La journée est encore jeune … | libre

Depuis que t’avais recommencé à être acrobate, que c’était ton métier à temps plein, que t’en vivais bien, t’avais obligatoirement dû en revenir aux saines habitudes de vie. En tout temps. Adieu, les mojitos de Perry - même si tu t’en permettais un de temps en temps. Mais clairement, tu ne pouvais plus abuser autant que tu l’avais fait durant tes années de hiatus lors de ton arrivée à Bowen, après la fermeture du cirque Cirkaös. Surtout, il te fallait reprendre un entraînement bien routinier. La discipline était la clé, et heureusement tu n’avais pas eu trop de mal à retomber dans les bonnes vieilles habitudes. Tu te levais avant tous tes colocataires, tu descendais silencieusement à la cuisine où ton smoothie pré-workout t’attendait, et tu prenais la route en le buvant en direction du complexe sportif. À cette heure-là, t’avais la paix, non pas que la présence d’autres sportifs te gênait, mais tu préférais avoir toutes les machines et toutes les barres d’entraînement à ta disposition. Il n’y avait toujours que quatre ou cinq autres early birds alors ça t’arrangeait. Tes écouteurs sans fil dans les oreilles - cadeau de Perry qui en avait marre de t’entendre te plaindre que tes fils te gênaient -, tu venais de terminer une série de chin up quand une femme t’interpella. T’enlevas un écouteur juste à temps pour l’entendre te demander de l’aide. Tu lui souris. « Ouais pas de problème. De quoi t’as besoin ? » Au gym ce pouvait être n’importe quoi, comme demande, peut-être qu’elle avait besoin que tu sois là en soutien pendant qu’elle faisait son bench press ou de quoi du genre. Ça te faisait plaisir. C’est vrai que parfois quand on s’entraîne seul, il faut être plus prudent, alors si elle préférait demander de l’aide plutôt que de risquer de se blesser, tu trouvais juste ça bien.

Quand t’étais plus jeune ça avait pu t’arriver, à toi aussi, de laisser sur la machine des poids bien trop lourd. Tu pensais juste pas à ça, t’étais un peu plus inconscient qu’aujourd’hui, peut-être aussi que tu voulais un peu faire le coq, montrer que t’étais fort au prochain mec qui suivrait. Mais c’était con parce que la prochaine personne, homme ou femme, risquait de se blesser à tenter de soulever ton poids pour le retirer. Aujourd’hui tu ne faisais plus cette erreur, cette bêtise, t’avais appris les règles de vie d’un gym. Même si t’avais pris une pause des salles d’entraînement dans les dernières années, t’avais quand même pas oublié ces principes-là. Contrairement à d’autres. « Ah, ouais … C’est Monsieur Muscles là-bas qui pense que tout le monde devrait pouvoir soulever ces poids. » Tu désignas, d’un bref coup de menton, un mec au loin qui était en train de boire un shake avant de reprendre ses haltères gigantesques. C’était un habitué du gym, pire, y’avait quasiment aucune visite durant laquelle tu ne le croisais pas. À croire que sa vie se résumait à s’entraîner ici, ce qui ne devait pas être franchement très bon pour le corps, hein. Tu retiras le lourd poids sur la machine que désirait utiliser la jeune femme, l’écoutant t’expliquer qu’elle tentait une remise en forme. « Je comprends. Je suis en remise en forme aussi depuis quelques mois maintenant. J’fréquentais les gyms bien avant, mais il y avait tout un tas de machines que je n’avais jamais vues, en m’inscrivant ici. » Expliquas-tu en te passant une main sur le front, tes cheveux étaient un peu mouillés par l’effort et des gouttelettes tombaient sur ton front. « Ils offrent pas des séances avec entraîneur, ici, à l’inscription ? » Demandas-tu en fronçant légèrement les sourcils, intrigué. Ça se faisait à certains endroits mais ici, t’avais pas demandé, tu ne jugeais pas en avoir besoin. Mais c’aurait pu être bien pour elle qui ne connaissait pas tous les appareils.

