(hot) baby got her head down ▽ (jackson)

baby got her head down

La soirée était lancée, mais l'alcool ne parvenait pas à monter suffisamment pour donner l'effet escompté. Charlie était sortie avec quelques amis, en petit comité, qui l'avaient convaincue de sortir de chez elle. Ces dernières semaines, la jeune femme avait traversé pas mal de choses. Elle remontait la pente, reconstruisant ce que ses doutes avaient bien failli pulvériser, mais sortir et faire la fête n'était pas encore tellement au programme. Elle qu'on connaissait d'habitude si pleine d'énergie, un immense sourire illuminant son visage et ses yeux pétillant, elle qui ne manquait jamais une occasion de sortir même si elle savait que c'était signer son arrêt de mort face à l'épuisement qui allait en résulter, avec son quotidien surchargé, elle était restée calme ces derniers temps. Un calme étonnamment revigorant, elle qui ne parvenait à se remettre en jambes qu'en explosant de joie de vivre et en dispersant son trop-plein d'énergie partout autour d'elle. À vrai dire, c'était la première vraie sortie qu'elle faisait depuis l'accident d'Aelya et Niels. Après être restée cloîtrée chez elle durant des jours sans parler à personne, elle avait finalement repris le travail, repris ses activités et sa vie sociale, avec moins d'enjouement qu'avant cependant. Petit à petit, les choses s'étaient remises en place. Mais on ne pouvait pas dire qu'elle était à nouveau elle-même, au top de sa forme. Cela revenait, lentement mais sûrement. Les derniers événements l'avaient quelque peu traumatisée, même si c'était difficile à admettre, mais quiconque la connaissait bien pouvait le voir. Ce qu'il lui fallait, c'était du temps. Que le naturel du quotidien revienne, sans se presser. Et apparemment ce soir, ce qu'il lui fallait, c'était boire et retrouver le sens de la fête. Elle ne pouvait pas le nier, ça lui avait manqué. La jolie brune était encore sobre, ou pompette tout au plus, et elle partit commander son cinquième verre d'alcool avec un presque semblant d'agacement, si pas de désespoir. Si elle était sortie, c'était pour lâcher prise, sortir de cette torpeur qui semblait l'habiter depuis un moment et qui ne lui était pas habituelle. Alors merde, fait ton effet, alcool, t'es là pour ça. Arrivée au bar, elle demanda une tequila sunrise, patientant accoudée au comptoir qu'on lui apporte sa commande, ses doigts tapotant le bois, l'autre main jouant avec ses boucles marron. Son regard clair traînait sur la population du Elm Street, sans vraiment y prêter attention, adressant un signe de tête et une grimace à ses amis assis plus loin, ses iris iceberg reprenant leur vagabondage. Au bout du bar, les esprits semblaient s'échauffer, et la jeune interne fronça les sourcils, prêtant un peu plus d'attention à ce qu'il se passait là-bas.

T’avais l’habitude de sortir, de découvrir les bars d’à peu près partout dans le monde. Après les représentations de Cirkaös, il n’avait jamais été rare pour toi de suivre le reste de la troupe jusqu’à tard dans la nuit, pour parler de vos performances, parce que c’était la seule vie que vous connaissiez. Les autres sujets de conversations possibles vous avaient toujours semblés si loin. Vous ne viviez que pour une seule chose et ça ne semblait pas être la même chose que le reste du monde. Ce à quoi tu n’étais pas habitué, toutefois, c’était de consommer de l’alcool. Si tu errais dans les bars, autrefois, c’était sans jamais avaler une seule goutte qui aurait pu te faire basculer dans l’ivresse. T’avais toujours pris soin de ton corps au point de bannir tous les excès. Ça, c’était jusqu’à ce que le cirque ferme et que tu perdes tous tes repères. Et ce soir, tu les perdais encore plus, alors que tu t’étais enfilé plusieurs verres les uns à la suite de l’autre, toi qui n’avais pas eu une adolescence t’ayant permis de commettre des erreurs et d’apprendre de celles-ci. Tes limites, tu ne le connaissais pas. Ce soir, tu les avais franchies sans même t’en rendre compte. T’arrivais encore à marcher à peu près droit mais ton impulsivité, elle, était impossible à contenir. Alors quand un homme t’avait fait un commentaire homophobe parce que t’étais apparemment en train de flirter avec un autre homme, t’avais pété les plombs, et pas rien qu’un peu. « And why do you care ? » Avais-tu répondu d’une voix forte, te levant de ta chaise avec les poings serrés et le regard menaçant. Les regards s’étaient tournés vers la scène et comme interpellé par ton petit numéro d’agressivité, ton interlocuteur s’était jeté sur toi, et puis toi sur lui. Il te criait des noms entre deux coups et tu faisais pareil, le traitant d’homophobe et d’enfoiré, les mots s’emmêlant les uns avec les autres à cause des coups et de l’alcool qui te donnaient l’air un peu plus confus encore. Et pourtant, tu frappais encore juste. Assez pour que la situation dérape un peu trop et qu’on veuille vous séparer le plus rapidement possible.

