Ne pas oser, c'est un peu comme regarder votre train partir sans vous | DONORIA

Invité

D'un battement de cil, Victoria balaya la pièce du regard. L'évènement du soir donnait lieu à un apéritif dinatoire organisé par le comité d'entente de la ville. Une raison de réunir les membres de la famille Parrish et de la famille Emery qui étaient membres du comité. Ils avaient cette grande fierté d'avoir réuni Victoria et Donovan : le couple it des quartiers dorés de Bowen.

Tous ces visages, braqués sur elle. Sur eux. Les Emery affichaient leurs alliances sur leurs mains amoureusement entremêlés. Sa cravate avait la couleur assortie à sa robe d'un bleu pervenche. Ils brillaient. Victoria, elle, avait pour apparence de baigner dans le bonheur. Elle souriait, caressait ses cheveux à chaque compliment, susurrait des mots doux à son époux. Au fond, elle hurlait d'une dépression nerveuse.

Malgré ce que l'on pouvait croire, son couple franchissait des obstacles dignes des jeux olympiques. Mais Victoria n'a jamais été une grande athlète, cette intellectuelle au cœur gros préférait enfouir ses émotions. Une façon de agir que son mari Donovan n'appréciait pas. Il détestait les « fausses couvertures ». D'ailleurs pour l'amener jusqu'ici elle l'avait préparé psychologiquement en assurant que cela lui remonterait le moral. En même temps, étant la boss de l'événementiel marital, elle se devait de montrer que son propre mariage fonctionnait bien.

Toutefois, comme on dit les apparences sont souvent trompeuses. Depuis peu, Don était devenu papa. Cette situation bouleversait Victoria. D'une part parce qu'elle ne pouvait pas avoir d'enfant, d'une autre part parce que cela rapprochait Don d'Amber. Amber, cette femme qui avait crucifié ses rêves de former une vraie famille. Amber, la briseuse de couple. Amber, c'était notamment la tentatrice. C'est pourquoi Victoria suivait cette affaire de très loin. Secrètement elle avait engagé un détective privé afin de suivre Donovan lors de ses visites. N'ayant aucunement confiance à sa rivale, elle épiait ses gestes, à défaut de la voir.

Victoria & Donovan

 DESIGN BY PIXIE

Une cravate trop serrée sur sa chemise d’un blanc immaculé, On pourrait croire que Donovan était en rendez-vous d’affaire, pourtant la noblesse de l’étoffe, ne manquait pas de rappeler qu’il ne portant pas ce genre de costume au travail, non, ce soir il dînait en haute société. Il paraissait parfaitement a l’aise, fendant la foule avec classe, sa magnifique femme à son bras, on voyait que le jeune homme avait l’habitude de ces soirées. Pourtant il était loin d’être à son aise, en vérité il avait horreur de ça, il jouait simplement un rôle, rôle qu’il avait appris bien jeune, obligé d’assister à ce genre d’événement dès son plus jeune âge par ses parents, il donnait donc parfaitement le change, distribuant sourires et poignées de mains, presque aussi bien qu’un politicien, de façon tout aussi hypocrite dans tous les cas.
Mais en ayant épousé mademoiselle Parrish, Donovan savait qu’il serait obligé de tenir ce rôle encore longtemps, jusqu’à la fin de ses jours probablement, tel était son destin, il avait pensé y échapper en s’émancipant de ses parents, mais dans les bras de sa belle, il ne pouvait rien lui refuser. Surtout par les temps qui courraient, leur couple était fragile, il la savait d’autant plus vulnérable alors tout ce qui pourrait lui faire plaisir, lui changer les idées, paraissait être une bonne idée, même cette satanée soirée. Notre homme n’était pas non plus idiot, il se doutait bien qu’elle jouait de la situation pour le faire venir, mais il se laissait faire volontiers, après tout, il avait bien fait des jumeaux à une autre, alors il pouvait bien souffrir ce soir en serrant les dents, ça ne fait pas si mal que ça. Et puis, la vue de Victoria, dans cette robe d’un bleu qui lui allait à merveille, ravissait tellement Donovan qu’il lui cèderait tout, rien que pour la voir se mouvoir et avoir ensuite le plaisir de lui retirer le vêtement…
Pour tous les invités ce soir, les voir ensemble ce soir était un ravissement, ils étaient si parfaitement assortis, Donovan voyait les yeux d’autres hommes envieux couler sur les formes de Victoria, il leur aurait bien mis son poing dans la figure, il voyait aussi les femmes les regarder du coin de l’œil, à l’affut du moindre faux pas qui les ferait descendre de leur piédestal. Mais rien ne les déstabilisait.