T’éclatas de rire, tentant quand même de contrôler le volume pour ne pas attirer tous les regards sur vous, dont celui de Monsieur Muscles que vous étiez en train de fixer tous les deux. Ton objectif d’aujourd’hui n’était pas de ressortir d’ici avec un nez cassé. « Le fameux chest-bras, c’est inventé pour lui, c’est ça ? » Ajoutas-tu avec un grand sourire. La jeune femme semblait déjà s’en vouloir d’avoir lâché un tel commentaire. C’était pas non plus ton genre de parler dans le dos des gens, même si tu aimais ton occasional tea. En fait, toi, t’aimais pas faire preuve de médisance, mais t’adorais écouter les autres se le permettre. Bref, avant de t’enfoncer davantage, tu retiras le poids sur la machine, afin de faciliter la tâche à la jeune femme qui n’aurait peut-être pas réussi à pousser aussi fort – ce n’aurait surtout pas été recommandé qu’elle teste cette limite. Avec les muscles, il fallait y aller en douceur dans les augmentations de charge, autrement les blessures devenaient inévitables. Puisqu’elle ne semblait pas en confiance absolue avec ses connaissances des équipements, tu demandas si elle s’était informée de la disponibilité d’entraîneurs pour la guider. « Oh, okay. Non moi je m’entraîne solo, j’ai longtemps eu un entraîneur, pendant, … pfiou, beaucoup trop longtemps, ouais. J’en avais marre d’avoir toujours quelqu’un derrière moi, ça me fait du bien, maintenant, d’y aller à mon rythme. » Avouas-tu. T’avais rapidement été pris sous l’aile d’un coach, alors que t’étais encore un enfant, pour être formé à devenir acrobate. Ça avait payé, t’avais été un des meilleurs acrobates de ta région, dans ta catégorie d’âge, mais quand même. Ça t’avait aussi volé des moments-clés de l’adolescence. La jeune femme se présenta à toi, tendant sa main vers toi, que tu attrapas avec un sourire. « Moi c’est Jackson. Mais tout le monde m’appelle Jacks. » Tu balanças ta serviette sur ton épaule. « S’il y a quoi que ce soit d’autre, Lee, n’hésite pas. Je suis pas entraîneur mais je peux te donner quelques infos, quelques trucs, je pense. » T’avais tellement baigné dans la mise en forme, le training, la musculation … t’avais quand même beaucoup appris sur le tas.

Tu ris à ton tour quand la jeune femme acquiesça à tes propos. Cette fois, c’est vrai, t’avais été un peu médisant et en plus, pas forcément très subtil. Ça, c’était ton vilain défaut : quand il t’arrivait de faire des remarques pas très cools sur les autres, tu n’arrivais même pas à le faire habilement, sans t’attirer des ennuis. Heureusement que tu t’échappais rarement et que, généralement, ça restait dans ta tête sans franchir la barrière de tes lèvres. Délaissant ce grand gaillard inconscient qui ne méritait pas toute cette attention anyways, tu suggéras plutôt à la jeune femme de se prendre un entraîneur qui pourrait au moins lui montrer la base. Généralement, c’était un service offert gratuitement avec l’abonnement, pour la première séance en tout cas. T’ignorais si c’était le cas ici mais ça valait le coup de le demander à la réception. Personnellement, tu n’en avais pas besoin, t’avais été largement coaché dans ton adolescence, ce que tu confias à la brunette. « Ouais je comprends l’envie d’y aller à ton rythme, c’est aussi pour ça que je préfère ne pas en avoir, maintenant. Ado, j’ai beaucoup trop poussé par moments, j’pense, juste pour suivre ce que mon coach voulait. Parfois écouter son corps, c’est le mieux à faire. » En même temps, t’imaginais que si elle précisait à l’entraîneur quelles étaient ses attentes, il ou elle respecterait son souhait. À la suite de cet échange, elle se présenta à toi, Leewana, et t’en fis de même en lui serrant la main. « Enchanté Lee. » Répétas-tu avec un sourire, avant de lui affirmer que si elle avait besoin d’être pour quoi que ce soit, qu’elle n’hésite pas. T’allais être à la salle pour une bonne heure encore, sûrement. C’était une bonne journée pour toi, tu débordais d’énergie, alors aussi bien en profiter. « J’ai toute ma journée, je ne travaille pas avant ce soir, j’suis là pour un moment encore alors … t’en fais pas, tu me dérangerais pas. J’l’aurais pas proposé sinon. » Tu lui fis un signe de la main, avec un sourire, avant de t’éloigner de la machine de tirage vertical qu’elle occupait, vers la machine sur laquelle tu t’apprêtais à t’installer avant que Leewana ne t’interpelles un peu plus tôt. Du coin de l’oeil, tu la regardas s’installer à la machine. Sans vouloir être trop observateur, déplacé ou insistant, tu remarquas qu’elle exécutait mal le mouvement. En plus de ne pas solliciter les bons muscles pour le mouvement, elle risquerait peut-être de se blesser. T’hésitas, un moment, parce que tu savais que ce n’était pas tout le monde qui aimait se faire reprendre, à la salle de gym. Et tu pouvais comprendre. En même temps, après la conversation que vous aviez eue, tu te disais que ce serait peut-être mieux reçu … Tu te levas finalement. « Excuse-moi, Lee … » T’attiras son attention. « Promis, j’étais pas en train de te fixer comme un stalker, c’est juste que … j’ai remarqué … ben, pour ce mouvement, tu pourrais cambrer juste un peu plus ton dos, en fait c’est con à dire, mais il faut bomber un peu plus le torse, et tu tires la barre vers ta poitrine. Là, ton dos va mieux travailler. » Lui indiquas-tu, mimant un peu le mouvement en même temps, n’osant quand même pas la toucher elle pour la replacer.