Charlie était maintenant tout à fait concentrée sur l'altercation qui avait lieu un peu plus loin. Lors d'une soirée normale, elle n'y aurait probablement pas prêté attention, tout simplement parce que sa vue embuée par l'alcool ne lui aurait pas permis de remarquer ce genre de bagarres de soirées, plutôt habituelles au final. Quelques verres de trop, un peu de testostérone ou bien de jalousie féminine et hop, c'était parti. L'étudiante restait généralement en marge de ces événements, trop occupée à profiter de sa soirée, à faire des choses totalement ridicules entre deux shots d'alcool et potentiellement à vomir dans les toilettes. Mais ce soir, comme l'alcool ne semblait visiblement pas prêt à l'aider sur le plan de l'ivresse, la jeune brune s'était tournée vers l'échange de plus en plus agressif entre deux hommes au bout du bar, si bien qu'elle s'était à moitié levée, son regard iceberg se posant sur celui qui semblait perdre quelques crans de contrôle sur lui-même, faisant valser ses poings et quelques insultes destinées à ce qu'il semblait désigner comme être un gars homophobe. Ce n'était pas tellement le centre de leur querelle qui interpellait Charlie, plutôt la violence avec laquelle le jeune homme semblait se déchaîner, semblant ne pas pouvoir s'arrêter. L'autre n'était pas mal non plus, mais la brunette avait saisi un très bref échantillon du regard de ce garçon, un éclair vif et presque impossible à intercepter. Mais Charlie l'avait reconnu, parce qu'elle l'avait déjà vu de nombreuses fois. Dans le regard de Scar. Quand il perdait le contrôle et laissait la colère l'envahir, insensible à ce qui se passait autour de lui, c'était cette même lueur presque animale qu'on pouvait lire dans ses yeux. Entre-temps, des personnes étaient intervenues, tentant de séparer les deux protagonistes, et cette fois Charlie se leva franchement pour s'élancer d'un pas déterminé vers le brun. Overdose de confiance dans son petit corps féminin, sans doute, mais elle n'allait certainement pas prendre le temps d'y penser, encore moins de douter de sa carrure sans doute ridicule comparée à celle de l'homme à côté duquel elle arriva. Rien à foutre de son format de XS et de ses muscles trois fois moins puissants, elle affichait l'expression qu'on lui connaissait bien quand elle prenait les choses en main à l'hôpital. « Hey ! Hé, hé là, calm down. » s'écria-t-elle avec force mais sur un ton étonnamment posé, s'interposant sans crainte entre les deux adversaires, déjà séparés par les quelques bras qui les retenaient. Qu'un des deux essaye de lui foutre une patate tiens, elle les ferait embarquer à l'hosto sans attendre et leur administrerait une bonne dose de calmant sur le chemin, histoire de voir qui rirait le dernier. Non mais ho, on déconne pas avec Charlie. Trop la confiance cette meuf, je vous dis. Bien consciente de la différence de carrure entre elle et le garçon devant lequel elle s'était postée, l'interne préféra y aller franco, se jetant presque contre lui pour le forcer à reculer tout en captant son regard, posant les mains sur ses avant-bras avec une certaine conviction dans ses gestes, toute sa détermination se lisant sur son visage, même si elle remerciait mentalement les personnes en train de plus ou moins retenir le gars. « Calm down, ça sert à rien de taper sur les gens, ça fait des frais médicaux pour rien. Viens, on va prendre l'air. » répéta la brunette, avant de désigner la porte du bar d'un signe de tête. Sa voix était douce et plutôt empathique, mais son ton était sans appel. On la lui faisait pas, à Charlie. Elle avait déjà assez dealé avec toutes les réactions de merde de Scar que pour se laisser impressionner. Au fil du temps, c'était devenu une habitude de gérer ce genre de crises.

C’était une noirceur qui traversait ton sang comme un venin, quand on te cherchait, quand on te trouvait. Quand on te plongeait dans cette incontrôlable rage qui te faisait perdre toute ta raison. T’étais pourtant pas un mauvais garçon. T’étais pas méchant. Tu ne souhaitais de mal à personne, généralement. Mais quand cet éclat-là traversait ton regard, c’était comme si tu te transformais. Tu t’oubliais. Tu changeais. Et alors les coups fusaient et la violence physique se joignait à la violence verbale, toutes deux massacrantes. L’autre homme perdit rapidement le dessus et tu le surplombais de ta colère démesurée. Ce n’était que des mots, t’aurais dû les ignorer et t’en aller. Ce n’était pas la première fois et ce ne serait pas la dernière. Et pourtant, y’avait eu ce je-ne-sais-quoi dans le regard de ton interlocuteur. Son sourire mesquin t’avait triggered et il t’était alors impossible de faire marche-arrière. Du moins, pas de ton plein gré. Si autrefois c’était Brooke qui arrivait à te calmer et à te raisonner, ce soir c’est une toute autre voix féminine qui t’interpella, t’ordonnant de te calmer. Tu tournas vivement la tête vers cette voix étrangère, rencontrant le regard impatient de cette femme que tu ne connaissais pas. Pris de court par cette intervention inattendue, des bras arrivèrent à te séparer de ta victime, toi qui pensais encore pourtant être la sienne. « C’est à lui qu’il faut dire ça ! » Crachas-tu en te débattant comme pour retrouver la liberté dont t’avais besoin pour finir ce que t’avais commencé. Le finir lui. La jeune femme revint à l’assaut et cette fois, ce sont ses mains à elle qui se posèrent sur ton torse, te forçant à reculer. Elle posa ensuite ses mains sur tes avant-bras, les entourant, les retenant, pour t’empêcher d’envoyer tes poings valser où que ce soit d’autre. « Il n’aura plus besoin d’avoir de soins médicaux quand j’en aurai fini avec lui ! » Lanças-tu sans pourtant le penser. T’avais quand même pas l’intention de le tuer. Juste de lui faire ravaler sa langue et ses insultes. La jeune femme proposa plutôt d’aller prendre l’air, d’un ton autoritaire. Elle te tira jusqu’à la porte du bar et, titubant, tu gagnas finalement l’extérieur du bâtiment. « Of course que c’est l’enfoiré de service qui reste là-bas et qui continue sa soirée comme si rien s’était passé ! » Te plaignais-tu en désignant le bar d’une main, pointant abstraitement l’homme qui était toujours à l’intérieur. « C’toujours les innocents qui paient. » Mais t’étais pas innocent, t’avais été le premier à frapper. Tu pensais juste que c’était légitime, de te faire justice à toi-même pour des paroles d’abruti. Mais tu ne pensais pas correctement, jamais, quand t’étais dans cet état. Alors, tu donnas un coup de pied dans le mur de briques de l’établissement, accompagné d’un : « Fuck ! » bien senti.

