Back to the place, back to the room where it all began + Emersen

Un week-end chez l’un, un week-end chez l’autre. L’amour entre Léo et Alba était en garde alternée depuis quelques mois déjà. En garde alternée mais au grand jour tout de même. Ils ne se cachaient plus aux yeux de leur fils ou de quiconque et c’était déjà un sacré pas en avant. Les deux amants avaient gardé cette habitude de se faufiler dans le lit de l’autre quelques soirs en semaine, ça restait toujours clandestin, comme s’ils aimaient garder ce frisson d’interdit, de transgression des règles. Entre eux il n’y avait pourtant aucune règle, c’était ça le plus simple. Amants torrides en semaine, ils formaient comme une famille parfaite les week-ends. Ils vivaient au jour le jour cette relation où ils apprenaient à s’apprivoiser. Presque huit ans après leur coup de foudre inavoué, six ans après avoir essayé, en vain, de recoller les morceaux suite à la naissance de Jonah, ils se redonnaient une chance. Chacun d’entre eux avait cette impression que c’était la dernière, ils étaient tous deux conscients des moments précieux qu’ils vivaient. Mais ils n’osaient pas totalement, chacun chez soi, ils se mettaient des barrières invisibles qui pesaient parfois dans leur quotidien. Cela faisait quelques mois que ce petit manège durait, mais pour combien de temps encore ? Si eux pouvaient continuer sur ce schéma longtemps, ils devaient penser à leur enfant qui commençait à poser des questions. Parfois il interrogeait son père, du haut de ses six ans, s’il aimait sa maman ? Si un jour ils auraient une maison tous les trois ? Jamais il n’avait eu ce genre de questionnement quand ils étaient séparés, mais peut-être qu’à présent le petit Jon n’y comprenait simplement plus rien. Et c’était à chaque fois la même chose, à chaque nouvelle question, Léo ne savait pas quoi répondre, pas parce que c’était tabou, mais plus parce qu’il ne connaissait pas les réponses. Il n’avait pas osé en parler avec Alba, il ne savait pas si elle recevait également les interrogations de leur garçon. Dans le brouillard de cette histoire, Emerson ne savait pas vraiment où se situer, il ne savait pas non plus s’il en avait envie. C’était un peu son fil d’ariane, ce flou artistique qui constituait ses relations avec les femmes, l’amitié ambiguë, l’amour, profond, mais qu’il refuse d’admettre et ça revenait finalement toujours un peu au même point, sa peur de l’engagement, de se tromper et d’entraîner sa belle dans sa chute. Pourtant, dans cette histoire avec Jensen, il y avait quelque chose de nouveau, cette évidence, cette simplicité. Peut-être parce qu’ils avaient déjà tant vécu ensemble et qu’il ne le restait que ça, arrêter d’avoir peur, juste être ensemble, juste s’aimer. Sauf qu’ils ne se le disaient pas, ils se le montraient de bien des façons, mais sans mettre de mots sur ce qu’ils ressentaient c’était comme si ça n’existait pas. Léo avait bien senti, depuis quelques temps, qu’Alba doutait de lui, elle demandait s’il allait bien, à quoi il pensait, toujours avec pudeur, sans jamais être agressive, mais il avait compris qu’elle ne le sentait pas toujours totalement impliqué. Pourtant il l’était. Alors, à sa façon à lui, il comptait le lui prouver. Il avait fait du grand Léo, réservé des billets d’avion, pris les dispositions pour que Jonah soit gardé, il avait même fait appel à son vieil ami Samson pour venir s’occuper de la galerie d’Alba, l’espagnol n’était, à priori, pas rancunier, depuis plusieurs jours il s’était permis de fouiller dans les affaires de la blonde pour lui prendre çà et là quelques vêtements et constituer une valise. Et il allait enlever sa belle, l’emmener là ou tout avait commencé, là où toutes les pensées convergeaient trop souvent, tous les deux, quelques jours, pour ranimer les souvenirs et puis les laisser derrière eux, pour ne plus être nostalgiques de cette vie et pouvoir avancer ensemble. Leur avion décollait ce soir, alors il allait la chercher directement à son travail, en espérant qu’elle y soit, puisqu’elle n’était pas prévenue. Il poussa la porte de la galerie et, comme à chaque fois, il fut saisi par son ambiance particulière ainsi que les souvenirs du vernissage qui avait tout fait basculer. Un tintement se fit entendre, signalant sa présence dans le bâtiment encore vide en ce début d’après-midi. Léo attendit quelques secondes que le bruis de ses talons claquent sur le sol et son visage se fendit d’un sourire quand il la vit arriver. Salut ! Je te dérange ? Pour la première fois depuis qu’il avait commencé à échafauder son plan, il commençait à stresser, et si elle avait un rendez-vous important ? Si elle refusait de partir sans Jon ? Plein de questions se bousculaient.

Il y a quelques mois, la vie d’Alba était bien différente. Son cœur se serrait souvent entre ces tumultueux sentiments. Aujourd’hui, il n’y avait que Léo et elle était heureuse. Chaque jour à ses côtés était une aventure. Ils ne se cachaient plus aux yeux du monde, assumant l’attirance et l’amour qu’il y avait entre eux. C’était une grande étape pour eux, comme si s’assumer donnait une nouvelle saveur à cette relation compliquée. La semaine, ils restaient ces amants interdits, un Roméo et Juliette des temps modernes où la clé restait cachée pour que chacun rejoigne l’autre dans le songe de la nuit. Jon dormait toujours dans la chambre à côté mais il n’était plus surpris de venir la nuit après un cauchemar et voir ses parents dans le même lit. Parfois, il venait juste pour vérifier qu’ils étaient bien là tous les deux souriant comme un matin de noël. Et parfois, ils étaient seuls rendant le petit garçon nostalgique des autres nuits. Il voyait que les choses changeaient, il avait ses deux parents et plus de partage. Combien de matin, Alba dormait encore alors que Léo préparait Jon pou l’école. Il y avait eu au départ des moments gênants et aujourd’hui c’était presque une habitude. Mais Alba adorait se cacher dans le lit de son amant et que la nuit ne leur appartienne qu’à eux. C’était un nouvel équilibre qui semblait leur convenir. Jon voulait plus, posant des questions à ses parents. A chaque fois, ce sentiment de culpabilité animait Alba se rendant compte qu’ils n’apportaient pas de stabilité à ce petit garçon qui le méritait. Mas égoïstement, elle voulait que ça continue ainsi pendant des années. Elle le sentait, une conversation sérieuse rendrait leur relation fragile parce que Léo et Alba n’étaient pas doués avec les mots. Il était souvent absent dans ses pensées, oubliant la présence de la blonde. Elle le voyait, elle n’était pas dupe mais elle ne disait rien profitant de ce moment de répit que leur offrait la vie. Tout était spontanée et Alba ne savait pas encore comment la soirée allait se dérouler. Peut-être que Léo sera occupée, elle lui enverrait un message un peu plus tard pour savoir. Son amant lui manquait quand il n’était pas là, accro à sa présence telle une addicte à l’héroïne. C’était une journée calme à la galerie. Il y avait eu quelques visites et Alba était dans son bureau s’occupant de trouver ses prochains partenaires. En ce moment, il y avait cette exposition particulière qu’elle avait faite avec Lys. C’était un très bel ensemble où se mariait les œuvres de Lys avec les photos d’Alba. La sonnette la sortait de ses pensées lui rappelant ses obligations professionnelles. Elle vit. Avec son sourire et son malaise, elle trouvait ça attendrissant. « Salut ! » Lui répondait-elle avec un sourire étincelant. S’approchant de lui, elle posait ses mains autour de sa nuque. « Pas du tout mais qu’est-ce que tu fais là ? » Elle avait besoin de ce contact physique pour se rappeler qu’elle ne rêvait pas et qu’en ce moment, Léo était toute à elle. Elle posait ses lèvres sur les siennes, l’embrassant avec une douce passion. « Tu veux boire un café ? » Il les connaissait ces cafés, forts et amers. Elle l’avait initié à l’art de la caféine en Thaïlande, se souvenant de ces premières grimaces. Maintenant, il ne buvait que ça, adepte à cette façon de faire. C’était un doux souvenir, elle aimait se rappeler de cette fois-ci, après ils avaient fais l’amour à même le sol. Souvent, Alba se disait que tout était plus simple en Thaïlande et qu’ils avaient laissé là-bas le meilleur d’eux. Là-bas ils s’étaient aimé de la manière la plus pure et elle voulait retrouvé ça, même si aujourd’hui elle était parfaitement heureuse avec Léo.