Évidemment, avec ce genre de propos, il te fallait t’attendre à ce qu’elle te questionne sur tes entraînements d’avant. Pour qu’un adolescent se foute une pression monstre pour plaire à son coach et suivre toutes ses indications à la lettre, il fallait être en training pour une discipline particulière. Tu hochas la tête avec un demi-sourire. « Non non, t’en fais pas, t’es pas trop curieuse. Et puis, je comprends que ça puisse piquer la curiosité de toute façon. » Admis-tu, ne lui en voulant aucunement d’avoir posé la question. Et puis, t’avais aucune honte à partager cette information, au contraire, c’était l’un des plus bels accomplissements de ta vie. T’avais tellement fait de sacrifices pour en arriver là, tu pouvais au moins en parler un peu, des fruits que ça avait portés. « Alors, ouais, enfin, athlète … rien d’olympique ou de compétitif ou d’quoi du genre. Mais j’étais, enfin, je suis encore acrobate aérien. J’ai passé une bonne partie de ma vie dans un cirque nomade mais maintenant, je me suis posé ici et je travaille au Cabaret Delirium, je ne sais pas si tu connais ? » Demandais-tu. Ça n’avait pas été ta décision, de te poser. Elle t’avait été imposée. Le cirque Cirkaös, celui que tu avais toujours connu, avait fait faillite. Pas facile pour un cirque de plus petite envergure, de survivre face à des géants de l’industrie comme le Cirque du Soleil – rêve que tu caressais encore, parfois, du bout des doigts. Mais t’avançais en âge. Ta fenêtre se refermait lentement mais sûrement. Tu indiquas finalement à Leewana qu’elle n’avait pas à hésiter si elle avait besoin d’aide à nouveau, mais finalement ce n’est pas elle qui revint vers toi, c’est plutôt toi qui osas l’accoster encore, cinq minutes plus tard environ, pour la conseiller sur la position à adopter pour son exercice. Elle en sembla pas t’en vouloir, ce qui te rassura. « Oui, c’est exactement comme ça ! Et malheureusement, ce ne sont pas toutes les postures d’entraînement qui nous donnent l’air cool. » Dis-tu avec un doux rire, un peu moqueur mais sans plus. De toute façon, elle n’avait pas l’air ridicule du tout, non plus. Ton sourire s’agrandit quand elle sentit la différence, et tu hochas vivement la tête, ravi. « Ça fait toute la différence hein ? » Tu lâchas un petit son de surprise toi aussi quand elle lâcha la barre, le poids qui retomba faisant un énorme bruit dans le gym. Ça te fit plus rire qu’autre chose. « Si tu préfères, j’te fais dès maintenant un petit tour de toutes les machines et je te montre rapidement comment les utiliser, comme ça, tu sais quoi faire les prochaines fois avec n’importe quel exercice. » Tu t’avançais peut-être un peu trop. Pas tout le monde n’était sociable comme toi, et c’était correct aussi. « Enfin, j’veux pas m’imposer, c’est peut-être mieux un vrai entraîneur embauché par la salle, aussi. »

