Dont let me down / Jim & Cam

Comme chaque semaine, Jim était venu faire sa petite visite de contrôle à l'hôpital. Comme chaque semaine, le constat avait été le même. Pas vraiment de progrès. Son état ne s'empirait pas. Ca ne tracassait pas forcément l'homme. Et l'avis du médecin restait ce qu'il était. Avec un peu de temps, de bonne volonté, et une aide au quotidien, Jim pourrait peut-être retrouver un niveau intellectuel correct. Tenir un semblant de conversation semblait déjà relever du miracle. Jim comprenait quand on lui parlait. Jim savait plus ou moins se faire comprendre. Mais grossièrement cela s'arrêtait là. Il était difficile pour lui de parler pendant longtemps avec un même interlocuteur. Soit parce qu'il s'énervait car il ne trouvait pas ses mots. Dès lors il n'arrivait presque plus à en placer une et à se faire comprendre. Soit parce que la personne se lassait. Discuter avec un « simplet » n'est pas vraiment une partie de plaisir. Les quiproquos étaient bien plus courant que du temps où l'homme était « intelligent ». Jim pensait à quelque chose. Il essayait d'en faire part. Ne pouvant s'exprimer comme il le souhaitait, il était parfois obligé d'employer d'autres mots. Son idée de départ pouvait alors ne plus trop coller avec les mots qui sortaient de sa bouche. Il s’exaspérait souvent tout seul dans ces cas là. Répétant à la personne. « Jim … Bête ... ». Ce qui pouvait avoir un petit côté comique. Mais souvent, cela apportait son lot de pitié et d'apitoiement. Des ressentis que Jim ne parvenait pas souvent à déceler.

Il déambulait dans les couloirs de la clinique. Il n'avait pas trop prévu de s'attarder aujourd'hui. Il était d'humeur joyeuse, comme tous les jours. Il affichait un petit sourire nigaud et faisait des signes de têtes aux personnes qu'il croisait. Il prenait parfois un petit air un peu plus sérieux et dans ces moments là, personne ne pouvait penser que Jim avait été victime d'un accident et qu'il était devenu un « attardé ». Il n'avait peut-être plus toutes les connections d'établies au cerveau mais il en avait suffisamment pour ne pas se perdre dans le dédale que pouvait représenter l'hôpital. Il était somme toute assez proche de la sortie quand il remarqua une demoiselle plantée au beau milieu d'un couloir. La tête dans les mains. Ses épaules semblaient se soulever et s'abaisser doucement. Comme si elle était en train de pleurer. Jim s'approcha lorsqu'il entendit un sanglot. Il détestait voir les gens tristes. Cette jeune femme devait sans doute avoir appris une mauvaise nouvelle. Une mauvaise nouvelle la concernant elle ou concernant un proche. Arrivé à ses côtés, il posa une main sur son épaule. Personne ne lui était – semble-t-il – venu en aide. Quand Jim se sentait assez mal, il aimait avoir une personne à qui faire part de son mal être. Il laissa descendre sa main sur le bras de cette demoiselle et le caressa doucement du pouce. Il attendit qu'elle le regarde pour oser parler. Il sourit alors timidement. Euh … Bonjour … Il pointa son propre torse de l'index. Jim … Il sortit ensuite un paquet de mouchoir de sa poche, l'ouvrit, et tendit un mouchoir en papier. Mouchoir … ? La démarche était sans doute un peu maladroite mais elle avait le mérite d'être sincère. Jusque là, Jim s'était limité à ces quelques mots. Il n'allait pas lui demander comment elle allait. Il voyait bien qu'elle était triste. Il ne lui fit pas encore part de sa condition. La jeune femme n'avait pas besoin de ça pour le moment … Il espérait du fond du cœur pouvoir la réconforter. Ne serait-ce que par sa présence. Parce que les mots … Il n'était pas doué avec les mots.