Charlie avait l'habitude des éclats de voix et des réactions agressives, parce qu'elle connaissait trop bien celles de Scar. Malgré son allure de fleur fragile, elle en avait vu d'autres et elle n'était pas de celles qui se laissait facilement démonter. Alors quand elle posa son regard sur celui du brun, elle était pleine de confiance, d'une certaine autorité et en même temps d'un calme implacable, qui contrastait avec ce dans quoi elle avait mis les pieds, ce règlement de comptes qui transpirait l'agressivité et le besoin d'en découdre. Mais la brunette n'en démordait pas, posant ses mains sur les bras du jeune homme et cherchant son regard, comme si le clair de ses yeux allait le convaincre de laisser tomber. Ce n'était sans doute pas le cas, elle savait à quel point il était difficile de gérer ce genre de comportements. Mais l'éclair compatissant que ses traits affichaient remportèrent peut-être la bataille, aussi le jeune homme finit par se laisser entraîner à l'extérieur. « Je m'en doute, mais ça ne vaut sûrement pas la peine de se faire virer du bar pour un pauvre type qui n'en vaut pas la peine. » répondit Charlie une fois à l'extérieur, l'ombre d'un sourire étirant ses lèvres. Autant elle n'était pas du genre à réagir aussi violemment que son interlocuteur, autant elle pouvait comprendre le sentiment d'injustice qui semblait l'habiter. Elle savait qu'il était d'une difficulté extrême de raisonner quelqu'un dans son état, mais elle en avait l'habitude et peut-être était-ce pour ça qu'elle s'était élancée vers le jeune homme sans que le doute semble l'étreindre. Une fois dehors, elle prit le garçon par la main, l'emmenant un peu plus loin sur la rue, là où l'écho des conversations se dissipait quelque peu, histoire qu'il ait l'espace nécessaire pour défouler la rage qui restait en lui, ou qu'il puisse simplement reprendre son souffle, et ses esprits par la même occasion. « Sois pas si négatif, personne ne t'interdit de continuer ta soirée à toi non plus, a priori. » répondit la jeune interne avec un sourire plus franc cette fois, tandis que l'homme qu'elle avait entraîné dehors pestait toujours contre son adversaire. Elle lui adressa un clin d’œil furtif, avant de jeter un rapide regard à l'intérieur du bar, puis revenir sur lui, l'innocence incarnée. « Tu veux un verre pour te calmer, peut-être ? Rien de tel que l'alcool pour se remettre d'aplomb ! » lança-t-elle, les effets de l'alcool un peu présents tout de même, affichant un sourire rayonnant contrastant totalement avec la situation. L'alcool, ce remède à toutes les situations. Ça faisait un peu alcoolo sur les bords, mais bon, soit. « S'tu veux je le fais déguerpir, et on rentre à l'intérieur après. » proposa ensuite la brunette avec un air de badass qui jurait avec sa silhouette frêle, mais étonnement, il était possible de la prendre au sérieux pour le coup. Insensible à la crise de colère du jeune homme, elle reprit sa main dans la sienne, un faible sourire aux lèvres, accompagnant le regard convaincant qu'elle plongeait dans le sien.

Le type n’en valait certes pas la peine, mais lui foutre ton poing dans sa tête de con, ça par contre, t’avais pourtant l’impression que ça en valait vraiment la peine. T’en avais rien à foutre d’être viré de ce bar, on pourrait même t’en bannir à tout jamais s’il le fallait et ça ne te ferait pas pleurer. Tu t’étais passé d’alcool pendant la plus grande partie de ta vie, alors de rayer un bar sur la liste de ceux qui se trouvaient dans cette ville, ça ne changerait pas grand-chose à ta vie. Mais est-ce que ça changerait vraiment quelque chose à ta vie de laisser ce mec s’en sortir sans égratignure ? Sans doute pas. Même que ça sauverait tes jointures. Cette réflexion-là ne se rendit toutefois pas jusqu’à toi, parce que ta colère était encore en train d’écraser ta raison. Tu suivis malgré tout la jeune femme à l’extérieur, parce que la bataille était de toute façon maîtrisée et que c’était tout ce qu’il te restait à faire. De prendre une grande bouffée d’air frais. De t’aérer l’esprit embrouillé par les vapeurs alcoolisées. « Si on les laisse toujours s’en sortir comme ça ils vont juste continuer avec leurs commentaires haineux et dégueulasses … » Parce que quand t’en es à ce degré de stupidité, même les paroles les plus sensées ne feraient pas écho dans une tête pourtant vide. La main de l’inconnue vint se glisser dans la tienne, et tu relevas un regard un peu perdu vers elle, qui détourna le regard pour t’entraîner plus loin sur la rue, vous enveloppant dans un calme presque apaisant. Presque, ouais, parce que t’avais encore ce besoin de cogner qui n’avait pas été assouvi par la faute de la brunette. Elle t’avait pourtant sauvé de toi-même. « J’retourne pas là-dedans avec ce connard. » Crachas-tu avec dégoût, comme un cowboy qui déclarerait qu’il n’y avait pas de place pour les deux dans ce bar. La demoiselle proposa donc de le faire déguerpir pour que vous puissiez aller boire un verre pour te calmer. T’eus un rire amusé. Étonnamment, cette main dans la tienne avait le don de te changer tes idées auparavant dirigées contre ton assaillant. « J’aimerais bien t’voir à l’œuvre mais j’ai pas vraiment envie qu’tu mènes mes batailles pour moi. Surtout pas quand c’est toi qui m’a empêché de la mener jusqu’au bout. » Lui fis-tu remarquer. Puis, tu tournas la tête vers l’autre côté de la rue, où s’érigeait un autre bar à quelques adresses d’ici. Tu désignas l’endroit d’un coup de tête. « J’t’emmène plutôt là-bas ? Ça m’évitera d’avoir une seconde envie de meurtre. » Parce que retourner à votre lieu de rencontre initial, c’était de te forcer à recroiser ce pauvre type.

