Lola & Hayden

Ce soir, c’est la fête ! Ça fait deux mois jour pour jour que mon pote Matthew et moi-même sommes arrivés en Australie et c’est quelque chose qu’il faut célébrer ! Alors ni une ni deux, on a enfilé nos plus beaux habits et on est sorti dans un bar en ville. Ne me demandez pas le nom, je ne m’en souviens déjà plus. Il faut dire que le lascar a déjà payé deux tournées de shooter et quand on les enchaine à deux… Ça ne fait pas forcément un bon mélange… Une chose est sûr, c’est que je suis loin d’être bourré mais pour autant, j’ai une sacrée envie de m’amuser. Vous m’avez vu en temps réel quand je dis des conneries à tout va. Et puis maintenant, vous allez découvrir le Hayden qui a un petit coup dans le nez… C’est à mon tour d’aller chercher une tournée. Et à peine je suis parti, je me retourne pour le regarder et il est déjà en train d’emballer une fille. Il n’y a pas à dire, c’est un sacré charmeur ce mec. Il pourrait presque me faire de l’ombre… J’arrive enfin au bar.

« Je peux avoir une tournée de shooter s’il te plait ? Et 5 minutes de ton temps pour que tu viennes boire un coup avec moi ? »

La serveuse arrive et m’annonce qu’elle va me préparer la tournée de shooter. Un large sourire se forme sur mon visage. Je m’aperçois que de plus près, elle est encore plus jolie que ce que j’avais pu remarquer précédemment. Puis, mon sourire s’efface, laissant place à une moue de tristesse. En effet, la jeune femme vient de décliner ma proposition, m’expliquant que sur ses heures de travail, elle ne peut pas consommer de l’alcool.

« Je comprends. Je ne voudrais pas être à l’origine de votre perte d’emploi. »

Bah oui. Si elle commence à être saoule pendant son travail, son patron n’aura plus qu’une envie, la virer. Et je ne suis pas le genre d’homme qui veut avoir ceci sur la conscience. Néanmoins, je ne m’avoue pas vaincu aussi facilement, et je tente donc une nouvelle approche, avant qu’elle ait le temps de s’en aller vers de nouveaux horizons, ou plutôt vers de nouveaux clients. Si elle part, je sais que ce sera mort pour moi…

« Et si jamais j’attendais la fin de votre service ? Je ne suis pas pressé après tout et je pense que votre compagnie vaut la peine d’attendre. »

Elle semble satisfaite de ma réponse. Et lorsqu’elle m’annonce qu’elle a l’habitude de mettre à la porte les hommes qui ne réagissent pas de la même manière que moi, je me dis que j’ai bien fait de me la jouer gentleman. De toute façon, on m’a toujours dit qu’on n’obtient rien par la force. Je fais une légère grimace, du style « j’aimerais pas être à leur place ».

« C’est la moindre des choses ! »

Phrase banale, je vous l’accorde. Elle va bientôt croire que je suis complétement inintéressant et ce n’est pas ainsi qu’elle va accepter que je l’attende à la fin de son service. D’ailleurs, il faut que je trouve un moyen pour en savoir d’avantage à ce sujet. Bientôt, elle trouve un moyen plutôt bien tourné pour refuser ma proposition mais cela m’amuse. Je me tourne alors et montre un homme du doigt, qui n’est autre que Matthew.

« Vous voyez l’homme là-bas ? » Je porte de nouveau mon attention vers elle avant de reprendre. « Ces shooters sont censés être pour lui – et moi bien entendu. Mais bon, il est plutôt occupé avec la fille en train de lui lécher la langue… Donc autant dire que je suis seul. »

Et oui, c’est toujours comme cela quand on sort en ville entre potes. On commence la soirée ensemble mais il arrive toujours ce fameux moment où l’un de nous deux trouve une meilleure compagnie et délaisse l’autre complétement.

« Donc vous n’avez plus de raison de refuser… »

Je tourne de nouveau la tête vers Matthew. J’aurais dû m’en douter que la soirée se finirait ainsi mais je n’ai jamais le cœur à lui dire non quand il me demande si on peut sortir. D’ailleurs, c’est souvent moi qui réclame plus qu’autre chose et lui qui finit seul au bar, mais il est hors de question que je l’avoue à la jeune femme.