Depuis quelques semaines qu’il préparait son coup, Léo était incapable de savoir si Alba allait apprécier la surprise. Fut une époque où il en aurait été persuadé, parce qu’elle était comme lui, capable de partir sur un coup de tête, de tout laisser derrière elle sans se poser de questions. L’aventure et le voyage coulaient dans ses veines, ils étaient faits du même bois, mais, à présent la blonde était maman et ça changeait bien des choses. Elle n’était plus jamais repartie depuis qu’elle avait eu Jonah, ou du moins pas bien longtemps puisqu’elle avait toujours respecté les semaines de garde alternée. Elle avait mis sa passion entre parenthèse pour mieux élever son fils. Léo n’avait jamais vraiment su, ni osé demander, si c’était un sacrifice de sa part, si l’envie était toujours là, ou si elle avait simplement changé, si la maternité lui suffisait, cette vie simple à regarder son enfant grandir et s’épanouir. Léo, lui, avait besoin de partir, ce n’était pas qu’une passion, pas juste un caprice non plus, c’était en lui, cette urgence de s’évader, de s’aérer l’esprit, sous peine ne se sentir enfermé, mis en cage. Il avait toujours fonctionné ainsi et même s’il s’était calmé à la naissance de Jonah, il ne pouvait simplement pas renoncer. A côté de ça il avait hâte que le petit garçon grandisse et soit en âge de partir avec lui dans ses aventures, il voulait lui offrir le monde, c’était la moindre des choses. En attendant ce soir c’est avec Alba qu’il allait s’envoler, juste elle et lui, comme à la grande époque, juste pour se rappeler qu’il y avait eu un avant et qu’il était resté comme inachevé. Ce voyage les avait menés bien au-delà de tout ce qu’ils auraient pu espérer, Léo s’était enfui de Bowen pour oublier son deuil, pour s’oublier, simplement et il avait trouvé un nouveau sens à sa vie. A l’époque Alba l’avait réanimé, soigné, guérit. Mais il l’avait quitté de la pire des façons. Cette fois, plus de sept ans plus tard, il comptait se racheter, la remercier à sa façon d’avoir été là, d’être encore là, pour lui. Dans la galerie d’art, à quelques heures seulement de leur vol, il se sentait un peu stressé à l’idée que son plan ne fonctionne pas, mais la blonde s’approchait de lui et lorsqu’elle posa ses mains sur sa nuque avec toute la délicatesse et la sensualité qui la caractérisaient, Emerson ferma juste les yeux et sourit. Je suis venu te faire une surprise ! Il se laissa embrasser et la ramena un peu plus près de lui pour faire durer la passion, celle qui ne s’éteignait jamais, cette flamme incandescente. Alba ne se doutait de rien, par surprise elle avait probablement compris qu’il venait lui rendre visite, simplement. Il fit alors durer un peu le suspens et accepta son café, de toute façon il devait attendre que Samson arrive, il ne tarderait pas. Tes fameux expressos, tu te souviens du premier que tu m’as fait boire ? Moi je m’en rappelle, j’ai failli tout recracher sur le lit ! Il jouait avec leurs souvenirs, avec cette époque où tout était simple, qu’il avait hâte de revivre, espérant naïvement que tout serait pareil. Il prit la tasse qu’elle lui tendit entre ses mains. Merci. Tu y pense parfois, à Bangkok ? Il osait mettre les pieds dans le plat, l’air de rien. Mais fut rattrapé par le tintement de la porte d’entrée. Samson n’était décidément pas en retard. Il laissa à Alba le loisir de découvrir son nouveau visiteur, restant en retrait pour observer l’effet de surprise.

La vie d’Alba avait changé quand le petit Jon avait pointé son bout de son nez dans ce monde. Les rêves de la maman et ses envies ne s’étaient jamais éteintes, mais sa priorité était tout autre à présent. Souvent, elle rêvait de prendre le large, louer un bateau et vaguer dans les eaux turquoises de l’Australie. Presque toutes les semaines, elle rêvait à une destination, comparant les prix des billets pour s’envoler le lendemain. Mais il y avait Jon. Ils avaient vécu ensemble depuis six ans maintenant, et le petit garçon avait dû mal à imaginer sa maman loin. Même quand il était chez son papa, Alba lui rappelait qu’elle n’était pas loin, dans la même ville. Ce n’était pas l’envie qu’il manquait, mais Alba ne pouvait laisser son fils derrière elle. Alors elle s’était faite à l’idée que les voyages coups de tête ça ne fonctionnerait plus. Il n’y aurait plus de longs périples sans Jon et que pour l’instant il était trop jeune. Ça lui manquait évidemment parce que ça faisait partie de l’essence même de la photographe, mais son fils avait prit toute la place. Aujourd’hui, c’était une journée assez calme, elle avait eu le temps de préparer des choses et de rêver comme elle savait le faire. Léo était dans ses pensées, alors elle fut contente de le voir dans sa galerie avec un large sourire. Une surprise ! Elle enroulait ses bras autour de sa nuque et l’obligeait à se baisser pour qu’elle puisse l’embrasser. « J’aime bien ce genre de surprise … Tu devrais en faire plus souvent. » Des tas d’idées traversaient l’esprit de d’Alba. Lui et elle dans cette galerie, ça donnait des images à la maman qui en ferait rougir plus qu’un. Quand elle était avec lui, c’était tout son corps qui parlait et qui priait pour qu’on éteigne ce brasier qu’il allumait à chaque fois. Il l’approchait d’elle et déjà Alba se sentait perdue. Il avait ce pouvoir sur son corps qui rendait folle la photographe. Avec difficulté elle s’éloignait de lui, proposant un café comme elle savait les faire. Elle riait. « Evidemment que je m’en souviens. Je t’ai critiqué toute la journée et pour la peine tu en as bu trois le soir pour me faire taire. » Ils étaient jeunes à cette époque et fougueux. Ils avaient rit toute la soirée et fait l’amour également jusqu’à s’épuiser. Elle en avait préparé ce matin, il était encore fumant alors elle apportait une tasse à son amant. Bangkok. Evidemment qu’elle y pensait. « Tout le temps … » Répondait-elle avec sincérité avant qu’ils ne soient interrompus par Samson ! Elle ne comprenait rien la blonde, après leur collaboration ils ne s’étaient plus parlés. L’espagnol lui avait dit qu’il y avait déjà un Léo dans sa vie et qu’il n’y avait pas sa place. « Mais … Qu’est-ce que tu fais là ? » Elle le regardait et ses yeux se posèrent ensuite sur Léo qui avait un sourire en coin. « J’espère que vous n’allez pas me proposer un plan à trois ! » Disait-elle en riant même si venant d’eux, elle ne serait pas étonnée. Enfin un peu quand même.