Rien ne semblait pouvoir entamer la légèreté de Charlie, malgré la tension qui émanait de son dernier compagnon de soirée. Tension presque palpable, qui aurait sans doute mis une autre inconnue sur le qui-vive, s'attendant à n'importe quel dérapage, n'importe quelle perte de contrôle. La future chirurgienne gardait pourtant son sourire, d'un calme et d'un sourire étincelant qui contrastait avec le jeune homme à ses côtés, pas une once d'inquiétude sur son visage à l'expression amusée. L'alcool dans son sang jouait un rôle, pour sûr, mais en-dehors de ça, elle avait tout simplement l'habitude de gérer ce genre de situations. Et elle savait très bien que ce qui ressortait maintenant du garçon ne faisait pas de lui quelqu'un de dangereux, ou de pas fréquentable. Au contraire, elle compatissait. Si ça avait été Scar, elle aurait sans doute été moins indulgente, mais elle conservait toujours cette douceur et cet aplomb naturel lorsqu'il sortait de ses gonds lui aussi. Charlie acquiesça aux paroles du brun, sans se départir d'un sourire en coin, mais on voyait dans son regard qu'elle prenait ce qu'il lui disait au sérieux. Il n'avait pas totalement tort, pas totalement raison non plus, mais c'était inutile d'argumenter sur le sujet et la brunette préférait laisser le jeune homme sortir ce qu'il avait sur le cœur. Mieux valait qu'il se défoule avec des mots qu'avec ses poings, de toute manière. Et ça faisait du bien de décharger ce qu'on avait à dire. « D'accord. C'est vrai qu'il pourrait nous contaminer avec sa stupidité. » ajouta la jeune femme, soulignant ses paroles d'un hochement de tête, une expression parfaitement sérieuse sur le visage, même si une touche malicieuse vint éclairer son sourire. Mieux ne valait pas retourner à l'intérieur, effectivement, s'il ne se sentait pas capable de se contrôler avec ce type dans ces parages. Inutile de gâcher encore plus sa soirée. Charlie laissa échapper un petit rire quand le garçon lui précisa que c'était elle qui avait interrompu leur bagarre. Elle était en effet mal placée pour jouer les héroïnes maître de karaté. « Pas faux. » gloussa-t-elle avant de reprendre avec son air innocent et presque enfantin. « Note, j'ai pas précisé comment j'allais le faire déguerpir. Peut-être que je comptais juste lui demander gentiment. » Bon, elle allait arrêter de causer de ce type parce que ça devait sûrement pas aider. Sa parade était purement rhétorique et touchée d'humour, inutile de s'étendre sur le sujet plus longtemps sinon elle allait empirer la situation qu'elle avait essayé d'améliorer, jusqu'ici. Heureusement, le garçon proposa plutôt d'aller ailleurs. Charlie hésita une seconde, passant une main dans ses boucles brunes, jetant un regard au bar qu'il lui indiquait, puis à celui dont ils venaient de sortir et où se trouvaient ses potes. Elle finit par afficher un sourire guilleret et accepta d'un hochement de tête enthousiaste, et même satisfait. Ses potes s'en sortiraient très bien tout seul et c'était bien son style de disparaître d'une soirée parce qu'elle avait trouvé l'herbe plus verte - et amusante - ailleurs. « J'te suis ! Mais arrête de parler de meurtre ou j'envoie un message à mes potes pour les prévenir qu'ils vont me retrouver découpée en morceaux s'ils viennent pas me sauver. » fit-elle sans se départir de sa bonne humeur, emboîtant le pas au jeune homme. Merci Charlie pour les plaisanteries débiles et totalement superflues. C'était dans son ADN, elle y pouvait rien, la pauvre. « Au fait, moi c'est Charlie. Balance ton nom, que je sache au moins qui est mon potentiel futur meurtrier. » se présenta-t-elle en arrivant à l'entrée du deuxième bar. Évidemment, elle ne s'arrêtait jamais, c'était plus fort qu'elle. Arrête les vannes de merde, Charlie, arrête. C'est ton humour débile qu'il va vouloir tabasser.

