With a little help from my friend (Sam)

Installés près de cette crique qui était clairement devenue leur refuge, Tahlia gardait son regard sur Thaïs qui s'amusait, d'un côté, à donner ses jouets à Sam, de l'autre à manger son gâteau qui avait probablement un peu de sable dessus. A son tour, elle piocha dans la boîte à biscuits faits jute avant de partir, la tendant ensuite vers son ami afin qu'il se serve s'il voulait. Elle appréciait les moments de la sorte. C'était serein. C'était calme. Et pourtant, l'esprit de la brune était en ébullition depuis quelques jours, les pensées tournées vers ce projet qu'elle avait en tête. Elle avait eu le temps de poser quelques questions à Jean, à son médecin lors du dernier rendez-vous et elle savait que c'était ce qu'elle voulait. C'était réfléchi, depuis longtemps, même. Elle voulait aller jusqu'au bout de ce projet. Elle voulait de nouveau avoir un enfant. Ce n'était pas une idée lancée sous le coup de la fougue, pas du tout. Cela venait de ses tripes, cela hurlait que c'était ce qu'elle voulait. Le dossier avait été rempli et envoyé. Maintenant, il fallait être patiente. Elle savait que cela pouvait prendre des mois et des mois, en espérant que les mois ne se transforment pas en année. Et surtout, il fallait commencer à l'annoncer à son entourage. Dont Sam. La jeune femme garda ses yeux verts sur sa fille et le jeune Wellington, alternant entre l'un et l'autre. « Dis, je peux te poser une question ? » demanda-t-elle à l'égard du blond. « Tu trouves que je suis une bonne maman ? Je veux dire, est-ce que tu trouves que je suis faite pour ça ? » Elle ne savait pas comment aborder la question, elle était donc allée vers la question la plus naturelle, celle qui lui venait en premier.

J’adorais passer du temps avec elles. C’était toujours simple, agréable et je trouvais qu’il n’y avait rien de plus ressourçant que ces moments-là. Du coup, dès que j’avais l’occasion de les voir, je ne disais jamais non. Pour tout avouer, j’étais même demandeur. Je m’étais tellement habitué à leur compagnie, qu’aujourd’hui j’avais du mal à m’en passer. En même temps, est-ce qu’on pouvait vraiment me le reprocher ? Il n’y avait qu’à voir la petite tête de Thaïs et le sourire de sa mère pour comprendre pourquoi j’en redemandais encore. Devenais accro.

Assis à terre, je joue avec la petite, un sourire niait collé aux lèvres. Elle était tellement mignonne. Ca me donnait limite envie d’avoir la même. Malheureusement, la vie en avait décidé autrement... Alors que j’attrape un des biscuits tendus par Lia, la voilà qui me pose une question étrange « Pourquoi tu me demandes ça ?! » Je me redresse légèrement puis me tourne vers elle surpris par sa question « Bien sûr ! Il n’y a qu’à te voir avec Thaïs. T’es prête à tout pour cette petite. Pour son bonheur, son épanouissement. Donc oui. Je pense que tu es faite pour ça. Tout le monde ne l’est pas, mais toi si… Mais dis-moi, pourquoi cette question ? Est-ce quelqu’un t’a laissé croire le contraire ? » Pas sûr que quelqu’un ait assez de culot pour prétendre le contraire, mais je préférais tout de même demander.

Elle aurait pu simplement profiter du moment. S'émerveiller devant la relation complice qui se construisait entre Sam et Thaïs, rire des bêtises de la petite et se nourrir des sourires apaisés de Sam. Mais c'était comme si l'esprit de Tahlia ne s'arrêtait jamais. Elle avait déjà du mal à se couper de tout en temps normal que cela se décuplait quand elle avait un tel projet en tête. Et parce que c'était Sam en face d'elle, elle se devait de parler de ses 'soucis'. Il était l'un de ceux en qui elle portait une confiance aveugle - et rares étaient ceux qui avaient ce grade - elle aimait sa sagesse et le regard toujours vrai qu'il portait sur n'importe quelle situation. Elle l'écoutait toujours, Sam, et c'était agréable d'avoir un homme comme lui dans son entourage. Alors, elle posa une question, une simple question dont la réponse l'intéressait, certes, mais qui pouvait aussi ouvrir sur un autre sujet. Elle l'écouta avec attention, son regard se faisant ému en entendant sa réponse. Une réponse qui lui faisait un bien fou et le sourire qu'elle avait en témoignait. "Ça me touche, ce que tu dis." avoua-t-elle en gardant son sourire. Puis, elle secoua la tête à sa dernière question. "Non, non, personne ne m'a laissé croire le contraire." C'était même l'inverse. Beaucoup trouvait que Tahlia s'était calmée, apaisée. Comme si elle avait trouvé sa voie, sa place. "C'est plutôt moi qui me pose cette question. Parce que..." Elle s'arrêta un instant, ne sachant pas comment aborder la suite : "... parce que je vais avoir un bébé." Elle dévia le regard, presque intimidée, avant d'ajouter, en riant  : "Enfin, pas là, maintenant. Je ne suis pas enceinte." Il valait mieux le préciser. "Mais je veux en avoir un..."

