croire que tu es nul, Casey. Tu es tout sauf ça. T’es un mec génial, si seulement tu pouvais t’entrer ça dans le crâne ! Je sais que c’est plus facile à dire qu’à faire, mais il ne faut plus que tu penses à tout ça. Le lycée et tout le reste… C’est du passé. Je suis de ton côté, tu sais. Je suis là et j'ai aucune intention de partir avec quelqu'un d'autre. C'est avec toi que je me suis mariée, Casey. C'est pas anodin. Ça veut dire que moi, je crois en toi. Et que je t'aime suffisamment pour avoir envie de finir mes jours à tes côtés. »

Elle avait dit tout cela sans le quitter des yeux, ce qui n’était pas arrivé depuis… Depuis une éternité. Mais elle tenait vraiment à le rassurer, à lui montrer qu’elle l’aimait sincèrement et que quoi qu’il en pense, elle n’avait aucunement l’intention de partir pour Emrys. Ni même pour quelqu’un d’autre. Elle n'était pas vraiment à l'aise avec les grandes déclarations (personne ne lui avait appris comment faire puisqu'elle avait grandi avec une mère neurasthénique à la capacité émotionnelle d'une petite cuillère) mais il y avait des moments où on ne pouvait y échapper. Et celui-ci en faisait partie. S'il fallait qu'elle se livre entièrement pour montrer à son mari qu'elle l'aimait pour ce qu'il était et qu'elle n'avait pas envie de le laisser tomber, alors elle le ferait.

« Si… Si tu veux… Si tu veux on divorce… »

Elle soupira doucement avant de lui faire un petit sourire. Comment pouvait-elle encore parler de divorce alors qu’il était là, devant elle, les yeux plein de larmes et l’air complètement perdu ? De toute façon, cette proposition n’était pas sérieuse. Elle n’avait jamais eu envie de divorcer. Elle avait simplement cherché un moyen de le faire réagir – et cela avait marché au-delà de ses espérances.

« Viens là. »

Sans lui laisser le temps de répondre quoi que ce soit, elle l’attira à elle pour le serrer dans ses bras. Son étreinte était maladroite mais elle était sincère. Elle ferma doucement les yeux, heureuse d’avoir pu faire tomber l’une des barrières qui se dressaient entre eux. Cela faisait des mois qu’elle n’avait pas osé l’approcher et le sentir contre elle lui faisait du bien. C'était idiot mais son odeur lui avait manqué.

« J’ai aucune envie de te laisser. Ni maintenant, ni jamais. Tu as bien trop besoin de moi, de toute façon. Tu serais complètement perdue sans ta magnifique femme ! », plaisanta-t-elle pour essayer de détendre l’atmosphère tout en le gardant contre elle.

Elle le serra une nouvelle fois dans ses bras avant de relâcher son étreinte pour de bon, lui adressant un petit sourire. Elle était un peu gênée - comme d’habitude – mais pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait soulagée. Elle avait l’impression que cette matinée marquait le début d’un nouveau chapitre, un nouveau départ qui les conduirait vers une nouvelle vie. Une vie où ils parviendraient à se rapprocher et à reprendre leur relation là où ils l’avaient laissée avant de se marier, quand le poids de l’engagement et des responsabilités ne pesait pas encore sur leur couple.



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MessageSujet: Re: #122 Home, sweet home.   #122 Home, sweet home. EmptyJeu 2 Mai 2013 - 1:08

Lee & Casey
(Disputes du soir, bonsoir.)



Il n’y a jamais rien eu et il n’y aura jamais rien. Pas tout à fait sorti de sa crise de panique, cette phrase le rassura cependant. Et oui, oui bien sûr, il avait été un monstre de ridicule. Il s’était un film totalement givré, qui n’aurait même pas été valable pour Hollywood. Mais il avait la meilleure femme du monde et cela, il allait vite le comprendre.

Petit à petit ses mots agissaient sur le jeune homme et lentement toutes les émotions qui le submergeaient s’envolaient de sa poitrine. Il reprenait une conscience normale des choses et redevenait plus tempéré. Et ce qui l’aida plus que tout, ce furent ces paroles : « Ça veut dire que moi, je crois en toi. Et que je t'aime suffisamment pour avoir envie de finir mes jours à tes côtés. » De qui avait-il peur si Emily était là avec lui ? Si elle, elle croyait en lui ? De qui osait-il encore avoir peur ? Comment pouvait-il se préoccuper des pensées des autres alors qu’il avait Emily ? Il était irrécupérable. Vraiment il était irrécupérable. Plus tard il irait se taper la tête contre un mur deux-trois fois pour bien réaliser qu’il était un abruti. Un abruti oui. Abruti d’amour aussi, malgré tout. Si abruti qu’il en avait perdu sa cervelle, sa conscience, son esprit. Elle croyait en lui. C’était suffisant. Il aurait dû le comprendre plus tôt ! Par tous les dieux existants et inexistants… Quel idiot.
Il se sentit plus léger et un petit sourire mêlé à un rire bref résonna dans la pièce – bulle de cristal qui éclate. Et pour une fois, le fait de regarder Lily dans les yeux ne le gêna pas. Il n’essaya pas de dévier son regard, c’était une conversation normale – enfin aussi normale qu’elle puisse l’être après tout ce qui s’était passé.

Alors qu’il avait parlé de divorce dans un élan désespéré – de stupidité oui ! mais cachons-lui son pathétique – Emily le prit dans ses bras. Elle ne le rejetait pas. Elle ne lui en voulait pas. Elle ne voulait pas divorcer ! Il sourit. Casey répondit à son étreinte et eut un éclat de rire à sa réplique. Le pire c’est… Qu’elle disait vrai. Vu ce qu’il venait de se passer, elle disait vrai. Même s’ils n’étaient plus proches depuis quelques temps, sa vie aurait été bien vide sans Emily et il aurait peut-être fait bien plus n’importe quoi que ce qu’il faisait déjà.

« Oh mais oui ! Tu imagines… Si tu n’étais pas là, je m’habillerais n’importe comment ! » dit-il avec le même air qu’elle, cherchant aussi à détendre l’atmosphère.

D’ailleurs ce qu’il venait de dire n’était pas faux. Julie avait déjà fait un grand travail depuis le collège pour habiller le petit Kennington mais l’avis d’Emily avait énormément contribué à… L’acquisition de la notion de style pour Casey.

Elle lâcha son étreinte et eut un sourire gêné qui attendrit le jeune homme. Lui aussi se sentait soulagé. Plus léger. Il n’était pas sûr de pouvoir affronter cette journée car cette matinée l’avait crevé pour la semaine mais au moins, un poids avait disparu – du moins, s’était atténué. Il offrit à sa femme un sourire sincère et la pressa contre lui pendant quelques temps, minutes délicieuses auxquelles il avait coupé court depuis des mois… Mais quelle idée ?
Enfin il la relâcha, son visage près du sien, et son regard, cette fois, fixé dans le sien. Tout en défaisant son étreinte, il passa sa main près de sa joue, entre ses cheveux, son visage encore éclairé d’un sourire franc.

« Je crois que… Tu vas être en retard au travail par ma faute. » énonça-t-il avec un petit sourire.

Oui. Oui, vu le résultat… Il était plutôt content qu’elle soit en retard par sa faute. Ses yeux noirs scrutaient Emily et, ce matin, il retrouvait enfin sa malice d’antan.
En plus… En plus Emrys verrait Emily de bonne humeur grâce à lui ! Bingo !




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