Tu souris, t’avais pas de mal à imaginer qu’elle n’était pas sportive à cet âge, dans le sens où, normalement à cet âge, l’entraînement n’était la priorité que d’une poignée d’adolescents. Les autres profitaient de la vie. « Y’a des moments où j’aurais préféré ne pas l’être non plus. Pas à ce point. » Dis-tu en haussant les épaules, un petit sourire timide. C’était du passé. C’était fait. Tu ne pouvais rien y changer et puis, ça t’avait permis de devenir l’homme que tu étais aujourd’hui. T’aurais peut-être été complètement différent, si t’avais passé ton adolescence à la même place, à faire la fête, à faire comme les autres. T’expliquas à Leewana que tu étais acrobate aérien, désormais au Cabaret Delirium à plein temps. T’avais presque pas de soirées à toi, mais ça valait le coup. « Ah oui le Wojna’s ! Mon copain est fan #1 de mojitos alors forcément, on y va de temps en temps. » Mais t’avais pas souvenir d’avoir eu Leewana comme serveuse ou comme barmaid. Elle travaille peut-être en cuisine. « Viens me voir en arrière-scène après le spectacle si jamais tu viens au cabaret un de ces jours ! » Lâchas-tu avec un grand sourire. Tu ne faisais pas des arts de la scène pour rien, t’aimais être le spectacle, t’aimais que les yeux soient rivés sur toi et tes acrobaties parfois risquées. Sur cette invitation, t’étais retourné à tes machines mais tu avais rapidement constaté que Leewana s’y prenait “mal” avec certaines positions pour certains mouvements. Surtout pour éviter qu’elle se blesse, tu retournas la voir pour lui montrer quelle position était optimale pour travailler. « À voir comment certaines personnes se prennent en photo après chaque répétition j’crois que y’a un peu d’envie d’être cool là-dedans. » Ce n’était visiblement pas le cas de Lee, ni le tien. Puisqu’elle était motivée d’ailleurs, et réceptive à tes commentaires, tu lui proposas de faire le tour de toutes les machines avec elle pour lui montrer comment elles fonctionnaient. C’était intimidant les premières fois et comme ça, à partir de maintenant, elle pourrait toutes les faire sans hésiter. Ce serait plus agréable pour elle. « J’prends l’offre. J’viendrai avec mon copain, il va flipper en te voyant m’offrir ce verre, je vais pouvoir le mener en bateau toute la soirée. » Tu ris, avant de froncer les sourcils. Peut-être que Perry allait juste se dire que ce serait l’occasion pour un threesome avec Leewana, s’il pensait qu’elle te draguait. Tu gardas cette réflexion pour toi. Tu te dirigeas vers la prochaine machine, qui en était une de rowing, et tu l’expliquas à Leewana, comme pour toutes celles qui suivirent. Bras, épaules, dos, pectoraux, abdominaux, jambes, tout y passa.

Je ne peux comprendre, en vrai, je ne peux qu’imaginer que c’était pas facile tous les jours. D’avoir une discipline aussi rigide pour un adolescent. Je mords ma lèvre inférieure en hochant la tête doucement. « Je ne peux qu’imaginer ! » Puis on discute un peu, je lui raconte que je ne suis pas ici depuis super longtemps. Donc peu familière avec les endroits. Je n’ai pas pris le temps de sortir réellement, ça ne me ressemble pas tellement. Je suis quelqu’un d’assez sage, j’ai perdu pas mal d’années ou j’aurais pu en profiter, je ne regrette pourtant rien. Je ne me souviens pas de l’avoir vu à mon travail, mais il faut dire que je ne retiens pas toujours le visage de mes clients. « Il a bon goût, c’est vrai qu’ils sont délicieux. » Je souris encore une fois puis je lui dit que j’irais peut-être faire un tour. « On peut ? Je ne savais pas qu’on pouvait passer aussi facilement en arrière scène ! Mais je te promets que si je viens, j’irais te voir après ta performance ! » Je note cette sortie à mon agenda, ça pourrait me faire du bien de sortir de chez moi.