Léo n’avait aucune certitude qu’Alba allait le suivre dans son idée folle de tout laisser tomber au pied levé, y compris leur fils, pour une escapade en tête à tête. Au point où il en était, il préférait ne pas penser qu’elle refuserait, il ne préférait simplement pas penser du tout en fait, au risque de paniquer. Mais il fallait avouer que si la blonde ne le suivait pas, il serait déçu, déjà parce qu’il avait horreur qu’on lui refuse quoi que ce soit, en bon fils unique trop gâté toute sa vie. Et aussi parce qu’il avait besoin qu’ils soient égoïstes, ensemble, tous les deux, comme au tout début, quand rien d’autre ne comptait que l’instant présent, quand il n’y avait qu’elle et lui, un lit et l’eau transparente des mers thaïlandaises. Il avait besoin revivre cette période, comme pour se prouver que ça avait bien existé et que c’était encore là, quelque part, sous la routine du quotidien, sous leur rôle de parent qui prenait toute la place, sous les rancunes et les erreurs, les multiples peurs qui s’étaient accumulées tout au long de leur relation conflictuelle. Certes ils s’aimaient, Alba et Léo, ça crevait les yeux, ils n’avaient pas besoin de se le dire, mais quelque part l’amour ne suffisait pas, il y avait la passion des corps, mais il manquait cette flamme qui les rendait si beaux, cette insouciance qui s’était éteinte quand Léo avait claqué la porte de leur chambre d’hôtel des années plus tôt. Le photographe ravala un éclat de rire, elle n’avait décidément pas idée du genre de surprise qu’il préparait, mais allait-elle vraiment aimer ? Il sourit de façon presque énigmatique avant de prolonger leur baiser. Ils auraient pu continuer, allumer tout un brasier comme ils l’avaient déjà fait une fois dans cette même galerie, rien que d’y penser, Léo sentait déjà une pointe d’excitation monter dans son bas ventre, mais il n’était pas là pour ça aujourd’hui. Parler café, c’était mieux, d’ailleurs il rit franchement à son anecdote, les trois expressos en une soirée ça n’avait pas été l’idée du siècle, il n’avait pas fermé l’œil de la nuit cette fois-là Alba non plus, d’ailleurs… On ne peut pas dire que ça t’ai fait taire ! Mais au moins tu ne te moquais plus de moi et de moi jus de chaussette. Il lui sourit alors qu’elle avouait penser tout le temps à Bangkok, encore fallait-il qu’elle y pense en bien et pas avec regrets. Mais c’était encourageant. Il n’eut pas le temps de continuer, déjà la porte de la galerie s’ouvrait sur un nouvel invité. Visiblement Jensen était surprise, bouche bée même, l’entrée de l’espagnol avait fait son petit effet. Léo pouffa de rire à sa réflexion et Samson renchérit sans se dégonfler. Alba, toujours aussi caliente ! Ne me tente pas avec ce genre d'idée, bella ! Il haussa les sourcils ostensiblement. Et Emerson rit de plus belle en les rejoignant, les deux hommes étaient visiblement toujours autant complices malgré leur rivalité par rapport à la blonde. C’était de l’histoire ancienne, Léo s’était montré suffisamment clair et Samson n’avait pas insisté. Quant à cette idée de plan à trois, très peu pour lui, l’australien détestait partager, il était bien trop possessif pour ça. J’ai un plan à te proposer, mais de ce genre-là ! Il regarda sa montre. Dans la soirée, un avion décolle pour Bangkok, j’ai réservé deux billets. Si tu veux bien m’accompagner, Samson s’occupera de la galerie en ton absence. Sinon il prend le deuxième billet à ta place. Mais, (il se tourna vers Samson) sans vouloir t’offenser mon ami, j’ai une préférence pour les blondes. Il saisit Alba par la taille et lui sourit avec douceur. Toi et moi en Thaïlande, juste nous, ça te rappelle quelque chose ? J’en meurs d’envie depuis des mois. C’était le moment de vérité, il espérait qu’elle ne se déroberait pas, qu’elle ne réfléchirait pas trop.

Souvent, il arrivait à Alba de trainer sur les sites de réservation des avions. Elle s’imaginait une destination, une date et son sac à dos pour partir à l’aventure. Mais elle n’avait plus fait ça depuis la naissance de Jonah. Evidemment qu’elle avait repris l’avion déjà pour aller à Brisbane, mais elle ne voyageait plus comme avant. Jon avait besoin d’elle, et même quand il était chez son père, le petit garçon était content de savoir que sa mère restait dans les parages au cas où. Pourtant, Alba rêvait de s’envoler, de voyage unique et surtout inattendu. C’était Léo l’inattendu de ce jour, arrivant à sa galerie un sourire large et des yeux malicieux. Les yeux pétillants, elle le rejoignait l’embrassant heureuse de le voir ici. Il était la belle surprise. Alba ignorait encore qu’il ne parlait pas de ça mais du voyage dont elle rêvait secrètement depuis des semaines. Elle lui proposait un expresso, ce petit breuvage dont elle avait le secret et qui avait rapprocher les deux amants. Alba se souvenait encore du regard outré qu’elle avait lancé à Léo quand elle l’avait vu remplir sa tasse da café avec plein d’eau. Comment un être humain pouvait-il boire ça, avait-elle pensé sur le coup. Toute la journée, elle l’avait jugé, se moquant de lui. C’était la première fois qu’elle avait vu à quel point Léo était orgueilleux et pour se venger il en avait bu trois. Ils avaient passé le reste de la soirée de se réconcilier de la meilleure des manières. C’était une des plus belles soirées, Alba s’en souvenait encore. « En même temps c’était dur de me taire. » Disait-elle avec plein de double sens. Ç’avait été une nuit remplie d’orgasme et de cris, épuisés finalement ils s’étaient endormis quelques minutes avant l’aurore. Le lendemain, Léo avait bu de nouveau de ce breuvage pour s’y accommoder. Ils étaient l’un des les bras de l’autre et Alba sentait la bosse de son amant. Parler de cet anecdote lui donnait des envies, et la blonde le regardait avec ardeur. Mais elle fut couper par l’entrée d’un client. Enfin non. C’était Samson. Inconsciemment elle s’éloignait de son amant passant son regard de l’un à l’autre. Elle levait les yeux au ciel. Toujours aussi charmant ce Samson et son accent espagnol. « Je crois que le Monsieur à côté de moi ne sera pas d’accord ! » Pouffait-elle de rire. Alba en avait déjà eu des threesome, c’était quelque chose qu’elle appréciait de temps en temps. Elle savait que ça ne plairait pas du tout à Léo, capable de partir nu dehors parce qu’il se montrerait jaloux. La conversation devint plus sérieuse d’un seul coup. Léo avouait. Cette surprise était tout autre, elle avait une autre saveur. La Thaïlande … Il avait enquêter le bougre. Alba sentait son cœur s’arrêter de battre tellement le cadeau était parfait. C’était comme si Léo avait lu en elle. Même sa blague auprès de Samson ne suffisait pas à la ramener à la réalité. Puis elle se tut Alba. « Et Jon ? » Demandait-elle après plusieurs minutes de silence. Evidemment qu’elle pensait à son fils, mais une fois que Léo lui annonçait tout ce qu’il avait été mit en place, elle ne pu s’empêcher de sourire. « Tu crois qu’on est des mauvais parents si on laisse notre enfant quelques semaines ? » C’était un oui ! Alba qui pendant des années s’était empêché de s’éloigner de Jon, avait envie pour une fois de redevenir celle qu’elle était au moment de sa rencontre avec Léo.