« Je vais nous chercher un verre ? Champagne ? » Il avait bien besoin de ça pour se détendre un peu, il aurait même eu besoin d'une bonne dose de nicotine, mais il savait Victoria hostile à son addiction, il attendrait donc un peu pour s'esquiver sans qu'elle ne le remarque trop.

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"Is that alright ?"

Maybe it's time to let the old ways die. It takes a lot to change a man, it takes a lot to change your plans. And a train to change your mind.

Invité

Les poupées de salon n’avaient qu’à bien se tenir, car le couple brisé à mille reprises, s’aimait tout de même plus que tout. Et ce n’est qu’en jetant un bref regard vers Donovan que Victoria était persuadé qu’il représentait avec classe la gente masculine, son idéal, son rêve à l’eau de rose. Il n’y avait pas plus bel homme que lui, bien qu’on puisse penser à un avis subjectif. Autour d’elle, elle entendait rire le gratin doré de Bowen. Elle se demandait si ils riaient d’elle, s’ils savaient qu’en réalité elle s’engouffrait dans une mélancolie qui ne voulait se guérir.

Un grand et faux sourire s’élargit sur son visage. Donovan lui avait proposé une coupe de champagne. « Oui, merci mon cœur. » son remerciement s’accompagna d’une caresse sur le bras et d’un léger baiser. Dès qu’il tourna les talons pour chercher un serveur, elle bailla discrètement car en effet elle manquait atrocement de sommeil. Ces dernières nuits furent affreuses, si affreuses qu’elle aurait voulu clouer la porte de la salle de bain et s’emprisonner. Vous vous demandez quel était ce mal dont elle s’empêchait d’exprimer ? Il s’agissait d’un tout et malheureux bordel dans sa vie. Entre autres choses il y avait : apprendre qu’elle n’aurait jamais d’enfant, devoir vivre avec la perspective que son mari a deux enfants avec une autre femme, le voir s’éloigner et combattre sa peur de le perdre définitivement.

C’était étrange cette sensation, comme si elle devait faire du bouche-à-bouche pour sauver leur mariage. En dépit de tout, elle préférait vivre dans le mensonge que s’imaginer une seule seconde de le perdre. Tout en fermant les yeux sur toutes les questions qu’elle se posait, elle s’éteignait à petit feu. Elle avait beau tenter d’ignorer ses interrogations, rien ne facilitait la cicatrisation de ce mal. Au fond, tout ce qu’elle voulait, c’était de pouvoir refaire confiance à Don. Mais Victoria craignait qu’Amber lui prenne Don, pire encore qu’il choisisse de vivre à ses côtés.

Perdue dans ses pensées, ce fut la voix de Don qui l’interpella qui la réveilla de ses songes. Elle prit sa coupe des mains et le regarda longuement. « Je sais que tu en as déjà marre d’être ici. » lui dit-elle à voix basse, pour que seul lui puisse l’entendre. Elle continua de le fixer durant un certain temps. « Je veux bien que t’ailles fumer une clope si tu me laisses tirer dessus. » bien entendu elle s’attendait à sa surprise, car elle détestait l’odeur du tabac. Mais Victoria était retombé dans cette addiction très récemment… peut-être même au même moment que la reprise de Don.