La demoiselle releva la tête vers Jim. Leur regard se croisèrent. Celui de Jim exprimait la bienveillance. La sympathie. Celui de la demoiselle exprimait la tristesse profonde. Jim eut un gros pincement au cœur. Il aurait voulu savoir quoi dire. Il aurait voulu redevenir l'ancien lui l'espace de cinq minutes. Faire quelques phrases et tenter d'apaiser la peine de la jeune femme. Mais le passé ne pouvait être changé. L'accident a été. L'accident restera. Et si accident il n'y avait pas eu, Jim ne serait pas à Bowen en ce moment. Il ne serait pas aux côtés de cette femme, une main caressant son bras. Et cette femme serait sans doute encore en train de pleurer seule. Si les bons moments devaient être partagés avec d'autres, les mauvais encore plus. Et si Jim pouvait un soupçon pester contre lui-même, il fut content d'être là. Aujourd'hui. Maintenant.

Camilla. C'était le nom de la jeune femme. Un prénom et un visage qui s'inscrivirent au marqueur indélébile dans la tête de Jim. S'il était amené à revoir la demoiselle dans un futur – aussi lointain soit-il – il se rappellerait de qui elle est. Il se rappellerait aussi sans doute leur rencontre. Elle accepta le mouchoir et le jeune homme replaça le paquet dans sa poche. La pseudo tentative de réconfort ne fonctionna guère comme Jim l'aurait souhaité. S'il était aussi facile de consoler  une personne … Camilla sanglota. Alors le jeune homme s'approcha un peu plus d'elle. La larme à l’œil, il l'entoura de ses bras et la pressa délicatement contre lui. Il lui caressa timidement le dos. Après tout il ne la connaissait pas. Il envahissait peut-être son espace personnel. Il la mettait peut-être mal à l'aise par ce geste. Mais sur le coup, il se dit que c'était la seule chose à faire. Comment aurait-il pu réconforter Camilla autrement que par un geste affectif ? Il murmura alors à l'oreille de la demoiselle. Bien … Pleurer … Bien … Il n'avait pas correctement exprimé le fond de sa pensée. Avec un tant soit peu de réflexion et un peu de bon sens, c'était compréhensible. Mais « Ne retiens pas tes larmes » aurait été une phrase qu'il aurait souhaité prononcer. Alors il s'excusa d'être si peu doué avec les mots. Toujours en murmurant à voix basse. Pardon … Jim … Difficile … Parler … Jim … Accident … Tomber … Escalier …

Il se sentit très bête. La jeune femme n'avait pas besoin d'entendre ses problèmes à lui. Elle en avait déjà suffisamment en ce moment même. Alors il reprit timidement ses dires précédents. Camilla … Pleurer … Bien … Pleurer … Pasgrave … Vider … Larmes … Et dans un dernier murmure il répéta. Bien … Il serra un tout petit peu plus la demoiselle. Il avait été totalement nul. Ses semblants de paroles étaient … grotesques. Il essaya d'en faire abstraction. Il essaya de devenir une éponge empathique pour absorber tout le chagrin dont regorgeait la femme. Il s'était positionné de sorte que la tête de Camilla lui arrive sur le torse. La jeune femme pouvant ainsi enfouir sa tête et vider ses larmes. Elle tacherait peut-être son t-shirt mais c'était bien le dernier des soucis de Jim. Sa main remonta le long de l'échine de la demoiselle. Il en vint à doucement masser sa nuque et il déposa un petit baiser sur l'épaule de Camilla. En silence. C'était parfois mieux le silence …