Cette relation avait été sabotée tellement de fois qu’on pouvait se demander pourquoi ils recommençaient sans cesse. Léo était doué pour ça, saboter ses histoires d’amour, il l’avait fait, beaucoup, avec plusieurs femmes. A croire qu’il ne pensait pas que le bonheur puisse lui aller. Mais avec Alba c’était d’autant plus vrai. Il se souviendrait toujours de ce dernier regard qu’il lui avait lancé, alors qu’elle dormait d’un sommeil paisible, de cette hésitation qui avait failli le pousser à ne pas passer cette porte. Et surtout à cette déferlante de sentiments qui l’avait assailli alors qu’il savait qu’il faisait une connerie en la laissant. Parce qu’il l’aimait à ce moment-là, il l’avait compris. Il aurait pu passer une vie de voyages avec cette femme-là, une vie entière auprès d’elle à n’avoir besoin de rien d’autre que de ses bras sans jamais s’en lasser. Mais il avait claqué la porte et fermé son cœur à tous sentiments envers elle. Il avait laissé de côté les idées de voyages. Et puis Jonah était arrivé, il avait tout bouleversé. Il avait songé mainte fois à quelle aurait été leurs vies si elle n’était pas tombée enceinte ou bien si elle avait mis un terme à cette grossesse ou bien si, tout simplement, elle n’en avait pas mis au courant son amant et gardé ce bébé pour elle. Peut-être qu’ils ne se seraient plus jamais vus. Loin des yeux, loin du cœur, ils auraient continué leurs vies sans plus jamais se croiser et peut-être qu’avec le temps les rancœurs se seraient apaisées pour ne garder que de beaux souvenirs de leur parenthèse thaïlandaise. Parce qu’au lieu de ça il y avait eu tout le reste, la colère, les ressentiments, la jalousie et le manque, le besoin de l’autre, si fort, trop fort pour y résister trop longtemps. Ils étaient incapables d’être indifférents, qu’ils s’aiment ou se détestent, ensemble ou séparément, ils ne s’oubliaient pas. Comme oublier celle qui pourrait bien être la femme de sa vie ? Alors ils avaient choisi de s’aimer, de mettre de côté leur passé et de se donner une chance, une ultime chance ? Serait-ce vraiment la dernière ? Peut-être, la bonne espérons-le. Ils s’en donnaient les moyens dans tous les cas. Comme ce séjour que Léo avait concocté dans le plus grand secret. Pour qu’ils se retrouvent, comme avant. Il avait mis Samson dans la confidence, drôle de choix, quand on connaissait le passé de l’espagnol avec Alba, mais il était avant tout son ami, à lui et Emerson ne pouvait pas en vouloir au brun d’avoir bon goût en matière de femmes… Il savait surtout qu’il serait le plus à même de prendre soin de la galerie, deuxième bébé de la blonde. Par contre, le threesome, très peu pour lui, Léo était bien trop traditionnel et puis la simple idée qu’un autre touche à sa copine lui hérissait le poil. Pour faire ça un jour il faudrait qu’il soit le troisième, celui qui s’invite dans un couple, mais ça n’était pas près d’arriver, il n’avait aucune intention d’aller voir ailleurs. Il secoua alors la tête, non, le monsieur n’était pas d’accord, en effet ! Il lui dévoila alors son plan, sa surprise et il put voir les yeux d’Alba s’illuminer, on aurait dit une enfant un matin de Noël, c’était beau, trop beau peut-être. Parce qu’elle resta silencieuse, elle réfléchissait. Et ça ce n’était pas bon. Il sourit, elle pensait à Jonah, évidemment, il était sa préoccupation principale, il passait avant tout le reste et ça, le photographe l’avant anticipé. Jon est bien habitué ici maintenant, ça fait plus d’un an que vous vivez à Bowen. Il ira un peu chez mes parents, Charlie s’est proposé de le garder si besoin. Et j’ai contacté tes parents, ils vont venir passer quelques semaines à Bowen … si tu veux bien leur prêter ta maison. Je crois qu’on n’aura pas à s’inquiéter pour lui. Il lui laissa une nouvelle fois le temps d’assimiler toutes les informations, il avait tout prévu, en vérité elle était prise au piège, elle n’avait aucune raison de refuser… sauf si elle ne voulait pas venir. Pourtant son visage s’illumina à nouveau et se fendit d’un sourire qui valait toutes les réponses, le pauvre Samson faisait un peu office de spectateur pour le moment. Je crois qu’on serait de mauvais parents si on ne laissait pas l’occasion à ses grands-parents de s’en occuper un peu. J’ai même peur qu’il nous ait oublié à notre retour. Il lança un regard à l’espagnol. Je crois qu’elle a dit oui ! Il souriait, visiblement ravi que son plan ait fonctionné. Alba, ça te va de laisser la galerie à Samson ? Parce que ça semblait être un détail pour Léo, mais elle devait avoir totalement confiance en l’artiste.

Alba se souvenait encore de leur rencontre. Tout paraissait lointain, mais jamais elle n’oublierait le regard vide qu’il avait posé sur elle. Jamais elle n’oublierait le lendemain matin où il l’avait viré de sa chambre d’hôtel de la pire des façon. Leur histoire n’avait pas bien commencé, mais la Thaïlande leur avait réservé des surprises. Après son départ, elle avait un peu regretté de l’avoir rejoint dans son hôtel avant le départ pour l’aventure. Sur le moment, elle aurait voulu tout oublier Alba, oublier cet homme qui avait marqué chaque parcelle de son corps, oublier ce regard si tendre et à la fois si froid, oublier les fous rires, les danses sensuelles, les promesses sans fond. Elle avait voulu tout oublier mais aujourd’hui, elle voulait revivre ces moments. Est-ce qu’ils avaient été aussi heureux depuis ? Sûrement pas. C’était avec lui qu’elle se sentait le plus vivante, avec lui et Jon. Leur petit bouclé apportait de la légèreté là où ses parents n’y arrivaient pas. Aujourd’hui, ils essayaient. Chaque jour était une nouvelle étape dans leur vie à deux, chacun attendant fatalement le moment où tout se casserait. Mais Alba aimait croire que cette fois-ci c’était la bonne, il n’y avait plus d’obstacle, plus de femmes ou d’hommes entre eux. L’amour qu’ils se portaient étaient bien réel, ils le savaient tous les deux. Ils leur manquaient juste du courage. Alba appréciait la surprise de son amant. Sa visite dans la galerie égayait sa journée, elle qui chaque jour attendant patiemment la nuit où elle pourrait se plonger dans les bras de l’être aimé. Léo, cet homme plein de surprise avait une idée en tête. La Thaïlande. Cet endroit magique où tout avait commencé pour eux. Quand Léo était partit, elle avait vraiment pensé qu’elle ne verrait plus cet homme, mais la vie en avait décidé autrement. Et aujourd’hui, Jon était au centre de leur préoccupation. Evidemment qu’Alba s’enthousiasmait et désirait au plus profond d’elle de retourner là-bas avec lui. Mais Jon ? Il avait tout prévu ce diabolique Léo, et chaque mot qu’il prononçait caressait le cœur de la blonde. Déjà plus d’un an que Jon et elles étaient là. Puis, il avait parlé à ses pères, négociant avec eux. « Tu as parlé avec Steen et Luke ? » Demandait-elle surprise. Souvent elle appelait ses pères par leur prénom, trouvant cette façon de les nommer drôle. C’était sa petite manie depuis toujours. Ce geste la touchait profondément parce qu’elle savait à quel point Steen se montrait dur avec l’amoureux de sa fille. Elle souriait, les yeux étincelants parce que la Thaïlande semblait si proche. « On peut quand même aller lui faire des gros bisous avant de partir ? » Alba restait la mère de Jon. Ce voyage elle le voulait mais pas sans un dernier gros câlin à son fils qui allait sûrement râler préférant retourner à ses jeux. Samson, elle l’avait oublié pendant quelques minutes. « J’ai dis oui ! » Disait-elle en pouffant légèrement avant que Léo ne lui soumette l’idée de laisser son deuxième bébé à l’espagnol. Alba avait confiance en lui, mais ça ne l’empêchait pas de froncer les sourcils. « Viens par là ! » Disait-elle à l’attention de son remplaçant, l’entraînant vers son bureau pour lui donner des ordres. Mais avant, elle se retournait et partait embrasser le photographe avec passion. « Merci ! » Chuchotait-elle. Puis elle entraînait Samson avec elle. Quelques heures plus tard, elle était à l’arrière d’un taxi avec Léo. Comme elle l’avait prévu, Jon se moquait que ses parents s’en aille, mais Alba versait quand même un petite larme dans le véhicule. « J’espère qu’il fera vivre la misère à ses grands-parents. » Disait-elle en riant légèrement tout en s’essuyant une larme.