Victoria & Donovan

 DESIGN BY PIXIE

Donovan voulait se diriger jusqu’au bar, près de la sortie, comme pour pouvoir respirer une bouffé d’air frais, il étouffait déjà dans cette atmosphère hypocrite et superficielle. On voyant des hommes et des femmes se tourner autour, se jauger, se sourire pour mieux se critiquer par derrière, voilà le monde dans lequel la famille Emery avait évolué toute sa vie, dans laquelle ses parents se complaisent et qui semble presque nécessaire à Victoria aussi. Il n’y avait qu’à regarder la façon dont elle se mouvait, gracieuse, rayonnante, on aurait dit une ballerine en pleine représentation. Elle semblait si heureuse ce soir, c’est ce qui surprenait le plus Donovan. Parce que ces derniers jours il l’avait à peine vu sourire, ou timidement, comme s’excusant d’exister dans la vie de son homme. Il avait mille fois eu envie de crier, de la secouer, de claquer les portes pour la faire réagir, pour lui dire qu'elle n'était pas faite que pour faire des gosses, et que tant pis si elle ne pouvait pas en avoir, ça ne changeait rien à sa personne, ou bien de la prendre par la taille avec fougue, de la jeter sur le lit et lui faire l’amour avec force encore et encore pour lui prouver à quel point il l’aimait, il avait envie d’elle, de son corps mais aussi d’elle dans sa vie, comme une femme aimante devait l’être, présente, vivante. Elle semblait éteinte, comme morte de l’intérieur ce qui détruisait Donovan aussi. Il se savait responsable de ce désastre et ça le bouffait d’autant plus.
Pourtant ce soir personne ne pouvait se douter de la souffrance de la jeune madame Emery, elle donnait si bien le change, c’est étrange comme elle pouvait prendre une toute autre attitude, Donovan lui aurait donné l’Oscar sans l’ombre d’une hésitation, il lui en voulait presque de ne pas jouer la comédie en sa présence à lui, simplement pour la voir sourire encore au réveil…
Finalement il n’eut pas à atteindre le bar, un serveur s’était planté juste devant lui, lui proposant un verre, il aurait été déplacé de refuser. C’est donc à regret et non sans un regard attristé vers la sortie que Don attrapa deux coupes de champagne et retourna auprès de sa belle. Elle semblait absorbée par une conversation mais c’est lorsqu’il l’interpella « Tu as vu le professeur Storm fait partie de la fête, ça fait tellement… » Qu’il comprit qu’elle n’avait pas remarqué sa présence, elle n’écoutait rien, elle avait les yeux dans le vide, un demi sourire sur les lèvres. Il toussa, lui caressa doucement l’épaule comme pour la réveiller et c’est alors qu’elle sembla réagir. Il lui sourit tendrement tout en se demandant où son esprit pouvait bien divaguer, il lui tendit sa coupe. Elle finit par lui confier qu’elle savait qu’il en avait marre d’être là, Donovan eut envie de nier, de lui dire que tout allait bien, mais elle ne le laissa pas prendre la parole, lui proposant plutôt de partager une cigarette. Soufflé, Emery en resta bouche-bé, il savait qu’elle avait eu une courte période à fumer, plus pour faire comme les autre que par réel intérêt ou addiction pour la nicotine, mais il savait surtout à quel point elle se montrait contre depuis, le réprimandant régulièrement, n’attendant qu’une chose, qu’il arrête, il ne comprenait donc pas son comportement… Et même s’il en fut amusé, il sentit une sorte de coup dans sa poitrine, comme une sirène d’alarme, comme si quelque chose de mal se tramait. « Tu… t’es sure Vick’ ? » Question stupide s’il en est, mais quoi répondre d’autre à une telle proposition sortie de nulle part ! Pourtant à voir la détermination dans le regard de sa femme, comme une invitation à relever le défi, Donovan n’eut pas le cœur à refuser, après tout il la connaissait bien, Victoria était pleinement consciente de ce qu’elle faisait et puis une clope n’allait pas la tuer, la vie lui refusait déjà tant… « Ok, on sort ? » Il la prit par la main, complice.

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"Is that alright ?"

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