Jim faisait du mieux qu'il pouvait. Mais ça ne semblait pas suffisant. Rien ni personne ne pouvait remonter le moral de Camilla. Et c'était bien normal. La demoiselle releva lentement la tête et plongea son regard dans celui de Jim. Les prunelles de la jeune femme, d'abord remplis de gratitude, s'emplirent peu à peu de larmes. Jim sentit lui aussi ses yeux devenir humides. Il essaya de lui offrir un petit sourire mais n'y parvint pas vraiment. Alors il cajola doucement la demoiselle. Elle refondit en larmes et c'est à ce moment là qu'elle lui révéla le pourquoi de son chagrin. Il s'agissait de sa mère. Elle était mourante. Un cancer. Une saloperie de maladie. Il n'en sut pas beaucoup plus. Combien de temps lui restait-elle à vivre ? Quel cancer ? Si son père était toujours en vie et en bonne santé. Si Camilla allait traverser cette terrible épreuve seule. Des dizaines de questions fusaient dans sa tête. Jim n'allait évidemment en poser aucune. Même s'il souhaitait avoir la réponse à au moins l'une d'entre elles. Camilla avait-elle une quelconque personne dans sa vie, un ami, un frère, une sœur, un homme, qui lui apporterait du soutien ? Et si non, il s'imaginait déjà devenir cette personne. Quelle pensée absurde. Comment pouvait-on venir demander du réconfort à quelqu'un comme lui. Quelqu'un qui n'arrivait pas à aligner trois mots. Quelqu'un qui, à première vue, ne semblait pas être en mesure de véritablement comprendre. Il fit abstraction de tout cela et continua de doucement serrer Camilla contre lui.

Si l'ancien Jim aurait probablement su quoi dire, le nouveau avait du mal. Beaucoup de mal. Il avait bien quelques mots et quelques idées en tête. Mais il était à peu près sûr qu'il ne parviendrait pas à retranscrire ses pensées en parole. Il avait peur d'un quiproquo. Peur que la jeune femme lui hurle dessus en le traitant d'imbécile. Mais au bout de quelques secondes, il se décida tout de même. Il ferma les yeux et murmura tout aussi doucement que précédemment. Jim … Désolé … Camilla … Profiter … Maximum … Il marqua un petit temps d'arrêt pour montrer qu'il commençait une nouvelle phrase. Maman … Pas vouloir … Camilla … Triste … Nouveau petit temps d'arrêt Si … Maman … Souffrir … Beaucoup beaucoup … Partir … Mieux … Il caressa tendrement l'épaule de la demoiselle. Jim … Désolé … Il était désolé de ne pas pouvoir s'exprimer correctement. Mais il évita de le lui rappeler. Il n'était pas question de lui en ce moment. Il était surtout désolé pour la mère de Camilla. Il ne savait guère son âge mais elle ne devait pas être si veille. Elle ne méritait pas de partir si tôt. Il rouvrit les yeux. Ils étaient toujours au beau milieu de ce couloir. Alors le jeune homme demanda à la demoiselle si elle ne voulait pas aller prendre un peu l'air. Essaya de demander du moins. Camilla … Vouloir … Sortir ? … Respirer … Dehors … Mieux … Hôpital … Il ôta ses bras du dos de Camilla, se recula doucement mais garda tout de même une main sur son bras, juste en dessous de son épaule. Il chercha à plonger son regard dans celui de la femme qu'il essayait de consoler. Un léger sourire affectueux mais non sans moins de tristesse. S'il avait du mal avec les mots, les intentions du jeune homme étaient sincères et louables. Camilla le comprendrait sans doute mieux avec des gestes plutôt qu'avec des paroles. Du moins c'est ce qu'il espérait.

Le jeune homme semblait avoir apporté suffisamment de réconfort à la demoiselle pour que celle-ci cesse de verser des larmes. Ils échangèrent un bref regard et Jim perçut de la reconnaissance dans les yeux de Camilla. Un léger regain de détermination également. La profonde tristesse avait laissé place à quelque chose de moins grave. Le jeune homme lui sourit quelque peu. Si l'expression de la demoiselle semblait vouloir dire « merci », celle du jeune homme s'apparentait tout naturellement à un « de rien ». Et sans aucun mot, ils se dirigèrent vers la sortie. Parfois, les gestes, les regards, pesaient bien plus que certaines paroles. Camilla n'avait pas besoin de remercier verbalement Jim. Parce que ses prunelles venaient déjà de le faire.