Cette année à Bangkok datait de quelques années à présent, bien des choses s’étaient passées depuis. Et pourtant elle restait bien présente dans la mémoire des deux amants. Léo y pensait souvent, plusieurs fois il avait tenté de revivre les sensations qu’il y avait ressenti, ailleurs, avec une autre, mais ça n’avait jamais été pareil, chaque voyage avait un goût différent et celui-ci tout particulièrement, jamais il ne s’était senti plus libre, plus vivant, plus ancré dans la réalité, plus en phase avec une femme, que là-bas. Même ici, à Bowen, avec Alba, c’était différent, le quotidien n’aidait sûrement pas, mais il manquait surtout ce quelque chose, cette étincelle particulière. Léo n’était pas naïf, huit ans plus tôt ils étaient différents, depuis ils avaient changé, beaucoup de choses avaient changé, il n’espérait pas revivre la même en faisait cette surprise à sa maîtresse. Mais il avait besoin de changer d’air, de passer du temps avec elle sans se soucier de l’heure à laquelle ils devaient aller chercher leur fils, de vivre d’alcool, de caresses et de beaux paysages, juste quelques jours, le temps d’une parenthèse hors du temps. Et il avait effectivement pour qu’elle accepte, allant même jusqu’à s’adresser aux pères de la blonde pour leur demander leur aide. Il lui avait fallu une bonne dose de courage pour le faire, parce qu’il savait qu’ils se méfiaient de lui, celui qui avait fait tant de mal à leur fille chérie. Mais lorsqu’il était déterminé, rien ne pouvait l’arrêter, pas même deux pères prêts à montrer les dents. Et finalement ça s’était bien passé, ils semblaient avoir été touchés par son attention et par le fait qu’il pense à eux pour l’aider dans sa démarche. Oui, même Steen a été sympa ! Léo savait que, des deux hommes, c’était lui le plus méfiant vis-à-vis de lui. Ils feraient n’importe quoi pour leur petit fils. Tout comme Charlotte, la mère de Léo. Il pouffa de rire alors qu’Alba avait une ultime requête avant de dire oui. J’ai dit à ma mère qu’on irait le chercher à l’école avant de le lui amener. Je pense que même lui va avoir besoin de son câlin d’au revoir. Emerson avait prévenu son fils qu’ils allaient le laisser avec ses grands-parents, sur le coup le petit garçon n’avait pas totalement compris, il s’était juste inquiété de revoir sa maman avant qu’elle parte. La blonde fit faire le tour de la galerie à Samson, elle lui donna sûrement quelques recommandations avant de lui confier son bébé, c’était drôle, pour Léo, de les regarder déambuler dans la galerie et de s’enfermer dans le bureau, d’observer, de loin, l’air sérieux de sa copine, elle était une vraie cheffe d’entreprise, il l’admirait, cette galerie était une vraie réussite. Quelques heures plus tard, Léo séchait les larmes de la jeune maman qui s’apprêtait à laisser son fils pour la première fois aussi longtemps. Quelques autres encore et ils étaient dans l’avion, main dans la main, prêt à décoller, l’excitation était à son comble. Comme souvent, le photographe ne vit pas le vol passer, il s’endormit rapidement après le décollage et ne se réveilla que lorsque le commandant fit son annonce, il commençait les manœuvres d’atterrissage. Léo se redressa, se retourna vers Alba et lui sourit. J’ai hâte qu’on touche la terre ferme ! Tu veux savoir où on va ? Il ne lui avait encore rien dit de leur séjour, mis à part la destination, en gros, mais il avait gardé tout le plan de route secret, pour lui laisser la surprise.

Souvent elle repensait à Bangkok et à tout ce qui les avait amené ici. Sans cette rencontre fortuite et un courage, Alba n’aurait jamais vécu ce si beau voyage. Aujourd’hui, la routine installée, ils avaient parfois du mal à trouver leur rythme Léo et Alba, même si elle savait qu’elle le voulait lui. Il manquait parfois cette fougue qu’ils avaient à Bangkok ou encore la nuit à la galerie où tout était repartit. Cette fougue, ils l’avaient quand ils étaient qu’eux deux, dans le secret de leur chambre ou dans leur échange parfois téléphonique. Mais ils ne s’étaient pas retrouvés seuls plus de douze heures depuis … Bangkok. Et là, Léo leur offrait cet ultime voyage, un retour dans le passé pour mieux se construire pour le futur. Quelle surprise pour la maman qui acceptait assez facilement une fois que Léo l’ai rassuré par rapport à Jon. Cela pouvait paraitre anodin, mais qu’il prenne contact avec ses pères étaient un vrai geste. Alba savait qu’ils pouvaient être durs avec Léo, surtout Steen qui n’avait jamais pardonné Léo d’avoir laissé Alba pas une mais deux fois. Luke était bien plus tempéré, heureux de revoir l’homme dans la vie de sa fille. Il la faisait scintiller, toujours un sourire au lèvre quand elle parlait de lui. Mais il était aussi celui qui assombrissait ses regards et lui faisait verses des larmes. Tout ne pouvait pas être blanc ou noir et l’équilibre de leur relation n’avait pas été encore trouvée. « Mon père s’assagi en vieillissant. » Disait-elle en pouffant de rire avant d’embrasser la joue de son amant. Il avait bien raison Léo sur ce point là. Jonah était celui qui rassemblait. Chaque adulte était assez intelligent pour accepter les autres pour le bonheur du petit chérubin. La photographe ne partirait pas sans un au revoir à Jon, celui qu’elle n’avait pas quitté depuis des années. Parfois, ce n’était pas facile de comprendre leur relation, bien trop proche aux goûts des autres. « Je pense aussi … » Elle souriait à Léo d’avoir pensé à cet instant. Ça n’avait pas été facile pour les trois de se quitter. Même si Léo semblait plus détaché, elle voyait bien dans son regard que la séparation était aussi dur pour lui. Ces derniers mois il voyait Jon presque tous les jours, il n’y avait plus de garde alternée et les week-ends ils les passaient en famille. Alors ces quelques jours allaient être compliqués pour chacun mais excitante. Il séchait les larmes de son amante avant d’aller à l’aéroport. Alba découvrit que Léo dormait tout le long du voyage. Elle en était outrée, surtout qu’elle avait eu du mal à s’endormir, équilibrant son temps entre la lecture, les films ou la somnolence. Il se réveillait alors que l’avion atterrissait et elle l’accueillit avec un regard énervé. « Comment t’as fais pour dormir tout le long ? » Disait-elle dans une plainte avant de sourire. « Evidemment ! Mais tu as tout prévu ? » Elle ne serait pas étonné si c’était le cas, mais il allait devoir revoir ses plans. Alba ne laisserait jamais Léo tout contrôler dans ce voyage, comptant également apporter sa petite touche. « J’espère que tu as prévu une balade dans la forêt où on se perd. » Disait-elle en plaisantant alors qu’ils récupéraient leur valise.