« Oh j’ai l’habitude vous savez ! Trop bon trop con comme on dit ! Ou plutôt un super co-pilote peut-être ?! Votre idée n’est pas bête mais j’avais plutôt envie de découvrir la serveuse qui m’a tapé dans l’oeil ce soir qu’une autre cliente. »

Un nouveau sourire, et elle finit par accepter de me rejoindre à la fin de son service avant de retourner aux autres clients. Je ne veux pas une nouvelle fois l’empêcher de travailler correctement, surtout si cela met en péril la soirée de d’autres personnes qui ont besoin de leurs boissons.

« Super ! Je vous attends là-bas alors ! »

Je file vers la table que je lui ai montré du doigt, seul avec mon mètre de shooter et je continue de l’observer pendant tout ce temps. Une jeune femme vient m’accoster, pleine d’audace je dois avouer… mais je l’envoie balader. Oui, ce n’est pas vraiment dans mes habitudes. Bientôt, alors que j’ai terminé 7 verres sur 10, Matthew vient me voir et m’annonce qu’il s’en va avec sa charmante compagne. Et peu de temps après, la brune arrive.

« Ça a bien marché ce soir niveau pourboire ? »

Je ne sais pas trop pourquoi j’aborde ce sujet mais bon, histoire de faire la conversation… Je le regrette néanmoins, je ne veux pas qu’elle croit que je suis un homme qui ne pense qu’à l’argent !

Elle s’installe en face de moi et j’apprends alors que j’ai assisté à son premier service. Je ne pensais vraiment pas à cela car elle s’en est tirée comme une chef. Peut-être a-t-elle eu une expérience de barman dans le passé. Après tout, c’est un métier assez commun, surtout pour les jeunes femmes.

« Je suis donc le premier client avec qui vous acceptez de boire un verre j’imagine ?! Quel honneur ! » Je lui adresse un nouveau sourire, le plus charmeur que j’ai en réserve. « En tout cas, je vous ai observé depuis notre discussion et je n’aurais jamais pu deviner que c’était votre premier soir. Vous vous en sortez comme une chef ! »

Ce compliment est sincère. J’ai moi-même eu l’occasion d’être serveur à plusieurs reprises, même si c’est loin d’être une habitude et il faut dire que je ne m’en sors pas toujours très bien. Je la vois se servir. Elle fait bien !

« A ce rythme-là, je vais devoir aller redemander une tournée. »

Je dis cela sur un ton amusé. Je suis loin d’avoir assez bu pour la soirée alors accompagné ou non, j’aurais fini par la demander cette autre tournée. Elle en vient à me parler de Matt, que visiblement elle a vu partir.

« Oui, c’est lui. Disons qu’une jeune femme lui a proposé qu’il la raccompagne alors il a été incapable de dire non. Un preux chevalier vois-tu ! Ou peut-être qu’il avait autre chose en tête… J’avoue que je n’ai pas demandé. »

Je fais style que je ne sais rien mais au fond, je me doute tout à fait des intentions de mon ami.

C’est vrai que je n’ai pas attendu qu’elle arrive pour commencer à boire. En même temps, seul dans un bar, abandonné par l’ami qui m’accompagnait, je me voyais mal rester dans mon coin sans alcool. J’ai patienté sagement, les sirotant les uns après les autres tout en regardant la foule et plus particulièrement la belle serveuse qui m’avait servi cette première tournée.

« Bien sûr, c’était fait pour ça, entre autres, à la base ! »

Je fais signe au serveur qui a repris le shift de me remettre la même chose. J’ai de la chance, peu de monde au bar, il me voit rapidement. Il ne manquerait plus qu’on tombe à court de munition. On en vient sur Matty et ma réponse apporte une nouvelle question aux lèvres de la jeune femme. Je souris de nouveau.

« Je n’ai pas osé mettre mon armure de chevalier ce soir, de peur d’effrayer ces gentes personnes qui se trouvent autour de nous. » plaisantais-je. « Mon ami et moi-même faisons partie de la même division de chevalier mais nos intentions peuvent être différentes. »

Matty et moi n’avons pas tout à fait la même manière d’aborder les femmes, ni la même vision de ce qu’est une femme d’ailleurs… D’où le fait que je parle d’intentions qui peuvent différer… Vous aurez bien compris que je veux paraitre le mieux possible aux yeux de cette charmante demoiselle.