Elle lui proposa ensuite une cigarette. Il balança la tête de droite à gauche en signe de négation. Puis un chocolat chaud. C'était bien mieux. Alors il hocha vivement du chef. Non non … Jim … Fumer … Avant … Jim … Arrêter … Pas bon … Cigarette … C ... Il s'était adressé à Camilla en la regardant. Il avait terminé sa phrase un peu en suspens. Il avait voulu ajouté un mot. Un seul. « Cancer ». Mais aussi bête qu'il pouvait l'être, son cerveau se retint de lâcher le mot. Il avait clairement eut l'air imbécile à ne pas continuer sa phrase mais mieux valait cela que de remuer le couteau dans la plaie de Camilla. Il ne souhaitait pas lui faire de la peine. Il venait de la consoler, elle semblait se remettre quelque peu de ses émotions. Jim ne voulait pas être la cause d'un nouveau malheur. Après deux secondes de malaise, il reprit. Jim … Arrêter … Boire … Aussi … Pas bon … Alcool … Cerveau … Ca n'avait pas grand-chose avec ce qu'il venait de dire mais c’était simplement dans le but de continuer la discussion. Chocolat … Chaud … Ouuuiii ! … Ou … Mi-lk sha-ke Il avait beaucoup de mal avec ce mot et épelait chaque syllabe avec difficulté. Jim … Inviter … Camilla ! … Si si … Plaisir … Jim … Il aurait été bien malotru de ne pas payer la boisson de la demoiselle. Il avait une nouvelle fois fortement acquiescé de la tête. Signe qu'il était content de la proposition de Camilla mais qu'il souhaitait surtout payer lui-même l'addition. Si l'homme n'était pas des plus intelligent, il n'en oubliait pas moins la galanterie.

Jim ne sut si la jeune femme souhaitait rester aux environs de l'hôpital ou s'ils pouvaient aller boire ce fameux chocolat dans un petit coin bien sympa à quelques minutes de marche. Euuh … Chocolat … Chaud … Hôpital … Ou … Ville ? … Jim … Aimer … Beaucoup beaucoup … Chocolat … C’était sans doute le seul petit péché mignon du jeune homme. Jim … Gourmand ! … Il regarda Camilla non sans une petit lueur dans les yeux et un grand sourire sur les lèvres. Il espérait pouvoir faire sourire la demoiselle ne serait-ce qu'à moitié. Lui faire oublier la maladie de sa mère l'espace de quelques minutes.

Jim était ravi de pouvoir payer un bon petit chocolat chaud à Camilla. Et puis franchement, il n'était pas à quelques dollars près. Le geste, l'invitation, du jeune homme ne semblait pas avoir eu l'effet escompté. Camilla allant même jusqu'à être vexée ? C'était ce que semblait indiquer ses sourcils. Néanmoins, Jim insista quelque peu. Ce qui fit rougir la demoiselle. Lui même se sentit également un peu gêné. La jeune femme croyait-elle qu'il la prenait en pitié ? C'eut été fort triste de sa part de penser de la sorte. Jim savait très ce qu'était la pitié et l'apitoiement. Lui même avait croisé et croisait toujours certaines personnes qui le regardait avec un apitoiement bien trop appuyé à son goût. « Pauvre Jim » lui avait-on dit. Il n'aimait pas vraiment ça et préférait être considéré comme quelqu'un de « normal ». Même s'il ne l'était plus vraiment. Alors non il n'avait pas pitié de Camilla et de sa situation. Il montrait juste par cette petite invitation toute sa générosité. Elle l'en remercia tout de même. Avec des joues incroyablement rouges. L'australien posa alors la main sur son épaule, lui fit un sourire naturel et sincère. Non … Etre … Normal … Il hocha doucement la tête en fermant les yeux.