T’avais aucunement l’intention de retourner dans le bar et la jeune femme sembla le comprendre assez vite. D’ailleurs, comme pour ajouter une raison à celles que tu avais déjà en tête, elle mentionna qu’il pourrait très bien vous contaminer avec sa stupidité. Tu ris, hochant la tête pour montrer toute ton approbation. Ton regard croisa le sien, illuminé par une lueur malicieuse qui t’arracha un sourire encore plus grand, figé dans le temps. C’est à ce moment seulement que tu t’attardas enfin à cette personne qui se tenait devant toi, qui s’était montrée généreuse d’elle-même au point de te sortir de l’embarras et de prendre de son temps pour ton rétablissement émotionnel. Et pour couronner le tout, elle avait de ces regards qui vous ensorcellent, qui vous prennent tout votre oxygène tout d’un coup. T’inspiras profondément, cherchant l’air qui t’avait manqué un moment alors qu’elle avait pris ta main dans la sienne. « Ce mec-là comprend clairement pas le langage de la gentillesse. » Relevas-tu en secouant la tête. On disait peut-être kill them with kindness mais pour certaines personnes, cet effort supplémentaire n’en valait pas la peine. Tu proposas donc d’aller au bar de l’autre côté de la rue, plutôt que d’avoir à recroiser ce pauvre type qui trouverait certainement le moyen de te mettre en colère à nouveau. La jeune femme, après avoir semblé hésiter un moment, accepta avec enthousiasme. Tu ris à son commentaire. « C’est exactement c’qu’une fille dans un film de suspens dirait avant que ça arrive pour vrai … » Fis-tu remarquer avec malice. « Si tu préfères, invite tes potes à nous retrouver de l’autre côté, where the real fun is going to be. » Proposas-tu, même si étrangement t’aurais davantage eu envie d’apprendre à la connaître en tête à tête. Si sa bande d’amis vous rejoignait, ce serait tout d’un coup toi le outsider, et tu ne savais pas si tu réussirais à prendre ta place. Seul avec elle, t’avais toute son attention, et ce n’était pas pour te déplaire. « Jackson. Deux jolis noms pour faire la une des journaux. » Tu ris, rentrant dans ses blagues alors que t’aurais sans doute dû la rassurer à la place. Surtout que si d’ordinaire t’avais l’air d’un agneau sans défense, votre première rencontre laissait croire tout le contraire. Tu n’avais peut-être plus la rage dans les yeux mais Charlie t’avait vu sur le bord d’exploser. Ce n’était rien pour lui prouver que t’étais un bon gars, au fond. Tu lui ouvris finalement la porte du second bar et rentra à sa suite, la laissant choisir une table libre et t’asseyant face à elle. « Qu’est-ce que tu bois ? T’as envie qu’on se partage un truc ? » Demandas-tu en consultant distraitement le menu.    

À la base, ce n’était pas vraiment dans les plans de Charlie de se retrouver à discuter dehors avec un inconnu, après avoir décidé dans une pulsion utopique de le sauver de lui-même, pour finalement décider de passer le reste de sa soirée avec lui. Mais la brunette ne voyait pas plus de raison que ça de refuser une aventure imprévue, bien plus appétissante que boire des verres avec ses amis dans un bar, comme à chaque fois qu’ils sortaient. Elle crachait pas dessus, mais c’était quand même pas la soirée du siècle, comparé à une petit bifurcation imprévue dans les plans. C’était donc avec enthousiasme que Charlie accepta la proposition du brun, en accord avec sa personnalité vive et impulsive qu’elle suivait encore plus quand elle était un peu saoule. « Oh tais-toi, tu vas finir par me faire douter. Et j’ai trop envie que tu me payes un verre que pour faire demi-tour. » répliqua la jolie brune en assenant une petite tape sur le bras de son interlocuteur, marchant à ses côtés jusqu’au bar d’en face. C’était sans doute un peu stupide que de se sentir déjà amie avec quelqu’un qu’on venait de rencontrer dans un bar et avec qui on avait seulement échangé quelques mots, mais c’était la sensation que Charlie avait et elle ne ressentait pas de gêne à l’exprimer. Peut-être que finalement, elle avait besoin de cette rencontre inopinée. De prétendre que tout allait bien dans sa vie, de lancer un sourire et croiser un regard pétillant, sans se soucier de quoi que ce soit d’autre. D’oublier les derniers trucs qu’elle avait traversé, les pensées qui la turlupinaient parfois. « Pas la peine. J’te fais confiance pour animer ma soirée tout seul, t’as l’air d’être bien assez… divertissant, au minimum. » répondit Charlie d’une voix amusée en glissant un regard malicieux au garçon quand il lui proposa de ramener ses potes. Elle n’avait aucune envie de se retrouver canevassée dans un modèle de situation qu’elle connaissait déjà, des visages connus, une fin de soirée prévisible, des discussions habituelles… Non, elle avait envie de faire quelque chose de différent, d’éteindre son cerveau et de rester avec le beau brun, qui la faisait sourire, qui la faisait se sentir vivante, tout d’un coup, de par sa simple présence. Il lui révéla ensuite son nom, et elle laissa échapper un petit rire, résonnant comme des clochettes légères. Bon, ce serait quand même bien ironique qu’il soit effectivement serial killer et qu’elle se marre beaucoup moins dans quelques heures. Mais, autre que les probabilités, quelque chose dans le regard de Jackson lui affirmait qu’elle n’avait rien à craindre de lui, malgré la situation dont elle venait de l’extirper, sans trop lui demander son avis d’ailleurs. Il lui rappelait bien trop Scar. Il avait beau être un enfer à gérer parfois, il était adorable, et une des plus belles personnes que Charlie avait rencontré dans sa vie. Elle avait confiance en le fait que Jackson soit le même type de personne que son meilleur ami. « Ce que tu veux sauf du whisky, j’aime pas trop. T’as qu’à choisir un truc qui me va, selon toi. » répondit la brunette après avoir passé une main dans ses mèches bouclées, une fois installés dans le bar. Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle voulait boire mais elle n’oubliait pas qu’elle en serait à son sixième verre. Ça ne l’empêcha pas de plonger son regard couleur iceberg, dans lequel dansait une étincelle espiègle, dans celui de Jackson, le mettant au défi de leur trouver une boisson adéquate. Heureusement pour lui, elle n’était pas difficile du tout, que ce soit vin, bière ou cocktail en tout genre. Mais elle était curieuse de voir ce qu’il lui attribuerait.