« S’il y a besoin de vous ramener chez vous en toute sécurité ou même de vous porter dans mes bras parce que vous avez trop mal aux pieds et n’arrivez plus à marcher, je me ferais un plaisir de vous rendre ce service. N’importe où, n’importe quand. Telle est ma devise de chevalier servant ! »

Je m’imagine tellement en armure de chevalier, entrant tel un maitre d’armes dans le bar. J’aurais claquer la porte un grand coup pour faire la plus forte des impressions et tout le monde, hommes et femmes, auraient regardé dans ma direction pour savoir qui venait d’entrer. Dans un univers parallèle, ils auraient tous adoré me voir, m’auraient limite supplié de passer un peu de temps en leur compagne mais sur Terre, ils se retourneraient vite avant de se moquer ouvertement de moi. Des rires auraient sans toute fusé très rapidement.

« Je la mettrais la prochaine fois si cela peut faire plaisir à mademoiselle. » ajoutais-je avec un sourire.

Ou pas à vrai dire… Je me vois mal faire le tour des magasins de déguisements juste pour les beaux yeux d’une demoiselle. Néanmoins, s’il n’y avait que cela pour la séduire, je le ferais volontiers tout de même. Je vois que je la fais rire et comme le dit le dicton « femme qui rit à moitié dans mon lit ». Lu et approuvé ! Ou plutôt vécu et approuvé me concernant. On en vient à ma vision des femmes et là, je me vois dans l’obligation d’embellir légèrement la réalité.

« C’est moi bien sûr. Ce n’est sans doute pas lui qui aurait attendu que tu finisses ton service, sage dans un coin. Moi, je me crois encore à rêver que les femmes sont toutes des princesses qui méritent qu’on leur accorde toute notre attention. Lui… il les emmène directement chez nous. »

Bon, c’est vrai que je n’ai pas avoué que j’en ramène plus que Matthew à la maison des jolies demoiselles mais ça aurait tout cassé… Laissons la rêver de ce prince charmant que je ne suis pas. Alors que les shooter arrivent, je m’empresse d’en attraper un avant de le lever pour trinquer. Oui, trinquer avec des shooter, c’est fun je trouve !

« A notre rencontre. » lançais-je alors.

Puis, alors qu’elle mentionne que ma proposition semble être intéressante, je souris de nouveau, charmé par ses paroles et son visage enjôleur. Son rire est écarlate, un vrai délice pour mes oreilles. Elle finit par me demander si je sais danser.

« Tu as déjà vu un chevalier qui ne sait pas danser ? J’imagine que tu voudrais même une petite démonstration. »

Alors sans plus attendre, je me lève, délaissant mon verre désormais vide sur la table. Je commence à me dandiner comme je le fais si bien. Mes gestes sont plus drôles qu’autre chose mais je ne suis pas quand même un danseur pitoyable. Bientôt, j’attrape sa main pour qu’elle me rejoigne et je l’attire vers moi.

J’apprends bientôt que la jeune femme ne croit pas aux contes de fée et je ne peux pas m’empêcher d’éprouver un sentiment de désolation pour elle. En effet, j’ai toujours été un grand adepte des rêves. Ils donnent un espoir que l’on ne peut retrouver nul par ailleurs que dans les contes. Mais après tout, chacun son truc. Elle est sans doute plus intelligente et réaliste que moi, voilà tout. Néanmoins, alors que je vois une perche tendue dans sa dernière réplique, je la saisie tout de suite.

« Que me dis-tu là ?! Je suis là maintenant alors le sortilège est rompu. »

Je lui fais un large sourire satisfait. Je sais que je suis un grand dragueur mais il m’arrive tout de même de penser ce que je dis. Dans ma vie, je n’ai encore jamais rencontré une femme qui m’a donné envie de me poser et de construire une famille. Pourtant, je n’attends que ça même si je n’oserais jamais l’avouer. Je ne dis pas du tout que la jeune femme est celle qui arrivera à me changer sur le plan des relations mais qui sait de quoi est fait le destin ?

On se lance ensuite dans une danse endiablée au rythme de la musique. J’ai bien conscience d’avoir l’air ridicule et j’en profite pour accentuer ce trait. La demoiselle, au bout d’un moment, n’en peut vraiment plus et explose de rire. Je ne me fais pas prier pour en faire autant. Puis, alors que la brune me ramène un shooter que je m’empresse d’avaler, je lui réponds.

« Je suis très heureux de l’apprendre ! Je n’ai plus qu’à continuer à faire l’idiot dans ce cas. »