L’avion avait cet effet apaisant sur Léo, il avait été habitué à le prendre depuis qu’il était gamin alors il n’avait aucune appréhension, au contraire, il était généralement plutôt surexcité les quelques heures qui précédaient un vol, c’était pour lui le début du voyage, d’une nouvelle aventure. Il se félicitait même d’avoir toujours gardé cette âme d’enfant en pensant de la sorte, il n’était pas encore blasé de ces périples. Et il n’espérait ne jamais le devenir, sinon autant tout arrêter. Il y avait de longues heures de vol pour arriver jusqu’à la capitale thaïlandaise, mais il fallait avouer que Léo avait très peu dormi les nuits précédentes, stressé à l’idée qu’Alba refuse de le suivre, mais aussi parce qu’il avait tout mis en œuvre pour honorer tous ses contrats en cours, tout terminer avant de partir, histoire d’être tranquille. Ils partaient pour quinze jours alors autant avoir l’esprit léger, sans devoir penser à son travail. Durant le vol il avait rêvé de Jonah, qu’il partait avec eux. C’aurait été une belle idée, un jour ils lui feraient découvrir ce pays qui les avait réunis et où il avait été conçu, après tout, sans Bangkok, pas de petit blond bouclé ! Mais cette fois encore ils devaient faire ce voyage tous les deux, pour se retrouver, pour mieux le retrouver lui à leur retour. Le laisser à Charlotte n’avait pas été facile, même si Léo essayait toujours de prendre un air décontracté quand il partait. Cette fois c’était pourtant différent, cela faisait des mois qu’il le voyait quasiment tous les jours, avant il était presque un père à mi-temps, maintenant il était bien plus présent dans la vie de son fils et ils avaient une tout autre complicité. Et puis cela faisait un moment, aussi, que Léo n’avait pas quitté Bowen, tout simplement. Il savait que Jon serait parfaitement heureux en leur absence, mais s’il avait séché les larmes d’Alba dans le taxi, les siennes n’étaient pas si loin non plus. Alors qu’il se réveillait doucement, il se faisait déjà houspiller par la galeriste. J’avais du sommeil à rattraper. Tu n’as pas dormi ? Mais sa mine renfrognée valait toutes les réponses. Il lui sourit et commença à attiser sa curiosité, ce qui eut pour effet de la faire sourire également. Il se redressa sur son siège et sortit un petit carnet avec une carte. Non, je n’ai pas tout prévu, juste les premiers jours. On va atterrir à Bangkok ce matin puis on prendra le ferry pour Koh Similan, on avait dit, à l’époque, qu’on irait y faire de la plongé et puis finalement on ne l’a jamais fait. J’ai prévu quelques heures de plongé avec un professeur, un hôtel les pieds dans l’eau. Et quelques surprises. Il lui sourit, un brin espiègle, il avait tellement hâte de redécouvrir ce pays avec elle, il leur restait encore tellement de choses à voir. Il lui montrait sur la carte ce qu’il leur restait encore à parcourir alors que l’avion avait entamé sa descente. Puis il rangea rapidement ses affaires, ils allaient toucher terre d’ici peu. Alors qu’il se levait, il lança un regard moqueur et entendu à la blonde. Les balades où on se perd je te les laisse, c’est ta spécialité, pas la mienne ! Il attrapa les valises, lui tendit la sienne et ils purent quitter l’avion. Avec seulement un bagage cabine ils furent rapidement sorti de l’aéroport, le séjour pouvait commencer. Un taxi les attendait dehors, ils furent accueillis par la chaleur étouffante propre aux pays d’Asie, Léo allait devoir s’y réhabituer. Il leur fallut encore quelques heures avant de poser leurs valises dans leur chambre d’hôtel. Le photographe n’avait pas menti, ils avaient les pieds dans l’eau, de la grande baie vitrée la vue était sublime. On leur avait offert un cocktail de bienvenue, Léo décida de s’asseoir sur le petit ponton pour le siroter tranquillement. Je pourrais rester ici une vie entière, comment s’en lasser ? Il ne réalisait pas qu’il aurait pu faire ce choix, quelques années plus tôt, de rester ici, de ne jamais partir, de ne jamais quitter Alba. S’il avait fait des choix différents, toute leur vie aurait été différente. Et c’était un peut tout le but de ce séjour, panser les blessures qu’il avait ouvert en l’abandonnant ici.

A l’aéroport, Alba avait ressenti cette pique d’adrénaline. Les voyages faisaient partis de son ADN et même si pendant quelques années, elle avait mit cette passion de côté, aujourd’hui ça revenait avec force. C’était cet amour de la découverte et du voyage qui avait réuni les deux australiens. Ils s’étaient aimés passionnément en Thaïlande. Il n’y avait aucun doute là-dessus. A cette époque, ils étaient naïfs et Alba pensait que le monde lui appartenait. La réalité avait été dur. Son voyage avait prit fin quelques semaines après le départ de Léo. Son photographe avait dormi tout le long du voyage ce qui agaçait la jeune femme qui n’avait presque pas fermé l’œil. Au moins, elle dormirait cette nuit pendant que Léo devra s’acclimater avec le décalage. « Comment ça du sommeil à rattraper ? On n’a pas dormi ensemble hier soir. » Disait-elle en pouffant de rire. S’il y avait une raison pour qu’elle et Léo soient fatiguées, c’était à cause de leur câlins nocturnes. Elle avait hâte de savoir ce qu’avait prévu le photographe pour ces deux semaines. Il la connaissait bien et elle savait qu’il avait laissé place à la spontanéité. Il y a quelques années, c’était arrivé plusieurs fois qu’Alba réveille Léo en plein milieu de la nuit parce qu’elle avait lu quelque part un nouveau lieu à découvrir. Non. Ils n’avaient jamais fait de plongée. Plusieurs fois ils en avaient parlé, mais cette année était passée vite. Le départ de Léo avait avorté plusieurs projets qu’ils avaient eu dont la plongée. Elle lui souriait, heureuse qu’il se souvienne de ce genre de détail. L’avion atterrissait mais Alba n’avait d’yeux que pour lui. « C’est parfait ! Merci ! » Alba avait envie de retourner à quelques endroits qui l’avaient marqué. Ce voyage c’était un peu la seconde chance qu’ils attendaient. Revenir sur les pas où tout avait commencé était romantique mais c’était également un risque. C’était dans ce pays qu’elle avait été aussi heureuse que malheureuse. Elle se retournait faussement outrée de la remarque du brun. « Je n’était pas perdue ! Tu étais juste impatient. » Disait-elle en riant alors qu’elle avançait dans l’aller de l’avion. Le trajet jusqu’à Koh Similan était asse long. Alba en profitait pour penser à Jon. Il lui manquait déjà, mais elle savait que ce voyage leur ferait du bien à eux deux. A peine arrivée, ils étaient déjà guidés à leur chambre, un cocktail les attendait. Elle croyait revivre ses anciens souvenirs, la vue était tout simplement féerique. Alba profitait de la chambre pour se changer et mettre une tenue plus légère pour supporter la chaleur thaïlandaise. Elle rejoignait Léo sur le ponton. Plusieurs fois, elle hésite à poser des question. La Thaïlande rappelait trop de souvenirs aussi bons que mauvais. Aujourd’hui, ils y étaient ensemble, sans ombre ou passé compliqué à gérer. Ils avaient muri et avaient un petit garçon blond qui les attendait. « La dernière fois qu’on était dans un tel cadre, tu n’avais pas ce tee-shirt. » Disait-elle avec un regard malicieux avant de poser la tête sur son épaule. Le soleil tapait sur ses épaules, tout était parfait. Elle se sentait presque apaisée Alba si seulement il n’y avait pas le spectre de leur passé. « Tu regrettes parfois ? » Demandait-elle. La départ de Léo avait toujours été un sujet sensible entre eux. Il ne lui avait jamais vraiment expliqué la raison. Alba ne savait même pas si elle voulait savoir. Après tout, n’était-elle pas heureuse aujourd’hui avec lui ?