T’éclatas de rire quand elle t’ordonna de te taire, sous peine de faire demi-tour à force de la faire douter. T’avais absolument rien d’un meurtrier, toi tu le savais, mais n’importe quelle personne prudente ne se fierait pas aux paroles de l’inconnu qui le dit de lui-même. « L’appel de l’alcool … plus grand que l’instinct de survie ! » Blaguas-tu alors que la jeune femme affirmait qu’elle avait trop envie de ce verre que t’allais lui payer – ah bon ? – pour faire demi-tour. Tu te dirigeas donc vers le bar de l’autre côté de la rue, en compagnie de la brunette qui t’offrait un changement de programme inattendu pour la soirée, mais ça faisait ton bonheur. Étrangement, t’avais l’impression que vous étiez deux amis de longue date qui alliez partager un verre. Et pourtant, vous aviez absolument tout à apprendre de l’autre, même le prénom. Tu pensas à proposer à ta sauveuse d’inviter ses amis, après tout c’était dommage de les laisser derrière alors que son plan initial était de passer la soirée avec eux. Elle ne semblait pas en être dérangée plus que ça. « Divertissant ? Tu dis ça parce que j’ai pété un plomb ? J’vais essayer de trouver d’autres manières d’animer ta soirée, ça vaut mieux pour nous deux … » Fis-tu remarquer avec un sourire. Si elle devait te mettre les freins une seconde fois, ce ne serait plus drôle. Tu doutais toutefois que ça se reproduise, l’épisode un peu plus tôt en était un isolé. Tu n’avais pas l’habitude des bagarres, quand même. Tu ne les cherchais pas par exprès. Bref, tu pris place à une table du bar, en face à face avec Charlie dont tu venais enfin d’apprendre le prénom. Une lueur de défi dans son regard pétillant de base, la jeune femme te proposa de choisir une boisson qui lui irait, selon toi. Un sourire tout autant malicieux se dessina sur ton visage, ton regard amusé plongé dans le sien. « D’accord, voyons voir … » Tes yeux noisette se posèrent sur le tableau noir derrière Charlie, où les bières de la saison étaient affichées. Tu fis un signe au serveur. « On va te prendre un pichet de la bière Lollipop, s’il-te-plaît. Deux verres. » Tu le remercias et regarda Charlie, un sourire aux lèvres. « Une bière légère aux arômes d’agrumes et de baies fraîches. » Tu haussas les épaules. « Ça m’a fait penser à toi. » Parce qu’elle était un vent de fraîcheur, parce qu’elle te donnait l’impression que c’était toujours un peu l’été auprès d’elle. « Alors, sur une échelle de 1 à 10, j’m’en suis tiré comment ? » Demandas-tu en riant, posant tes coudes sur la table.  

Le rire de Jackson lui arracha un sourire, authentique, emprunt de douceur. Elle aimait faire rire les gens, et pas seulement pour flatter son humour qui avait cruellement besoin de reconnaissance. Elle aimait les faire rire et sourire, parce que ça lui faisait tout chaud au fond d’elle, parce qu’elle avait l’impression de ressentir leur bien-être, aussi court fût-il parfois, éponge émotionnelle qu’elle était. Elle avait besoin d’être un soleil dans la vie des gens, et elle le faisait naturellement, sans même qu’on ne s’en rende compte. « Je rêve où tu me traites subtilement d’alcoolo alors que tu me connais même pas ? » rétorqua Charlie en faisant mine d’avoir une réaction offusquée, mais elle ne put réprimer un sourire en coin amusé. L’étudiante se sentait étonnamment à l’aise avec le brun, même si elle ne connaissait rien de lui, hormis le fait qu’il avait failli casser la gueule à un type. Ça n’allait pas la freiner. Elle possédait une sorte d’instinct pour ça. Comme si chaque personne dégageait une aura, à laquelle on faisait confiance ou dont on se méfiait, et que la brunette la captait immédiatement. « Non non, c’est pas ça. » démentit-elle, un poil gênée et baissant ses iris iceberg l’espace d’une seconde. Elle ne voulait pas qu’il croit que c’était ça qui animait sa sympathie, qu’elle était juste une fille excitée par les mecs badass. Elle se serait sentie malaisée qu’il pense ça d’elle. « C’est juste que… T’es chouette. Tu me rappelles quelqu’un. » fit la jeune femme en s’efforçant de prendre un air nonchalant. Une pensée s’envola vers Scar, qu’elle entreprit d’effacer dans la seconde. Ils s’installèrent à une table et Charlie proposa que le beau brun choisisse pour elle. Leurs regards se croisèrent un instant, et l’interne lui renvoya son sourire, malicieux. Le sien, un peu troublé, peut-être. Elle ne pouvait s’empêcher de sourire. « C’est pas un mauvais choix, je te l’accorde ! Mais une bière toute simple aurait fait l’affaire aussi, je suis pas difficile. Je t'accore quand même huit sur dix. » approuva la brune en replaçant une de ses boucles derrière son oreille, son regard s’illuminant à nouveau de cette joie de vivre légère. « Parce que j’suis fraîche ? » rétorqua l’australienne en arquant un sourcil, affichant une expression exagérément sensuelle pour souligner son ironie. Mais putain, tape-toi la tête contre la table, Charlie, toi et tes blagues à coucher dehors. En parlant de coucher, d’ailleurs… Non, arrête-toi là, s’il te plaît.