Je le laisse continuer son entraînement avant qu’il ne revienne pour m’expliquer le fonctionnement de la machine pour ne pas que je me blesse. Encore une fois, on tombe un peu dans le jugement, mais ça me fait bien rire. Ce n’est pas méchant, mais il est vrai que certains prennent cette place pour un site de rencontre. « Je dois être trop vieille pour ce genre de truc. J’ai jamais été douée avec les selfie. » Je ris en faisant semblant de prendre la pose, les lèvres en cul de poule. Puis pour le remercier de son aide, je lui offre un verre lorsqu’il viendra au Wojna’s à sa réplique je rougis presque. « Je ne veux pas faire de jaloux non plus ! S’il faut, je lui en offre un aussi parce que tu as été vraiment un amour avec moi ! » Je ne veux pas faire de chicane de couple non plus ! Puis je le suis dans le gym prenant des notes mentales sur le fonctionnement des machines. Je pense que aujourd’hui ce  sera tout pour moi ensuite. J’ai déjà passé pas mal de temps ici. « Merci encore de ton temps Jacks. Oh et si tu veux je te laisse mon numéro, si jamais tu viens au wojna’s ! Il me fera plaisir de te revoir ! ’  

Tu souris alors que Leewana affirmait que les mojitos du Wojna’s étaient effectivement délicieux. « C’est rien contre le Wojna’s mais en vrai, mon copain je pense qu’il pourrait aimer n’importe quel mojito, même celui du bar miteux au coin de la rue. » Tu n’avais pas un bar miteux en tête mais bon tout le monde avait un peu en tête un bar louche quelconque au coin d’une rue. C’était juste une façon de parler. « Cela dit j’admets que j’aime bien ceux du Wojna’s, moi qui ne les aime pas en toutes circonstances. » Parfois c’était beaucoup trop amer, mais ceux du bar à rhum et tapas était juste bien équilibré. T’invitas finalement Leewana à venir te voir en arrière-scène au cabaret, avant ou après un spectacle, si elle venait un de ces quatres. « Je pense que tu pourrais te faufiler sans que personne ne pose de questions, en vrai. Mais si jamais quelqu’un te stoppait, t’aurais qu’à leur dire que tu viens me voir. Jackson Lewis-Reyes. » Elle ne s’en souviendrait peut-être pas, de ton nom complet, cela dit. Sauf si elle tenait vraiment à venir te voir au Delirium, alors elle le noterait dans un coin de sa tête. Mais t’étais juste un inconnu croisé à la salle de gym, après tout. Cette conversation ne mènerait peut-être à rien de plus que ça. D’ailleurs t’étais déjà en train d’y mettre fin, la laissant s’entraîner et retournant toi-même à ta routine de training. Cependant, quelques minutes plus tard à peine, t’étais de retour vers elle afin de corriger une position. Tu le faisais sans arrière-pensée, sans manque de respect. Juste un petit coup de main entre personnes qui s’entraînent. Tu ris quand tu vis la duck face qu’adopta la jeune femme alors que vous parliez de selfies. « C’est un art qui s’apprend ! Perso’ je mentirais si je te disais que je n’en prends jamais. Mais j’cache pas que parfois j’ai envie d’avoir l’air cool, surtout sur Instagram. » Elle avait quel âge, en vrai, Leewana ? Elle ne te semblait pas si vieille que ça. Si ça se trouve elle n’avait pas de compte Instagram et traînait encore sur Facebook, plutôt. C’est pas tous les trentenaires qui pouvaient être aussi in que Perry. Haha. En vrai, tu pensais ça mais t’étais toi-même plus du tout “un jeune”, étant donné que t’étais pas de l’ère TikTok. T’avais un compte, bien sûr, et t’y publiais parfois des vidéos d’acrobaties, mais sans plus. Tu préférais encore jouer au mannequin sur Instagram. « Ah non, faut pas lui offrir, ça va lui monter à la tête et après c’est moi qui vais devoir l’endurer, lui et son gros égo ! » Tu plaisantais mais à moitié quand on connaissait le personnage de Perry Peach. Tu l’aimais gros comme l’univers, cela dit. Bref, tu fis le tour de toutes les machines avec Leewana, montrant le mouvement à chaque fois et le lui faisant pratiquer. Mine de rien, ça vous faisait votre entraînement de la journée. « Ça m’a fait plaisir, Lee. Et ouais j’vais le noter, attends. » Tu sortis ton téléphone et t’entras un nouveau contact, en enregistrant le numéro qu’elle te donna à l’instant. « Tiens j’t’ai envoyé un texto, comme ça t’as mon numéro aussi. Si jamais tu viens au Delirium, t’auras qu’à m’dire. »

TERMINÉ