Parce que je vais avoir un bébé. Je la regarde choqué. Clairement, je ne m’attendais pas à cette annonce et au moment où elle prononce ces quelques mots, je me rends compte que mon cœur se serre et que mon visage se ferme. Elle avait rencontré quelqu’un ? Quand ? Ca faisait quelques mois qu’elle était revenue et à aucun moment elle n’avait mentionné un autre homme. Après tant mieux pour elle. Enfin je crois… Tellement de choses me traversèrent l’esprit...
Alors que j’étais en train d’essayer de remettre mes idées en place, la voilà qui reprend, en me disant que là, tout de suite, elle n’est pas enceinte, mais qu’elle veut un enfant. « Oh… » Je la regarde soulagé puis baisse les yeux légèrement gêné de me sentir comme ça. « Désolé. Je suis un peu perdu. Donc tu n’es pas enceinte, mais tu veux un bébé ? » Perdu ? Le mot était faible. Mais on ne pouvait pas vraiment m’en vouloir, si ? « Tu le seras. Faut juste que tu rencontres la bonne personne. Laisse-toi du temps » Je sais, c’était des paroles un peu bateau, mais je ne savais quoi dire d’autres. Surtout que je connaissais son histoire et je me doutais que ça ne devait pas être facile pour elle. « Tu as rencontré quelqu’un ? » Je ne pouvais pas m’en empêcher. Après tout, si elle voulait avoir un enfant, c’était possible que ce soit à cause de ça. Ou rien à voir. Mais fallait que je sache. Je ne sais pas pourquoi, mais c'était comme ça.

A l'annonce de ces quelques mots, le visage de Sam se ferma aussitôt, ce qui troubla Tahlia. Elle connaissait Sam depuis tant d'années maintenant qu'elle savait quand quelque chose clochait. Mais pour le coup, elle ne savait pas vraiment comment analyser sa réaction. Apporter des détails supplémentaires – notamment le fait qu'elle n'était pas enceinte, là, dès maintenant – n'arrangea pas le tout. Sam semblait perdu. Et il y avait de quoi. Le projet de Tahlia n'était pas anodin. Alors quand il résuma la situation, la brune hocha la tête. « C'est exactement ça. » En revanche, elle n'était pas d'accord avec la suite de ses mots. Laisse-toi du temps. « J'ai 33 ans, Sam. Et tu connais mon histoire, tu sais à quel point mes deux grossesses ont été... compliquées. Je n'ai plus autant de temps. » Il y avait peut-être quelque chose qui n'allait pas chez elle. Elle avait peut-être des problèmes qui la poussaient à avoir des grossesses difficiles. Ajoutez à cela l'âge qui avançait et ses problèmes sentimentaux et cela complexifiait encore plus l'équation. Quand elle entendit la dernière question de Sam, un sourire s'afficha sur les lèvres de la brune. C'était plausible, une rencontre, l'espoir d'un bel amour, les papillons dans le ventre et les projets à deux pouvaient expliquer pourquoi elle voulait tant avoir un bébé. Elle garda son regard sur lui, secouant doucement la tête, toujours ce sourire sur les lèvres : « Non, je n'ai rencontré personne. Mon cœur de pierre est toujours là. » Sam la connaissait plus que bien pour savoir que son cœur de pierre n'était qu'un mythe. Mais cela permettait d'alléger l’atmosphère, surtout pour dissimuler la gêne qu'elle avait en ajoutant : « J'ai dans l'optique de faire un bébé toute seule. Avec un... donneur. » Elle avait hésité à ajouter ce détail, un peu honteuse de se dire qu'elle était incapable d'avoir une famille lambda.  « Tu... tu trouves que c'est une mauvaise idée ? » finit-elle par demander, le regardant avec attention. Son avis comptait tant pour elle.