Tu éclatas de rire, encore une fois, à croire que Charlie excellait réellement dans son besoin de rayonner sur les autres. En tout cas, toi, elle avait réussi à te sortir de ta noirceur et à te plonger dans sa lumière et ce, en quelques minutes à peine. La jeune femme avait un réel don pour briller et transmettre aux autres ce bonheur contagieux. Ses répliques te faisaient rire à chaque fois, elle avait un sens de la répartie plutôt développé et vous rebondissiez sans cesse sur les propos de l’un et de l’autre. Le genre de personne avec qui on ne s’ennuie jamais, quoi. « Si le chapeau te fait … » Tu lui adressas un clin d’œil amusé. Évidemment, tu ne la traitais pas d’alcoolique, mais il était vrai que sa phrase t’avait servi cette blague-là sur un plateau d’argent. Après, qu’elle ait réellement un fort penchant pour l’alcool ou non, ça ne te regardait pas. Finalement, Charlie te qualifia de divertissant, ce à quoi tu associas ton pétage de plomb de tout à l’heure. Après tout, c’était la seule explication que tu voyais à ce qu’elle te trouve divertissant. La jeune femme démentit toutefois tes propos, et en sembla même gênée pour un moment. Tu culpabilisas un peu. Elle te dit plutôt que tu lui rappelais quelqu’un. Tu faisais souvent penser à d’autres personnes, visiblement. « Oh. » Dis-tu, retrouvant un mince sourire qui creusa tes fossettes. Tu marchas jusqu’à une table. « Désolé d’avoir mal interprété. » Une fois assis face à elle, tu posas tes coudes sur la table. « Et qui est ce quelqu’un ? » Demandas-tu, intéressé. Après tout, si elle te comparait à une personne de sa vie, tu te montrais curieux d’en connaître un peu plus les raisons. Après tout, si tu te retenais de poser toutes les questions qui te passaient par la tête, la soirée risquait d’être longue et silencieuse. Et puis, t’avais envie d’en apprendre davantage sur Charlie. Elle était chouette, elle aussi, pour reprendre ses propos. D’ailleurs, tu te prêtas au jeu de lui choisir une boisson à son image, ou du moins à l’image que t’avais d’elle. « T’es peut-être pas difficile mais une bière toute simple, c’aurait été triste, comme choix … comme si t’avais une personnalité terne, alors que ce n’est pas le cas. » Te défendis-tu, déçu de ton score. Charlie te demanda alors si ton choix avait été déterminé par le fait qu’elle soit fraiche, comme les baies de la bière. Tu ris. « Très fraîche. » Tu arquas un sourcil à ton tour, le regard malicieux, joueur. C’était tellement pas ton genre de parler comme ça, mais puisqu’elle avait commencé. D’ailleurs, ça te donnait tout d’un coup très envie de continuer.

Pour toute réponse et comme seule défense, Charlie ferma les yeux et tira la langue, dans une jolie grimace, avant de rire. Elle n’allait pas nier qu’elle aimait boire et faire la fête. Mais elle restait loin d’être une alcoolique, ou en tout cas elle l’espérait. Ça arrive plus vite que ce qu’on ne croit ces choses-là, paraît-il. La peau de ses joues rosit légèrement quand Jackson lui demanda qui il lui rappelait. Ses pensées s’envolèrent un moment vers Scar. Scar qui passait ses soirées à se taper la terre entière. Bon, elle exagérait clairement, comme toujours. Mais même. Elle ne pouvait empêcher cette pointe de jalousie de venir l’empoisonner, quand elle y pensait, ou quand il lui parlait d’une de ses énièmes conquêtes. Charlie secoua la tête, retrouvant contenance avant de relever les yeux vers le garçon. « Un super bon pote. » dit-elle simplement avec un sourire. On pouvait lire derrière ses traits à quel point elle tenait à cette personne, même si elle refusait souvent de l’admettre à haute voix, sans doute un peu par fierté. Au fond, elle savait à quel point il comptait pour elle, et lui le savait aussi. Mais il n’était pas là ce soir et elle n’avait aucune envie de penser à ça. Ni à rien d’autre en fait. Juste à cette soirée, et au jeune homme face à elle. Il la faisait sourire. Plus que ce qu’elle n’avait souri ces derniers temps. Elle avait besoin de se détacher un peu de ce qu’elle connaissait. De vivre comme si elle allait mourir demain. Juste un peu. Le reste la plongeait dans des remises en question et des introspections un peu trop déprimantes, pour le moment. Lorsque Jackson choisit une bière pour elle, l’étudiante en fut ravie, ne pouvant s’empêcher de sortir une blague débile au passage. La justification du beau brun la fit sourire, un réel sourire authentique, qui acceptait le compliment avec gratitude. Elle était touchée, réellement, et sa réponse était presque une poésie. « C’est gentil. Vraiment. » fit-elle, rougissant légèrement à nouveau. Il n’avait rien dit d’exceptionnel, mais pour Charlie ça voulait dire beaucoup. Et vu ce qu’elle traversait dernièrement, ce genre de compliments ne pouvait qu’aider. « Mais t’as très bien choisi, je t’assure ! Merci, d’ailleurs. Et je t’accorde un point supplémentaire pour ce que tu viens de dire ! » relança la jeune femme en prenant une gorgée de la bière, qui était effectivement très bonne. Et très fraîche. Charlie éclata de rire quand il répondit positivement à sa question, qui était surtout une vanne stupide, entrant dans le jeu. « Et toi alors, c’est quoi ton style de boisson ? Plutôt… Chaude ? » demanda la brunette, fixant son regard bleu clair dans celui du garçon, reprenant cette expression mêlant humour et charme exagéré, histoire de continuer la blague. Mais misère, Charlie, faut que t’apprennes à t’arrêter. Un bâillon, une camisole de force, je sais pas. Quelque part, elle se demandait si sa réponse était purement humoristique, ou s’il y avait un fond de vérité. Elle aurait pas été contre qu’il la trouve jolie, certainement.