Il hésita sur la direction à prendre. Il posa la question à la demoiselle qui lui répondit que cafét, ou machine à l'accueil, c'était comme il le souhaitait. Jim opta bien entendu pour le réfectoire de l'hôpital. Ce serait bien mieux. Cafét ! … Cafet … Meilleur … …. Plus … Confortable … … Moins … Personne … Passer … … Plus … Calme … Il se voyait mal s'asseoir sur les chaises de l'accueil au milieu de personnes qui attendaient. L'endroit n'était pas du tout prévu pour prendre un café ou un chocolat chaud. Et les boissons étaient légèrement meilleures à la cafétéria qu'à la machine. Il proposa son bras à Camilla pour qu'elle y passe le sien et ils marcheraient cote à cote pour rejoindre leur destination. Une manière de lui signaler que même s'ils ne se connaissaient pas, il pouvait être là pour elle. Ils marchèrent alors tranquillement. Camilla … Frères … Sœurs ? Il fallait bien parler de quelque chose. Jim enchaîna presque immédiatement. Pour demander à la jeune femme ce qu'elle préférait. Discussion … Pas déranger … Camilla ? … Ou Camilla … Vouloir … Silence ? Il pouvait très bien rester sans mot dire pendant des minutes si c'était ce qu'elle souhaitait. Parfois il appréciait énormément le silence, le calme. C'était apaisant. Mais à choisir, ce jour là, avec Camilla, il préférait parler. La demoiselle allait sans doute ressasser de mauvaises choses sinon.

Le jeune homme semblait avoir touché la demoiselle. Le geste aussi simple que de proposer son bras pour qu'elle s'y accroche, avait ravi la jeune femme. Elle le regarda avec une lueur dans les yeux. Deux prunelles disant merci au jeune homme. Il lui sourit. Il était content de voir qu'il parvenait, légèrement, à la réconforter. Et puis vraiment, marcher bras dessus, bras dessous était tout autant un plaisir pour lui qu'une manière d'apaiser la peine de Camilla. Il chercha à en savoir plus sur elle. Si elle avait une famille. La question blessa la demoiselle qui lui répondit avoir perdu deux frères jumeaux. Jim se sentit bête de lui avoir demandé cela. Il venait de rouvrir une plaie douloureuse. Il ressentit une légère pointe au coeur. Il n'aimait pas faire mal aux gens. Il souhaitait que Camilla aille mieux, qu'elle s'aère l'esprit quelques minutes. C'était raté. Il la rapprocha un peu plus de lui. Vint poser sa seconde main sur le bras de Camilla qui était lié au sien. Désolé … Vraiment … Désolé … Il aurait voulu lui dire qu'il ne savait pas. Qu'il n'aurait pas demandé sinon. Qu'il était désolé de ramener cette mauvaise période de sa vie. Mais l'homme ne voulait pas s'enfoncer plus. Il avait du mal à parler et aurait aggravé son cas en essayant de s'excuser davantage. Et puis Camilla devait bien se douter de comment se sentait l'australien. Elle continua. Elle avait un autre frère ici-même qu'elle n'avait pas encore vu. Jim fut dubitatif quant à cette situation. Etaient-ils fâchés ? Camilla venait-elle tout juste d'arriver en ville ? Ou ce frère ? Il garda ces interrogations pour lui-même. Demanda tout de même. Prénom … Frère … Camilla ? …Jim … Connaître … Peut-être. Il ne connaissait pas grand monde. Et il avait beaucoup plus de facilité à parler avec les femmes qu'avec les hommes. Mais peut-être avait-il entendu parler d'un certain … Il attendit que Camilla lui donne le prénom. Il espérait tellement pouvoir lui dire où il était. A moins qu'elle n'était en colère contre lui et ne voulait plus voir ? Le jeune homme avait peur d'avoir fait une nouvelle gaffe. Il demanda alors à la jeune femme si elle souhaitait qu'il se taise. Elle lui répondit que non et il fut soulagé de l'entendre. Ca ne pouvait pas faire de mal c'est certain. Il l'entendit dire qu'il était la première personne qui lui apportait du soutien. Il fut à la fois fier, heureux et peiné. Personne ne devait traverser ça seul. Personne. Elle plongea son regard dans le sien. Et comme quelques minutes auparavant, il ne put se retenir de lui montrer toute son affection. Il lâcha son bras pour venir doucement serrer la jeune femme. Il vint tendrement caresser sa nuque. Lui démontrant toute son affection, son amitié. Ils ne connaissaient pas mais Jim tint tout de même à lui dire. Jim … Etre … Là … Oui … Il murmurait doucement à l'oreille de Camilla. Essayant de prendre un timbre de voix normal, réconfortant. Camilla … Pouvoir … Faire … Confiance … Jim … Oui … Il termina. Jim … Ami … C'était peut-être un peu précipité. Mais le jeune homme souhaitait l'aider à traverser cette passe difficile. Il voulait lui apporter cette épaule. Une simple épaule.

