Only you can set my heart on fire (ciàlia)

Sa rupture avec Percy remontait à quelques semaines, maintenant. Quelques semaines nécessaires à Tahlia pour tourner une page qui avait compté pour elle. Quelques semaines durant lesquelles elle n'avait pas informé Ciàran de son récent célibat. Bien sûr, ils avaient continué à se parler, parce qu'elle ne pouvait se passer de lui, de ses messages, de ses nouvelles. Parce qu'elle voulait rattraper les trois années passées sans lui. Mais elle ne s'était pas sentie disponible pour autant. Du moins, jusqu'à ce fameux message où elle lui avait annoncé sa rupture, message qui avait donné suite à un rendez-vous, le soir même, au Elm Street. Il était temps de mettre les choses au clair, de voir ce que cette rupture engendrait désormais pour eux. Evidemment, ils s'étaient cherchés, s'étaient taquinés, s'étaient lancés quelques sous-entendus, mais le amore de Ciàran qui avait conclu leur conversation laissait remonter toute la profondeur de leur relation. C'était donc entre appréhension (parce que Tahlia flirtait toujours avec ses insécurités) et excitation qu'elle avait retourné son dressing. Elle avait opté pour un look casual chic, avec un caraco en satin noir laissant deviner la lisière de sa poitrine, un pantalon slim et une veste cintrée qu'elle gardait en main, la température nocturne étant encore assez haute. Evidemment, cela l'avait mise en retard ! Alors, elle laissa sa chevelure brune, légèrement ondulée, en cascade sur ses épaules, mit un peu de maquillage et enfila en trombe ses escarpins avant de prendre la route du Elm. A peine entrée dans l'établissement, ses yeux verts se posèrent instinctivement sur cette silhouette familière. Ciàran était là, au comptoir, comme il l'avait dit. Juste en le voyant là, elle sentit un poids se délester de ses épaules, elle sentit ses questionnements s'envoler au profit de son cœur qui s'emballait. Elle s'avança jusqu'à lui, tout sourire, se planta à ses côtés et entama la conversation, charmeuse :  « Vous attendez quelqu'un ? »

Il est difficile pour toi de savoir comment appréhender ce rendez-vous avec Tahlia. Difficile de savoir où vous en êtes à présent qu'elle t'a avoué avoir rompu avec Percy. Tu sais pertinemment que vos retrouvailles sont au coeur de sa rupture mais, pour autant, tu ne sais pas réellement ce que ça veut dire pour vous. C'est sans doute ce soir que tout va se jouer - ou presque. C'est sans doute ce soir que les choses vont s'éclaircir pour l'un comme pour l'autre. Une chose dont tu es certain, néanmoins, c'est que l'envie d'être avec elle ne fait que s'accroitre. Ces échanges de sms durant ces quelques semaines n'ont fait que renforcer cet amour que tu éprouves pour Tahlia. Un amour pur et sincère que tu n'as jamais connu ou même ressenti avant elle. Avec elle, tu as découvert bien plus de choses qu'en trente années de vie de célibataire. Tu as bien eu quelques histoires par-ci par-là mais rien de bien sérieux. Et rien qui te donne envie d'aller aussi loin qu'avec la brune. C'est donc à la fois impatient et légèrement perturbé que tu te rends au Elm, où vous vous êtes donnés rendez-vous. Tu es le premier arrivé alors tu te postes au bar, comme tu le lui as dit, ne tenant plus en place. Tout ce dont tu as envie, là, c'est de la voir se poster à tes côtés, sur ce tabouret haut. Heureusement, l'attente ne fut pas très longue. Alors que sa voix s'élève, tu sens un frisson te parcourir l'échine. Un sourire se dessine immédiatement au coin de tes lèvres. Une fois à ta hauteur, tu peux sentir le parfum de Tahlia qui te ramène doucement à la maison. C'est bon, c'est doux et c'est surtout rassurant. « Malheureusement oui... Une incroyable brune qui me fait tourner la tête. Vous la connaissez peut-être... » Souffles-tu, mystérieux. « Elle s'appelle Emma. » Finis-tu par ajouter avant de rire. S'il y a bien quelque chose que tu aimes faire, dans la vie, c'est la taquiner et entendre son rire. Un son qui te fait du bien à tous les niveaux. « Qu'est-ce que tu bois ? » Demandes-tu enfin, faisant signe au barman de s'approcher.

Jusqu'à présent, il n'y avait eu que des mots, des mots lourds de sens qui montraient que, trois ans plus tard, leur page n'avait pas été tournée. Maintenant, étaient-ils prêts à donner plus de sens à ces mots-là ? De les laisser devenir des actes ? Sa rupture avec Percy était un premier pas. A eux de voir s'il y allait en avoir, un deuxième, puis un troisième, pour que leurs chemins redeviennent une route commune. Mais malgré toutes les craintes, tous les doutes, toutes les questions, il y avait une certitude qui primait chez Tahlia : elle n'avait plus envie de perdre Ciàran. Durant trois ans, elle avait vécu en étant incomplète. A peine avait-il remis un pied à Bowen – et dans sa vie – qu'elle avait l'impression d'être en parfaite adéquation avec elle-même. Il avait ce pouvoir-là, Ciàran. Alors oui, peu importe ce qu'ils allaient devenir, elle lui laissait une place dans sa vie. Arrivée au bar, elle s'empressa de le rejoindre, tentant de faire abstraction de ce déchaînement d'émotions en elle. Il y avait cette chaleur qui l'envahissait, ce désir qui étreignait ses entrailles en le sentant près d'elle, ces frissons en entendant sa voix et son accent si charmant, cette envie et besoin de sentir son regard sur elle. Bien sûr, elle fit son entrée, joueuse. Ce qu'elle aimait avec lui, c'était qu'il répondait aussitôt à son jeu. Elle arqua un sourcil quand il parla de cette brune incroyable, sachant totalement qu'il allait retourner la situation. Pas manqué. Tahlia éclata de rire alors qu'il évoqua une certaine Emma, rétorquant aussitôt : «Oh mais quelle coïncidence, c'est mon deuxième prénom ! » Non. Mais elle haussa les épaules, ajoutant : « Tant pis pour cette Emma. La place est prise. » Elle se hissa sur le tabouret, lui adressant un regard complice. Elle se tourna vers le barman qui approchait, après que Ciàran l'ait demandé. « Un mojito, s'il vous plaît. » Elle laissa Ciàran passer sa commande, avant de laisser le barman s'éloigner. Là, elle posa son regard sur le bel italien et reprit : « ça me fait du bien d'être là, ce soir, avec toi. » Surtout que c'était voulu et pas le fruit d'un hasard. « Même si je pense que tu dois te poser des questions, non ? » reprit-elle avec un sourire. Comme elle, sûrement.