Lui faire penser à un super bon pote, c’était tout de suite mieux que de lui donner l’impression d’être un potentiel agresseur, fou furieux, prédateur, name it. T’étais donc plutôt ravi d’avoir pu te défaire de ta première impression donnée, plutôt violente. Bien des gens n’auraient vu en toi qu’un danger, un red flag à éviter au plus vite. Pas Charlie. Charlie, en plus de t’être venue en aide, te donnait même une chance de faire tes preuves autrement. Tu hochas simplement la tête avec un sourire, n’ayant rien à ajouter à cela et, surtout, tu ne voulais pas poser des questions trop personnelles. Tu sentais bien que cette personne occupait une place bien spéciale dans la vie de Charlie, mais que ce n’était peut-être pas le moment d’aller fouiner plus loin. La curiosité insistante était un vilain défaut que tu n’avais pas. Tu te montrais intéressé à Charlie, bien sûr, mais tu savais respecter les limites que tu semblais interpréter. À la place, donc, tu te prêtas au jeu de lui choisir une bière à son image. Tu marquas quelques points, surtout après ce rattrapé légendaire. Les joues de Charlie s’empourprèrent tout légèrement, ce qui te fit sourire. Ça la rendait juste encore plus belle. Quand elle t’accorda un point supplémentaire, tu serras le point en signe de victoire, avant de rire. « C’est tout ce que je voulais entendre. » Lâchas-tu à la blague, comme si t’avais fait tous ces efforts, tous ces compliments, que pour la note. Mais tu pensais réellement tout ce que t’avais dit. La jeune femme te relança ensuite la question de ton style de boisson. Évidemment qu’elle y mit un certain sous-entendu. « Oh, j’ai pas besoin que la boisson soit chaude pour que moi je le sois. » T’avais le sang chaud, t’étais toujours chaud à l’idée de rencontrer d’autres êtres, d’autres corps. Tu souris, révélant tes fossettes qui ne se faisaient aucunement gênées en présence de Charlie. « Mais pour tout te dire, j’sais même pas c’est quoi, mon style de boisson. J’suis que récemment devenu un adulte de ce côté-là. » Admis-tu en riant. « J’ai longtemps été acrobate pour un cirque alors la discipline, le contrôle, c’était tout ce que je connaissais. J’n’avais bu que quelques gouttes d’alcool par-ci par-là, avant d’arriver à Bowen. J’ai encore tout à découvrir. » Les derniers mots étaient dits sur le ton de défi, comme si tu invitais Charlie à te faire découvrir tous ces côtés de la vie qui t’avaient longtemps échappés. Tous ces goûts que tu ne connaissais pas.

Un nouveau rire étreignit le visage de la jeune femme devant la réaction de Jackson, concernant le point supplémentaire qu’elle lui accordait. Il était de bonne compagnie, et malgré ce qu’il avait montré tout à l’heure, il n’avait rien de quelqu’un d’agressif ou désagréable, il était même très drôle. Mais la jeune interne était bien placée pour savoir qu’il ne fallait pas se fier aux premières impressions et surtout aux accès de violence. Scar était quelqu’un d’adorable, malgré qu’il puisse envoyer des types à l’hôpital à côté de ça. Rien qu’elle ne cautionne, mais en attendant, elle savait qu’on ne pouvait juger quelqu’un uniquement à ses actions, et que ça ne faisait pas une personne. Il en allait de même pour Jackson, voilà pourquoi elle n’avait pas hésité à aller prendre un verre avec lui après l’incident. Elle se sentait en confiance. « Oh, je vois, monsieur n’a pas peur de dévoiler ses ardeurs. » plaisanta-t-elle à nouveau, s’éventant avec sa main en prenant un air de pucelle en chaleur, levant les yeux au ciel comme si elle allait bientôt s’évanouir devant l’effet qu’il faisait. Plutôt bonne comédienne, Charlie, même si comme d’habitude t’as juste l’air ridicule, but who cares ? Tant qu’à être dans la blague, autant continuer jusqu’au bout. La conversation prit finalement un tournant enfin un tantinet plus sérieux, Jackson révélant qu’il n’était pas du style à boire beaucoup. Charlie haussa un sourcil, posant son regard azur sur lui avec intérêt, tandis qu’il révélait quelques informations à son sujet. « T’es un peu un vierge de l’alcool, alors ? » lança-t-elle avec malice, soutenant son regard de défi. « On va arranger ça. » ajouta-t-elle avec un clin d’œil. « Je comprends ce que c’est. Avoir de la discipline, j’veux dire, pas faire des acrobaties. » fit l’interne en hochant la tête. Son métier, et même sa vocation, était tout aussi centrée sur la discipline. Elle se permettait néanmoins beaucoup de sorties, parce qu’elle était comme ça. Elle avait besoin de relâcher la pression de l’hôpital, même si elle adorait ça, même si elle vivait pour la chirurgie, elle avait tout autant besoin de se lâcher quand elle le pouvait, de devenir cette jeune fille un peu délurée qui s’enfilait des shots d’alcool et prenait des décisions sans trop réfléchir. « J’te propose donc de payer la prochaine tournée en shots de Jägermeister ! Mais après j’me calme, ce serait triste que j’me réveille demain en ayant oublié ma soirée. » proposa avec enthousiasme la jolie brune, tout sourire et regard provocateur. Non parce qu’elle, elle avait déjà bien bu, quand même. Et si l’alcool était un peu redescendu, la bière suivie de shots allaient bien vite faire repartir la danse.