Le photographe eut ce rire de connivence avec sa maitresse, ils se comprenaient, la plupart du temps, les nuis sans sommeil c’était à elle qu’il les devait, la blonde le maintenait éveillé par la chaleur de ses baisers, par ses caresses qui l’embrasaient totalement. Ils pouvaient des heures à faire l’amour jusqu’à l’épuisement, on disait qu’avec le temps, les années, l’habitude, le sexe était moins passionné dans le couple et que c’était normal. Mais pour ces deux-là il y avait toujours autant d’ardeur et s’ils pouvaient douter de beaucoup de choses concernant leur relation, ils n’avaient clairement pas à s’en faire quant à l’attirance physique qu’ils avaient l’un pour l’autre. Pourtant elle avait raison, Alba, cette nuit ils ne l’avaient pas partagé et Léo en était d’autant plus épuisé. Il joua avec les doigts de la blonde, du bout des siens, sur l’accoudoir qu’ils partageaient. Disons que je n’étais pas totalement serein, je n’étais pas sûr que tu dirais oui pour ce voyage. En d’autres termes, il avouait qu’il avait passé une nuit à angoisser sur le fait qu’elle pourrait le planter, on ne dirait pas, comme ça, mais Léo était plutôt stressé, quand il voulait. Il passa la fin du vol à lui donner les grandes lignes de leur séjour et du programme qui les attendait, rien de très planifié, ils se laisseraient guider, par leurs envies, par les souvenirs peut-être, des lieux qu’ils auraient envie de revoir, des sensations qu’ils auraient besoin de revivre. Ce voyage c’était un retour aux sources, une plongée dans leurs premiers souvenirs, pour la plupart joyeux, mais pas tous. Alba semblait sincèrement emballée par ce qu’il lui disait, Léo exultait, c’était un sans fautes jusque-là. Au terme de plus d’une journée de vol et de bateau, ils arrivèrent enfin dans leur hôtel, dans la soirée. Ils étaient passablement épuisés, le décalage horaire se faisait sentir. Ce soir ils dîneraient certainement dans leur chambre, ce qui ne les dérangerait pas, à l’époque ils adoraient manger dans leur lit, entre deux baisers. La blonde rejoignit son amant sur le ponton, elle portait une robe légère, très légère, de celles qu’elle ne portait quasiment plus depuis qu’elle vivait à Bowen, depuis qu’elle était maman. Il caressa sa jambe nue et se fendit d’un sourire. C’est une invitation à le retirer, ça ? Les habitudes n’étaient jamais très loin. Seulement elle posa sa tête sur son épaule avant qu’il n’ait eu le temps de quitter son t-shirt. Et elle posa cette question qui le laissa sans voix. Léo savait qu’ils auraient ce genre de conversation, c’était même un peu le but de ce séjour, mettre enfin des mots sur des années de non-dits, enterrer le passé pour mieux vivre dans le présent, avec seulement les bons souvenirs et plus aucune zone d’ombre. Seulement il ne pensait pas que ça arriverait si tôt. Une petite boule se forma dans sa gorge, une émotion toute particulière l’envahi, celle qu’il avait toujours refuser de laisser le perturber. Ce soir, pourtant, il était temps. Je n’aurais de cesse de regretter. Il ne niait pas, il ne se défilait pas, on était loin du Léo qui faisait l’autruche ou qui fuyait, cette fois-ci il assumait totalement. J’ai regretté à la minute où j’ai eu fermé la porte derrière moi. Il caressa ses cheveux avec tendresse. Il ne lui avait jamais dit pourquoi il l’avait quitté si brutalement. Et quand il l’avait trouvé à la porte de chez lui, trois mois plus tard, à Bowen, il l’avait accueilli si froidement qu’elle avait dû penser qu’il ne l’avait jamais aimé, que tous ces mois ensembles n’avaient été qu’une mascarade, qu’un jeu pour lui. Il avait porté un masque, longtemps, pour qu’elle le croit sans cœur, hermétique à son charme, insensible malgré tout ce qu’ils avaient vécu ensemble. Et même si elle avait fini par faire tomber le masque, il ne lui avait jamais dit la vérité.

