ANNA&NATHAN - Family Business

« Nathan? Nathan, descends! Il est quinze heures quarante-cinq poussin, tu vas être en retard ». Je lève les yeux au ciel, agacé par le sobriquet ridicule dont m’affuble ma mère. Pour un gamin de cinq ans ça n’a rien de foncièrement gênant, mais à mon âge franchement… « Ta sœur va être de mauvais poil! » Je soupire. Je suis prêt à parier qu’elle va être en retard de toute manière alors, pourquoi me presser? Anna ne sait pas ce qu’est la ponctualité, cette notion lui échappe totalement. En tout cas, lorsqu’elle a rendez-vous avez moi. « NATHAN?! ». Je tape du pied, ça commence à bien faire maintenant! « OH CA VA, J’ARRIVE! » je râle pour la forme en dévalant les escaliers quatre à quatre. Avec ces bêtises, je n’ai pas eu le temps de dire au revoir à Rina. Je me suis déconnecté sans crier gare et ça me met de mauvais poil. Je vais passer pour quoi, moi? « Bon alors, on y va? » je demande en enfilant mon manteau. Ma mère sourit et attrape ses clefs de voiture après quoi elle me dépose devant la plage où je suis censé retrouver ma sœur aînée. Je ne suis pas surpris de constater qu’elle est en retard et j’ai le temps de boire deux verres avant que madame ne daigne se montrer. « Ah ba quand même! C’est pas trop tôt » je m’exclame en la voyant arriver.

« Bonjouuuuur mon chatoooon ». Je lève les yeux au ciel et pousse un long soupir. Non, mais elles n’ont pas bientôt fini avec leurs surnoms débiles?! Qu’est-ce qui se passe avec les filles Wilson, elles se sont donné pour mission de me gâcher la vie? De me déposséder de toute virilité? Je suis prêt à parier qu’elles se sont alliées contre moi, tiens! Un juron m’échappe lorsqu’Anna passe sa main dans mes cheveux. Je déteste ça, mais elle le fait exprès! J’ai dû être quelqu’un d’horrible dans une vie antérieure pour mériter une sœur comme celle là, je songe alors qu’elle s’installe en face de moi. « Ça va? » finit-elle par me demander tout sourire. « J’ai bien failli prendre racine, mais on fait aller » je réplique faussement maussade, en feignant m’essuyer la joue pour l’agacer. « Tu pourrais arriver à l’heure franchement! J’ai autre chose à faire que de t’attendre » C’est faux. Je suis un geek de première classe et ma sœur le sait aussi bien que moi. « Et à l’avenir je me passerai de tes bisous baveux, c’est dégueulasse » je conclus en grimaçant. Bien sûr, je ne le pense pas vraiment. J’adore ma sœur, mais qui aime bien châtie bien, n'est-ce pas? « Comment ça va toi? » je reprends avec un peu plus de sérieux. « L’enregistrement se passe bien? » Je suis tellement fier d’elle qu’à la maison, je ne parle plus que de ça. Même mes parents commencent à s’en lasser. Tout ce que j’espère c’est que ma mère aura su tenir sa langue. Je n’ai pas envie qu’Anna apprenne que je vante ses qualités de chanteuse à tout bout de chant et, qu’elle me manque.

« YOU GEEKY DRAMA QUEEN, j’arrive à l’heure où je peux mon doux amour, et je sais que tu aimes tout mes bisous ! » Elle se moque ouvertement de moi en plus. Non, mais je rêve?! Anna a de la chance qu’on soit en public, auquel cas je me serais jeté sur elle et je lui aurais fait payer cet affront. Sale petite teigne va! Je songe en souriant alors qu’elle commence à me raconter ses séances au studio. « Tout vaaaa bien, l’enregistrement c’est cool même si la fille de la maison de disques est vraiment une grande malade de la vie… Enfin ça me montre que je suis pas si forte que ça et qu’il faut que je bosse un peu ! OH d’ailleurs mon petit microbe préféré, maman m’a dit que j’étais devenue ton sujet de conversation numéro un, je sais que je suis géniale mais un peu de mesure quand même ! » A peine a-t-elle fermé la bouche que mes joues virent au rouge pivoine. Si seulement je pouvais me cacher sous la table… « Je ne vois pas de quoi tu parles! Tu connais maman, elle prend ses rêves pour des réalités. Non, mais franchement tu t'entends parler? MOI? Passer mon temps à parler de toi, et puis quoi encore? » Un rire cynique accompagne mes propos, mais ma mère m’a vendu, c’est trop tard. « En tout cas, je suis content de savoir que tout se passe bien. Au moins tant que t’es occupée tu ne viens pas me casser les pieds. C’est fou ce que ça peut être libérateur de ne plus avoir à te supporter à longueur de journée! » J’éclate de rire et elle me tire la langue, grands gamins que nous sommes. « Pour en revenir à la fille de la maison de disques. Elle est si horrible que ça? Plus enquiquinante que ma chère et tendre sœur? Non parce que je doute que ce soit possible ». Un sourire béa accroché aux lèvres, je commence à siroter mon jus de fruits.

« A d’autres baby Nathan, maman t’a vendu, je sais que tu m’aimes, mais c’est pas grave tu sais, c’est pas une honte d’aimer sa merveilleuse grande sœur ! » Je lève les yeux au ciel et laisse échapper un soupir significatif. Je manque même de rétorquer une phrase du type ‘ça va les chevilles’, mais préfère la laisser me raconter ce qui se passe en studio - puisque visiblement ça la contrarie. Qu’est-ce qu’elle croyait? On ne me l’a fait pas à moi. Ça fait dix-sept ans et des poussières que je la supporte alors je crois être à même de remarquer quand quelque chose la dérange et puis Anna ment très mal - contrairement à ce qu’elle croit. « Si, c’est possible, elle est complètement folle et elle passe ses journées à m’expliquer que je chante faux… Hors, j’ai beaucoup de défauts, mais je chante correctement ! Et d’ailleurs…. » Et d’ailleurs? J’arque un sourcil, prêt à entendre la suite de son explication, aussi abominable soit elle (oui parce qu’avec son caractère de cochon, elle est bien capable de se faire virer la Nana) quand sa main vient claquer mon visage. « Ne dis plus jamais que je suis enquiquinante ! » « AIE! » je beugle en faisant un bond sur ma chaise. Elle m’a pris par surprise et je déteste ça. En plus la moitié des clients se sont retournés quand j’ai crié. J’ai l’air de quoi maintenant?! « Dans des moments comme celui-là je serais bien tenté de le répéter, encore et encore… Parce que c’est ce que tu es: une chieuse de première catégorie. D’ailleurs, merci de m’avoir ridiculisé en public - encore une fois… » je râle pour la forme en finissant mon verre. « Maintenant, si tu as fini de me battre » Comment ça j’en fais un peu trop? « et même si tu ne mérites pas d’entendre ces douces paroles… s’il y a bien une chose dont je sois certain et sur laquelle nous tombons étrangement d’accord… » Anna secoue la tête et serre les dents. Aurais-je oublié de préciser que la patience n’est pas son fort? « Tu as une voix absolument merveilleuse et d’accord, j’avoue, je me suis PEUT-ÊTRE un peu emballé quand tu as signé ce contrat, mais c’est normal. T’es une Wilson! J’imagine que j’ai de quoi être fier! Et puis grâce à ton imminente notoriété, je vais pouvoir attirer tout un tas de jolies filles dans mes filets » je conclus en souriant, même si mes paroles ne coïncident pas du tout avec mon comportement.