La jeune femme se montra bienveillante avec Jim. Même si elle était triste. Evidemment il ne pouvait pas savoir. Ce n'est pas pourtant qu'il n'était pas désolé d'avoir posé cette question. Il n'avait pas eu de frères et sœurs. Il s'était souvent demandé à quoi cela ressemblerait d'avoir une belle fratrie. Ses parents ne pouvaient avoir d'enfants. Il avait lui-même été adopté. Ayant été abandonné à la naissance, ce couple d'amoureux avait pu le recueillir chez eux et l'élever comme s'il s'agissait de leur enfant. Pour Jim, ils étaient ses parents. Point. Pas ses « parents » ou ses parents adoptifs. Non. Ses parents tout court. Ils avaient apporté tout leur amour à leur chéri et il leur en était toujours reconnaissant. Ils n'avaient pas adopter d'autres enfants. Alors en bon fils unique, Jim fut incroyablement chouchouté et gâté. Il revint un peu à lui et posa une question à Camilla concernant son frère. Rafael. Le nom ne lui dit rien. La description pas trop non plus. Un grand brun, il devait y en avoir des centaines à Bowen. Et « grand » était assez objectif. Il aurait pu là, tout de suite, lui citer au moins une dizaine d'homme qu'il jugeait grand et brun. Il la regarda alors avec un petit air triste. Un regard aux milles excuses. Désolé … Jim … Pas connaître … Rafael … Il reprit le premier mot une nouvelle fois. Désolé … Elle lui expliqua se sentir seule. C'est du moins comme cela que Jim le comprit. Il la prit dans ses bras. Se dit être son ami. Oui c'était beaucoup trop tôt. On ne devient pas ami dix minutes après s'être croisé dans les couloirs d'un hôpital. Mais il voulait aider la jeune femme. Il ne souhaitait pas la voir triste et seule. Il était entièrement sincère dans sa démarche. Camilla lui sourit. Et il en fit de même. Elle confirma. « Ami ». Elle leva le petit doigt. Dans l'espoir qu'ils scellent tous deux cette promesse d'amitié. Il fallut quatre secondes à Jim avant de comprendre le souhait de la jeune femme. Et quand la pièce tomba, son sourire illumina un peu plus son visage. Il ferma le poing, leva le petit. Il posa son regard dans celui de la demoiselle et chercha son petit doigt à tâtons. Il trouva la situation presque rigolote. Leur petit doigt s'entrelacèrent. Il serra doucement. Fit la promesse en son for intérieur d'être là pour Camilla. Il n'y avait pas besoin de mots. Le geste se suffisait à lui-même. Il fit un léger signe de tête. La promesse était faite. Il avait chaud au cœur. Vraiment. L'ancien Jim serait peut-être passé à côté de cette femme sans trop la regarder. Pas que c'était un connard ou un je-m'en-foutiste. C'est juste qu'il n'avait jamais le temps. Mais le nouveau Jim était différent. Il était heureux de pouvoir être la personne sur qui elle pouvait compter. Il se replaça à ses côtés et lui tendit son bras. Ils se dirigèrent alors vers la cafeteria.