Ça faisait des mois maintenant qu’ils se retrouvaient presque tous les soirs. Ils aimaient encore passer par la porte vitrée ou fermer la porte d’entrée délicatement pour pas que Jon entend. C’était inutile puisque tous les matins le petit blond voyait ses deux parents. Mais ça les faisait rire, comme s’il était interdit pour eux de se voir. Sauf que la nuit dernière, ils avaient fait lits séparés et pourtant Léo était fatigué. Son regard se posait sur celui du photographe et elle lui souriait. « Pourquoi tu as douté ? A cause de Jon ? » Ou peut-être que c’était autre chose. Pendant quelques instants, Alba y avait réfléchi, mais pas parce qu’elle ne voulait pas de ce voyage avec Léo. C’était juste le fait de laisser son fils en Australie, la séparation n’était pas toujours simple. A présent, ils avaient deux semaines rien que pour eux. Deux semaines pour parler, s’aimer et essayer de briser tout ce qui les retenait. Léo n’avait pas prévu tout le voyage mais quelques bribes qui plaisaient à la voyageuse qu’elle était. Tel des parfaits petits aventuriers, ils avaient appareil photo autour de leur cou si jamais l’envie leur prenait de capturer un moment. Le trajet pour aller à l’hôtel était un peu long mais elle avait apprécié cette ballade en bateau. Elle pu prendre quelques clichés de Léo qui se plaignait évidemment. Il n’était jamais le premier à se mettre en avant sur une photo, préférant être derrière l’objectif. Ils étaient fatigués et pourtant ils n’allaient pas dans le lit immédiatement. Le cadre était grandiose et Alba comptait profiter de l’eau et du ponton pour se reposer. Léo y était déjà tandis qu’elle était allée se changer pour mettre quelque chose de moins chaud. Léo avait fait sa valise et elle souriait. Dedans, il y avait des vêtements qu’elle ne portait plus spécialement. Cette petite robe légère, elle ne la mettait que dans des très rares occasions, les dimanches par exemple où elle savait qu’elle resterait au bord de sa piscine à lire et à dormir. Ce cadre lui rappelait un hôtel dans lequel ils avaient été quelques années auparavant. Comme elle le fit remarquer à son amant, à cette époque, elle ne portait pas de robe et lui pas de tee-shirt. Elle riait. « La prochaine fois je te dirais quoi mettre dans ma valise. » Le taquinait-elle avant de poser sa tête sur son épaule. Ses pieds fleurtaient avec l’eau, plongeant parfois un orteil dedans. Même s’ils en avaient pas discuté dans l’avion, elle savait tout comme lui qu’ils allaient parlé. Parlé de leur souvenir d’ici, de ce qu’ils voulaient à présent. Les conversations allaient riches en émotion, mais Alba fut impatiente. Peut-être qu’il avait regretté tout ce voyage. Après tout, il était devenu papa à la suite de leur rencontre et ils devaient à présent vivre avec l’autre. Il regrettait. Pas leur rencontre, pas leur voyage mais son départ. C’était une zone d’ombre dans leur relation, une question sans réponse qui revenait sans cesse dans l’esprit d’Alba dès qu’elle doutait. Plein de fois elle s’était refait les onze mois pour essayer de comprendre, mais finalement la question demeurait sans réponse. « Pourquoi t’es parti ? » Elle relevait la tête, essayant d’avaler les larmes qui menaçaient de couler. Ç’avait toujours été une blessure dans le cœur de la blonde et la fatigue ne l’aider pas à gérer ses émotions. « J’ai cru pendant longtemps que tout ce qu’on avait vécu je l’avais imaginé. » Avouait-elle. Ce n’était pas des reproches, elle avait presque guéri de ce moment. Mais elle voulait savoir.

Quelque part leur relation restait toujours au stade d’une idylle cachée, même si Jonah savait que ses parents se revoyaient, même si leurs proches étaient au courant également et qu’ils s’autorisaient à sortir ensemble, à être vus. Ils étaient encore et toujours ces éternels amants qui se glissaient dans la pénombre au milieu de la nuit, qui s’aimaient mieux la nuit que le jour. Et même s’il adorait cette fausse confidentialité de leur histoire, Léo avait besoin d’avancer, besoin qu’Alba soit plus que sa maîtresse, qu’elle sache et que lui soit plus que cet amant qu’elle cachait aux autres. Ce voyage c’était donc la meilleure façon de faire ce pas en avant qu’ils n’osaient faire en restant dans leur quotidien. Il lui répondit par un sourire presque gêné. Je sais que c’est lui qui passe avant tout maintenant. Ce n’était pas un reproche, il comprenait parfaitement qu’elle aime son fils plus que tout, qu’il soit sa priorité, mais quelque part il avait envie d’avoir sa place, de ne pas être simplement le père de Jonah. Au final, ce petit garçon était bien le seul qui avait réussi à lui voler sa première place qu’il chérissait tant. Et le pire étant qu’il ne pouvait pas lui en vouloir, le bougre était bien trop adorable ! Mais ils auraient bien le temps de se dire que leur fils leur manquait, durant ces deux semaines, pour le moment ils n’y pensaient plus, tout à leur joie de retrouver cette liberté qu’ils aimaient tant. Et de se retrouver tout simplement, eux deux, loin de tout. Au terme de ce long voyage ils étaient rincés, épuisés, même les quelques heures de répit que Léo avait eu dans l’avion ne comptaient plus à présent, il se sentait vide de toute énergie. Il savait que ça ne durerait pas, qu’après une nuit de sommeil il aurait hâte de prendre appareil photo et sac à dos pour partir à la conquête de ce pays qu’il avait tant aimé voilà quelques années. Dès leur descente de l’avion il avait retrouvé des sensations qu’il pensait avoir oublié, des odeurs qui lui rappelaient de souvenirs, il avait la Thaïlande dans la peau pour tellement de raisons, dont la principale était Alba. Ce nouveau séjour serait bien différent du premier, déjà parce qu’il avait une date de fin et aussi parce qu’il ne fuyait plus son passé, au contraire même, il comptait bien se réconcilier avec celui-ci, avec ces secrets qu’il gardait encore pour lui depuis trop longtemps. Il était conscient que s’il voulait avancer dans cette histoire avec la blonde, il devait être totalement transparent et ça commençait par le tout début, avant même leur rencontre. Le regard qui fixait l’eau transparente sans vraiment la voir, il était posé sur le ponton quand Jensen le rejoint, elle était belle dans cette robe qu’il avait choisie. En vérité il n’avait pas trop fait attention à ce qu’il avait mis dans la valise, il avait juste pris soin de prendre des vêtements qu’elle ne portait pas beaucoup ces derniers temps, pour qu’elle ne se doute de rien. Mais cette robe, elle l’avait beaucoup portée ici et évidemment ça lui plaisait, bien qu’elle se fût plus souvent retrouvée sans aucun vêtement parce que ce qu’il préférait c’était avoir accès à l’entièreté de sa peau, c’était admirer ses formes sans artifice, sans tissu qui les cachait. La prochaine fois je ne mettrai rien dans la valise, ce sera plus simple. Il répondait du tac au tac, mais elle ne fut sûrement pas surprise par cette répartie, encore aujourd’hui, il la préférait nue. Pourtant l’apparente légèreté des premières minutes laissa place à la curiosité de la blonde, elle ne lui laissait pas de répit. Mais Léo ne se dégonfla pas, s’il fût décontenancé quelques secondes, il choisi l’honnêteté, pour une fois. Parce qu’il savait que tôt ou tard, au cours de ce séjour, il le lui aurait dit. Il se sentait fébrile et quand elle posa sa seconde question, tout aussi difficile, quand il vit ses yeux brillants de larmes qui menaçaient de déborder, il s’en voulu encore plus. La douleur d’Alba était toujours aussi vive, même après des années, la culpabilité de Léo également. La photographe savait pourquoi son amant était parti, elle savait pour Ana, elle savait qu’il devait faire son deuil pour avancer, il n’avait jamais été très bavard sur le sujet, il ne s’était jamais étalé, mais elle savait. Seulement elle ignorait le point le plus important, celui qui l’amenait encore ce soir à lui poser cette éternelle question, pourquoi il était parti ? Pourquoi il l’avait abandonné. Il était temps de lui retirer sa peine, elle ne méritait pas de souffrir autant. C’était si fort, ce qu’on a vécu, c’est impossible à imaginer. C’était vrai, même si je me suis battu pour le repousser de toute mes forces. J’ai cherché à ne pas voir que tu t’attachais à moi, que tu tombais amoureuse de moi, j’ai essayé de me persuader jusqu’au bout que ce n’était qu’une histoire sans avenir et que ça n’aurait pas de conséquences. Et à côté de ça je me complaisais dans ta tendresse, dans ces sentiments naissants qui me faisaient tellement de bien. C’était si bon de me sentir … aimé. Il lui semblait que rien de ce qu’il disait n’avait de sens, il y avait tellement à dire, tellement à se faire pardonner. Léo avait pris l’amour d’Alba, il s’en était servi sans jamais rien rendre en retour et puis il l’avait jeté, vulgairement, comme s’il avait eu assez. Il savait à quel point il avait fait du mal. Mais elle ne savait pas combien ça lui en avait fait à lui aussi, même lui n’en était pas conscient.